Le Poulailler/Chapitre21

CHAPITRE XI

Race dite de Cochinchine ou Changaï (variété fauve).


COQ.
PROPORTIONS ET CARACTÈRES GÉNÉRAUX.

Corps ramassé, court, cubique, trapu, anguleux, bas sur pattes, d’un volume et d’un poids considérables ; tête de dimension ordinaire, crête simple, droite et dentelée ; cou demi-grêle ; épaules saillantes ; ailes courtes et relevées ; dos plat, horizontal ; sternum saillant ; cuisses et jambes très-fortes ; pattes fortes et courtes ; pectoraux forts, mais non proportionnés à la taille de l’animal ; plumage fauve, abondant surtout aux cuisses et à l’abdomen ; plumes de la queue très-courtes ; canon de la patte court et emplumé, chair bonne dans le poulet de six à huit mois bien nourri, médiocre à l’âge adulte, plus abondante et moins bonne aux cuisses et aux pilons qu’aux filets ou pectoraux, prenant assez facilement la graisse, mais ne la gardant pas très-bien à la cuisson ; ossature lourde (grav. 83).


POIDS, DIMENSIONS ET CARACTÈRES PARTICULIERS.

Poids. — 4 à 5 kilogrammes.

Taille. — De la partie supérieure de la tête sous les pattes, 0m.60 à 0m.70.

Corps. — Circonférence prise au milieu, sous les ailes, a l’endroit où les cuisses s’articulent, 0m.45.


Grav. 33. — Coq de Cochinchine.

Longueur du corps. — De la naissance du cou au bout du croupion, 0m.28.

Largeur des épaules. — 0m.22.

Le corps du coq cochinchinois est d’une configuration heurtée et comme composée de parties cubiques.

Les épaules, extrêmement saillantes et anguleuses, forment avec le dos et les ailes, qui sont élevées au niveau du dos, une grande surface plate et horizontale. Le plastron est haut et large ; les plumes des flancs, extrêmement aplaties et se rejoignant en deux grandes plaques, laissent bien voir la proéminence du sternum. Les ailes sont courtes et presque cachées par les lancettes, qui cependant ne descendent pas beaucoup plus bas qu’elles.

Tout ce que je viens de décrire compose la partie supérieure du coq, laquelle est recouverte de plumes généralement courtes et collantes, qui laissent bien comprendre la forme heurtée des membres qu’elles recouvrent ; aussi cette partie supérieure présente-t-elle un grand contraste avec les cuisses, qui sont enveloppées de plumes longues, légères, épanouies, bouffantes, et forment avec le cul-d’artichaut une masse vraiment disproportionnée, mais qui constitue les caractères les plus saillants de l’espèce. Les jambes ou pilons sont à peu près cachées sous les plumes des cuisses, et laissent à peine apercevoir l’endroit où elles s’articulent au canon de la patte.

Tête. — Longueur, 0m.08.

Joues. — Dénudées et ne prenant la plume qu’en arrière du conduit auditif.

Crête. — Simple, courte, droite et dentelée de six à sept grandes dents, très-épaisse surtout à la base, qui couvre presque le crâne d’un œil à l’autre, ne se prolongeant pas trop en arrière et prenant en avant des narines. Hauteur, 0m.06.

Barbillons. — Demi-longs et arrondis. Longueur, 0m.06.

Oreillons. — Courts, 0m.04.

Bouquets. — Très-épais et formés d’une touffe de plumes jaunes de la nature du poil.

Narines. — Ordinaires, longitudinales.

Bec. — Fort, assez droit, d’un beau jaune franc.

Œil. — Doux, et surmonté d’une arcade sourcilière assez épaisse.

Pupille. — Aurore.

Iris. — Noire.

Patte, canon de la patte. — Longueur, 0m.10 au plus ; circonférence, 0m.07 à 0m.09. Comme on le voit, le canon de la patte doit être très-gros et très-court, ce qui constitue un des caractères principaux de l’espèce.

