Magasin d’Éducation et de Récréation, Tome XVII et XVIII, 1903



XIX

L’infirmière des prisonniers.


Djaldi s’avançait en flânant ; elle l’appela de loin.

« Par ici, marchand de fruits ! »

Un soldat anglais, qui allait et venait d’un air las, s’arrêta, les mains croisées sur le canon de sa carabine, pour assister à l’entretien.

« Tu as de belles pèches, mon petit, commença Nicole. Combien les vends-tu ?

— Plus cher sans doute que tu ne peux payer ! fit d’un air rogue le petit marchand, promenant un œil dédaigneux sur le logis de l’acheteuse. Vingt-quatre anas[1] les six.

— C’est plus en effet que je ne puis y mettre, dit-elle d’un ton de regret. Voudrais-tu m’en donner pour la valeur de quatre anas ?

— Je ne vends mes pèches qu’à la demi-douzaine.

— Alors il faudra que je m’en passe.

— C’est ça ! L’abstinence est une grande vertu… on gagne le ciel à la pratiquer !

— Mais toi, si tu veux gagner le ciel, fit doucement Nicole, pratique la vertu de générosité ; offre gratuitement tes beaux fruits à ces pauvres malades dont les lèvres sont desséchées par la fièvre…

— C’est donc pour eux que tu les voulais ?

— Oui ; moi je suis jeune et forte. Je n’ai besoin que d’un morceau de pain pour me soutenir ; mais le cœur se brise à voir ces enfants et ces vieillards privés de tout…

— Si vous voulez promettre de les garder pour vous et de ne pas les donner au premier mendiant venu, je vous paye toute la corbeille, plaça ici le troupier qui avait écouté le débat.

— Je vous remercie, répondit Nicole avec calme. Personnellement, je n’ai besoin de rien. Mais, si vous donnez aux malades, Dieu vous récompensera.

— Plus souvent ! m’éboursiller pour un tas de geignards et de fainéants ! Ah ! mais non… Allons, ne faites pas les dégoûtés. C’est moi qui régale ! En attendant, je m’en vas y goûter. »

Et, arrachant rudement la corbeille, il la plaça sur le devant de la charrette et se mit à fourrager parmi les beaux fruits, qu’il mordait à même.

« Eh bien, vous n’en mangez pas ? » fit-il suçant ses doigts ruisselant de jus.

Mais déjà Nicole avait gagné l’intérieur de sa cabine.

« Toi alors ! dit le soldat avec colère, s’adressant au petit marchand. C’est ennuyeux de manger seul. Je n’aime pas à « faire suisse », moi.

— Merci. Je n’ai pas faim.

Tous les mêmes ; plus ils sont gueux et plus ils sont orgueilleux ! » grommela le soldat, déçu dans ses vagues intentions de libéralité.

Tirant de sa poche une poignée de menue monnaie, il choisit la plus mince et la jeta au petit marchand.

« Hé ! le moricaud ! Prends ton argent et emporte ta corbeille. On t’a assez vu.

— Un ana !… Un ana pour tout ce que tu as dévoré ! glapit Djaldi.

— Pour des fruits volés, sans doute… c’est bien payé !

— Je ne suis pas un voleur ! Ces fruits viennent du jardin de mon père — un plus honnête homme que le tien !

— Vermine ! je vais t’apprendre à me parler ainsi… »

Mais, ramassant son éventaire, Djaldi s’enfuyait déjà à toutes jambes, content du résultat de son expédition. Il avait noté soigneusement la situation du wagon, ses abords, la distance qui le séparait du corps de garde, les points de repère qui lui permettraient de le retrouver aisément ; et son œil avisé avait bientôt noté une indication qui le dispensait de chercher davantage, qui pouvait presque servir de poteau indicateur : c’était une maison de bois assez vaste, par comparaison avec les misérables buttes qui l’entouraient, et sur laquelle flottait le drapeau à croix rouge. Le wagon qui servait d’abri à Nicole était le huitième, si l’on suivait une ligne droite, partant de l’ambulance pour gagner la porte de sortie ; muni de ces renseignements, Henri, qui menait son aviateur avec tant de sûreté, ne courrait pas le risque de s’égarer.

