La Catastrophe de la Martinique (Hess)/40

Librairie Charpentier et Fasquelle (p. 255-267).



NOTES ET DOCUMENTS

POUR COMPLÉTER MON REPORTAGE


XL

LA CATASTROPHE, LA RELIGION ET LA SUPERSTITION


Toutes les grandes catastrophes, les épouvantables deuils et les effroyables peurs qui les suivent provoquent une réaction de foi religieuse chez les survivants, que la religion soit le fétichisme africain ou le catholicisme romain.

Ce phénomène n’a pas manqué.

Un correspondant de Fort-de-France écrivait le lendemain de la catastrophe au Courrier de la Guadeloupe :


C’est horrible !… L’imagination et la raison humaine sont confondues. Sur les ruines fumantes, dans ce silence de nécropole on ne croit pas à la réalité. Je ne puis y croire et j’ai pleuré sur les ruines d’une ville si animée, si pleine de vie… Hier je ne croyais pas en Dieu. Aujourd’hui j’y crois !


Un conseiller général de Fort-de-France, esprit fort en temps ordinaire, m’affirmait très sérieusement que parmi les victimes notables de la catastrophe se trouvaient trois personnes, haut placées d’ailleurs, qui avaient affiché leur impiété en mangeant gras le vendredi saint. Et il en concluait que leur impiété avait été punie par le Seigneur, lequel les aurait pour ce, attirées de Fort-de-France à Saint-Pierre le jour même de la catastrophe.

Les blanchisseuses de Fort-de-France affirmaient sérieusement que la ville de Saint-Pierre avait été anéantie parce que l’on y avait dansé en carême. Et l’une d’elles qu’un troupier conviait à se réjouir un vendredi, répondit que ce n’était pas « jour à bêtiser », car le Seigneur l’en punirait certainement par une nouvelle pluie de feu.

D’autres rappelaient qu’en partant pour la France à la suite de « persécutions politiques », Monseigneur de Cormont aurait jeté sa malédiction sur la ville impie et que le volcan se serait chargé de sanctionner cette malédiction…

Pline nous a conté que les gens de Pompéi entendaient, voyaient des géants infernaux dans la montagne en feu, en fumée, que dans les airs embrasés les prêtres montraient à leurs fidèles les génies vengeurs… Ça n’a pas manqué à Saint-Pierre ni à Fort-de-France.

J’ai entendu une femme dire que lors des deux éruptions elle avait vu des diables dans les nuages de fumée et que ces diables avaient reçu du Seigneur liberté de venir punir les pécheurs martiniquais. Et la pauvre hallucinée ajoutait que son confesseur lui avait dit que c’était vrai. Des gens qui se croyaient des personnages sérieux m’ont dit sans rire que les nuages de la deuxième éruption avaient des formes démoniaques infernales…


Un instituteur m’a conté que les prêtres avaient dans toutes les communes de la Martinique, su très habilement profiter de la terreur causée par l’anéantissement de Saint-Pierre pour réchauffer le zèle religieux de leurs ouailles.

La cathédrale le 26 mai.

« C’est en punition des fautes de l’île et des fautes de la France, où triomphe le mauvais esprit, que Dieu, vengeur, a frappé Saint-Pierre. »

Et pour adoucir la légitime colère du Seigneur, pour l’implorer pour lui demander de ne pas choisir à la Martinique de nouvelles victimes expiatoires, ces prêtres prescrivaient non seulement des prières et des offrandes, mais aussi des pénitences parfois très dures. Notamment celle de rester à genoux au soleil pendant une heure et plus…

Une légende aussi se crée, et peut-être demain parlera-t-on de miracle.

Une vierge de plâtre aurait été miraculeusement transportée par la trombe de feu, à l’abri, sans être endommagée.



Voici maintenant deux documents plus typiques de la mentalité du clergé en cette occurrence.

Les prêtres de la Martinique furent officiellement très réservés.

Ceux de la Guadeloupe le furent moins. C’est chez eux que nous trouverons le rappel de Sodome et de Gomorrhe, des villes frappées par la colère du Seigneur.