Doigts. — Très-forts ; celui du milieu plus long et l’externe ou petit doigt plus court que dans aucune espèce indigène.

Le doigt du milieu est long de 0m.10, y compris l’ongle ; l’interne, de 0m.07, y compris l’ongle ; l’externe ou petit doigt est presque rudimentaire, ainsi que son ongle, le doigt postérieur est d’une dimension ordinaire. Les ongles sont forts, aplatis et allongés.

Trois rangées de plumes aussi molles que possibles, mais souvent roides, longent extérieurement le canon de la patte, le petit doigt et quelquefois le doigt du milieu ; elles doivent être, s’il se peut, aussi longues et aussi fournies en haut du canon qu’en bas, s’épater sur les doigts, former matelas et cacher sous leur abondance tout le canon et la partie externe des doigts, ce qui contribue puissamment à donner à l’animal une forme pesante, en élargissant la base sur laquelle son corps paraît fixé d’une façon inébranlable.

Couleur du canon et de la patte. — D’un jaune citron pur en avant, et, en arrière, d’un rouge plus ou moins intense parsemé de petits points d’un rouge plus vif. Les doigts sont jaunes.

Allure. — Pesante, grave et gauche. Le cochinchine semble calquer sa dégaine sur celle d’un homme obèse qui voudrait courir ; rien n’est plus bouffon ni plus caractéristique que cette pesanteur empressée. Au repos, dans la position droite, sa tournure est pleine de gravité ; son cou est droit, sa tête est haute et son dos paraît horizontal.

Voix. — Rauque et pénétrante.


DESCRIPTION DU PLUMAGE.

La robe du cochinchine fauve doit être d’un bout à l’autre, y compris les plumes de l’abdomen et celles des pattes, d’une belle couleur tenant du fauve clair et du café au lait, sans aspect douteux. Au camail, aux épaules et aux lancettes, une teinte légèrement dorée se trahit même dans les sujets les plus purs. Les faucilles grandes et petites, qui toutes, chez cette race, sont extrêmement courtes (0m.10 à 0m.15), sont ordinairement d’un violet foncé à reflet bronzé.

Le dessus des sourcils, aux abords de la crête, est garni de plumes fines, ténues et hérissées, qui ressemblent plus à des poils qu’à des plumes. Le camail est collant et court. Les plumes des ailes, aplaties, laissent bien sentir la forme anguleuse des membres, ce qui fait encore plus ressortir l’épanouissement des plumes des cuisses et de l’abdomen (cul-d’artichaut), dont l’ampleur n’a pas d’équivalent dans les autres races. Il ne doit pas y avoir dans tout le plumage la moindre trace de blanc, et le noir ou plutôt le violet ne doit apparaître qu’à la queue. Les coqs fauves ont souvent les plumes tachetées de noir en dessous et surtout entre les épaules, sous le camail ; ceux qui ont le moins de marques sont préférables, parce qu’il est probable que leur progéniture auront un plumage plus pur. Ceux qui n’ont pas de marques sont surtout recherchés.


POULE.
PROPORTIONS ET CARACTÈRES GÉNÉRAUX.

Cette poule (grav. 84) est encore plus ramassée, plus trapue que son coq, parce que, la tête et le cou étant moins importants, la crête et les caroncules inférieures presque absentes, la patte très-courte et le queue rudimentaire, il ne reste plus à l’œil qu’un assemblage de grandes masses énergiquement accusées et saillantes, se distinguant facilement les unes des autres. Vue par derrière, elle doit être plus large que haute et perdre, en quelque sorte, l’aspect ordinaire d’une poule.

Sur un large nid, elle s’étale en un rond parfait produit par l’abondance de ses plumes. Plus elle est exagérée dans ce qui constitue ces caractères, et plus les amateurs la trouvent à leur goût. Son plumage est uniformément fauve, sans exception ; sa chair est plus fine et d’un meilleur goût que celle du coq, qualité qui se conserve dans la poule, tandis qu’elle se perd chez le coq quand l’un et l’autre sont adultes.

