CHAPITRE VII

LES SELS


78. Définition d’un sel.

Un sel résulte de la substitution d’un métal à l’hydrogène d’un acide.

79. Propriétés des sels.

I. CRISTALLISATION

Fig. 61. — Trémie de sel marin.
Fig. 61. — Trémie de sel marin.

En général, les sels sont cristallisés. Une des formes cristallines les plus remarquables est celle du sel de cuisine. On peut y voir des cristaux agglomérés en pyramides creuses à quatre pans, qu’on appelle des trémies (fig. 64). D’autres sels, comme le plâtre, la craie, ne sont pas cristallisés.

II. SOLUBILITÉ

Il sont, tantôt très solubles dans l’eau, comme le salpêtre, tantôt très peu solubles comme le plâtre, tantôt tout à fait insolubles comme le sulfate de baryum.

III. COLORATION

Très souvent, les sels sont blancs et leurs dissolutions sont incolores ; quelquefois ils sont colorés et leur couleur permet, dans certains cas, de reconnaître quel est le métal qui a servi à les former. Ainsi, les sels de cuivre sont bleus ; les sels de fer sont vert clair ou brun ; les sels de nickel sont vert foncé, les sels d’or sont jaunes.

80. Principaux sels.

Les principaux sels sont ceux de potassium, de sodium et de calcium. Ces trois corps, peu importants comme métaux, ont au contraire une grande importance lorsqu’on envisage leurs sels. Nous savons que les carbonates de potassium et de sodium, obtenus à bas prix par la calcination des végétaux, sont employés dans l’industrie à la place de la potasse et de la soude. Nous connaissons le chlorure de sodium sous le nom de sel ou sel marin ; le carbonate de calcium, sous le nom de calcaire ; le sulfate de calcium, sous le nom de plâtre.

81. Azotate de potassium.

L’azotate de potassium, appelé encore nitre ou salpêtre, sert à préparer l’acide azotique. Comme cet acide, il est oxydant, propriété qui le fait employer dans la fabrication de la poudre pour fournir au charbon l’oxygène nécessaire à sa combustion.

La poudre est un mélange de charbon de bois très facilement inflammable, de salpêtre et de soufre. On choisit pour la fabriquer des matières très pures. On les pile au mortier en ajoutant un peu d’eau de manière à former une pâte, puis on laisse sécher. La masse obtenue est placée sur un crible ; par compression, on force la matière à traverser les trous, ce qui donne des grains de grosseur voulue. La poudre s’enflamme sous l’influence d’un choc ou d’une élévation de température. Le charbon brûle en donnant du gaz carbonique dont l’oxygène est fourni par la décomposition du salpêtre ; et le potassium s’unit au soufre pour former un sulfure. Le gaz carbonique formé et l’azote provenant de la décomposition du sel sont portés à une haute température par la chaleur que dégagent les réactions ; ils sont emprisonnés dans un petit espace ; leur force élastique est très considérable et chasse le projectile de l’arme.

82. Chlorure de sodium.

On trouve le chlorure de sodium, soit dissous dans les eaux de la mer, soit en masses compactes dans le sol et constituant alors le sel gemme (Wieliczka, Transylvanie ; Vic et Dieuze, Alsace-Lorraine). Le sel gemme est enfermé entre deux couches imperméables d’argile qui le protègent contre les infiltrations de l’eau. Dans les régions où les infiltrations se produisent, l’eau de certaines sources contient du sel dissous.

EXTRACTION DU SEL

Sel gemme. — Le sel gemme s’extrait dans des carrières à ciel ouvert ou dans des mines, suivant que la couche de sel est superficielle ou profonde.

Sel dissous. — Le procédé d’extraction du sel dissous est toujours le même : on fait évaporer l’eau et le sel cristallise. L’extraction du sel marin se pratique sur les côtes plates à sol argileux ; on établit sur le rivage des marais salants, c’est-à-dire des bassins peu profonds, mais de grande surface, dont le niveau est inférieur au niveau habituel de la mer. L’eau y pénètre par des canaux inclinés ; elle séjourne quelque temps dans un premier bassin où elle commence à s’évaporer, puis on la fait passer dans un deuxième, où l’évaporation continue, et ainsi de suite jusqu’à un dernier bassin où le sel cristallise. Dans les bassins précédents se sont déposés d’autres sels qui sont dissous dans les eaux de la mer avec le chlorure de sodium, mais qui sont moins solubles que lui.

