La Cité de Dieu (Augustin)/Livre IX/Chapitre XIX

La Cité de Dieu
Texte établi par RaulxL. Guérin & Cie (Œuvres complètes de Saint Augustin, tome XIIIp. 191).
CHAPITRE XIX.
LE NOM DE DÉMONS NE SE PREND JAMAIS EN BONNE PART, MÊME CHEZ LEURS ADORATEURS.

Comme plusieurs de ces démonolâtres, entre autres Labéon, assurent qu’on donne aussi le nom d’anges à ceux qu’ils appellent démons, il est nécessaire, pour ne point paraître disputer sur les mots, que je dise quelque chose des bons anges. Les Platoniciens ne nient point leur existence, mais ils aiment mieux les appeler bons démons. Pour nous, nous voyons bien que l’Ecriture, selon laquelle nous sommes chrétiens, distingue les bons et les mauvais anges, mais elle ne parle jamais des bons démons. En quelque endroit des livres saints que l’on trouve le mot démons, il désigne toujours les esprits malins. Ce sens est tellement passé en usage que, parmi les païens mêmes, qui veulent qu’on adore plusieurs dieux et plusieurs démons, il n’y en a aucun, si lettré et si docte qu’il soit, qui osât dire à son esclave en manière de louange : Tu es un démon, et qui pût douter que ce propos, adressé à qui que ce soit, ne fût pris pour une injure. Mais à quoi bon nous étendre davantage sur le mot démon, alors qu’il n’est presque personne qui ne le prononce en mauvaise part, et que nous pouvons aisément éviter l’équivoque en nous servant du mot ange ?