POIDS, DIMENSIONS ET CARACTÈRES PARTICULIERS.

Poids. — 3 kilogrammes à l’âge adulte. Passé un an, il y a des poules qui atteignent 3 kilogrammes 1/2 et 4 kilogrammes. Ce poids anormal est ordinairement déterminé par un engraissement naturel, et la poule est alors excellente à manger.

Taille. — Hauteur de la tête sous les pattes, 0m.45 à 0m.50 ; du dos sous les pattes, 0m.23 à 0m.28. — Largeur des épaules, 0m.20 ; du développement des plumes qui forme l’ensemble des cuisses et du cul d’artichaut, 0m.24.
Grav. 84. — Poule de Cochinchine fauve.

Corps. — Cubique, posé horizontalement ; cou petit, épaules et plastron saillants ; cuisses énormes ; pectoraux comparativement plus charnus que ceux du coq ; ossature moins lourde.

Tête. — Petite et admirablement faite.

Crête. — Simple, droite et extrêmement courte, 0m.02, tout au plus.

Barbillons. — Très-courts et arrondis.

Oreillons. — Rudimentaires.

Joues. — Dénudées.

Bouquets. — Semblables à ceux du coq.

Bec. — Jaune clair.

Œil. — Doux et intelligent.

Pupille. — Gris clair.

Iris. — Noir.

Patte, canon de la patte. — Court et très-fort ainsi que les doigts, le tout ayant les mêmes caractères que chez le coq.


DESCRIPTION DU PLUMAGE.

Le plumage de la poule doit être complètement zain (unicolore), et cela de la tête aux pattes, du poitrail à la queue. Une belle couleur jaune clair, tenant du café au lait, sans être blafarde ni rousse, est la seule qu’on doive recommander, et il est important qu’on ne voie pas la moindre tache noire.

Les taches ne sont supportables qu’aux grandes plumes de la queue, du reste presque cachées par suite de leur exiguïté et par l’abondance des plumes de recouvrement.

Aucune tache ne doit apparaître au camail : il faut soulever les plumes des différentes parties du corps, pour voir s’il n’y a pas à leur naissance des taches grises cachées dans les parties recouvertes, auquel cas la poule pourrait être belle comme aspect, mais compromettante pour la reproduction.

Il ne faut pas cependant être par trop difficile, et, si l’on ne comptait un peu sur le choix des élèves à venir, on trouverait rarement de quoi se satisfaire pour la pureté de la robe.

Il ne faut pas faire de différence entre les poules vraiment fauves, qu’on leur donne le nom de Victoria ou qu’on les désigne autrement.

Un grand nombre de poules ont la partie apparente du tuyau de chaque plume un peu plus claire que les barbes de la plume, ce qui donne quelquefois un aspect régulièrement et légèrement marqueté de petites taches allongées un peu plus claires que le restant du plumage. Si la poule est unicolore et d’une magnifique forme, il ne faut pas tenir compte de cette particularité.

Ponte. — Excellente. On a exagéré la productivité de la cochinchine, puisque l’on a porté à 300 le nombre des œufs qu’elle pouvait produire dans l’année, et que la nature même des faits en prouve l’impossibilité. La poule de Cochinchine pure ne pond pas plus de 16 à 24 œufs se suivant de jour en jour ; après quoi elle demande à couver, ce qui arrête naturellement sa ponte. Le temps nécessaire pour la découver et pour qu’elle se remette à pondre, dure bien de quinze à vingt-cinq jours, et, les pontes, au fur et à mesure que l’année s’avance, étant de moins en moins productives et n’allant quelquefois qu’à 12 œufs, on peut donc conclure que plus de la moitié du temps n’est pas employée ; seulement, comme il n’y a pas d’interruption de saison, quand la poule est placée dans de bonnes conditions, la ponte dure toute l’année et produit de 150 à 180 œufs, nombre malgré tout fort remarquable, et d’autant plus remarquable qu’une partie de cette production est donnée en plein hiver, au milieu des plus grands froids, au moment où nos poules sont complètement stériles.