C’est d’abord la lettre pastorale de l’évêque de la Guadeloupe.

Elle est assez intéressante pour que je la publie presque intégralement :



Nos très Chers Frères,

Nous n’avons pas à vous apprendre l’horrible catastrophe qui vient de supprimer la ville, naguère si florissante, de Saint-Pierre (Martinique). Les cent voix de la renommée ont déjà porté la triste nouvelle jusqu’aux extrémités du monde, et Nous sommes convaincu qu’un immense cri de douleur et de pitié s’élève en ce moment de tous les rivages, en faveur des victimes consumées, comme en faveur des parents et des amis qui leur survivent. On demeure forcément atterré et anéanti en présence d’une semblable calamité, et on vient même parfois à se demander si l’on n’est pas le jouet de quelque affreux cauchemar ? Mais non : la réalité s’affirme implacable et terrifiante !


I


Hier, la grande cité commerciale des Antilles françaises était debout et pleine d’animation ; aujourd’hui, elle n’est plus qu’une ruine fumante et un vaste cimetière ! Tout s’est effondré : Cathédrale, églises paroissiales, établissements publics, collèges, pensionnats, hôpitaux, demeures particulières, sans aucune exception ; et tout ce qui respirait est mort, sans que personne ait pu se dérober !

Que s’est-il donc produit, grand Dieu ! et quel est le gigantesque destructeur qui a passé par là, précédé de la terreur et suivi du deuil.

Vous savez N. T. C. F., qu’au-dessus de ce qui était la ville de Saint-Pierre, se dresse, presque égale à notre Soufrière, une haute montagne, aux puissants contreforts, désignée sous le nom de Montagne Pelée, sans doute parce qu’aucune végétation ne s’étage sur ses flancs. Eh bien ! c’est des profondes entrailles de ce monstre bouillonnant que s’est échappé le fléau longtemps prisonnier. On croyait le volcan éteint, car depuis plus de 50 ans il n’avait donné aucun signe d’activité ; mais il préparait sourdement, dans le travail mystérieux de sa force irrésistible et inconsciente, le grand coup qui vient d’éclater.

En effet, après quelques trépidations isolées qui avaient marqué le début de ce mois, après de timides essais qui avaient consisté en détonations plus ou moins bruyantes et en vomissements intermittents qui, malgré de lamentables ravages, avaient partagé la population entre la crainte et l’espoir : l’ardente fournaise s’élargit soudain, le sol chancela violemment, une trombe de feu s’élança avec fracas, et, suivant une direction précise, s’abattit, avec une fureur inouïe, sur la cité sans défense et sur les quartiers environnants.

Moment indescriptible ! Écrasement vertigineux, puisque pour changer en cendres toute une région verdoyante, pour abîmer dans les flammes tous les navires mouillés en rade, pour coucher dans la mort plus de trente cinq mille victimes humaines, quinze minutes ont suffi !!!

Ô chère Martinique, la matinée du 8 mai 1902 restera à jamais ineffaçable dans les annales de tes infortunes !

On dit même que la montagne homicide, comme si elle avait eu honte de sa foudroyante victoire, s’est affaissée sur ses bases, et a perdu les deux tiers de sa fière altitude !

La plume Nous tombe des mains, N. T. C. F., et Nous Nous demandons si Nous ne devons pas la briser, après un tel récit.

Ah ! il nous faudrait un autre Jérémie, pour dépeindre ce désastre sans précédent qui ne peut se comparer qu’à la ruine de Sodome, sans qu’il ait eu pourtant les mêmes causes déterminantes ; il nous faudrait le chantre inspiré du malheur pour nous dire comme autrefois : « J’ai vu les montagnes, et elles tremblaient ; j’ai vu les collines, et elles étaient toutes ébranlées ; j’ai jeté les yeux autour de moi, et je n’ai point trouvé d’hommes, et tous les oiseaux même du ciel s’étaient retirés ; j’ai vu les campagnes les plus fertiles devenues un désert, et toutes les villes détruites devant la face du Seigneur. » « Comment cette ville si pleine de peuple est elle maintenant solitaire et désolée ? » — « Ô vous tous qui passez sur le chemin, arrêtez-vous, et voyez s’il est une affliction semblable à la mienne ! » — « Souvenez-vous, Seigneur de ce qui nous est arrivé. » — « Nous avons acheté l’eau à prix d’argent. » — « Nous avons cherché du pain jusque chez l’étranger, et notre peau s’est brûlée au contact du feu. »


