Le Chemin des ombres heureuses/Eudème

Édition du Mercure de France (p. 45-46).

EUDÈME


Passant au front penché, aux yeux gonflés de larmes,
lève la tête, sèche ta paupière et regarde
la campagne sourire au ciel qui lui sourit.
Eudème autant que toi subit deuils et soucis,
mais il n’a pas permis que l’eau trouble des pleurs
en lui cachant le monde aggravât son malheur.

Tu ne trouveras point de consolation
si, comme au fond d’une prison,
tu restes enfermé dans tes noires pensées.
Les Dieux ont créé la beauté
pour adoucir et distraire tes jours.

Que sont nos maux auprès de ce qui nous entoure !
Regarde en ses métamorphoses
l’innombrable tribu des êtres et des choses.
Regarde ces merveilles : l’éther fleuri d’étoiles
tour à tour et vibrant de lumière azurée,
les vallons, les jardins épanouis, les bois,
les collines penchées vers la mer onduleuse
et les plaines coupées par la course des fleuves.
Regarde le visage harmonieux des femmes.
Et la sérénité rentrera dans ton âme.