La nouvelle administration de la Corée/Chapitre 2/06

VI. — DÉVELOPPEMENT DE L’INDUSTRIE ET DE L’AGRICULTURE

De longs siècles d’exactions et de corruption avaient rendu les paysans coréens fort paresseux et avaient brisé en eux tout ressort d’énergie. Depuis son établissement, le Gouverneur général lutte contre toutes les mauvaises influences et s’efforce de redonner au peuple des campagnes le goût du travail. Il cherche surtout à créer des industries nouvelles et à encourager l’agriculture. Des résultats appréciables ont déjà été obtenus, ainsi qu’on ni pourra juger par le tableau suivant donnant la valeur en yen de la production pour les années 1910 et 1918 :

Production.

1910.

1918.

Agriculture en général 210 592 973 974 388 140
Marine et pêcheries 7 835 060 30 838 074
Produits manufacturés 31 932 755 164 241 093
Horticulture et arboriculture 10 690 000 61 630 000
Mines 6 067 952 30 838 074
Total

267 118 740

1 234 960 709

Il est également intéressant de noter les progrès suivants :

Production.

1910.

1918.

Riz 10 405 613 koku[1] 15 294 109 koku
Céréales 6 207 623 koku 10 078 581 koku
Fèves 2 746 358 koku 4 868 321 koku
Coton 21 078 836 kin[1] 77 904 406 kin
Cocons 13 931 koku 121 069 koku
Bétail 703 844 têtes 1 480 037 têtes

D’autre pari, en 1919, 42 134 cho de terrain avaient été reboisés et 119 362 000 arbres avaient déjà été plantés.

Enfin, alors qu’en 1910 il n’existait en Corée que 118 compagnies commerciales (ayant 41 succursales) repré­sentant un capital total de 94 046 000 yen, il y en avait, en 1919, 336 (avec 69 succursales) représentant un capital global de 560 672 839 yen.

Il est possible que le zélé déployé par les fonctionnaires ait quelquefois dépassé le but et mécontenté le peuple ; c’est pourquoi le nouveau Gouverneur géné­ral, tout en continuant la politique de ses prédécesseurs s’efforce de travailler en parfaite harmonie avec tous les commerçants et tous les industriels, et de leur faire comprendre l’esprit même de la nouvelle administration. À cet effet, les mesures suivantes ont été prises :

A. Culture intensive du riz

En vue d’augmenter la production du riz, un projet a été étudié et a déjà reçu un commencement d’exécution en ce qui concerne et l’amélioration des terres et la modernisation des méthodes de culture. On compte que lorsque tous les travaux seront terminés, c’est-à-dire dans quinze ans, la Corée produira 9 000 000 koku de riz de plus qu’elle n’en produit à l’heure actuelle, alors que la consommation n’aura augmenté que de 4 400 000 koku, ce qui en laissera 4 600 000 disponibles pour l’exportation.

Pour obtenir ce résultat, il faudra transformer en excellentes rizières 427 500 cho de terrain. On parviendra.

1o en améliorant l’irrigation de rizières médiocres, soit 
 225 500 cho.
2o en transformant en rizières des champs non irrigués, soit 
 112 500 cho.
3o en défrichant des terres nouvelles et en cultivant des terres situées au bord de la mer 
 90 000 cho.

Ceci est le programme des travaux pour quinze années. Mais le Gouvernement espère doubler encore dans une autre période de quinze années la superficie des terres consacrées à la culture du riz. Il est estimé que l’exécution de ces programme coûtera environ 168 000 000 yen, dont une partie sera à la charge du Gouvernement. Le Gouvernement a en effet assuré par une ordonnance de décembre 1920 des subventions a tous les propriétaires désireux de cultiver le riz. Ces subventions ont été fixées à un maximum de :

1o 20 p. 100 des capitaux engagés chaque année dans de nouveaux travaux d’irrigation de rizières déjà existantes.

2o 35 p. 100 des capitaux engagés chaque année dans la transformation en rizières de champs non irrigués.

3o 30 p. 100 des capitaux engagés chaque année dans le défrichement de nouvelles terres.

Pour assurer le succès de cet énorme entreprise, il est indispensable de faire des enquêtes et des travaux préliminaires. Il faut connaitre les ressources en eau des diverses régions, étudier les diverses canalisations nécessaires dans les divers terrains et grouper tous ces renseignements de façon qu’ils soient accessibles à toutes les personnes désireuses de cultiver le riz. Cette étude prendra environ cinq années.

Le Gouvernement s’occupe aussi de faciliter à tous les agriculteurs grands ou petits, des emprunts à faible intérêt.