S’il s’agit des sources salées, on ne peut sacrifier de grands terrains pour l’évaporation de l’eau. On obtient néanmoins une grande surface en faisant tomber l’eau sur des fagots d’épines disposés en tas et constituant les bâtiments de graduation (fig. 65). On élève l’eau au moyen de pompes, et, après huit ou dix chutes successives sur des bâtiments différents, on achève la concentration dans des bassines.

Fig. 65. — Bâtiments de graduation. — p, pompe élevant l’eau dans la rigole C d’où elle coule sur les fagots F ; e, tiges de bois maintenant les fagots.
Fig. 65. — Bâtiments de graduation. — p, pompe élevant l’eau dans la rigole C d’où elle coule sur les fagots F ; e, tiges de bois maintenant les fagots.

Le sel est pour l’homme un aliment indispensable. Les mets non salés sont fades et d’une digestion pénible. Les animaux domestiques sont très friands de sel et se portent mieux quand on en ajoute à leur nourriture.

83. Carbonate de calcium.

Ce corps est connu sous le nom général de pierre calcaire. Les variétés les plus importantes sont la craie, le marbre, le calcaire grossier, la pierre lithographique. De toutes ces pierres, on peut extraire la chaux ; nous savons qu’on emploie plutôt la craie. Le marbre, qui se polit facilement, est réservé pour l’ornementation ; le calcaire grossier, assez mou pour être scié ou sculpté facilement, est employé comme pierre à bâtir ; mais il s’altère vite sous l’influence de l’eau de pluie chargée de gaz carbonique. La pierre lithographique, dont le grain est très fin, est utilisée pour la gravure sur pierre. On dessine les caractères avec un crayon gras et on passe sur la pierre un rouleau chargé d’encre ; celle-ci n’adhère que sur les caractères gras.

84. Sulfate de calcium.

Fig. 66. — Gypse en fer de lance.
Fig. 66. — Gypse en fer de lance.

Le sulfate de calcium est le plâtre. On trouve dans le sol le sulfate hydraté qu’on désigne encore sous les noms de gypse ou de pierre à plâtre. Certains morceaux sont transparents et se séparent en lames minces qui ont la forme d’un fer de lance (fig. 66). On transforme le gypse en plâtre par la chaleur. Chauffons dans un tube à essai un fragment de gypse en fer de lance, nous voyons une buée se former sur la partie supérieure du tube ; il reste au fond une poudre blanche, opaque, qui est le plâtre. Dans l’industrie, on exécute en grand cette opération en cuisant la pierre à plâtre dans des fours analogues aux fours à chaux ; mais la température à laquelle il faut porter cette pierre est bien inférieure à celle qu’exige la décomposition du calcaire. Vers le bas du four, on dispose de gros morceaux de pierre a plâtre de façon à former une voûte (fig. 67). On achève de remplir avec des morceaux plus petits et on allume du feu sous la voûte. Quand l’opération est terminée, on démolit la voûte et on retire les morceaux de plâtre qu’on broie dans un moulin.

Le plâtre, gâché avec de l’eau, forme une pâle qui se solidifie et sert à revêtir la surface des murs intérieurs des maisons. Il se solidifie, parce que, sous l’action de l’eau, il redevient pierre à plâtre. Ce fait est analogue à la solidification de la chaux qui, sous l’action du gaz carbonique de l’air, redevient pierre calcaire. La solidification du plâtre, comme celle de la chaux, se fait très vite à la surface, mais elle ne s’achève que très lentement à l’intérieur. Le plâtre qui durcit augmente de volume ; on le coule dans des moules dont il prend exactement la forme en pénétrant dans les moindres détails. On l’emploie pour faire des rosaces, des statues, etc.

Fig. 67. — Four à plâtre.
Fig. 67. — Four à plâtre.