II


Qu’il Nous soit au moins permis, après l’éminent et sympathique Gouverneur de la Guadeloupe, de déposer sur la nouvelle nécropole notre souvenir le plus ému. Ô mélange informe de tant de corps calcinés ! Ô égalité suprême cruellement ironique !!! Oui Nous Nous inclinons vers vous, innombrables disparus, chef honorable du Gouvernement de l’île-Sœur, fonctionnaires de tous les services et de tous les degrés, officiers de notre armée, soldats pleins de jeunesse, familles de tous les rangs, artisans obscurs…

Mais qui pourrait Nous reprocher d’évoquer plus particulièrement la mémoire bénie des onze Prêtres du clergé martiniquais, des quatorze Pères de la congrégation du Saint-Esprit, des trente-trois religieuses de Saint-Joseph de Cluny, des vingt-huit sœurs hospitalières de Saint-Paul de Chartres, et des huit religieuses de la Délivrance, qui gisent pêle-mêle dans cet amas de cadavres ? À tous ceux qui ne sont plus : paix et repos dans le Seigneur !!!

Mais à ceux qui restent : énergie et courage !

Nous avons voulu offrir sans retard à la Colonie si éprouvée le tribut de notre affection, et, dès la première heure, Nous avons député vers elle deux prêtres à l’âme généreuse et au cœur élevé : M. l’abbé Duval, notre Vicaire général, et M. l’abbé Amieux, Archiprêtre de notre Cathédrale. L’arrivée de nos envoyés, Nous le savons déjà, a vivement touché le clergé, les communautés et les familles de la Martinique, et tous deux ont pu prendre la parole dans la belle cathédrale de Fort-de-France, à la grande consolation des fidèles accourus de toutes parts. Le distingué et pieux administrateur qui, en l’absence du vénérable Mgr de Cormont, actuellement en France, porte le poids du Diocèse, a bien voulu Nous donner lui-même cette assurance, par une lettre qui exhale un parfum suave de sincérité, et que Nous vous communiquons :


« Fort-de-France, le 11 mai 1902.
« Monseigneur,

« Ces Messieurs que Votre Grandeur a bien voulu m’envoyer pour me donner, dans mon malheur et au milieu du deuil d’un pays entier, un témoignage de l’intérêt qu’Elle porte à l’île-Sœur si horriblement éprouvée, et à son pauvre et -chancelant administrateur, vous feront mieux que je ne saurais le faire moi-même le récit et le tableau de l’immensité de la catastrophe. Pour moi, plein de reconnaissance pour cette marque de votre haute sympathie, je ne sais comment vous l’exprimer. Mais je me sens réconforté devant tant de bienveillance, et je me dis : si les Pontifes de Jésus-Christ s’émeuvent devant nos malheurs, il n’est pas possible que le Chef des Pontifes, du haut du ciel, demeure sourd aux supplications de son peuple qui, malgré ses fautes, revient à lui. Oui, il aura pitié de nous, et nous retirera de l’abîme où nous sommes : j’en ai pour gage votre cœur, Monseigneur, et le cœur de vos deux représentants qui nous ont prodigué toutes les marques de la fraternité la plus émue et la plus touchante.

« À Votre Grandeur, Monseigneur, et à eux ma plus vive gratitude et la reconnaissance de la Martinique.

