Le Zend-Avesta (trad. Darmesteter)/Volume II/Vendidad/Fargard 16


 
Traduction de James Darmesteter

Édition : Musée Guimet. Publication : Ernest Leroux, Paris, 1892.
Annales du Musée Guimet, Tome 22.


VENDIDAD
Fargard 16
16.
De l’impureté de la femme au moment de ses règles : comment elle doit être isolée dans le dashtânistân pour éviter tout contact avec les fidèles (§§ 1-7) ; des cérémonies à accomplir si son état se prolonge trop longtemps (§§ 8-13) ; des peines qu’encourt l’homme qui a commerce avec

elle (§§ 14-17).


FARGARD 16

Ce chapitre Iraite de l’impureté de la femme au moment de ses règles : comment elle doit être isolée dunsle das/itânistàn, pour éviter tout contact avec les fidèles (§§ 1-7) ; des cérémonies à accomplir si son état se prolonge trop longtemps (§§ 8-13) ; des peines qu’encourt l’homme qui a commerce avec elle (§§ 14-17).

Cf. Saddar, ch. xli et lxviii .

[

1 . Créateur du monde des corps, saint ! Si dans la maison d’un adorateur de Mazda est assise une femme ayant 1. Analyse du Dhikavl, l. /., §§ 60-62 : 60. Sur la femme dashtdn, gravité de son impureté^ précautions à prendre à si ii égard [madam dashtdn, girdi/Ui zytnh riman, u-cand pdhrîlihlan-î ajas/i ; répondant aux §§ 1-7, 20).

61. Qu’il faut purifier du dasiuàn la personne ou la ctiose souillée par le dashimi et devenue armêsht ; le temps et le mode de la purification [aisli mnndîun pun dashtdn rîman, u- :aki akdr yahvûnét, shùijishn-i min dashtdn, hançjdm-î shùyishi, ctgûn shûijishnih, ma dar ham babd : §§ 7 (20)-14). 62. Sur le grand crime d’avoir commerce avec une fenuno dashtdn : U madam giràn vindsih-i dashtdn-marz : §§ 14-17. ZE.ND-AVEST A : VE>DIDAD. — FARGAHD 16 231

les fleurs blanches, ou ayant ses règles’ et qui voit le sang, que feront les adorateurs de Mazda ?

2 (3). Aliura Mazda répondit :

Ils choisiront un chemin sans bois, — plantes ou arbres, — ils saupoudreront le sol de poussière sèche- et isoleront de la maison la moitié, le tiers, le quart, ou le cinquième^ : car autrement le regard de la femme pourrait tomber sur le feu*.

3 (9). Créateur du monde d-is corps, saint ! A quelle distance du feu ? A quelle distance de l’eau ? A quelle dislance des faisceaux consacrés de Baresman ? A quelle distance du fidèle ? 4 (iO). Ahura Mazda répondit :

A quinze pas du feu, à quinze pas de l’eau, à quinze pas des faisceaux consacrés de Baresman, à trois pas du fidèle^ 5 (iij. Créateur du monde des corps, saint ! A quelle dislance l’homme qui lui apporte sa nourriture se tiendra-t-il de la femme qui a les fleurs blanches, ou qui a ses règles et voit le sang ? 6 (12). .hura Mazda répondit :

i. citliravaili, clhrômand, aigh :a)’<. — dalxlislilavaiti est le terme ordinaire, dalshslita signifie primitivemeat « signe » ; de là ses sens ordinaires de « caractéristique, naturel >> ; au sens de « règles », il signifie sans doute « signe sexuel ». 2. Pour empêcher que la femme impure ne louche les eaux, les plantes ou la terre.

3. Dans l’enclos de la maison ils choisissent une partie aride et nue, oii il n’y a rien qui craigne la souillure, et le réservent pour Dasiilànistàn, c’est-à-dire pour retraite de la femme Dashtàn. Aujourd’hui encore, une chambre écartée du rez-dechaussée est réservée à cet usage : dans la maison où habitent plusieurs familles, il y a un Dashtànistàn commun. — fratara Laça ninàna verezyàn — naèniem, fràztar min olàshdn mnn r varzând a’igh dashtànistàn hirà anà o’idùnand a ;/ùp nêniak, « en avant de leur maison ils feront, c’est-à-dire ils établiront comme Dashlànistan, la moitié... »

4. Si une femme qui a ses règles jette l’œil sur le feu, c’est un péché de 12 dirhams ; si elle s’en approche à plus de trois pieds, c’est un péché de 1,200 dirhems (un Tanâfùhr) ; si elle y met la main, c’est un péché de 15 Tanàfùhrs [Saddar, Lxvin).

