Le Chemin des ombres heureuses/Polémon

Édition du Mercure de France (p. 47-48).

POLÉMON


L’oiseau porte des chants, le lys porte des fleurs,
et moi, j’ai porté des poèmes.
Lorsque le rossignol module sa douleur
le voyageur, surpris, écoute,
et lorsqu’un lys se penche sur le bord du chemin
le passant goûte son odeur.
Mais nul ne me prêta l’oreille
et nul n’a respiré le parfum de mon cœur.

Je ne déclamais pas sous les portiques,
je ne recherchais pas les applaudissements,
j’étais inconnu, fier et libre.

Et cependant
j’aurai la gloire la meilleure et la plus douce
si, loin dans les âges, un jour,
ma voix a pour écho une larme, un soupir.