L’Encyclopédie/1re édition/PREVOT

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PREVOT, (Jurisprud.) du latin præpositus qui signifie préposé, est le titre que les premiers juges, soit royaux ou seigneriaux prennent dans beaucoup d’endroits.

On donne aussi ce titre au chef de certaines communautés d’artisans.

Enfin, dans certains chapitres, il y a un prevôt, qui dans quelques-uns est la premiere ou la seconde dignité ; dans d’autres, c’est un simple office. (A)

Prevôt des Bandes ou des Bandes françoises, est un prevôt d’armée attaché au régiment des gardes-françoises, il y a aussi un prevôt des bandes suisses ; ces sortes de prevôts sont pour ce corps en particulier, ce que les prevôts de la connétablie & maréchaussée de France, sont pour le reste de l’armée. Voyez Prevot d’armée & Prevot des maréchaux. (A)

Prevots-fermiers, on donnoit ce nom aux prevôts royaux du tems que les prevôtés étoient données à ferme. Voyez ce qui en est dit ci-après à l’article Prevot de Paris.

Prevôt en garde, est le titre que l’on donna aux prevôts royaux, depuis qu’il eut été défendu de donner les prevôtés à ferme, on donna les prevôtés en garde. Voyez ci après Prevôt de Paris.

Prevôts des guerres, c’est ainsi que sont nommés dans les anciennes ordonnances les prevôts d’armée, voyez le tom. III. des Ordonn. p. 112. Voyez ci-devant Prevôt de l’armée & Prevot des bandes. (A)

Prevôt de France (Grand) ou Prevot de l’hôtel du roi, qu’on appelle ordinairement par abréviation prevôt de l’hôtel simplement, est un officier d’épée qui est le juge de tous ceux qui sont à la suite de la cour, en quelque lieu qu’elle se transporte.

Du Tillet, & après lui quelques autres auteurs ont avancé, que le roi des ribauds exerçoit autrefois la charge de grand-prevôt, & qu’il fut intitulé prevôt de l’hôtel, sous le regne de Charles VI.

Miraulmont, au contraire, fait descendre le prevôt de l’hôtel des comtes du palais.

Mais les uns & les autres se sont trompés : ce que l’on peut dire de plus certain à ce sujet, est que l’autorité du prevôt de l’hôtel dérive de celle du grand sénéchal qui existoit en même tems que le comte du palais, mais dont l’autorité n’étoit pas si étendue que celle du comte du palais ; du sénéchal elle passa au bailli du palais, de celui-ci au grand maître, du grand maître, aux maîtres d’hôtel, & de ceux-ci au prevôt de l’hôtel.

Ces officiers avoient sous leurs ordres le roi des ribauds.

Sous le terme de bauds ou ribauds, on entendoit dans l’origine des hommes, forts & déterminés propres à faire un coup de main ; ce terme de ribauds se prit dans la suite en mauvaise part, à cause de la licence & des débauches auxquelles s’adonnoient ces ribauds.

Le roi des ribauds étoit le chef des sergens de l’hôtel du roi, il avoit lui-même son prevôt ou préposé qui exécutoit ses ordres, ses fonctions consistoient à chasser de la cour les vagabons, filoux, femmes débauchées, ceux qui tenoient des brelands & autres gens de mauvaise vie, que l’on comprenoit tous sous le nom de ribauds ; il avoit soin que personne ne restât dans la maison du roi pendant le dîner & le souper, que ceux qui avoient bouche à cour, & d’en faire sortir tous les soirs ceux qui n’avoient pas droit d’y coucher ; enfin il prêtoit main-forte à l’exécution des jugemens qui étoient rendus par le bailli du palais ou autre, qui avoit alors la jurisdiction à la suite de la cour.

Quelques-uns croient que le roi des ribauds fut supprimé en 1422 que le prevôt de l’hôtel lui succéda ; d’autres disent qu’il ne fut établi qu’en 1475.

Mais Boutillier qui florissoit en 1459, parle du roi des ribauds, comme étant encore existant ; & d’un autre côté, les historiens nous apprennent que le prevôt de l’hôtel étoit déja établi dès 1455, puisque les grandes chroniques de l’abbaye de saint Denis rapportent qu’en cette année, Jean de la Gardette prevôt de l’hôtel, arrêta sur le pont de Lyon le roi y étant, Otho, Castellan, Florentin, Argentier de S. M. & que le prevôt de l’hôtel assista en 1458 au jugement du procès du duc d’Alençon ; ainsi cet officier & le roi des ribauds existans en même tems, l’un ne peut avoir succedé à l’autre.

Le roi des ribauds qui étoit ordinairement l’un des archers du prevôt de l’hôtel, se trouva par la suite confondu parmi les archers de ce prevôt, ses sergens subsisterent encore quelque tems sous le prevôt de l’hôtel ; mais ils furent aussi supprimés, lorsque Louis XI. créa des gardes sous le prevôt de l’hôtel.

Il résulte aussi de ce qui vient d’être dit, que le prevôt de l’hôtel n’a pas non plus succedé aux prevôts des maréchaux qui exerçoient leur office à la suite de la cour, puisque du tems de Tristan l’Hermite, lequel vivoit encore en 1472, & qui est le dernier qui ait exercé cet office, il y avoit déja un prevôt de l’hôtel ; il existoit même, comme on l’a déja vû, avant 1455.

Le prevôt de l’hôtel prêtoit autrefois serment entre les mains du chancelier de France. Le sieur de Richelieu fut le premier qui le prêta entre les mains du roi, ainsi que cela s’est toujours pratiqué depuis ce tems.

L’office de grand-prevôt de France, qui est uni à celui de prevôt de l’hôtel, est aussi fort ancien. Les provisions de messire François du Plessis, seigneur de Richelieu, vingt-unieme prevôt de l’hôtel, nous apprennent que la charge de grand-prevôt de l’hôtel fut possédée avant lui par le sieur Chardion qui exerçoit dès 1524. Il fut peut-être le premier des grands-prevôts, à-moins que cette charge n’eût été créée pour Tristan & pour Monterad ; on croit que ce dernier posséda la charge de grand-prevôt depuis qu’il se fut démis de celle de prevôt de l’hôtel.

Comme la charge de grand-prevôt paroissoit éteinte à cause qu’il n’y avoit pas été pourvu depuis la mort de Monterad, le roi, par les provisions de M. de Richelieu, la rétablit en sa faveur pour la tenir conjointement avec celle de prevôt de l’hôtel.

Par un arrêt de conseil du 3 Juin 1589, le roi déclara n’avoir jamais entendu & qu’il n’entendoit pas qu’à l’avenir la qualité de grand-prevôt fût attribuée à d’autre qu’au prevôt de son hôtel & grand-prevôt de France ; ce qui a encore été confirmé par deux autres arrêts.