En ce qui concerne l’amélioration des méthodes de culture, le Gouvernement reconnait qu’il est indispensable d’encourager les fermiers, de les amener à se servir d’engrais et à choisir les graines de semences, et de les aider à se les procurer. C’est pourquoi il a été décidé d’augmenter le nombre des ingénieurs agronomes dans les administrations provinciales, de subventionner certaines fermes modèles où seront étudiées les valeurs respectives des diverses semences, de prêter aux cultivateurs l’argent nécessaire pour acheter des engrais, etc.

B. Annulation des règlements concernant les sociétés commerciales et révision des règlements sur les marchés

Les règlements sur les sociétés commerciales datent de 1911. À ce moment, les Coréens étaient pauvres et les Japonais ignoraient les ressources de la Corée. C’est pourquoi, craignant que la libre exploitation des ressources de la Corée ne fut un obstacle à son développement économique, le Gouvernement décida, à titre temporaire, de surveiller les opérations des sociétés commerciales, aucune société ne pouvant s’établir en Corée sans son autorisation. Or, dans les derniers temps, les Coréens ont fait de rapides progrès dans le domaine économique et commercial, et les entreprises japonaises se sont montrées dignes de confiance. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé, le 1er avril 1920, d’abolir toutes les restrictions de l’ordonnance de 1911. Des sociétés commerciales pourront désormais s’établir librement en Corée, à la condition toutefois qu’elles soient légalement constituées, que leurs opérations soient conformes à la loi et ne soient pas préjudiciables à l’intérêt public. Toutefois, les firmes d’agents de change, les sociétés s’occupant de change, de vente ou d’achat de titres et de loteries et les compagnies d’assurance sont encore soumises aux anciens règlements.

Les règlements sur les marchés ont été également revisés pour permettre de surveiller de plus près les opérations portant sur diverses denrées.

C. Création d’établissements d’horticulture et de pisciculture

La Corée a environ neuf milles de côtes ; les mers qui la baignent sont extraordinairement poissonneuses et abondent en plantes marines. D’autre part, la superficie des terrains boisés s’élève à 16 millions de cho et représente 73 p. 100 de la superficie totale de la péninsule. Le Gouvernement s’est depuis longtemps occupé d’encourager l’exploitation méthodique de ces deux sources de richesse et cela avec succès, comme on peut s’en rendre compte en consultant les tableaux des pages 96 et 98. Toutefois, on pense pouvoir, grâce à une étude plus approfondie, obtenir des résultats encore meilleurs. Dans ce but, le Gouvernement a décidé de créer, avant 1923, un certain nombre d’établissements de pisciculture et d’arboriculture, lesquels seront placés sous la direction d’experts techniciens.

D. Extension des divers travaux industriels

L’État possède en Corée 5 460 000 hectares de forêts dont 2 730 000 hectares (situés dans les bassins du Yalou et du Toumen) sont exploités par le Bureau des Entreprises Forestières, et le reste par le Gouvernement général. Les forêts vierges doivent être éclaircies. Les espaces dénudés doivent être reboisés. Le Bureau des Entreprises Forestières a, à cet effet, établi cinq succursales, et le Gouvernement général a établi dix nouveaux bureaux. Ces bureaux sont chargés de tous travaux ayant pour objet la conservation des forêts.

Une étude préliminaire du sous-sol coréen, commencée en 1911, a été terminée en 1917. En 1918, le Gouvernement a créé un bureau de recherches géologiques qui est chargé de dresser en quinze ans un tableau exact et détaillé des ressources du sous-sol coréen.

Pour améliorer le rendement des industries agricoles, le Gouvernement entretient en Corée une institution modèle de recherches industrielles. Cette institution a des ramifications dans plusieurs grands centres. Elle public les résultats de ses recherches scientifiques, aide les éleveurs de bétail et enseigne à tous les agriculteurs les meilleures méthodes de culture. Le nouveau Gouvernement général a donné une grande extension à cette œuvre et en a réorganisé les services de façon à faciliter la tâche des experts.

E. projet de création d’une commission d’études industrielles

Quoi qu’il en soit, les résultats obtenus jusqu’à présent sont peu de chose auprès des résultats que l’on espère obtenir dans l’avenir, aussi le Gouvernement a-t-il résolu d’établir un plan général de développement de l’industrie coréenne, et, dans ce but, il a jugé nécessaire de s’entourer de tous les conseillers civils possédant la compétence voulue. C’est pourquoi l’organisation d’une commission d’études et de recherches industrielles a été décidée récemment ; cette commission sera composée de fonctionnaires de l’administration et de particuliers, son budget a été approuvé par la Diète impériale et les fonds nécessaires à son établissement ont été votés.

  1. a et b Le koku = 180 litres 39 ; le kin = 600 grammes ; le cho 99 ares 17.