C’est ce qui fait et fera toujours de cette poule une race précieuse, que la réaction de l’engouement ne pourra pas parvenir à faire déchoir.

Les œufs sont de force moyenne et d’inégale grosseur dans les différents sujets ; mais le jaune, la partie la plus intéressante de l’œuf, est considérablement gros, — à quoi on attribue le volume des poussins, — et ce qui rétablit parfaitement la perte illusoire d’un peu d’albumine ; leur qualité n’est ni supérieure ni inférieure à celle des œufs provenant d’autres races ; elle ne dépend, chez les uns comme chez les autres, que du genre de nourriture livrée aux poules.

Incubation. — C’est là évidemment le triomphe de cette race, qui peut en toute saison couver, faire éclore et mener des poulets précoces ou tardifs. La rage de couver, qui est toute particulière à la cochinchine, détermine, par d’habiles croisements chez les autres races, cette qualité de couveuse qui manque souvent aux espèces les plus précieuses, et un certain nombre de cochinchines pures sont maintenant indispensables dans une grande organisation, afin d’avoir toujours sous la main des couveuses prêtes à prendre le nid.

La cochinchine métisse ou pur sang accepte, dans les premiers jours après l’éclosion des œufs, tous les changements ou additions de poulets que provoque la convenance de l’éleveur.


Variété rousse.

C’est dans cette variété que se trouvent généralement des sujets un peu plus élevés que dans les autres (grav. 85).

Le plumage de la poule est d’un jaune rosé vineux, celui du coq est d’un roux ardent et doré au camail, aux épaules, aux lancettes ; le plastron, le dos, les cuisses, sont rouge brique foncé ; les flancs, l’abdomen et les plumes des pattes, d’un roux tanné ; la queue, noire à reflet vert.
Grav. 85. — Poule de Cochinchine rousse.


Variété perdrix.
POULE.

La poule de la variété perdrix est assez régulièrement marquée de taches qui vont du noir foncé au gris mêlé, et s’enlèvent sur un fond fauve plus ou moins foncé.

Chaque plume porte un dessin dont les détails, quoique différents, ont une grande analogie, surtout dans chaque région.

L’aspect général présente un bariolage dont on ne s’explique pas la forme à première vue, mais dont on reconnaît, le mécanisme en inspectant chaque plume.
Grav. 86. — Plume du camail.

Les plumes du camail (grav. 86) sont presque couvertes d’une grande tache noire qui en occupe le milieu d’un bout à l’autre, et à laquelle les bords de la plume forment un entourage de couleur fauve.

Les plumes du dos, du recouvrement de la queue, des cuisses, des pectoraux, et celles qui entourent l’anus, ont une grande analogie (grav. 87). (Trois bandes demi-elliptiques gris foncé, sur fond fauve.)

Elles différent seulement un peu dans les détails ou dans les proportions, et les taches diminuent d’intensité au fur et à mesure qu’elles gagnent les régions inférieures du corps.
Grav. 87. — Plume de la cuisse.


Les plumes du devant du cou sont fauves et presque unies ; celles de l’abdomen, des flancs, de l’intérieur des cuisses, et celles des pattes, sont d’un jaune grisâtre brouillé.

Les plumes du recouvrement de l’aile (grav. 88) ont un dessin qui leur est propre (deux bandes demi-elliptiques presque noires, sur fond fauve).
Grav. 88. — Plume du recouvrement de l’aile.

Les grandes plumes de l’aile (grav. 89) et surtout du bras sont, dans la partie cachée (quand l’aile est ployée), d’un noir brun, et, dans la moitié visible, marquetées d’une façon analogue au reste du plumage.

