Adolphe Delahays, éditeur (p. 345-346).

XXVII.

Hydrophobie.

Je considère certains chapitres de roman comme des opérations de chirurgie reconnues inévitables. Dans ces cas, le mieux est d’avoir la main sûre et de faire vite.

Horatio était sur un fauteuil dans la partie la moins éclairée de la pièce. Immobile, la tête tendue, les deux mains enserrant chacune les bras du siège, il semblait écouter ou attendre.

Olivia entra.

— Qu’avez-vous donc, mylord, et que vient de me dire sir James !… Vous êtes indisposé… voici un verre d’eau fraîche.

À ces derniers mots, les yeux d’Horatio s’allumèrent. Mais, il parut contenir une commotion intérieure. Il se leva.

— Merci, ma belle Olivia, dit-il en s’approchant de sa femme.

Puis, lui passant un bras autour du cou, il inclina sa tête comme pour lui donner un baiser sur l’épaule.

La jeune femme poussa un cri perçant. Horatio l’avait mordue. — Le souvenir de la morsure de Mont-Dore se présenta à son esprit. Son mari avait un accès de rage !…

Elle voulut fuir. Mais le furieux ferma la porte. Et, ce fut une lutte, une poursuite, où l’effroi rendait la femme folle. Tout à coup, dans un moment, où une table la séparait de son mari, elle ouvrit une croisée et se précipita.

Deux personnes dans le château avaient entendu le cri d’Olivia : le baronet et Antarès.

Sir James, qui, décidément, est un des hommes forts de ce drame, ramena sur ses oreilles, la couverture de son lit et s’endormit. Antarès, préoccupé par les moindres événements qui pouvaient éclater près de lui, s’aventura hors de son laboratoire, et pénétra jusqu’à la chambre d’Horatio. Celui-ci, entendant du bruit à sa porte, et n’ayant plus personne sur qui il put assouvir sa rage ouvrit et se jeta comme un forcené sur son frère qui ne s’attendait nullement à cette péripétie. Et ce fut une lutte épouvantable.

La fenêtre par laquelle Olivia s’était précipitée donnait sur la Clyde.