Léger comme un chamois, Djaldi parvient en quelques minutes à cette porte, sans autre accident que le pillage du reste de ses fruits par des soldats qui, ceux-là, n’eurent pas l’honnêteté de lui offrir même une fraction d’ana. Mais, dédaigneux d’un détail aussi mince, le petit Hindou, dévorant l’espace, se mit en devoir de regagner au plus vite la maison paternelle. Il avait hâte de rassurer ses grands amis ; et il était tout glorieux du bon résultat de son ambassade…

Quelle joie ! Quel soulagement ! quand on le vit arriver, sa bonne figure brune toute rayonnante. Les parents étaient fiers de la conduite de leur fils ; ils avaient compris, avec l’intuition de cœurs délicats, combien il était pénible à ces intrépides jeunes gens de demeurer inoccupés, ne fût-ce que l’espace d’une matinée, et de remettre à des mains étrangères le soin de leurs plus chers intérêts.

Mais cette période d’attente et d’incertitude était passée… Nicole vivait. Les privations, les fatigues n’avaient altéré ni sa santé, ni son courage. Elle savait que le salut était proche. Que d’heureuses nouvelles après tant d’épreuves amères ! Henri et Gérard ne se lassaient pas de se faire redire tous les détails de l’entrevue ; et Djaldi répétait avec complaisance combien la Mem Sahib était imposante : il avait cru voir un ange du ciel ! Et combien elle était douce aux malades, aux malheureux ! Comment les petits enfants baisaient ses mains !…

Les larmes coulaient sur le visage brun de la mère de Djaldi, en écoutant ces récits. Et quand vint le soir, quand les jeunes hôtes dirent adieu à la maisonnette hospitalière, non sans laisser entre les mains du père un souvenir généreux de leur passage, il leur sembla à tous que c’étaient des amis qui partaient. Djaldi surtout se montrait inconsolable, Henri ayant refusé péremptoirement de permettre qu’il participât à une expédition qui pouvait aboutir à des coups de fusil ; car le pauvre petit, en dehors de la vive affection qu’il avait vouée aux deux frères, avait pris un goût non moins vif pour l’Epiornis ; il se trouvait affreusement désappointé par cette décision qu’il n’avait point prévue.

On avait attendu pour se mettre en route que le lever et le coucher de la lune fussent accomplis. Bien avant l’heure favorable, les deux frères, guidés par Djaldi et son père vers le cirque des rochers où l’Epiornis était remisé, observaient impatiemment le ciel ; à mesure que le crépuscule l’envahit, un fantôme de lune se dessine ; peu à peu l’astre brille d’un éclat plus vif, et enfin il répand une clarté éclatante, autant que celle d’un beau jour d’occident. Il est minuit passé quand la lune redescend, disparaît enfin sous l’horizon, ne laissant le bleu sombre du ciel éclairé que par des myriades d’étoiles.

C’est le moment. Déjà, depuis une heure, Henri et Gérard ont exigé que leurs guides regagnent la maisonnette et les laissent seuls à l’entreprise qu’ils vont tenter. Ils ont vu la poitrine de Djaldi secouée de sanglots, mais sont restés inébranlables dans leur résolution de ne pas l’admettre à bord.

L’Epiornis est sorti de son abri ; le voici libre et bientôt planant dans les airs. Henri le dirige aussitôt vers le camp dont il a, tout le long du jour, déterminé la position, la distance et la configuration, sur les renseignements minutieux donnés par Goûla-Doûla. La nuit n’est pas si obscure qu’on ne puisse distinguer vaguement la forme des choses ; et, grâce à son excellente vue, servie par une lorgnette marine, Gérard parvient à distinguer le drapeau blanc à croix rouge qui flotte sur sa hampe. Joyeux, il annonce la nouvelle, et, après avoir pris position au-dessus de ce point, l’Epiornis commence à descendre lentement.

