La Route fraternelle/47
AMOUR ET SOUFFRANCE
u souffres : bénis ta détresse.
La douleur en bonté mûrit ;
C’est pour le cœur une richesse,
Une lumière pour l’esprit.
Bénis cette sombre tourmente
Dont tes agrès sont ravagés ;
Ta voile en sera plus clémente
Au sort des autres naufragés.
Et ta nacelle aux flots en proie,
Comprendra mieux le cri d’appel
Que la vague à la rive envoie,
Que la rive renvoie au ciel.
Fraternité de secourance,
C’est toi qui rends les maux moins lourds,
Qui fais des lèvres l’attirance,
Et des yeux tendres le velours !
Poète, ou disparais du globe
Ou sache encore aimer, souffrir ;
Quand rien ne bat plus sous sa robe,
Le vates n’a plus qu’à mourir.
En toute saison de la vie,
Aux saintes amours livre-toi,
Car la nature t’y convie,
Et Dieu même t’en fait la loi.
Si le vrai Dieu s’appelle Idée,
Surtout, surtout il est Amour ;
Et sa silhouette, accoudée
Au balcon de l’astral séjour,
Sourit aux hommes, paternelle ;
Et les hommes voient clairement
Leur ciel futur en sa prunelle,
Surtout, surtout un ciel aimant.