« Veuillez, agréer, Monseigneur, l’assurance des sentiments respectueux avec lesquels je suis,

« De Votre Grandeur,
« le très humble serviteur.
Signé : Parel, administrateur. »


III


Toutefois, N. T. C. F., notre tâche n’est pas encore achevée, puisque les âmes qui animaient tous ces corps brûlés ont paru devant Dieu, et qu’elles ont certainement besoin de nos prières et de nos suffrages. À quoi leur serviraient nos larmes stériles et nos regrets superflus, si nous n’implorions en même temps pour elles la miséricorde et le pardon ? Nous leur serons ainsi beaucoup plus utiles qu’en demandant au Souverain Maître des hommes et des choses le pourquoi de ces cataclysmes qui confondent dans le même creuset l’innocent et le coupable, et qui peuvent parfois déconcerter les esprits superficiels. Dès lors que nous ne possédons pas, pour nous prononcer, tous les éléments qui nous seraient nécessaires, pourquoi récriminer et blasphémer peut-être ? Qu’il nous suffise de savoir qu’il existe des lois physiques générales qui expliquent certains phénomènes, et même certains bouleversements naturels ; qu’il nous suffise également de savoir que Dieu ne fait rien sans raison, que ses jugements sont plus éclairés que les nôtres, et qu’un avenir réparateur redressera les contradictions et les injustices appareilles du présent. Et puis courbons-nous humblement sous la main du Seigneur, qui nous frappe en ce monde pour nous épargner dans l’autre.


IV


Enfin, N. T. C. F., envisageons avec générosité et résolution le devoir qui, aujourd’hui, s’impose à nous. Les fléaux, vous ne l’ignorez pas, traînent toujours après eux la misère et la faim, et quand la vie sociale et religieuse d’un pays a été profondément troublée, elle ne peut reprendre sa marche et sa vigueur qu’avec des secours matériels, abondants. Or, la Martinique ne peut plus les tirer de son sein, et elle s’adresse à la Guadeloupe, sa sœur moins malheureuse. Chers diocésains, vous entendrez tous sa voix éplorée, et en face de l’immense tribulation qui l’étreint, au souvenir des largesses qu’elle vous a prodiguées à l’heure de vos propres calamités, vous ne vous contenterez pas de lui donner l’obole de votre surabondance. Vous saurez prendre sur votre nécessaire, pour soulager, dans des proportions exceptionnelles, une infortune qui dépasse toute proportion. N’oubliez-pas que Dieu est toujours le plus fort, et que son bras n’est ni désarmé, ni raccourci ; et si vous voulez que sa protection vous soit plus assurée, rappelez-vous que l’aumône chrétienne constitue le rachat du péché et devient pour les individus, les familles et les nations, la meilleure garantie des bénédictions du Ciel, etc. etc.



Imaginez l’effet produit par ce rappel du bras de Dieu « ni désarmé, ni raccourci » sur le cerveau de pauvres noirs affolés par les récits terrifiants de la catastrophe.



L’évêque avait parlé de Sodome, un de ses prêtres, le curé de la Pointe-à-Pitre, prononçant un sermon le 10 mai, osait à peine faire allusion aux villes maudites… mais quelle allusion.

Voici son sermon, d’après le Courrier de la Guadeloupe :


… Ni la foi, ni la religion ne nous défendent les larmes, — cette seule réalité d’ici-bas ; — ni le deuil, cette divine et secrète religion du cœur !

Ah ! devant un tel désastre il faudrait plaindre l’être humain, l’être raisonnable et sensible qui, d’un œil sec contemplerait un spectacle de désolation et de mort pareil à celui que nous entendons raconter depuis quelques heures et dont nous ignorerons longtemps, grâce à Dieu, l’épouvantable réalité dans tous ses atroces défaits. Ne vous semble-t-il pas que vous relisez le xxixe chapitre de la Genèse, après que le feu du ciel eut détruit jusque dans leurs derniers fondements je ne sais plus quelles villes coupables de désordres tellement monstrueux qu’ils nous paraissent légendaires ? Loin de nous la pensée d’une assimilation que tout ici repousse ; mais combien le rapprochement, dans ses résultats terribles, est frappant !