Voici qu’il se trouve à cent mètres environ au-dessus de l’ambulance. Le drapeau, tout à l’heure faiblement agité, pend immobile, car une sorte de calme pesant s’est abattu sur l’atmosphère et, en même temps, la nuit s’est épaissie. Penché au-dessus du bord, Gérard compte anxieusement les cabines dont la forme, de plus en plus vague, se profile, grisâtre, sur le sol. Et Henri, suivant les indications qu’il lui jette à voix basse, gouverne de façon à venir effleurer, ainsi qu’il a été convenu, sur la bâche même du wagon.

Mais qu’arrive-t-il ? Gérard étouffe une exclamation de surprise, hésite une seconde, puis rapidement :

« Change de direction, Henri ! Vite, un peu à gauche ! nous ne pouvons descendre où il a été dit. Devant la huitième hutte, — oh ! c’est sûr, j’ai compté dix fois, — devant cette hutte ou ce wagon, je vois une lanterne posée à terre et qui l’éclaire en plein !… Qu’est-ce que cela veut dire ? Nicole aurait-elle été assez mal avisée pour allumer un fanal, afin de nous indiquer sa demeure ?

— Jamais, répond Henri. Ou bien elle est soupçonnée, surveillée ; ou ceci est un malencontreux accident auquel il faut remédier. Discernes-tu, près d’ici, quelque emplacement vide où nous puissions nous poser dans l’ombre ? »

Gérard détermine tant bien que mal un endroit propice, et Henri manœuvre pour atterrir. Tout à coup, une voix discordante rompt le silence de la nuit, commence à beugler une chanson chauvine. Puis, abandonnant ce thème guerrier, le chanteur entonne une romance sentimentale fort en honneur parmi la soldatesque :

The girl I left behind me[2]

avec le plus pur accent faubourien de Londres :

The gurl I left be’ind me.

Et la suite, « faisant la nuit hideuse » par sa lourde et grossière gaîté, et empêchant les infortunés malades de dormir.

— La sentinelle charme ses loisirs en se donnant un petit concert ! murmure Gérard.

— Il est tout près de la cabine de Nicole, n’est-ce pas ?

— Planté juste en face de sa porte, avec sa lanterne et sa carabine entre les jambes. Impossible que le plus léger mouvement s’y produise sans qu’il en soit averti : le diable l’emporte !

— Il faut nous débarrasser du bonhomme ! dit Henrri brièvement.

— Allons-y ! »

Les deux frères ont bientôt réglé leur place.

Descendant sans le moindre bruit, grâce aux chaussons dont il s’est muni, sur le conseil de Goûla-Doûla, Gérard se dirige à pas de loup sur le dos de la sentinelle, qui braille toujours ; prompt comme l’éclair, il la coiffe jusqu’au menton de son large chapeau de feutre, lui enroule la tête dans une ceinture de flanelle ; puis, l’ayant ainsi rendu aveugle et muet, il le renverse, lui lie les mains derrière le dos, le laisse comme un paquet sur le sol, avant même que l’autre ait eu le temps de crier à l’aide ou de comprendre ce qui lui arrive.

Une fois son exploit accompli, Gérard allonge un coup de pied au falot, l’éteint, court au wagon, frappe légèrement à la porte, qui s’ouvre aussitôt.

Une silhouette sombre se dessine vaguement.

« C’est vous, Nicole ? Vite !… Ne perdons pas une seconde ! Venez !…

Prenant la main de la jeune fille, il l’aide à descendre, l’entraîne vers le point où il croit pouvoir regagner l’Epiornis. Mais, dans l’émotion de ce moment critique, il a perdu son orientation. Il erre un instant, incertain, se heurte dans l’obscurité contre un obstacle imprévu, réveillant un chien qui commence à aboyer.

« Où donc est l’ambulance ? demande-t-il à voix basse, et s’arrêtant court.

— Au nord de ma cabine, répond la jeune fille, qui, toujours brave et maîtresse d’elle-même, n’a marqué ni par un mot, ni par un geste la frayeur ou le découragement.

— C’est-à-dire en face de l’entrée !

— Oui.

— Alors Henri est en arrière. Croyez-vous pouvoir retrouver l’ambulance ?

