Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume II/Vendidad/Fargard 17


 
Traduction de James Darmesteter

Édition : Musée Guimet. Publication : Ernest Leroux, Paris, 1892.
Annales du Musée Guimet, Tome 22.


VENDIDAD
Fargard 17
17.
I (1-6). Ce qu’il faut faire des cheveux que l’on coupe.

I (7-10). Ce qu’il faut faire des ongles que l’on coupe.


FARGARD 17

t (1-6). Ce qu’il faut faire des cheveux que l’on coupe. I (7-10). Ce qu’il faut faire des ongles que l’on coupe’. Le culte des cheveux et des ongles qui fait l’objet de ceFargard, s’est, chez certains peuples et aune certaine époque, combiné avec les idées relatives à la résurrection. En Irlande, il est défendu de brûler les cheveux, il faut les enterrer : le possesseur les retrouvera à la résurrection-. C’est la même idée qui faisait tant redouter aux martyrs le supplice du feu et ramena tant de fois le miracle de sainte Eulalie ’ Les flamines devaient enterrer sous un arbre fruitier leurs ongles et leurs cheveux * : dans ce cas-là au moins la résurrection est hors de cause. Le point de départ de ces précautions est probablement dans cette impression, si sensible dans le Parsisme, que tout ce qui est séparé du corps est mort et par suite est un siège de corruption et d’infection. Des idées d’hygiène n’y étaient donc pas étrangères (§3).

1. Dinkart, 64 : Madam pdkrêj-X vars u-nâkhun, vinâs-i mhi apàhrêjhlinîh (sur les précaulions à prendre à l’égard des cheveux et des ongles et le péctié qu’il y a à les négliger). — Voir la paraphrase de ce Fargard dans le Saddar, ch. xiv. 2. Notes and Querles, 2^ série, X, 146.

3. Le Blant, Les supplices destructeurs du corps. 4. Aulu-Gelle, X, 15, 15. — Cf. Mélusine, 1878, pp. 79, 549, 583. - !.. de Rosny, Histoire des dijnasties divines. 308. ZEND-AVESTA : VENDIDAD. — tARGARD 1" 237

I

1. Zaraihushtra demanda à Ahura Mazda :

Ahura Mazda, Esprit très bienfaisant, créateur du monde des corps, saint !

Quel est l’acte le plus énergiquement mortel ’ par lequel les mortels sacrifient aux démons- ?

2 (3). Ahura Mazda répondit :

C’est quand ici-bas les hommes, se peignant et se taillant les cheveux’, ou se coupant les ongles, les laissent tomber * dans des trous ou dans une crevasse’.

3 (»3). Alors par cette faute aux rites ’% il sort de la terre des Daêvas ; par celte faute aux rites, sortent de la terre les Khrafslras que l’on appelle des pous et qui dévorent le grain dans les greniers et les vêtements dans la garde-robe ^

4 (10). Toi donc, ô Zaraihushtra, dans ce monde matériel, quand tu te peignes ou te tailles les cheveux", ou que tu te coupes les ongles, une fois la chose faite, ô Zaraihushtra, lu les porteras à dix pas des fidèles, à vingt 1. Lilt. « par quelle mort la plus forte » ; j^lose : « par quelle action criminelle » [vindskàrîh).

2. aoshù yazàitè ; est traduit /} !«) gavishn yazbakiiûnêt, « sacrifient avec parole », aosliô étant considéré comme dérivé de aoj, « parler » ; le sens serait : c’est comme s’ils offraient aux Daêvas un sacrifice avec récitation des prières. — On se demande si gavishn ne serait pas une faute de copiste pour 6sh, aoshô signifiant « la mort, mrltyu » : le sens serait : « sacriBent la mort », c’est-à-dire offrent un sacrifice qui développe les puissances de mort des Daêvas. Toute offense à la religion est considéréecommeuneolTrande auxdémons,qui en deviennent plusforts. Cf. Yt.V,95. 3. hàm-râz, arranger [ham ûrdijand) ; paiti-ttar, couper [madam pasakûnd). 4. taosbayèili, les laisse tomber dans les trous sans suivre les prescriptions enjointes plus bas.

5. unàliva, de una, » trou » {.fûrak ; cf. vol. I. 105, n. 46) ; raèshaya, traduit par conjecture ; le pehlvi a rêshishn, blessure, avec te glose de sens inconnu darîm, ([ui pourrait être un dérivé de dar, percer.

6. vyaretliàhva, jîil dhuilh, <c contre-loi » ; glose : « quand on fait autrement qu’il ne faudrait ». — spisli, le persan sipis. — vastràbva, de vastrà, vastar-dt’ni, garderobe.