À la place qu’hier encore occupaient des champs fertiles, de riches habitations, des villes peuplées, Abraham voyait la cendre monter de la terre comme la fumée qui s’échappe d’une fournaise. » (V. 27.)

L’évêché le 26 mai.

Le deuil ! — Mais ceux qui furent engloutis vivants dans les flammes ardentes de cette fournaise, ceux qui, encore pleins de vie, de jeunesse, de santé, étouffèrent dans les tourbillons de cette cendre, c’étaient nos frères ! vos fils, vos enfants et vos femmes, le sang de votre sang ! le cœur de votre cœur !

Et puis, y avez-vous songé ? Tous ont péri sous ce niveau de feu et de lave… tous !

Avaient-ils donc tous mérité cette horrible agonie ? N’y avait-il dans cette foule, je vous le demande à vous qui les avez connus, estimés, aimés, n’y avait-il pas un seul juste ? Pas un seul innocent ?

Oh ! certes non !

Et Dieu les a frappés… Ah ! Nos jours sont courts et mauvais ; nos œuvres chancelantes ; nos volontés incertaines. L’avenir nous échappe ; le passé ne nous instruit guère ; le présent nous déconcerte et la nature garde bien ses secrets ; malgré notre science, elle n’obéit qu’à Dieu !

À Dieu seul ! car c’est toujours à lui qu’il faut revenir, à lui qui n’est jamais ni cruel, ni injuste ! Entendez-le parler à Jérémie : « Ils viendront à moi dans les larmes et je les ramènerai dans ma miséricorde. »

Retenons ces paroles.

Aux cris de douleur, aux larmes de nos yeux, au deuil de nos âmes fraternelles ajoutons pour ceux qui ne sont plus, la prière ; pour ceux qui survivent, hélas ! dans quelle détresse, la compassion, les secours généreux de la charité sous toutes ses formes, et gravons profondément dans nos cœurs saignants la leçon que Dieu nous donne : « Veillez ! priez ! vous ne connaissez ni l’heure ni le jour !… »



Il y avait dans la foule des victimes de Saint-Pierre des gens qui « avaient mérité cette horrible agonie ». Voilà l’effroyable menace que les ministres du Dieu de la Bonté et du Pardon laissent tomber du haut de leur chaire aux Antilles… Pour un peu je serais tenté d’écrire en aussi mauvais français que le monseigneur de la Guadeloupe et de répéter sa phrase : « La plume Nous tombe des mains, N. T. C. F. et Nous Nous demandons si Nous ne devons pas la briser après un tel récit… »



Si encore on n’avait accusé que les dieux les diables ou les zombis !… Mais cela allait plus loin. Qui attirait sur Saint-Pierre, qui attirait sur Fort-de-France les feux du volcan et les feux du ciel ?… Vous ne le savez pas. La populace a trouvé tout de suite. C’était l’électricité. C’était la lumière électrique. Les bonnes gens de la Martinique ont toujours cru et croient encore plus crue jamais qu’il y a de la sorcellerie dans cette chose inconcevable de fils de fer dont les uns sont à l’air et ne portent rien, et dont les autres sont dans des verres et brûlent, éclairant…

Il n’est pas possible que cela soit une chose humaine, une chose chrétienne, c’est diabolique, c’est de l’autre monde.

Je faisais visite à une bonne personne chez qui viennent quelquefois les filles de Béhanzin que je voulais saluer. La confidente, l’amie à tout faire de son ex-altesse était navrée et se répandait en amères doléances contre le gouvernement des blancs qui exposait les pauvres noirs à de telles catastrophes… Sans doute avait-on juré de leur perte… « Comment et pourquoi donc ? » — « Avé leu électicité chéi…! » Et ne croyez pas que je plaisante. Pendant mon séjour Fort-de-France demeura plusieurs nuits sans lumière électrique.

Le maire avait dû obéir aux ordres de la population… D’ailleurs, à la mairie même j’ai entendu des gens sérieux me dire que les lumières électriques amenaient le volcan :