Éditions Police Journal (Aventures de cow-boys No. 5p. 18-21).

CHAPITRE VII

LOUISETTE, LORTIE ET FRED


Quand Louisette vit Fred entrer dans la grange, elle lui dit vivement

— Cachez-vous là, mon chéri.

Elle lui indiquait le foin.

— Mais…

— Pas de mais, mon amour. Couvrez-vous de foin pour ne pas être vu.

— Pourq… ?

— Chut, et surtout ayez confiance.

Elle précisa :

— Confiance en moi.

Il obéit.

Sans maugréer.

Louisette sortit.

Et cacha le cheval de Mallette.

Il était temps.

Des sabots de cheval retentissaient dans le lointain.

Lortie avait envoyé un éclaireur indien avertir la jeune fille de sa venue prochaine.

Pourquoi venait-il ?

Parce qu’il croyait encore à son emprise de chantage sur elle.

Sans aucun doute.

Elle rentra dans la grange.

Et attendit Lortie.

Celui-ci parut bientôt :

— Tu as reçu mon message du pied-noir ?

— Oui.

— J’ai un petit voyage à te faire faire…

— Un voyage de quelle nature ?

— Tu connais la cabane au squelette située au bout de ton ranch ?

— Mais oui.

— Eh bien, tu vas aller là.

— Pourquoi ?

Lortie se planta solidement devant Louisette.

Et menaça :

— Si tu refuses, ton jeune frère meurt en dedans des prochaines 72 heures…

— Tu sais bien que j’accepte, salaud ; tu me tiens à la gorge. Tu en étais donc rendu à la cabane.

— Oui, eh bien, tu entres, regardes à ta gauche, tu verras une des planches dont le malajustement est presque invisible ; tu l’enlèveras, prendras la boite de fer qui y est tu me l’apporteras…

— OH !

— Oui, tu as compris, c’est la boite du poney-express.

— Mais pourquoi ne vas-tu pas toi-même la chercher ?

— Parce que la royale police montée, appelée par Arthur, garde tous les sentiers dans ce bout-là.

— Bien, j’irai.

Il remonta à cheval.

Et détala.

Louisette appela :

— Fred…

— Oui…

— Vous pouvez vous montrer.

Malette s’écria :

— C’est pas trop tôt.

Il se leva, ressemblant à une botte de foin ambulante.

Se débarrassa de son fourrage en disant :

— Je me compterai un homme chanceux si je n’attrape pas la fièvre des foins.

Alors, sans préambule, il la prit dans ses bras et murmura :

— S’il y a un cowboy en amour, c’est bien moi.

— La cowgirl l’est autant que toi, mon chéri.

— Ne nous chicanons pas à analyser la profondeur de notre sentiment.

— En effet nous aurons bien le temps après notre mariage.

Ils sourirent.

Fred dit :

— Vous m’aimez et vous ne connaissez pas encore mon vrai visage.

— En effet.

— Eh bien, je crois que le temps est venu de me démasquer.

Il prit de l’eau dans une tonne.

S’arma d’une barre de savon.

D’une serviette.

Se lava la figure.

S’enleva une boulette de cire du nez.

Deux autres de la bouche.

S’inclina comiquement devant Louisette.

Et demanda :

— Suis-je à votre goût, mademoiselle ?

— Oh, oui.

— Plus à votre goût que Lortie ?

— Ce n’est pas à demander…

S’inclinant de nouveau, il fit :

— Mademoiselle Godin, j’ai l’honneur, le plaisir et la fierté de vous présenter Fred Mallette…

— Je n’aime guère ce nom de Mallette, moi.

— Pourquoi ?

— À cause du « LETTE »

— Ah…

— Oui, mon chou, mon cœur se refuse à vous appelez Mallette, et il tient à vous baptiser MABEAU.

Ils éclatèrent de rire.