5. A trois pas du fidèle, afin qu’elle puisse recevoir la nourriture, qui lui est tendue sur de longues cuillers de fer.

A trois pas de la femme qui a les fleurs blanches, ou qui a ses règles et voit le sang, se tiendra l’homme qui lui apporte sa nourriture. Sur quoi lui apportera-t-il son pain ? Sur quoi lui apportera-til sa liqueur d’orge* ?

— Dans un vase de fer, de plomb, ou de métal commun’. 7 (15). Combien de pain lui apporlera-t-il ? Combien de hqueur d’orge lui apporlera-t-iP ?

Ahura Mazda répondit :

Deux danare de pain sec( ?j’, un danare de liqueur’" : autrement la femme s’affaiblirait trop".

Si un enfant vient de la toucher, on lavera à l’enfant d’abord les mains, puis le corps ’-.

6. yaom ; litt. « combien d’orge » {gortdi) ; mais il s’agit de la liqueur tirée de l’orge : v. note 10.

7. Les vases de métal se purifient, les vases de terre ne se purifient pas (Farg. VII, 74-75).

8. danare, ddnar ; dànar étant employé en pehlvi au sens de « fois », il se peut que danare ne soit pas le nom d’une mesure déterminée, mais signifie d’une façon générale une mesure, une portion. — On en a rapproclié le persan dânk, qui doit être ancien, car Hésychius le connaît déjà : savâ-/.-/ ; ■ v ;;j.ia[xâT :isv x ; PxîSxp r/.sv, o’jvi ;j.evîv iw/.sov îêsAoj uJ.’((ja v.’ii.

9. taj’ùirinàm, tirlahmà ; tàyùiri, dont l’ir est la contraction, désigne une sorte de pain, lahmâ ; peut-être un pain sec, un biscuit, car c’est l’eau que l’on veut surtout protéger : ainsi la femme enceinte peut prendre du pain sec, nâni khushk (Farg. V, note 92).

10. khshàudrinàm, shûsv, ds ; kbshàudri, donl dérive shûs} désigne les liqueurs fortes [as ; cf. kbsLudra, traduit madhùni, Afrin Gàhftnbàr, § 12). 11. nyuruidhyàt ; traduction conjecturale ; le pehlvi a nyûrûzdîh : nyuruzdishtôtema (Farg. III, 18, 61) est glosé kamist, « très peu » ; nyurudh peut être un négatif de urudh, grandir. Peut-être faut-il traduire : « elle perdrait trop », de urudh, écouler : cf. uruzda signifiant Aé/tr(Farg. VIII, note 83) .insi l’entend le commentateur Sôsliyàns : « pendant trois jours elle ne doit pas manger de la viande cuite, la perle deviendrait plus forte ». Cf. Saddar, ch. .xxxi. 12. Il s’agit, d’après le Saddar, d’un enfant qu’elle nourrit : <> Si elle nourrit un enfant de son lait, on ôle les vêtements à l’enfant » (ils seraient souillés au contact de la mère) « et on le donne à la mère jusqu’à ce qu’elle t’ait nourri... il reste pur ; mais quand sa mère se lave la tête (c’est-à-dire fait le Barashnùm ; Farg. VIII, -il, n. 62) elle lave aussi la tête de l’enfant » (ch. lxvhi). ZEND-AVESTA : VENDIDAD. — FARGARD 16 233

II

8 (21). Si après trois nuits écoulées la femme voit encore le sang, elle restera dans le lieu d’isolement" jusqu’à ce que quatre nuits se soient écoulées.

Si après quatre nuits écoulées elle voit encore le sang, elle restera dans le lieu d’isolement jusqu’à ce que cinq nuits se soient écoulées. 9. Si après cinq nuits écoulées elle voit encore le sang, elle restera dans le lieu d’isolement jusqu’à ce que six nuits se soient écoulées. Si après six nuits écoulées elle voit encore le sang, elle restera dans le lieu d’isolement jusqu’à ce que sept nuits se soient écoulées. 10. Si après sept nuits écoulées elle voit encore le sang, elle restera dans le lieu d’isolement jusqu’à ce que huit nuits se soient écoulées. Si après huit nuits écoulées elle voit encore le sang, elle restera dans le lieu d’isolement jusqu’à ce que neuf nuits se soient écoulées. 11. Si après neuf nuits écoulées elle voit encore le sang, c’est que les démons ont jeté sur elle leur fléau pour le culte et la glorification des démons’^

Les adorateurs de Mazda choisiront un chemin sans bois, plantes ni arbres ’

12 (26). Et ils creuseront trois trous dans la terre : à deux de ces trous ils la laveront avec de l’urine de bœuf ; à l’autre avec de l’eau. Us tueront des Khrafstras : deux cents fourmis voleuses de grain en été’" ; en hiver deux cents des Khrafstras créés par Angra Mainyu, de quelque espèce que ce soit.

1.3 (30). Si un adorateur de Mazda supprime’* les règles d’une femme 13. airimègâlùm, Varmêsht-gâh (ou dashldnistân) : cf. Farg. V, note 97. 14. Les pertes prolongées sont un des paityâra créés par Ahriman (Farg. I, 18 et 19).