Les grandes plumes de la queue (grav. 90), quoique très sombres, ont encore les mêmes dessins caractéristiques.


COQ.

On reconnaît bien dans le plumage du coq le principe de celui de la poule ; mais c’est sur un fond tanné sombre qu’
Grav. 89. — Grande plume de l'aile.

Grav. 90. — Grande plume de la queue.
apparaissent çà et là, et d’une manière douteuse, les marques caractéristiques, qui sont plus sensibles surtout au poitrail, au cul-d’artichaut, aux cuisses et aux plumes des pattes. Les épaules, le dos, le recouvrement des ailes, sont d’un rouge acajou foncé ; le camail et les lancettes sont d’un rouge ardent et doré foncé ; la queue est noire bronzée.

En Angleterre, où cette belle variété est fort recherchée, on préfère les sujets dont le poitrail est le plus foncé possible et tient plutôt du noir que du brun.

Les trois variétés, rousse, fauve et perdrix, sont certainement naturelles à l’espèce, et semblent ne provenir d’aucun croisement.


Variétés blanche, noire et coucou.

Ces trois variétés, qui doivent être pour la forme absolument semblables aux précédentes, ont été très-probablement obtenues artificiellement, c’est-à-dire par suite de croisements successifs et intelligents de cette variété avec d’autres espèces de poules.

VARIÉTÉ BLANCHE.

On a supposé que la blanche, qui doit être pure de toute tache, avait été obtenue avec le cochinchine jaune clair et la poule blanche malaise, et par suite d’accouplements consanguins. Il revient, en effet, assez souvent des tons roux ou café au lait à des sujets de cette variété. Il est bien entendu qu’on doit les écarter de la reproduction. Un parc de cochinchines blancs d’un grand choix offre l’aspect le plus distingué et le plus élégant qu’on puisse imaginer.

VARIÉTÉ NOIRE.

La variété noire semble avoir été obtenue avec le coq cochinchine roux foncé et la poule de Bréda, qui est d’un beau noir et ne manque pas d’analogie avec la poule de Cochinchine.

Cette variété est des plus recherchées et des plus estimables, tant par sa beauté que par sa production. Mais elle a deux défauts qui font le désespoir des amateurs. La majeure partie des coqs est ordinairement marquée de rouge au camail et quelquefois aux épaules et aux lancettes.

Les coqs sont, en outre, et cela sans exception, plus ou moins marqués de blanc à la naissance des plumes de la queue, dites faucilles ; ces taches se dissimulent difficilement, parce que les marques se prolongent ordinairement jusqu’au milieu des plumes.

Des marques de blanc apparaissent également aux plumes des pattes chez les coqs et chez les poules, et cela surtout après la mue de la deuxième ou troisième année.

Mais ces inconvénients, attachés à cette variété, n’en rendent les sujets purs de toutes taches que plus précieux, et on les recherche avec d’autant plus de passion qu’ils sont plus difficiles à obtenir.

Certains amateurs commencent, au reste, à admettre, pourvu qu’il soit beau de forme, le coq de Cochinchine noir à camail rouge. Et voici leurs raisons :

1o  Le blanc apparaît moins ordinairement chez les sujets issus du coq à camail rouge ; 2o  c’est presque toujours parmi ceux à camail rouge que se trouvent les plus beaux de forme et les plus gros ; 3o  ces coqs rouges reproduisent aussi bien des coqs noirs que les noirs ; 4o  ils reproduisent des poules plus fortes, mieux faites et d’un noir pur.

Ces raisons sont fortement controversées par d’autres amateurs très-compétents, qui assurent que l’on doit toujours et toujours appuyer sur la couleur noire aussi bien que sur la forme, et que ce n’est qu’à force de s’y tenir qu’on fixera cette variété.

Quant à moi, je suis de l’un et de l’autre avis, et ne saurais donner qu’un conseil : essayer de l’une et de l’autre manière.