— J’essayerai, je ne me rends pas très bien compte de la place où nous sommes… »

En ce moment des jurons, des cris, des appels retentissent dans la nuit.

Help !… The camp is attacked… Help, boys !… Mercy !… The devil is on us ! [3].

Surexcité par ces clameurs, le chien jappe de plus belle ; on entend des pas précipités ; une patrouille débusque en courant, projetant aux alentours la lueur de plusieurs lanternes. Plaçant Nicole derrière lui, Gérard s’arrête dans l’ombre contre une cabine ; ah ! s’il pouvait seulement décharger le snyders de la sentinelle qu’il a emporté !…

Cependant les soldats sont auprès de leur camarade abattu, qui est parvenu en se débattant à se désemmaillotter et qui jure, encore à moitié pris dans ses liens. Ils achèvent de le dégager, le remettent sur pied ahuri et furieux.

« Où est ton fusil ? demande rudement le sergent à moustache grise qui commande la patrouille.

The devil has taken it ! (Le diable me l’a pris) répond le héros d’un air effaré.

None of your sauce ! (pas d’impudence !) où est ton fusil ?

— Je ne sais pas… Il était là… Mais le diable est venu par derrière… et le fusil n’y est plus…

— Prends garde de passer au conseil de guerre pour avoir été trouvé sans armes à ton poste… Et d’abord qui t’a accommodé de la sorte ?

— Je n’en sais rien… si ce n’est le malin en personne…

— Tu n’as rien entendu ?

— Non, Votre honneur !

— Tu dormais, je vois ça !

— S’il vous plaît, Votre honneur, je ne dormais pas.

— Que faisais-tu, grande bête ?

— Je chantais…

— Tu chantais ?… Voyez un peu le beau rossignol ! Mais assez causé… Il s’agit de retrouver la carabine, et celui qui l’a volée… Ça, mes garçons, qu’on fouille partout, et vivement !… »

Les soldats se jettent parmi les ruelles, pénètrent sans crier gare dans toutes les cabines, fouillent, saccagent, bouleversent devant eux les choses et les gens… Sans perdre la tête, Gérard et Nicole font retraite pas à pas en tournant autour des huttes, à mesure que la troupe s’avance. La jeune fille est légère, comme une ombre. Gérard n’a fait aucun bruit sur ses chaussons de silence ; pas le plus léger frôlement ne les trahit. Bientôt, dépités de leurs recherches vaines, les troupiers se replient, s’éloignent, mais non pas sans que le sous-officier ait pompeusement placé deux sentinelles sur le lieu de l’attaque, et emmené, pour le mettre sous clef, le malheureux qui s’est laissé surprendre. De nouveau le calme règne dans le camp.

Cachés derrière une tente, à genoux sur le sol, retenant leur haleine, les fugitifs ont attendu patiemment que le silence et la solitude se fissent.

Ils se relèvent alors, examinent la position où ils se trouvent : dans l’éloignement ils reconnaissent le drapeau blanc de l’ambulance ; ils se mettent en marche vers ce point, prenant mille soins pour ne rien heurter et ne réveiller personne dans les ténèbres.

Ils progressent ainsi sans encombre depuis deux ou trois minutes, quand une nouvelle alerte se produit. Au détour d’une allée une patrouille s’avance, un homme qui se porte-en tête, un fanal à la main, hèle d’une voix impérieuse :

« Qui vive ! on a remué là… Répondez ou je fais feu !

— Chut ! Laissez-moi faire, dit la jeune fille. Et surtout ne vous montrez pas !… »

Puis, s’avançant tranquille :

« C’est moi, Nicole Mauvilain !

— Ah, bon !… l’infirmière des prisonniers ! » fait le chevronné, dont la voix rude prend un ton de respect. Puis se rappelant sa consigne : « Ignorez-vous qu’il est interdit de circuler la nuit dans le camp ?