15. Cf. § 1.

10. Forme simplifiée du Barashnùm (l-’arg. IX : cf. Farg. XIX, 52). 17. Voir Farg. XIV, note 16.

18. uz-vcrczyât. laid varzêt, « défaire » (cf. Farg. XVIII, 36) ; glose : aigh das/itdn nihdn lahlwàr obdknund, « c’est-à-dire fait disparaître ses règles ». T. II. 30

qui a les fleurs blanches, ou qui a ses règles et voit le sang , quelle sera la peine ?

Ahura Mazda répondit :

C’est un acte de Peshôtanu : il recevra deux cents coups d’Aspahêashlra, deux cents coups de Sraoshô-caraua. III

Créateur du monde des corps, saint !

Si un homme à plusieurs reprises louche lascivement" le corps d’une femme qui a les fleurs blanches ou qui a ses règles et voit le sang, de sorte que les fleurs deviennent les règles ou que les règles deviennent les fleurs-", quelle sera la peine ?

15 (36). Ahura Mazda répondit :

La première fois qu’il s’approche d’elle, la première fois qu’il s’étend à son côté, il recevra trente coups d’Aspahê-ashtra, trente coups de Sraoshôcarana.

La seconde fois qu’il s’approche d’elle, la seconde fois qu’il s’étend à son côté, il recevra cinquante coups d’Aspahê-ashtra, cinquante coups de Sraoshô-carana.

La troisième fois qu’il s’approche d’elle, la troisième fois qu’il s’étend à son côté, il recevra soixante-dix coups d’Aspahê-ashtra, soixante-dix coups de Sraoshô-carana.

16. La quatrième fois qu’il s’approche d’elle, la quatrième fois qu’il s’étend à son côté, s’il pénètre sous les vêtements, s’il pénèlre entre les cuisses impures, mais sans émission, quelle sera la peine ? 49. paourv«»-vasna shyaotlina, Itabad bâr pun kàmak kunishn, 20. cithra dakhslitcni havaiti : glose : aigh min zarlî/i lakhvàr ol téhak vartèl, c’est-à-dire « que du jaune [le sang] passe au rouge» ( ?). — dakhslita citlirem ha- ■ïaiti, glose : min téhak lakhvàr ol zarlih varlêt, c’est-à-dire « passe du rouge ( ?) au jaune ».

21. frà iiaùzeni, traduction conjecturale ; le pehlvi est inconnu [frâj pun akvîshn) ; uaè/.a est le nom d’une maladie (Vd. Vil, 58). — Dans l’enfer, Arda Virâf voit le coupable condamné ; cuire et à manger son propre lîls [Ardd Vlrdf, XXII).

ZEND-AVESTA : VENDIDAD. — FARGARD 16 235

Aliura Mazda répondit :

Il recevra quatre-vingt-dix coups d’Aspahê-ashtra, quatre-vingt-dix coups de Sraoshô-carana.

17 (39). L’homme qui a commerce complet avec une femme qui a les fleurs blanches, ou qui a ses règles et voit le sang, cet homme fait une chose aussi horrible que s’il faisait rôtir le corps de son propre fils atteint de naêza -’ et en laissait couler la graisse surle feu--. 18 (^1). Tous les méchants, incarnation de la Druj, sont des contempteurs du juge-’ ; tous les contempteurs du juge sont des hommes sans loi-* ; tous les hommes sans loi sont des impies -’ ; et tous les impies sont dignes de mort -^

22. « 11 n’y a point égalité entre les deux actes, mai ? ni l’un ni l’autre ne sont bons ». — Peut-être le coupable est-Q considéré comme homicide du fils qui aurait pu naître, s’il avait mieux choisi son temps, et qu’il fait périr sur un foyer d’impureté. — Pour l’expiation du péché, voir Farg. XVIII, C6 sq. 23. aderetô-lkaèsha, adds/il ddlôhâr « qui ne tiennent pas déjuge », c’est-à-dire <i qui ne tiennent pas le juge [dâlôbar = ddvar) pour juge ». 24. asraosha, asrôsh, c’est-à-dire « qui ne tiennent pas le souverain pour souverain [Uiùtài] ». Cf. Yasna XXIX, 6.

25. anasbavaiiô, OU mieux, des damnés (cf. vol. 1, 22 ; 106, n. 50’ : car- par cela ils deviennent darvaiids ».

2(i tanu-perelLô./afirf/’ûAri^v, margarzdn. — Analyse du Dinkart, 63 : madam margpûhalîh ?

addsht-ddlôbardn : » de la criminalité capitale de ceux qui n’obéissent 

pas au juge ». — Le § 18 est répété encore à la tin du Farg. suivant : il pourrait terminer tous les Fargards légaux.