L’Imitation de Jésus-Christ (Lamennais)/Livre deuxième/04

Traduction par Félicité de Lamennais.
Texte établi par M. Pagès, Bonne Presse (p. 98-99).


CHAPITRE IV.

DE LA PURETÉ D’ESPRIT, ET DE LA DROITURE D’INTENTION.

1. L’homme s’élève au-dessus de la terre sur deux ailes, la simplicité et la pureté.

La simplicité doit être dans l’intention, et la pureté dans l’affection.

La simplicité cherche Dieu ; la pureté le trouve et le goûte.

Nulle bonne œuvre ne vous sera difficile, si vous êtes libre au dedans de toute affection déréglée.

Si vous ne voulez que ce que Dieu veut, et ce qui est utile au prochain, vous jouirez de la liberté intérieure.

Si votre cœur était droit, alors toute créature vous serait un miroir de vie et un livre rempli de saintes instructions.

Il n’est point de créature si petite et si vile qui ne présente quelque image de la bonté de Dieu.

2. Si vous aviez en vous assez d’innocence et de pureté, vous verriez tout sans obstacle. Un cœur pur pénètre le ciel et l’enfer.

Chacun juge des choses du dehors selon ce qu’il est au dedans de lui-même.

S’il est quelque joie dans le monde, le cœur pur la possède.

Et s’il y a des angoisses et des tribulations, avant tout elles sont connues de la mauvaise conscience.

Comme le fer mis au feu perd sa rouille, et devient tout étincelant, ainsi celui qui se donne sans réserve à Dieu, se dépouille de sa langueur et se change en un homme nouveau.

3. Quand l’homme commence à tomber dans la tiédeur ; alors il craint le moindre travail, et reçoit avidement les consolations du dehors.

Mais quand il commence à se vaincre parfaitement et à marcher avec courage dans la voie de Dieu, alors il compte pour rien ce qui lui était le plus pénible.

RÉFLEXION.

Quand Jésus-Christ voulut proposer un modèle à ses disciples, le choisit-il parmi les hommes distingués par leur science ou par la supériorité de leur esprit ? Non ; il appela un petit enfant, le plaça au milieu d’eux, et dit : En vérité, je vous le dis, si vous ne vous convertissez et ne devenez comme de petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux[1]. Or, que voyons-nous dans l’enfance ? la simplicité, la pureté. Elle croit, elle aime, elle agit, sans aucun retour sur elle-même, par un premier mouvement du cœur ; et voilà ce qui plaît à Dieu. Il ne demande ni de longues prières, ni d’éloquents discours, ni des méditations profondes, mais une volonté droite et un amour plein de candeur. N’avoir en tout de désirs que les siens, s’oublier entièrement soi-même, se soumettre aux volontés de l’adorable Providence, sans chercher à les scruter, quoi de plus pur que cet abandon, que cette simple obéissance ? Aussi la récompense en sera-t-elle grande : Heureux est-il dit, ceux qui ont le cœur pur, parce qu’ils verront Dieu[2].

  1. Matth. xviii, 2, 8.
  2. Matth. v, 8.