LAZARE

Tout, quand vous voulez, Seigneur, est possible,
Le verrou se tire au seuil du cachot,
Le fusil s’abaisse au bord de la cible,
Les morts qu’on pleurait sortent du tombeau.

Devant le tombeau, vous pleuriez aussi,
Devant le tombeau où dormit Lazare,
Au jour de ce monde, il fut votre ami,
Vous avez brisé ses sombres amarres.

Compagnon de Dieu, Lazare mon frère,
Viendrez-vous demain, viendrez-vous ce soir,
Ô vous né deux fois aux joies de la terre,
Patron à jamais des derniers espoirs ?

Près du monument se tient invisible
La petite fille aux yeux de matin.
Tout, quand vous voulez, Seigneur, est possible
L’Enfant Espérance a joint les deux mains.

Je remets, Seigneur, aux plis de sa robe
La peine des miens, l’étreinte du cœur ;
Que l’enfant me rende, à l’heure de l’aube,
Le jour de la terre — ou sinon, d’ailleurs.

Fresnes, 4 février 1945.