— Je ne l’ignore pas, mais vous-même, sergent, vous m’avez laissée passer il y a quelques heures quand j’allais recueillir le dernier souffle d’une fillette de mon peuple, de la pauvre Janik qui m’appelait… Vous avez permis que la malheureuse mère vînt m’avertir que la petite était au moment de passer…

— Bon ! bon ! grommelle le sergent… Pour cette fois encore, je ne dirai rien… Mais rentrez vite. »

Et pivotant sur ses talons, raide comme un piquet, il s’éloigne avec ses hommes, non sans murmurer dans sa barbe qu’il commence à en avoir assez du métier de geôlier…

Nicole est revenue vers l’angle du mur de toile où Gérard est resté immobile, et, se tenant par la main, ils reprennent leur course à travers les tortueuses et sombres ruelles.

Parfois ils sont forcés d’enjamber un corps étendu à terre, un être humain mort ou endormi, ayant bravé la consigne pour venir respirer au dehors un air moins vicié que celui qui remplit les huttes sordides, à peine moins vicié, car une atmosphère lourde, étouffante, les oppresse ; on dirait que les pleurs répandus, les gémissements exhalés nuit et jour dans cette lugubre geôle, ont formé un nuage qui plane sur le camp.

Enfin, Nicole s’arrête. Ils ont contourné l’ambulance, se trouvent sur le terre-plein où, selon les indications que lui donne Gérard, l’Epiornis a dû venir se poser. Hélas ! il n’y est plus…

Qui sait à quelles manœuvres Henri a pu se voir forcé durant cette chaude alerte, alors que des hommes, des lanternes sillonnaient toutes les avenues du camp ? Sûrement il a été obligé de quitter le sol, de planer dans la hauteur jusqu’à ce que le calme fût rétabli.

Saura-t-il du moins regagner la même place ? Oui, sans doute, car le drapeau blanc à croix rouge, vague fantôme immobile, n’a pas quitté son poste, il sert toujours d’indice de ralliement.

« C’est ici, n’est-cc pas ? murmure Nicole.

— Oui, répond Gérard à voix basse. Voyez ! en nous penchant, nous pouvons apercevoir là-bas, droit devant nous, les deux sentinelles et leur falot. Nous devons nous trouver, à peu près exactement, à la place même où nous avions atterri. Si seulement il ne faisait pas noir comme dans un four !…

« Si j’osais appeler !… Hem !… Hem !… » risque-t-il, toussant légèrement.

Un silence ; puis, un peu sur la gauche, et comme venant du ciel :

« Hem !… Hem !… répond une voix étouffée.

— Bon, dit joyeusement Gérard. Il est là. Toute la question maintenant est de se rencontrer… »

Nicole et lui ouvrent démesurément leurs jeunes yeux, essayant de percer l’obscurité. Enfin Gérard croit voir comme un nouveau nuage plus dense augmenter l’épaisseur de l’air qui l’entoure ; au même instant il perçoit un léger frôlement ; il tend la main, rencontre une courroie…

« C’est l’Epiornis, qui nous cherche et n’ose atterrir de peur de nous écraser par mégarde… Brave frère, va !… »

Et élevant un peu la voix :

« Nous y sommes !… Vas-y carrément, Henri !… Preste !… »

Il a saisi le bordage de l’Epiornis, l’amène au ras du sol, de la main gauche, et, de la droite soulevant Nicole, il la place sur le marchepied, sent aussitôt qu’elle lui échappe, enlevée, mise en sûreté, par Henri.

Il s’apprête à la suivre, quand un jet de lumière électrique fulgurant, aveuglant, perce la nuit obscure, vient se poser sur l’Epiornis, l’illumine d’une clarté brutale en ses moindres détails.

Gérard saute dans l’oiseau géant, qui, d’un bond soudain, remonte aussitôt dans les nuages. Mais le rayon implacable l’y poursuit et, presque aussi rapides que le rayon, la poudre et le plomb vont l’y chercher. La fusillade éclate, bientôt suivie du tonnerre de l’artillerie. Tout le camp est en tumulte.

  1. Petite monnaie de cuivre.
  2. L’amie que j’ai laissée au pays.
  3. À l’aide !… On attaque le camp !… À l’aide, garçons !… Miséricorde !… Le diable est sur nous !…