Le tribunal de la prevôté de l’hôtel est composé dudit prevôt de plusieurs autres officiers, savoir de deux lieutenans-généraux civils, criminels & de police qui servent alternativement, l’un à Paris, l’autre à la cour, un procureur du roi, un substitut, un greffier-receveur des consignations, deux commis-greffiers, un trésorier-payeur des gages, douze procureurs, quatorze huissiers, trois notaires, dont deux ont été créés en 1543 à l’instar de ceux de Paris pour la suite de la cour & des conseils du roi ; le troisieme a été établi par commission du conseil.

Outre ces officiers de robe, le prevôt de l’hôtel a sous lui un lieutenant-général ordinaire d’épée, quatre autres lieutenans d’épée, douze capitaines exempts, & quatre-vingt-huit gardes, un maréchal des logis, un trompette ; il y a aussi un lieutenant & deux gardes qui servent près de M. le garde des sceaux, & un garde détaché auprès & sous les ordres de chaque intendant de province.

La jurisdiction de la prevôté de l’hôtel connoît en premiere instance des causes civiles de toutes les personnes qui sont à la suite de la cour, conformément aux édits, déclarations & reglemens concernant cette jurisdiction, l’appel de ses jugemens en matiere civile se releve au grand-conseil.

Le prevôt de l’hôtel est juge sans appel de toutes les causes criminelles & de police qui surviennent à la suite de la cour.

Les officiers de la prevôté de l’hôtel ont aussi la manutention de la police dans les lieux où se trouve la cour, y font porter les vivres & denrées, y mettent le taux, connoissent des malversations dans les logemens à la craie & de tout ce qui concerne les voitures publiques de la cour.

Ces mêmes officiers ont droit de jurisdiction, & d’instrumenter chacun en ce qui concerne leurs fonctions dans les maisons royales & leurs dépendances, hôtels d’équipages des seigneurs, chez les officiers du roi & de la reine étant dans leur quartier de service, chez les commis des bureaux des ministres dans les villes & endroits où la cour se trouve, à l’exclusion de toutes autres jurisdictions & officiers ordinaires.

Ils jouissent de tous les privileges des commensaux de la maison du roi. Voyez Miraulmont, le traité de la police, Brillon au mot prevôt, & le mémoire imprimé en 1758, sur la jurisdiction de la prevôté de l’hôtel. (A)

Prevôt de l’île de France, qu’on appelle communément prevôt de l’île simplement par abréviation, est le prevôt des maréchaux, qui a pour district l’étendue de pays qu’on appelle l’île de France. Il fait dans ce pays les mêmes fonctions que les autres prevôts des maréchaux font chacun dans la province de leur département, & juge les cas prevôtaux arrivés dans son district, avec les officiers du présidial à Paris. Ce prevôt n’a précisément que l’île de France pour son département, il y a un autre prevôt pour le surplus de la généralité de Paris, qu’on appelle le prevôt de la généralité de Paris, & qui a son siege à Melun. Voyez Prévôt des maréchaux. (A)

Prevôt de la marine est un officier établi dans les principaux ports du royaume, pour tenir la main à l’exécution des ordonnances concernant la marine. Il a un lieutenant, un exempt, un prevôt du roi, un greffier, des archers ; il reçoit les dénonciations des deserteurs, instruit le procès contre eux, & le rapporte au conseil de marine ou son lieutenant.

Ces prevôtés de la marine ont été établies par édit d’Avril 1704, dans les ports de Brest, Rochefort, Marseille, Dunkerque, le Havre, Port-Louis & Bayonne. (A)

Prevôt des marchands est un magistrat qui préside au bureau de la ville, pour exercer avec les échevins la jurisdiction qui leur est confiée.

L’office de prevôt des marchands est municipal ; on ne connoît que deux prevôts des marchands en France, celui de Paris & celui de Lyon, ailleurs le chef du bureau de la ville est communément nommé maire.

En 1170, une compagnie des plus riches bourgeois de Paris établit dans cette ville une confrairie sous le titre de confrairie des marchands de l’eau.

Ils acheterent des abbesse & religieuses de Haute-Bruvere une place hors de la ville, & fonderent leur confrairie dans l’église de ce monastere. Cet établissement fut confirmé par des lettres-patentes de la même année.

Quelques-uns prétendent néanmoins que l’établissement de la prevôté des marchands à Paris remonte jusqu’au tems des Romains ; que les marchands de Paris fréquentant la riviere, par laquelle se faisoit alors presque tout le commerce, formoient dès-lors entr’eux un college ou communauté sous le titre de nautæ parifiaci. Suivant un monument qui fut trouvé en 1710 en fouillant sous le chœur de l’église de Notre-Dame, il est à croire que ces nautes avoient un chef qui tenoit la place qu’occupe aujourd’hui le prevôt des marchands.

Quoi qu’il en soit de cette origine, il est certain que l’institution du prevôt des marchands est fort ancienne.

Il paroît que dans les commencemens ceux de la confrairie des marchands qui furent choisis pour officiers, étoient tous nommés prevôts des marchands, c’est-à-dire préposés, præpositi mercatorum aquæ, c’est ainsi qu’ils sont nommés dans un arrêt de l’an 1268, rapporté dans les olim.

Dans un autre arrêt du parlement de la Pentecôte en 1273, ils sont nommés scabini, & leur chef magister scabinorum.

Il y en avoit donc dès-lors un qui étoit distingué des autres par un titre particulier, & qui est aujourd’hui représenté par le prevôt des marchands.

En effet, dans l’ancien recueil manuscrit des ordonnances de police de Paris, qui fut fait du tems de S. Louis, les échevins & leur chef sont désignés sous ces différens titres, li prevost de la confrairie des marchands & li echevins ; li prevost & li jurés de la marchandise ; li prevost & li jurés de la confrairie des marchands ; ailleurs il est nommé le prevôt de la marchandise de l’eau, parce qu’en effet la jurisdiction à la tête de laquelle il est placé n’a principalement pour objet que le commerce qui se fait par eau.

Il devoit être présent à l’élection qui se faisoit par le prevôt Paris ou par les auditeurs du châtelet de quatre prud’hommes, pour faire la police sur le pain, & il partageoit avec les prud’hommes la moitié des amendes.

C’étoit lui & les échevins qui élisoient les vendeurs de vins de Paris, ils avoient le droit du cri de vin, & levoient une imposition sur les cabaretiers de cette ville. Le prevôt avoit la moitié des amendes auxquelles ils étoient condamnés ; c’étoit lui qui recevoit la caution des courtiers de vin.

Il avoit conjointement avec le prevôt de Paris inspection sur le sel.

On l’appelloit aussi à l’élection des jurés de la marée & du poisson d’eau douce.

Il étoit pareillement appellé, comme le prevôt de Paris, pour connoître avec les maîtres des métiers de la bonté des marchandises amenées à Paris par les marchands forains.

On l’appella aussi au parlement en 1350, pour faire une ordonnance de police concernant la peste.

Il recevoit avec plusieurs autres officiers le serment des jurés du métier des bouchers & chandeliers.

On trouve que dans plusieurs occasions le prevôt des marchands fut appellé à des assemblées considérables.

