Plon (4p. 69-70).

XXI


Le conte dit ici que les trois compagnons de la pucelle regardèrent longuement le lit, les fuseaux et l’épée, et tant qu’ils découvrirent sous le chevet une riche aumônière. Perceval qui n’hésitait jamais, étant simple d’esprit, l’ouvrit aussitôt et il y trouva un bref où était donnée la signifiance de la nef et de tout le reste.

— Il nous faut aller en quête de la demoiselle qui changera ces renges, dit Galaad, car nul ne doit tirer cette épée ni l’ôter d’ici avant que ce soit fait.

— Beau sire, dit alors la Pucelle-qui-jamais-ne-mentit, s’il plaît à Dieu, l’épée aura ce qui lui manque.

Et elle tira d’un écrin qu’elle avait apporté des renges bien ouvrées, ornées de pierreries, munies de deux boucles d’or, et toutes faites de cheveux blonds, si beaux qu’on les eût pris pour des fils d’or.

— Sire, reprit-elle, voici les renges qui conviennent. Je les ai faites de la chose de moi que j’aimais le plus : mes cheveux. Et s’ils m’étaient chers, ce n’est pas merveille, car j’avais l’une des plus belles chevelures du monde ; mais, le jour de la Pentecôte que vous fûtes armé chevalier, je la fis tondre et la tressai pour former ces renges que vous voyez.

— En nom Dieu, demoiselle, fit Bohor, vous nous mettez hors de peine ! Et maintenant, sire, dit-il à Galaad, nous vous prions de ceindre cette épée aux étranges renges.

— Laissez-moi auparavant tenter de l’empoigner, répondit Galaad, car, si je n’y réussis, c’est qu’elle n’est pas pour moi.

Ce disant, il saisit l’épée aux étranges renges et la serra si aisément que ses doigts se croisaient ; puis il la tira et elle parut, belle et claire au point qu’on s’y fût aisément miré. Alors la demoiselle la lui ceignit, après lui avoir ôté celle qu’il portait, qui valait bien une comté et qu’elle donna à Perceval.

— Peu me chaut maintenant de mourir, dit-elle, car j’ai fait chevalier le plus prud’homme du siècle !

— Demoiselle, répondit Galaad, je suis vôtre à toujours.