7. Litf. « peigne-toi ou taille-toi les cbeveux... après cela, tu les porteras... »

pas du feu, à trente pas de l’eau, à cinquante pas des faisceaux consacrés de Baresman.

5 (13). Et tu creuseras un trou profond, d’une dishti si la terre est dure, d’une vîtasti si la terre est molle % et tu y déposeras les cheveux en prononçant à haute voix ces paroles victorieuses : C’est pour lui en récompense que Mazda Ahura a fait pousser les plantes’-'.

(H). Puis tu creuseras à l’enlour avec un couteau de métal trois sillons, six sillons, ou neuf sillons ’», et tu prononceras l’Ahuna Vairya trois fois, six foison neuf fois.

ri

7 (10). Pour les ongles tu creuseras un trou en dehors" de la maison, ayant la profondeur de la dernière phalange du petit doigt, et lu y déposeras les ongles en pronongant ces paroles victorieuses : Les choses que les très purs proclament par Asha et Vohu Manô ’-. 8 (24). Puis lu creuseras àl’entouravec une couteau de métal trois sil- 8’. De dix doigts en terre dure, de douze doigts en terre molle. — disbli est défini dans le Farlmmj zend-pehlvi. p. 41, comme une mesure de 12 doigts ; mais étant placé entre la vitasfi, qui est de 12 doigts, et l’uz-aslita, qui est de 8, il est clair qu’il faut corriger 12 en 10, comme le fait la traduction anglaise. 9. at aliyâi ashà inàzdâo urvarâo valilisliat (Yasna XLVllI, 6 c). Vers des Gàttias interprété symboliquement : les plantes dans le microscome sont la chevelure de la terre : « La peau, dit le Grand Bundahish, est comme le ciel, la chair est" comme la terre, les os comme les montagnes, les veines comme les fleuves, le sang dans le corps comme l’eau dans la mer, les poils comme les plantes, les parties plus velues comme les forêts (mût cigûn vrvar, taniman aîgh mù’i vês/i rôst yalcôyamîinêt dgûn vêshak) ».

10. Pour enfermer leur force de mal.

11. nisblara-iiaèinàt, s’oppose à aûtare-naèmàj, à <c l’intérieur» Yasna LVII, 21). 12. asliâ vohù mananhà yâ sruyê paré majjacinù (Yasna XXXlllI, 7 b). Vers des Gàthas qui n’a rien à faire avec les ongles, même par symbolisme : il n’y a qu’un jeu de mot sur sruyè, qui est ici une forme verbale de sm {srût ydkàt/amtmél), mais peut être aussi une forme nominale de srva, ongle, l^e vers semble ici déloui’ué dans le sens suivant : « Asha avec Vohu Manu, ces ongles de pur [sont pour vousl ».

ZEND-AVESTA : VENDIDAD. — l’ArxGARD 17 239 Ions, six sillons, ou neuf sillons et tu chanteras l’Ahuna Vairya trois fois, six fois ou neuf fois.

9 (26). Et lu diras : « Oiseau Ashô-zuslita"’, je t’annonce, je te consacre ces ongles" ! Qu’ils soient pour toi autant de lances et de couteaux, autant d’arcs et de flèches à aile de faucon, et autant de pierres de fronde " contre les démons du Mâzana’^ »

10 (29). Si ces ongles n’ont pas été consacrés à l’oiseau Ashô-zushta, ils seront dans les mains des démons du Màzana autant de lances et de couteaux, autant d’arcs et de flèches à aile de faucon, et autant de pierres de fronde.

1 1 (30) . Tous les méchants, incarnation de la Druj, sont des contempteurs du juge ; tous les contempteurs du juge sont des hommes sans loi ; tous les hommes sans loi sont des impies ; et tous les impies sont dignes de mort.

•13. Litt. « aimé de l’Aslia » ou « qui aime l’Astia » ; il s’agit du hibou. « Car Hormazd, dit le Saddar (^cli. xiv), a créé un oiseau quel’on appelle Asliô-zusht ; on l’appelle aussi oiseau de Bahman : c’est le hibou : il mange les ongles ». Les noms Asliô-ziishta et oiseau de Bahman (Vohù Manô), sont naturellcmeni ; des noms donnés jjar les théologiens, et peut-être d’après les mois qui commencent la formule d’exorcisme : Ashà vohù niananhà.

14. paili tè... vaèdliayèmi,... àvaèdliajèmi : cf. les termes d’invitation aux offrandes et de consécration des offrandes : vol. I, 3, 56. 15. Cf. Farg. XIV. note 38.

16. Voir Yt. V, 22, note.

17. §17 = Farg. XVI, 18.