La Vérité sur l’Algérie/03/08


CHAPITRE VIII

Comment M. Rivière, que les grands savants de cabinet disent avec mépris « un jardinier », fut conduit à noter les vraies températures de l’Algérie.


Comment M. Rivière fut-il amené à constater que la thermométrie officielle induisait « le peuple » en si « grave erreur » ?

Très simplement. Et parce qu’il est un jardinier, ainsi que disent, avec dédain et mépris, quelques beaux savants que je connais… M. Rivière voyait au Jardin d’essai de la glace et des plantes congelées, tandis que les observations de thermométrie officielle n’accusaient pas le point de congélation ! Alors, au lieu de placer le thermomètre à 2 m. 60 de hauteur, il le met à l’air libre, au niveau du sol, près des plantes… et il constate les au-dessous de zéro qu’on niait, dont on ne voulait, dont on ne veut même pas encore aujourd’hui entendre parler ! Car il dure toujours l’état d’esprit des anciens algériens que M. Rivière décrit en ces termes :


« Imbus de la légende d’une Algérie coloniale, pays chaud et torride, ils croyaient nuire à leur pays en révélant les refroidissements au-dessous de zéro, la glace, la neige, manifestations météoriques pourtant fort communes et très accusées dans la plus grande partie du territoire algérien. »


Les savants les plus désintéressés ne pouvaient, eux-mêmes, accepter les « au-dessous de zéro » dans les « jardins du littoral, véritables serres tempérées, » où cependant M. Rivière les constatait.

Ses observations de 1878, où, sur des thermomètres nus placés à 0 m. 10 au-dessus du sol, thermomètres enregistreurs, furent marqués :


Le 14, janvier : −2°,5. Le 15 janvier : −1°,5. Le 16 janvier : −2°,5. Le 17 janvier : −3°,5. Le 18 janvier : −1°. Le 19 janvier : −2°. Le 15 mars : −4°,8. Le 16 mars : −2°,6. Le 19 mars : −3°.


M. de Tchiatchef, un savant russe en mission à Alger, avait dû les contrôler lui-même pour admettre les au-dessous de zéro qu’auparavant il niait sur la foi des observateurs officiels.

Notons que dès 1878 M. Rivière signalait ainsi l’erreur des gens qui, voulant à l’Algérie un climat chaud et au littoral de l’Algérie un climat tropical y recommandaient et y recommandent encore l’agriculture de colonisation de ces climats.

Les observations de M. Rivière sont d’autant plus typiques et, pourrais-je dire, « définitives » qu’elles ne portent pas sur les points mauvais de l’Algérie, mais sur le meilleur. Ses chiffres sont relevés au Jardin d’essai, à Alger « dans une station littorale, sur le rivage même, exceptionnellement favorisée par le climat… »


« La caractéristique des refroidissements sous zéro, dit M. Rivière, est qu’ils ne se produisent que dans la couche inférieure de l’air, près du sol, dans une épaisseur d’un mètre environ ; qu’ils sont de longue durée et d’autant plus accusés qu’on se rapproche plus du sol.

« Les thermomètres abrités, établis à 2 m. 60 de hauteur, établis suivant la méthode de l’observation dynamique, n’accusent pas ces abaissements ; bien au contraire, ils enregistrent de la chaleur quand la couche d’air près du sol indique −5°, quelquefois davantage, et que des végétaux sont désorganisés par le froid. »


Voici de ce phénomène une observation typique 26 décembre 1898,


Hauteurs. Degrés.
à 0 m. 10 au-dessus du sol : −4° ;
0 m. 25 » : −2° ;
0 m. 50 » : −1°,5 ;
1 m. » : −1°,4 ;
1 m. 50 » : zéro ;
10 m. » : +7°.


Les graphiques de plusieurs observations montrent, nombreux, la durée du froid au-dessous de zéro pendant six et même huit et dix heures.

Il y a des séries de froid de cinq nuits consécutives, ayant des −3° et des −4° suivis de relèvements diurnes de +23° très rapides, des dégels pour ainsi dire instantanés et courts, interrompant de longs gels.