Une question bien plus importante, à mon avis, est le débat survenu à l’occasion de la couleur des pattes. Les uns prétendent qu’elles doivent êtres jaunes ; d’autres, qu’elles doivent être noires. Ici, il n’y a plus d’hésitation à avoir. La patte noire est tout à fait conforme à la couleur entière de la bête, et de plus elle désigne une chair fine, excellente à manger, et à graisse blanche, ce dont on s’assurera aisément en inspectant des sujets à pattes jaunes et d’autres à pattes noires.

Les poulets en naissant sont tachés de blanc et de noir, mais le blanc disparaît petit à petit.


VARIÉTÉ COCHINCHINE COUCOU.

La variété coucou est la plus nouvelle, la plus rare et par conséquent la plus recherchée.

Rien n’est aussi curieux, en effet, que cette variété uniformément marquée comme la poule de Gueldre, dont elle est sans doute issue avec le cochinchine fauve, ou blanc, ou noir, mais plutôt noir.

Les coqs sont généralement de deux robes distinctes, les uns à robe coucou grise, et à camail, épaules et lancettes d’un beau jaune paille criblé de tachettes tout du long des plumes ; les autres à robe entièrement gris coucou.

Si ces derniers ne sont pas les plus riches, ils sont certainement les plus purs ; mais les goûts sont partagés.

Eh se reportant à l’article Bréda, variété de Gueldre ou de Bréda coucou, on trouvera la plume qui fait le fond du plumage de la gueldre. Elle est identiquement la même que celle qui fait le fond du plumage du cochinchine coucou, coq et poule.

Le dessin de cette plume se répète sur toute la poule, et cela d’une façon bien nette et en simulant des sortes d’écailles. Les taches sont naturellement proportionnées à la dimension des plumes.

Il en est de même chez le coq, excepté que les plumes du camail, des épaules et des lancettes sont tiquetées d’un bout à l’autre, et que, dans les petites et grandes faucilles, les marques sont en nombre et en dimension proportionnés à la longueur des plumes.

Cette variété, la plus nouvelle de toutes, est naturellement la moins fixée et reproduit assez inégalement ; ainsi j’ai obtenu, en 1857, sur vingt sujets, dix cochinchines coucous, six noirs, quatre mélangés roux et gris.

Voici quelle est son origine en France.

Je savais qu’il en existait en Angleterre un coq et trois poules que j’avais vus. Je fis beaucoup de démarches pour avoir des œufs et je finis par avoir les sujets eux-mêmes, au commencement de 1857.

J’en ai peu fait couver, parce que j’avais vendu les œufs, et, si les résultats obtenus chez moi n’ont pas assuré l’établissement définitif de cette variété, j’ai su qu’ils avaient encore été moins heureux chez les personnes à qui j’avais envoyé des œufs. J’ai gardé, dans l’année 1858, deux coqs et quatre poules ; deux des poules sont mortes d’accident.

Comme j’avais vendu le père et les trois mères 1,000 francs, en vente publique, et que je sais que les trois mères sont mortes ; comme on m’a, de partout, demandé des sujets de cette variété ; comme j’en ai fait chercher en Angleterre et qu’on n’en a pas pu retrouver, j’en fais élever le plus possible pendant la bonne saison. Un assez grand nombre de poulets coucous sont issus de ce troisième élevage, et j’ose espérer que la variété sera fixée définitivement l’année prochaine.

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR L’ESPÈCE.

La race cochinchinoise est introduite depuis peu en Europe.

Les premiers sujets qu’on ait vus en France, ceux rapportés par l’amiral Cécile, venaient réellement de la Cochinchine et ne ressemblaient pas tout à fait à ceux que nous connaissons maintenant, qui ont plus de poids, diffèrent un peu par la forme et viennent plus particulièrement de Changaï, lieu d’où ils sont probablement originaires.