Par exemple, en 1370 il fut appellé à une assemblée pour faire un reglement sur le pain ; & en 1379 à une autre assemblée, où il s’agissoit de mettre un impôt sur la marée.

Il assista le 21 Mai 1375 à l’enregistrement de l’édit de la majorité des rois.

Mais le 27 Janvier 1382, à l’occasion d’une sédition arrivée à Paris, Charles VI. supprima le prevôt des marchands & l’échevinage de la ville de Paris, & réunit le tout à la prevôté de la même ville, ensorte qu’il n’y eut plus alors de prevôt des marchands, ni des échevins ; ce qui demeura dans cet état jusqu’au premier Mars 1388, que le roi établit le prevôt des marchands & les échevins, mais il paroît que la jurisdiction ne leur fut rendue que par une ordonnance de Charles VI. du 20 Janvier 1411.

Le prevôt des marchands préside à cette jurisdiction.

Il est nommé par le roi, & sa commission est pour deux ans ; mais il est continué trois fois, ce qui fait en tout huit années de prevôté.

Cette place est ordinairement remplie par un magistrat du premier ordre.

Le prevôt des marchands a le titre de chevalier. Il porte dans les cérémonies la robe de satin cramoisi. Voyez le recueil des ordonnances de la huitieme race, le traité de la police, & les mots Bureau de la ville, Échevins, Échevinage. (A)

Prevôt des maréchaux de France, ou, comme on dit vulgairement par abréviation, prevôt des maréchaux, est un officier d’épée établi pour battre la campagne avec d’autres officiers & cavaliers ou archers qui lui sont subordonnés, afin de procurer la sûreté publique ; il est aussi établi pour faire le procès à tous vagabonds, gens sans aveu & sans domicile, & même pour connoître en certains cas des crimes commis par des personnes domiciliées.

On peut rapporter aux Romains la premiere institution de ces sortes d’officiers, les Romains ayant des milices destinées à battre la campagne, & pour arrêter les malfaiteurs & les livrer aux juges ; les chefs de ces milices étoient appellés latrunculatores.

En France, les comtes étoient pareillement chargés de veiller à la sûreté des provinces.

Les baillifs & sénéchaux qui leur succéderent furent chargés du même soin. Le prevôt de Paris qui tient le premier rang entre les baillifs avoit pour ce service 220 sergens à cheval qui venoient tous les jours à l’ordre, & une compagnie de cent maîtres qui battoit continuellement la campagne, & à la tête de laquelle il se trouvoit lui-même dans les occasions importantes. Les baillifs & sénéchaux faisoient la même chose chacun dans leur province.

Il n’y avoit jusqu’au tems de François I. que deux maréchaux de France ; ce prince les augmenta jusqu’à quatre. Ils commandoient les armées avec le connétable, comme ses lieutenans, & en chef lorsqu’il étoit absent. La jurisdiction militaire attachée à ce commandement étoit exercée sous leur autorité par un prevôt qui devoit être gentilhomme, & avoit commandé ; il étoit à la suite des armées ; & en tems de paix, il n’avoit point de fonction.

Charles VI. fixa ce prevôt des maréchaux à la suite de la cour d’autant que sous son regne la cour ne fut presque point séparée de l’armée. Cet arrangement subsista sous les regnes suivans, on a même fait de ce prevôt des maréchaux l’un des grands officiers de la couronne sous le titre de grand-prevôt de France.

Cet officier unique ne pouvant veiller sur toutes les troupes qui étoient tant en garnison qu’à l’armée, envoyoit de côté & d’autre ses lieutenans, pour informer des excès commis par les gens de guerre.

Louis XI. permit en 1494 au prevôt des maréchaux de commettre en chaque province un gentilhomme pour le représenter avec pouvoir d’assembler, selon les occasions, les autres nobles & autres gens du pays pour s’opposer aux gens de guerre, aventuriers & vagabonds débandés des armées, courant les champs, volant & opprimant le peuple, les prendre & saisir au corps, & les rendre aux baillifs & sénéchaux pour en faire justice.

Dans la suite ces commissions furent érigées en offices pour diverses provinces, tellement que vers la fin du regne de Louis XI. il ne resta presque aucune province qui n’eut un prevôt des maréchaux.

Chacun de ces prevôts eut la liberté de se choisir des lieutenans, & un certain nombre d’archers pour servir sous ses ordres.

Dans les grands gouvernemens, tels que ceux de Guyenne, Normandie, Picardie, les prevôts des maréchaux prirent le titre de prevôts généraux avec le surnom de la province ; ceux des moindres provinces furent simplement prevôt d’un tel lieu ; on les appella prevôts provinciaux.

Ils n’avoient d’abord de jurisdiction que sur les gens de guerre, suivant l’édit de François I. du mois de Janvier 1514 : en 1536 & 1537, il y eut des lettres qui leur attribuerent jurisdiction sur les voleurs, vagabonds, & dans cas appellés depuis prevôtaux ; mais ces commissions n’étoient que pour un tems.

Ce ne fut que par un édit du 3 Octobre 1544 que François I. accorda pour la premiere fois aux prevôts des maréchaux par concurrence & prévention avec les baillifs & sénéchaux, la justice, correction & punition des gens de guerre qui desemparoient le service ou les garnisons, & de tous les vagabonds & autres malfaiteurs qui tiennent les champs, & y commettent des vols, des violences ou autres semblables crimes.

Il rétablit en 1546 un prevôt des maréchaux pour la ville, prevôté, vicomté & élection de Paris, & pour les élections de Senlis, Beauvais, Clermont, Montfort-Lamaury & Estampes.

Les prevôts des marchands étant ainsi obligés de résider dans leurs provinces ; on établit d’autres prevôts des maréchaux pour la suite des troupes ; ce sont ceux qu’on appelle prevôts de l’armée.

Le prevôt général de Guyenne ayant négligé ses fonctions, son office fut supprimé ; on créa en sa place trois vice-sénéchaux, à chacun desquels on donna pour département une partie de la Guienne.

Il y eut encore de semblables offices établis dans quelques autres sénéchaussées sous le même titre de vice-sénéchaux, & dans quelques bailliages sous le titre de vice-bailliss ; présentement ils ont tous le titre de prevôt des maréchaux.

Les prevôts provinciaux ou particuliers furent supprimés par l’édit du mois de Novembre 1544 ; il y en eut pourtant depuis quelques-uns de rétablis, mais présentement il n’y en a plus, si ce n’est dans la province de Bourgogne.

Les prevôts généraux des maréchaux, qui sont présentement au nombre de trente-un, ont tous le titre d’écuyer & de conseillers du roi, avec voix délibérative dans les affaires de leur compétence, quand ils ne seroient pas gradués.

Ils ont rang & séance aux présidiaux après le lieutenant-criminel du siege.

Il ne peuvent posseder en même tems aucun autre office.

Pour les fautes qu’ils peuvent commettre dans leurs fonctions, ils ne sont justiciables que du parlement.

