Éditions Édouard Garand (56p. 24).

XI

Et le lendemain, par une journée printanière, il s’embarqua pour St X…

Le long de la route qui conduit de la gare à la demeure familiale, le soleil dardait sur la neige ses rayons renfoncés. Elle fondait à vus d’œil, l’eau se frayait un cours et s’acheminait par les fossés jusqu’à la rivière.

Heureux de déposer pour quelques temps le poids lourd de la richesse, il se laissa imprégner de la tranquillité latente de la campagne, pendant qu’il cheminait vers la demeure paternelle. On entendait des bruits familiers s’élever plus sonores comme un hymne au renouveau. Les coqs, juchés là où ils pouvaient s’élever, se dressaient tendus vers le ciel comme une offrande, et les « cocoricos » montaient, sonores, triomphants, exubérants.

Des habitants passèrent qui rencontrèrent le visiteur.

— Bonjour, Monsieur André, disaient-ils en saluant.

— Bonjour, mon vieux, répondait ce dernier.

Et d’être reconnu, salué, estimé, lui réchauffait le cœur.

Chez lui personne ne l’attendait, son arrivée fut une surprise joyeuse. Les questions se succédaient, pressées, nombreuses.

On le trouvait un peu maigri. Rien d’étonnant, puisqu’il lui manquait l’air pur que les usines n’ont pas contaminé et qu’il était privé de l’exercice salutaire qu’apportait à son corps, les randonnées dans les rangs et le travail dur auquel parfois il s’astreignait.

Il séjourna deux semaines à St X… insouciant du lendemain et de l’avenir, ne formant aucun autre projet, se contentant de se laisser vivre dans la douceur du farniente et d’oublier les tracas et les soucis qui, ces derniers temps, l’avaient assailli.

La saison était propice au repos. Partout en entaillait les érables et des fêtes nombreuses aux cabanes à sucre apportaient avec elles les distractions indispensables. Et puis, c’était l’époque du renouveau. La vie commençait d’apparaître au travers du manteau hivernal dont il ne restait plus que des lambeaux.