Le Puits de la vérité/La fin du soleil



LA FIN DU SOLEIL



Comme la terre ne survivrait pas au soleil, comme sa mort devancerait même très probablement celle de l’astre du jour, on voudra peut-être savoir combien d’années de chaleur, c’est-à-dire de vie, le soleil recèle dans son foyer. Les mathématiciens, qui ne doutent de rien, se sont mis au travail. Étant données, disent-ils, la quantité de chaleur que le soleil rayonne dans l’espace et les conditions de rayonnement, rien n’est plus facile. Les résultats de leurs calculs, cependant, varient de six mille ans à quelques milliards d’années. Et M. de Launay, qui est géologue et n’a de confiance que dans les sciences d’observation, raille les mathématiciens, montrant qu’ils ne trouvent jamais au bout de leurs calculs que ce qu’ils y ont mis tout d’abord. Tout est dans le point de départ ; s’il est hypothétique, on ne peut aboutir qu’à une hypothèse, qui n’est souvent qu’une chimère. Nous ne savons rien de ce qui concerne le commencement des choses. Aussi loin que remonte dans le passé l’expérience humaine, ce qui est peu de chose, à la vérité, nous voyons les grands mouvements de la nature toujours pareils à eux-mêmes, voilà tout. Or, sans données précises sur les origines des choses, nous ne pouvons raisonner équitablement sur leur fin. C’est au point qu’on se demande si de telles recherches ont bien un caractère scientifique et si les inventeurs de systèmes du monde, les Kelvin ou les Arrhénius, sont vraiment autre chose que les plus brillants de nos romanciers ? La physique mathématique traverse certainement une période romanesque. Depuis les ions jusqu’au soleil et aux étoiles, ce ne sont que romans, fort bien déduits, mais plus intéressants que solides, et qui prouvent moins la science que l’imagination de leurs auteurs, si science veut dire encore connaissance exacte des choses.


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