Ils ont ordinairement un assesseur pour leur servir de conseil, & quelquefois aussi un lieutenant. Il y a aussi en quelques endroits un procureur du roi pour la jurisdiction de la maréchaussée ; ailleurs c’est le procureur du roi au présidial qui fait cette fonction.

La compétence & les fonctions des prevôts des maréchaux ont été fixées par divers réglemens, notamment par des lettres-patentes du 5 Février 1549, 14 Octobre 1563, Août 1564, ordonnance de Moulins en 1566, par l’ordonnance criminelle de 1670, enfin, par la déclaration du 5 Février 1731, qui forme le dernier état sur cette matiere.

Suivant cette déclaration, ils connoissent de tous crimes commis par vagabonds & gens sans aveu, qui n’ont ni profession, ni métier, ni domicile certain, ni bien pour subsister, & ne peuvent être avoués, ni faire certifier de leurs bonnes vie & mœurs. Ils doivent arrêter les gens de cette qualité, quand ils ne seroient prévenus d’aucun autre crime ou délit, pour leur être leur procès fait suivant les ordonnances. Ils doivent aussi arrêter les mendians valides de la même qualité.

Ils connoissent aussi des crimes commis par ceux qui ont été condamnés à peine corporelle, bannissement, ou amende honorable, mais non de l’infraction de ban, si ce n’est que la peine en eût été par eux prononcée.

Ils ont aussi la connoissance de tous excès, oppressions, ou autres crimes commis par gens de guerre, tant dans leur marche que dans les lieux d’étapes, ou d’assemblée, ou de séjour pendant leur marche ; des déserteurs d’armée, de ceux qui les auroient suborné, ou qui auroient favorisé ladite désertion, quand même les accusés de ce crime ne seroient pas gens de guerre.

Tous les crimes dont on vient de parler, qui ne sont prevôtaux que par la qualité des personnes, sont de la compétence des prevôts des maréchaux, quand même ces crimes seroient commis dans les villes de leur résidence.

Outre ces cas prevôtaux par la qualité des personnes, ils connoissent de ceux qui sont prevôtaux par la matiere du crime, savoir, du vol sur les grands chemins, sans que les rues des villes & fauxbourgs soient à cet égard réputées grands chemins. Ils connoissent de même des vols faits avec effraction, lorsqu’ils sont accompagnés de port d’armes ou violence publique, ou lorsque l’effraction se trouve avoir été faite dans les murs de clôture ou toîts des maisons, portes & fenêtres extérieures, quand même il n’y auroit eu ni port d’armes, ni violence publique ; des sacrileges accompagnés des circonstances marquées ci-dessus à l’égard du vol avec effraction ; des séditions, émotions populaires, attroupemens & assemblées illicites avec port d’armes ; des levées de gens de guerre sans commission du roi ; & de la fabrication ou exposition de fausse monnoie. Il n’y a point d’autres crimes qui par leur nature soient réputés cas prevôtaux.

Les prevôts des maréchaux ne peuvent connoître des crimes mentionnés dans l’article précédent, lorsqu’ils ont été commis dans la ville & fauxbourgs de leur résidence.

Les présidiaux ont la concurrence avec eux, excepté pour ce qui concerne les déserteurs, subornateurs, & fauteurs d’iceux.

En cas de concurrence, les présidiaux & même les baillis & sénéchaux ont la préférence, s’ils ont informé ou decreté avant eux ou le même jour. La même chose a lieu pour tous les autres juges royaux ou seigneuriaux quant aux crimes qui ne sont pas prevôtaux de leur nature.

Les ecclésiastiques ne sont sujets en aucun cas à la jurisdiction des prevôts des maréchaux.

Les gentils-hommes jouissent du même privilege, à-moins qu’ils ne s’en fussent rendus indignes par quelque condamnation à peine corporelle, bannissement & amende honorable.

Les secrétaires du roi & officiers de judicature dont les procès criminels sont portés à la grand’chambre du parlement, ne sont pas non plus justiciables des prevôts des maréchaux.

Il suffit que l’un des accusés ne soit pas leur justiciable, pour qu’ils doivent s’abstenir de connoître de l’affaire, quand même la compétence auroit été jugée en leur faveur.

Ils peuvent néanmoins informer & decreter contre ceux qui ne sont pas leurs justiciables, à la charge de renvoyer le procès aux juges qui en doivent connoître.

Lorsque les cas prevôtaux ont été commis dans une ville où il y a parlement, ou dans les fauxbourgs, les prevôts des maréchaux n’en peuvent connoître, quand même ils ne résideroient pas dans ce lieu, à-moins qu’il ne fût question de cas prevôtaux par leur nature.

La compétence des prevôts des maréchaux doit être jugée au présidial le plus prochain.

Quand le jugement de compétence est en leur faveur, ils doivent ensuite juger le procès au siege royal le plus prochain, quand même ce ne seroit pas un présidial.

Les jugemens rendus par les prevôts des maréchaux sont toujours en dernier ressort.

Outre les cas dans lesquels ils ont jurisdiction, ils doivent arrêter tous criminels pris en flagrant délit, ou à la clameur publique.

Ils sont aussi obligés de prêter main-forte à l’exécution des jugemens.

Les captures qu’ils font hors les cas qui sont de leur compétence, ne leur attribuent aucune jurisdiction. Voyez Chenu, Joly, Guenois, Néron, le traité de la police, & les articles Maréchaux de France, Maréchaussée. (A)

Prevôt, (Cour des Monnoies.) Les prevôts sont une espece d’officiers subalternes dans les monnoies de France. Il y en a de deux sortes : les prevôts des ouvriers & tailleresses, & ceux des monnoyers. Ils sont à vie, & se font par élection.

C’est au prevôt des ouvriers de se charger des lames d’or, d’argent & de cuivre, pour les leur distribuer, afin qu’ils les taillent au coupoir, & qu’ils leur donnent les autres façons qui les rendent flaons, c’est-à-dire, propres à recevoir la marque qui leur fait avoir cours dans le public. Le prevôt des monnoyers en fait autant des flaons ; & c’est de sa main qu’ils les reçoivent pour les frapper au balancier. L’un & l’autre répond des lames ou des flaons, tant qu’ils restent entre leurs mains. (D. J.)

Prevôt de Paris, est un magistrat d’épée qui est le chef du châtelet, ou prevôté & vicomté de Paris, justice royale ordinaire de la capitale du royaume.

L’établissement de cet office remonte jusqu’à Hugues Capet ; la ville de Paris & tout le territoire qui en dépend, étoient alors gouvernés par des comtes qui réunissoient en leur personne le gouvernement politique & militaire, l’administration de la justice & celle des finances. Ils rendoient la justice en personne dans Paris, & avoient sous eux un vicomte qui n’étoit pas juge de toute la ville, mais seulement d’une petite portion qui formoit le fief de la vicomté & d’un certain territoire au-dehors. Hugues Capet qui étoit d’abord comte de Paris, étant parvenu à la couronne en 987, y réunit le comté de Paris qu’il tenoit en fief ; & l’office de vicomte ayant été supprimé vers l’an 1032, le prevôt de Paris fut institué pour faire toutes les fonctions du comte & du vicomte : c’est pourquoi le titre de vicomté est toujours demeuré joint avec celui de prevôté de Paris.

