Le Littré de la Grand’Côte/3e éd., 1903/Ban

Chez l’imprimeur juré de l’académie (p. 30-31).
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BAN, s. m. — Sorte d’applaudissement collectif. Il y a deux sortes de ban : le ban chanté, le ban battu. Le premier se dit lorsque, dans un diner, un des convives vient de chanter une chanson. Un autre convive se lève alors et chante le couplet du ban. Puis, à la reprise, tous les convives chantent tra la la… (tra la la, c’est l’appplaudissement) sur le même air :

[partition à transcrire]

Mais sans doute qu’on a trouvé un peu banal ce couplet final de vaudeville et le plus souvent un convive chante, toujours sur l’air précédent, un couplet connu, mais sans rapport de sens avec ce qu’on vient de chanter. Par exemple un des convives, voix de ténor léger, vient de moduler avec tendresse :

Ce qu’il me faut à moi, quand la brise du soir
S’éveille avec amour au fond de la vallée.

Ou bien :

Dans ton vol joyeux et rapide,
Où t’en vas-tu, petit oiseau ?
Tu t’en vas et l’amour te guide, etc.

Un des convives entonne alors le Ban de la Canuse, que je reproduis ici en changeant un mot, rapport à la pudeur :

Un’ canuse très honnête,
Que logeait près de Saint-Just,
A laissé prendre une canette
Dans le Quentin de sa vertu.

Chœur
Tra la la, Tra la la, etc.

Maintenant un ban sur un autre air favori. Celui-ci se chante surtout après la romance : Connais-tu le pays où fleurit l’oranger ?

[partition à transcrire]

Voici, sur le même air, un autre ban qui, dans sa touchante simplicité, dit tout ce qu’il est nécessaire de dire :

Il a fort bien chanté,
Buvons à sa santé !
Buvons, buvons à sa santé !
Il a fort bien chanté.
Tra la la…

Le ban battu a dû être le ban primitif, ainsi que l’indique l’étymologie, qui doit être une onomatopée, et non ban, publication à son de trompe. Le ban chanté est une extension. Son usage tend malheureusement à disparaitre, et l’on se contente le plus souvent du ban battu, en rythmant les battements de mains de la manière suivante :

[partition à transcrire]

On articule quelquefois les temps : un, deux, etc. D’autres fois on se contente de frapper en mesure. Lorsque, dans un salon du grand monde, une dame vient de jouer du piano, la courtoisie exige que la réunion batte un joli ban. C’est du moins ce que dit Mme la comtesse de Bassanville dans sa Science du monde.