La Cité de Dieu (Augustin)/Livre IX/Chapitre XIV

La Cité de Dieu
Texte établi par RaulxL. Guérin & Cie (Œuvres complètes de Saint Augustin, tome XIIIp. 187).
CHAPITRE XIV.
SI LES HOMMES, EN TANT QUE MORTELS, PEUVENT ÊTRE HEUREUX.

C’est une grande question parmi les hommes que celle-ci : l’homme peut-il être mortel et bienheureux ? Quelques-uns, considérant humblement notre condition, ont nié que l’homme fût capable de béatitude tant qu’il est dans les liens de la vie mortelle ; d’autres ont exalté à tel point la nature humaine, qu’ils ont osé dire que les sages, même en cette vie, peuvent posséder le parfait bonheur. Si ces derniers ont raison, pourquoi ne pas dire que les sages sont les vrais intermédiaires entre les mortels misérables et les bienheureux immortels, puisqu’ils partagent avec ceux-là l’existence mortelle et avec ceux-ci la béatitude ? Or, s’ils sont bienheureux, ils ne portent d’envie à personne ; car, quoi de plus misérable que l’envie ? Ils veillent donc sur les misérables mortels, afin de les aider de tout leur pouvoir à acquérir la béatitude et à posséder après la mort une vie immortelle dans la société des anges immortels et bienheureux.