Le prevôt de Paris fut donc institué non pas seulement pour rendre la justice, il étoit aussi chargé comme les comtes du gouvernement politique & des finances dans toute l’étendue de la ville, prevôté & vicomté de Paris.

On ne doit pas le confondre avec les autres prevôts royaux, qui sont subordonnés aux baillis sénéchaux. Il n’a jamais été subordonné à aucun bailli ou sénéchal, ni même au bailli de Paris, tandis qu’il y en a eu un. Il précede même tous les baillis & sénéchaux, & a plusieurs prérogatives qui lui sont particulieres.

Jean le Cocq dit que le prevôt de Paris est le premier dans la ville après le prince & messieurs du parlement qui représentent le prince, qu’il précede tous les baillis & sénéchaux ; & l’auteur du grand coutumier dit qu’il représente la personne du roi au fait de la justice.

Aussi voit-on que cette place a toujours été possédée par des personnes de distinction, & même par les plus grands seigneurs du royaume.

Le premier qui soit connu se nommoit Etienne. Il souscrivit en 1060 & 1067 deux chartes de fondation de saint Martin, faites par Henri I. & Philippe I. suivant l’usage où étoient alors nos rois de faire souscrire leurs chartes par leurs principaux officiers. Il y est qualifié Stephanus, præpositus parisiensis.

Philippe-Auguste établit en 1192 pour prevôt de Paris Anselme de Garlande, fils de Guillaume qui étoit dapifer, ou grand-maître de la maison de Louis le Gros, & d’une maison des plus distinguées qu’il y eût alors.

On voit dans plusieurs chartes que nos rois, en parlant du prevôt de Paris, l’appelloient par excellence notre prevôt, ensorte qu’il étoit le prevôt du roi ; c’est ainsi qu’il est qualifié dans une charte de Louis le Gros en 1126, qui le commit pour rendre en son nom à l’évêque de Paris certains droits, comme cela se pratiquoit alors.

En 1134, le même roi Louis le Gros donna aux bourgeois de Paris le privilege de pouvoir faire arrêter leurs débiteurs forains, & attribua la connoissance de ce privilege au prevôt de Paris & à ses successeurs : ad hæ sint, est-il dit, in perpetuum adjutores.

Il avoit autrefois son sceau particulier comme tous les autres magistrats, dont il scelloit les actes de sa jurisdiction contentieuse & volontaire ; ce qui suffisoit alors pour les rendre authentiques sans autre signature.

Vers la fin du regne de Philippe-Auguste, on introduisit l’abus de donner les bailliages & les prevôtés royales à ferme. La prevôté de Paris ne fut pas exempte de ce désordre, il y eut aussi des prevôts fermiers ; on voit même qu’en 1245 & en 1251 elle étoit tenue par deux marchands qui en exerçoient collectivement les fonctions. Ces prevôts fermiers ne jugeoient point, cela leur étoit même défendu ; ils convoquoient seulement les parties, les avocats leur donnoient conseil pour les causes qui se jugeoient en l’audience, ils jugeoient par leur avis. On prétend que c’est de-là que vient le serment que les avocats prêtoient ci-devant au châtelet ; lorsqu’il s’agissoit de faits & de preuves, il renvoyoit aux commissaires ; si c’étoit un point de droit, il renvoyoit aux conseillers qui jugeoient en la chambre civile.

La prevôté de Paris ne demeura dans cet état que pendant 30 ans, dans un besoin extrème d’argent, sur la fin du regne de Philippe-Auguste, sous celui de Louis VIII. & pendant la minorité de saint Louis. Dès que ce prince fut en âge de gouverner par lui-même, il réforma cet abus pour sa capitale, ce qui n’eut lieu pour les provinces que plus d’un siecle après, de sorte que l’office de prevôt de Paris en reçut un grand éclat ; ce magistrat ayant été commis par nos rois pour visiter les provinces, & y réprimer les désordres que faisoient les baillis & sénéchaux fermiers. C’est ce que l’on voit dans plusieurs ordonnances de la troisieme race, où le prevôt de Paris est nommé visiteur & réformateur par tout le royaume.

Ce fut en 1254 que saint Louis retira à lui la prevôté de Paris ; il la sépara pour toujours des fermes de son domaine, & la donna en garde à Etienne Boileau, ou Boisleve, homme de grand mérite, & lui assigna des gages pour lui & ses successeurs.

Depuis ce tems, ceux qui remplissoient les fonctions de cet office ne prenoient ordinairement dans leurs provisions que le titre de garde de la prevôté de Paris & non celui de prevôt, quelques uns prétendant que le roi lui-même étoit prevôt de Paris ; mais depuis 1685 on n’a plus fait de difficulté de donner le titre de prevôt de Paris au magistrat qui en fait les fonctions.

Saint Louis débarassa aussi le prevôt de Paris du soin de recevoir les actes de jurisdiction volontaire & de les faire expédier, en créant à cet effet soixante notaires.

Il paroît par des ordonnances & réglemens généraux de 1302, 1320, 1327 & 1420, que le prevôt de Paris rendoit autrefois assidument la justice en personne. L’ordonnance du châtelet de l’an 1485 lui enjoint d’être au châtelet à sept heures du matin, & d’y être tous les jours que les conseillers du parlement y seront. Un arrêt de réglement du 22 Juin 1486 lui enjoignit d’aller à Corbeil pour y tenir ses assises en personne. Il lui étoit même défendu d’avoir des lieutenans qu’en cas de maladie ou autre légitime empêchement, & alors il les choisissoit à sa volonté ; il commettoit des auditeurs qui lui faisoient le rapport des causes importantes ; il jugeoit les procès avec ses conseillers qu’il choisissoit conjointement avec M. le chancelier & quatre conseillers du parlement ; il commettoit aussi à la place des auditeurs, greffiers, procureurs, notaires, sergens ; il n’a cessé de nommer ces différens officiers qu’à mesure qu’ils ont été ériges en titre d’office.

Dans les affaires de la prevôté de Paris qui étoient portées au parlement, & dans lesquelles le roi se trouvoit intéressé, c’étoit le prevôt de Paris qui parloit pour le roi. Lett. hist. sur le parlem. tom. II.

Le gouvernement militaire ne fut séparé de la prevôté, que sous François I. & le prevôt de Paris a toujours conservé le droit de convoquer & de commander le ban & l’arriere-ban, & de connoître des contestations qui arrivent à ce sujet.

Le bailliage de Paris, que François I. avoit établi en 1522, pour la conservation des privileges royaux de l’université, fut réuni à la prevôté de Paris en 1526.

