Librairie Guillaumin & Cie (p. 498-499).

Facilité de la réforme





En réalité, que faut-il pour faire passer la réforme proposée de la théorie et de la période des discours à la rédaction d’une loi et à son application ?

Tout simplement deux choses : d’un côté, un peu plus d’indépendance chez nos gouvernants vis-à-vis des détenteurs des milliards ; d’un autre côté, un peu moins de crainte, de préjugés et d’esprit de routine dans la grande masse des citoyens. Il ne s’agit pas, comme les timorés paraissent le redouter, de préparer les voies à une sorte d’expropriation universelle, à la mise en commun de tous les biens, suivant l’utopie collectiviste. Il s’agit, au contraire, d’assurer un peu de bien-être et d’indépendance à tous, par la propriété personnelle rendue plus accessible, en faisant une meilleure part au travail, et en apportant à l’appropriation de la richesse les limites dont le bon sens, la justice, la prévoyance de tous les grands législateurs ont parfaitement reconnu la nécessité.

Comme application, quoi de plus simple ? Chaque citoyen fournit le tableau ou la déclaration de ses biens et revenus. Point n’est besoin pour cela de bouleverser, en quoi que ce soit, le mécanisme de notre administration fiscale. Le personnel actuel, qui sera même diminué en nombre, recevra du citoyen vivant la déclaration de ses biens, comme il la reçoit actuellement des héritiers du citoyen mort.

Il n’est guère possible d’entrevoir une amélioration quelconque de l’état des classes laborieuses, même par les moyens employés aujourd’hui : la mutualité, la coopération, les sociétés de production et de consommation, les syndicats, etc., si la législation n’apporte, soit par le régime fiscal, soit autrement, d’un côté une limitation à l’accumulation indéfinie de la richesse, d’un autre côté une plus grande facilité à la formation de la petite propriété. Lorsque chacun sera soumis à la loi du travail, chacun sera aussi admis à jouir, dans la mesure de son travail, du bénéfice de la richesse acquise…