On les a de suite croisés avec des espèces analogues mauvaises et déjà répandues, et ce trafic a produit un grand nombre de sujets abâtardis, qui ont plus contribué, par de déplorables résultats, à faire déprécier qu’à faire apprécier cette excellente poule ; mais on commence à connaître les caractères qui lui sont propres, et les personnes qui savent ce qu’elle vaut l’entretiennent avec le soin qu’elle mérite.

Rien n’est plus faux que les idées émises sur sa délicatesse de tempérament, sur la difficulté de la faire reproduire, enfin sur la presque impossibilité de son acclimatation.

À part les soins qu’exigent les poulets précoces élevés dans les temps froids ou pluvieux, soins exigés pour tous les autres poulets, mais plus particulièrement pour ceux-ci au moment de la mue du duvet ; à part la goutte, qui est propre aussi à plusieurs autres espèces et qui est, la plupart du temps, causée par l’humidité glaciale d’une basse-cour mal entretenue ou d’un parc boueux pendant l’hiver ; à part, dis-je, ces deux cas, auxquels on peut fort bien apporter un remède, il n’existe pas une race indigène dont les sujets soient aussi rustiques et dont les élèves résistent mieux aux différentes révolutions qu’amène la croissance.

On a voulu élever (et presque tous les éleveurs ont passé par là) un beaucoup trop grand nombre de poulets sur des terrains restreints et bientôt infectés, et l’on n’a pas manqué d’ attribuer à la délicatesse originelle de la race ce que l’on ne devait attribuer qu’à l’ignorance et à la cupidité de l’éleveur. Le tiers, la moitié et quelquefois les deux tiers des élèves périssaient, le reste venait mal. Qu’on essaye donc de répéter l’expérience avec des crève-cœur, des bréda, des la flèche, etc., et l’on verra si un seul élève y résiste.

Je soutiens fermement, et j’aurai pour moi le témoignage de tous les bons éleveurs, que c’est avec et après le Brahma, qui n’est certainement au reste qu’une variété du changaï, l’espèce la plus rustique et la seule vraiment rustique, et qu’elle communiqué à nos espèces si délicates une grande partie de sa rusticité.

Le coq de Cochinchine n’est pas aussi doux qu’on l’a prétendu ; s’il n’est pas aussi féroce et aussi batailleur que beaucoup d’autres, il n’en est pas moins à l’occasion un brave combattant, surtout avec de nouveaux arrivés. La poule même, dont le regard est doux, se bat avec fureur contre toute nouvelle arrivante, et j’en ai vu périr à la suite de paralysies déterminées tout à coup par un combat désespéré.

L’espèce est extrêmement sédentaire, ne pille pas et ne va pas au loin compromettre les semis ni dévaster les jardins, que la moindre barrière protège suffisamment.

Un coq est bon pour la reproduction quand il n’a pas de maladies déclarées, comme la goutte, par exemple, jusqu’à quatre, cinq et six ans, et la poule est bien productive jusqu’à trois ou quatre ans.

On a dit qu’elles étaient usées en deux ans, et l’on n’a pas considéré qu’on les avait souvent usées en leur faisant faire cinq ou six couvées dans l’année, les laissant souvent, pendant trois ou quatre couvées successives, sur un nid où toutes les conditions destructives venaient les assaillir.

En somme, la beauté, la variété et l’utilité incontestable de cette espèce la feront toujours cultiver par les amateurs intelligents.

Quand les coqs ont atteint le poids de 4 kilogrammes 1/2 dans la première année, les poules celui de 3 kilogrammes dans la première année, et qu’ils sont d’une forme parfaite, il n’y a plus qu’un mérite qui puisse leur faire préférer d’autres sujets, c’est l’augmentation sensible du poids, jointe toutefois à une excellente forme ; mais qu’on fasse bien attention que, pour juger de la valeur réelle de ce poids, il faut qu’il soit acquis dans la première année.