L’ordonnance de Moulins, art. 21. veut que le prevôt de Paris, & les baillis & sénéchaux des provinces, soient de robe courte & gentilshommes, & de l’âge & suffisance requise par les ordonnances, entendant que lesdits prevôts, baillis & sénéchaux puissent entrer & présider en leur siege, tant en l’audience qu’au conseil, & que les sentences & commissions soient expédiées en leur nom.

En 1674, lorsque la jurisdiction du châtelet fut séparée en deux, on créa un prevôt de Paris pour le nouveau siege du châtelet ; & par un autre édit du mois d’Août de la même année, l’ancien office de Paris fut supprimé, & le roi en créa un nouveau pour l’ancien châtelet, pour jouir par ces deux prevôts des mêmes dignités, rangs, séances, honneurs, prérogatives & prééminences dont jouissoit l’ancien prevôt de Paris. Les choses demeurerent dans cet état jusqu’au mois de Septembre 1684, que le nouveau châtelet ayant été supprimé & réuni à l’ancien, les deux offices de prevôts de Paris furent par ce moyen réunis ; & le roi créa & rétablit, en tant que besoin seroit, l’ancien office de prevôt, dont le duc de Coislin avoit été le dernier pourvu & non reçu, pour jouir des mêmes honneurs, rangs, séances & droits dont il jouissoit avant la suppression. Il permit de plus à celui qui en seroit pourvu, de prendre le titre de conseiller en ses conseils.

Pour pouvoir être pourvu de l’office de prevôt de Paris, il faut être né dans cette ville : il y a une ordonnance exprès à ce sujet, qui est rapportée dans Joly, tom. II. p. 1827.

Les principales prérogatives dont jouit présentement le prevôt de Paris, sont :

1°. Qu’il est le chef du châtelet ; il y représente la personne du roi pour le fait de la justice : en cette qualité, il est le premier juge ordinaire, civil & politique de la ville de Paris, capitale du royaume. Il peut venir sieger quand il le juge à-propos, tant au parc civil, qu’en la chambre du conseil, & y a voix délibérative, droit que n’ont plus les baillis & sénéchaux d’épée. Il n’a pas la prononciation à l’audience, mais lorsqu’il y est présent, la prononciation se fait en ces termes : M. le prevôt de Paris dit, nous ordonnons, &c. Il signe les délibérations de la compagnie, à la chambre du conseil.

2°. Il a une séance marquée au lit de justice, au-dessous du grand-chambellan. Du Tillet, des grands, dit que quand le roi est au conseil au parlement, que le prevôt de Paris se place aux piés du roi, au-dessous du chambellan, tenant son bâton en main, couché sur le plus bas degré du trône ; mais que quand le roi vient à l’audience, le prevôt de Paris, tenant un bâton blanc à la main, est au siege du premier huissier ; étant à l’entrée du parquet, comme ayant la garde & défense d’icelui, à cause de ladite prevôté ; que c’est lui qui tient le parquet fermé : les capitaines des gardes n’ont que la garde des portes de la salle d’audience.

On trouve un grand nombre d’anciennes ordonnances, qui sont adressées au prevôt de Paris, auquel le roi enjoignoit de les faire publier, ce qu’il faisoit en conformité de ces lettres.

Suivant une ordonnance du mois de Février 1327, on voit que c’étoit lui qui mettoit les conseillers au châtelet ; qu’il mandoit quand il vouloit au châtelet les conseillers de ce siege ; qu’il pouvoit priver de leur office les officiers de son siege qui manquoient à leur devoir, puis en écrire au roi pour savoir sa volonté. Il paroît même qu’il fut nommé pour la réformation des abus du châtelet. On mettoit les procès du châtelet dans un coffre dont il avoit la clé, & c’étoit lui qui en faisoit la distribution ; c’étoit lui qui instituoit les notaires, & qui nommoit les sergens à cheval.

Il étoit chargé en 1348, de faire observer dans son ressort, les ordonnances sur le fait des monnoies. Il avoit le tiers des confiscations ; & si le roi faisoit remise d’une partie de la confiscation, le prevôt de Paris n’en avoit pas moins son tiers.

Il avoit inspection sur tous les métiers & marchandises ; c’est pourquoi il étoit appellé avec les maîtres des métiers pour connoître de la bonté des marchandises amenées à Paris par les marchands forains.

Il moderoit la taxe que le prevôt des marchands & les échevins de la ville de Paris levoient sur les Cabaretiers de cette ville, lorsque cette taxe étoit trop forte.

Les Bouchers lui devoient une obole tous les dimanches qu’ils coupoient de la viande.

Les anciens statuts des métiers portoient qu’il pourroit y faire des changemens lorsqu’il le jugeroit à propos ; on voit même qu’il en dressoit de nouveaux, appellant à cet effet avec lui le procureur du roi & le conseil du châtelet ; & même du tems du roi Jean, cette inspection s’étendoit sur le sel.

Il avoit aussi alors inspection sur tout ce qui concernoit la marée ; c’étoit lui qui élisoit les jurés de la marée & du poisson d’eau douce ; il recevoit le serment des prud’hommes du métier de la marée : les vendeurs de marée donnoient caution devant lui.

C’étoit lui qui faisoit exécuter les jugemens du concierge & bailli du palais en matiere criminelle. Lorsqu’il s’agissoit du criminel laïc, les officiers de sa justice le livroient hors la porte du palais au prevôt de Paris pour en faire l’exécution ; ils retenoient seulement les meubles des condamnés.

Le roi Charles VI. par des lettres du 27 Janvier 1382, supprima la prevôté des marchands de Paris, l’échevinage & le greffe de cette ville, & ordonna que leur jurisdiction seroit exercée par le prevôt de Paris, auquel il donna la maison-de-ville, située dans la place de Greve, afin que le prevôt de Paris eût une maison où il pût se retirer lui & ses biens, & dans laquelle ceux qui seroient dans le cas d’avoir recours à lui, comme à leur juge, pussent le trouver ; & il ordonna que cette maison seroit nommée dans la suite la maison de la prevôté de Paris.

L’auteur du grand coutumier qui écrivoit sous le regne de Charles VI. dit que le prevôt de Paris est le chef du châtelet, & institué par le roi, & qu’il représente sa personne quant au fait de justice.

Jean le Cocq (Joannes Galli), célebre avocat de ce tems-là, & qui fut aussi avocat du roi, dit en plaidant en 1392, une cause pour le roi contre l’évêque de Paris, au sujet d’un prisonnier qui avoit été reconnu dans une église par le prevôt de Paris, dit que ce prevôt étoit le premier après le roi dans la ville de Paris, & après MM. du parlement qui représentent le roi ; qu’il lui appartenoit de conserver & défendre les droits royaux, & que ce que le prevôt de Paris avoit fait, c’étoit en conservant les droits du roi & ceux de son office, qui lui avoient été adjugés par arrêt.

Dans ce même siecle, en 1350, le roi Jean commit le prevôt de Paris pour rendre hommage à l’évêque de Paris des châtellenies de Tournan & de Torcy en Brie, comme avoit dejà fait Louis le Gros en 1126 ; il est toujours qualifié præpositus nosier, le prevôt du roi.

Il a la garde du parquet & le droit d’assister aux états généraux, comme premier juge ordinaire & politique de la capitale du royaume.

3°. Il a un dais toujours subsistant au châtelet, prérogative dont aucun autre magistrat ne jouit, & qui vient de ce qu’autrefois nos rois, & notamment S. Louis, venoient souvent au châtelet pour y rendre la justice en personne.

4°. Le prevôt de Paris est le chef de la noblesse de toute la prevôté & vicomté, & la commande à l’arriere-ban, sans être sujet aux gouverneurs, comme le sont les baillis & sénéchaux.

5°. Il a douze gardes, appellés sergens de la douzaine, qui doivent l’accompagner soit à l’auditoire, ou ailleurs par la ville & dans toutes les cérémonies. Ce droit lui fut accordé des 1309, par Philippe-le-Bel. L’habillement de ces gardes est un hocqueton ou espece de cotte d’armes : ils sont armés de hallebardes. Le prevôt de Paris a été maintenu en possession de ces gardes & de leur habillement, par un arrêt solemnel du 27 Juin 1566, comme premier juge ordinaire de la ville de Paris.

6°. Son habillement qui est distingué, est l’habit court, le manteau & le collet, l’épée au côté, un bouquet de plumes sur son chapeau ; il porte un bâton de commandant, couvert de toile d’argent ou de velours blanc.

7°. Il vient dans cet habillement à la tête de la colonne du parc civil, en la grand-chambre du parlement, à l’ouverture du rôle de Paris, & après l’appel de la cause, il se couvre de son chapeau, ce qui n’est permis qu’aux princes, ducs & pairs, & à ceux qui sont envoyés de la part du roi.

8°. Suivant une ordonnance de Charles VI. en 1413, pour être prevôt de Paris il faut être né dans cette ville ; tandis qu’au contraire cette même ordonnance défend de prendre pour baillis & sénéchaux, ceux qui sont natifs du lieu.

9°. Les ordonnances distinguent encore le prevôt de Paris des baillis & sénéchaux, en le désignant toujours nommément & avant les baillis & senéchaux, lorsqu’on a voulu le comprendre dans la disposition, ou l’en excepter.

10°. Il connoît du privilege qu’ont les bourgeois de Paris, de faire arrêter leurs débiteurs forains ; il est le conservateur des privileges de l’université ; il a la connoissance du sceau du châtelet, attributif de jurisdiction ; & c’est de lui que plusieurs communautés tiennent leurs lettres de garde gardienne.

11°. Il est installé dans ses fonctions par un président à mortier & quatre conseillers de grand’chambre, deux laïcs & deux clercs, tant au parc civil qu’au présidial, en la cambre du conseil & au criminel. Il doit faire présent d’un cheval au président qui l’a installé. Les cérémonies qui s’observent à sa réception & installation, sont au long détaillées dans le dictionn. des arrêts au mot châtelet.

M. de Segur, actuellement prevôt de Paris, le jour de sa réception en la grand’chambre, qui fut le 7 lévrier 1755, vint au palais en carrosse avec deux autres carrosses de suite, accompagné de ses douze hoquetons, de tout le guet à pié, & de la compagnie de robe-courte. Après sa réception en la grand’chambre, il alla avec le même cortege au châtelet pour y être installé. Après la lecture de ses provisions, M. le président Molé qui l’installoit, lui dit de prendre place. Il se mit après les deux conseillers laïcs, qui étoient à la droite du président : le lieutenant civil & les conseillers au châtelet restent en place. Le président fait appeller deux placets, & continue les causes au lendemain en ces termes, la cour a continué la cause à demain au parc civil.

12°. Il est reçu au payement du droit annuel de sa charge, sur le pié de l’ancienne évaluation, sans être tenu de payer aucun prêt.

Le payement même de l’annuel se fait fictivement, en vertu d’une ordonnance de comptant donnée par le roi annuellement à cet effet ; la même chose se pratique pour les trois lieutenans généraux, les deux particuliers, le procureur du roi, le premier avocat du roi, les quarante-huit commissaires, les officiers & archers du prevôt de l’île, de la robe courte, du guet à cheval, du guet à pié.

13°. Il a plusieurs lieutenans, dont trois ont le titre de lieutenant général, savoir les lieutenans civil, criminel, & de police, deux lieutenans particuliers, un lieutenant criminel de robe-courte ; il y avoit aussi autrefois le chevalier du guet, qui devoit être reçu par le prevôt, & qui est aujourd’hui remplacé par un commandant.

14°. L’office de prevôt de Paris ne vaque jamais ; lorsque le siége est vacant, c’est le procureur général du roi qui le remplit ; c’est lui que l’on intitule dans toutes les sentences & commissions, & dans tous les contrats, comme garde de la prevôté de Paris, le siége vacant.

Le prevôt de Paris jouit encore de beaucoup d’autres honneurs & prérogatives ; on peut consulter à ce sujet ce qui est dit ci-devant aux mots Chatelet, Conseillers au Chatelet, Lieutenant civil, Lieutenant criminel de robe-courte, Montre du Chatelet. Voyez aussi le recueil des ordonnances de la troisieme race, le recueil de Joly, & celui de Fontanon, & les mémoires imprimés en 1723 pour M. le comte d’Esclimont qui étoit prevôt de Paris.

Depuis la surséance de la charge de chevalier du guet, ordonnée par arrêt du conseil du 31 Mars 1733, le prevôt de Paris a été commis par autre arrêt du 31 Juillet audit an, pour recevoir le serment des officiers & archers du guet.

Le prevôt de Paris a le droit d’avoir un piquet du guet chez lui, & d’y faire monter la garde.

Anciennement il avoit la fonction d’assigner les pairs dans les procès criminels. Voyez le recueil appellé les grands procès criminels, & le Godefroy, in-fol. & in 4°. c’est le cérémonial françois. Voyez le recueil des ordonnances de la troisieme race, Joly, Néron, l’ancien style du châtelet (gothique) les memoires imprimés pour M. le comte d’Esclimont, prevôt de Paris. (A)

Prevôt provincial, est un prevôt des maréchaux attaché à une petite province, & dépendant d’un prevôt général, dont le district s’étend dans tout un grand gouvernement : il y en avoit autrefois dans toutes les provinces ; mais ils furent supprimés en 1544 ; il n’en reste plus qu’en Bourgogne. Voyez ci-devant Prevôt des maréchaux. (A)

Prevôt royal, præpositus, est un officier qui est le chef d’une jurisdiction royale, appellée prevôté.

En quelques endroits les premiers juges sont appellés châtelains ; en Normandie on les appelle vicomtes ; en Languedoc & en Provence, on les appelle viguiers, vicarii, comme tenans la place du comte ; & en effet, les prevôts, vicomtes, ou viguiers, furent établis à la place des comtes, lorsque ceux-ci se furent rendus propriétaires & seigneurs de leur gouvernement.

Les prevôts sont inférieurs aux baillifs & sénéchaux ; ceux-ci ont l’inspection sur eux ; ils avoient même autrefois le pouvoir de les destituer ; mais Philippe-Auguste en 1190, leur défendit de le faire, à-moins que ce ne fût pour meurtre, rapt, homicide, ou trahison.

Philippe-le-Bel ordonna en 1302, que les baillifs ne soutiendroient point les prevôts à eux subordonnés, qui commettroient des injustices, vexations, usures, ou autres excès ; qu’au contraire ils les corrigeroient de bonne foi, selon qu’il paroîtroit juste.

Les prevôts devoient, suivant cette même ordonnance, prêter serment de ne rien donner à leurs supérieurs, à leurs femmes, leurs enfans, leurs domestiques, leurs parens, leurs amis, & qu’ils ne seroient pas à leurs services.

Il n’étoit pas au pouvoir du prevôt de taxer les amendes.

Il ne pouvoit pas non plus poursuivre le payement de son dû dans sa justice.

Une prevôté étoit la recette des droits du roi dans une certaine étendue de pays ; il ne devoit y avoir qu’un prevôt, ou deux au plus dans chaque prevôté ; cela s’observoit encore en 1351.

Ces prevôtés étoient d’abord vendues, c’est-à-dire, affermées à l’enchere par les baillifs & sénéchaux, auxquels il étoit défendu de les vendre à leurs parens ni à des nobles.

Les baillifs faisoient serment de n’affermer les prevôtés du roi qu’à des personnes capables.

Saint Louis ne voulut plus que la prevôté de Paris fût donnée à ferme comme par le passé ; mais il la donna en garde en 1251, à Etienne Boileau.

Les autres prevôtés continuerent néanmoins encore pendant quelque tems d’être affermées.

En effet, Louis Hutin accorda en 1315 aux habitans d’Amiens, que dans l’étendue du bailliage de cette ville, les prevôtés ne pourroient être affermées pour plus de trois ans, & que ceux qui les auront une fois affermées ne pourroient plus les tenir ensuite.

Philippe de Vaiois commença à réformer cet abus ; il ordonna en 1331, que la prevôté de Laon ne seroit plus donnée à ferme, mais qu’elle seroit donnée à garde avec gages compétens.

Par une ordonnance du 15 Février 1345, il annonça qu’il desiroit fort pouvoir supprimer tous les prevôts ; & que dans la suite les prevôtés fussent données en garde à des personnes suffisantes.

Et en effet, par des lettres du 20 Janvier 1346, il fit une défense générale de plus donner les prevôtés à ferme, attendu les grands griefs & dommages que les sujets du roi en souffroient ; il ordonna que dorénavant elles seroient données en garde à personnes convenables qui seroient élues en forme prescrite par cette ordonnance pour les desservir, & que les clergies des prevôtés, c’est-à-dire les greffes, seroient annexées & adjointes aux prevôtés, en payement des gages des prevôts.

Cependant ce reglement si sage n’eut pas longtems son exécution ; parce que, selon que le disoit Philippe de Valois, la justice en étoit bien moins rendue ; que les domaines dépérissoient ; que d’ailleurs les prevôts & gardes ne pouvoient par eux-mêmes faire aucune grace ni rémission d’amendes, même dans les cas les plus favorables ; mais qu’il falloit se pourvoir par-devers le roi, ce qui ne pouvoit se faire sans de grands frais. C’est pourquoi par une autre ordonnance du 22 Juin 1349, il ordonna que les prevôtés, les sceaux, & les greffes des bailliages & prévôtés, seroient donnés à ferme à l’enchere ; mais cependant qu’elles ne seroient pas adjugées au plus offrant, à-moins que celui-ci ne fût reconnu pour homme capable & de bonne renommée, par le jugement des personnes sages des lieux où seroient ces fermes.

Il régla encore depuis en 1351, que les prevôtés ne seroient données à ferme qu’à des gens habiles, sans reproches, & non clercs ; que les personnes notées ne pourroient les avoir, quand même elles en donneroient plus que les autres ; que les prevôts fermiers ne pourroient pas taxer les amendes. Cette fonction fut réservée aux baillifs ou aux échevins, selon l’usage des lieux.

Charles V. n’étant encore que régent du royaume, défendit aussi de plus donner les prevôtés à ferme ; il en donna pour raison dans une ordonnance de 1356, que les fermiers exigeoient des droits exorbitans.

Mais l’année suivante il ordonna le contraire, & déclara naturellement que c’étoit parce qu’elles rapportoient plus, lorsqu’elles étoient données à ferme, & parce que quand elles étoient données en garde, la dépense exédoit souvent la recette.

En conséquence, on faisoit donner caution aux prevôts fermiers, lesquels étoient comptables du prix de leur ferme, & l’on faisoit de trois ans en trois ans des enquêtes sur la conduite de ces prevôts.

Il leur étoit défendu de faire commerce ni personnellement, ni par des personnes interposées, ni d’être associés avec des commerçans.

Les gens d’église, les nobles, les avocats, les sergens d’armes, & autres officiers royaux, ne pouvoient être reçûs à prendre à ferme les prevôtés, de peur qu’ils n’empêchassent d’autres personnes d’y mettre leurs encheres, & que par leur puissance ils n’opprimassent les habitans de ces prevôtés.

Cependant on faisoit toujours des plaintes contre les prevôts fermiers ; c’est pour les faire cesser qu’il fut ordonné par des lettres du 7 Janvier 1407, qu’il seroit fait dans la chambre des comptes avec quelques conseillers du grand-conseil & du parlement, & quelques-uns des trésoriers, une élection de prevôts en garde que l’on choisiroit entre ceux qui demeuroient dans les lieux mêmes ou dans le voisinage, & qu’il leur seroit pourvu de gages.

Depuis ce tems, les prevôts royaux, ont été créés en titre d’office, de même que les autres officiers de judicature.

Les prevôts royaux connoissent en premiere instance, de même que les autres juges royaux, de toutes les affaires civiles & criminelles entre leurs justiciables, & par appel, des sentences rendues dans les justices des seigneurs de leur ressort.

Il faut néanmoins excepter les cas royaux, dont la connoissance appartient aux baillifs & sénéchaux, & celle des cas prevôtaux, qui appartient aux prevôts des maréchaux de France. Voyez la déclaration du 5 Février 1731. Voyez le recueil des ordonnances de la troisieme race, Joly, Chenu, Fontanon, Néron, & les articles Chatelain, Juge royal, Cas royaux, Prevôt des maréchaux. (A)

Prevôt de la santé, est un officier de police qu’on établit extraordinairement dans les tems de contagion pour faire exécuter les ordres de la police, notament pour s’informer des lieux où il y a des malades, les faire visiter par les médecins & chirurgiens, faire transporter les pauvres attaqués de la contagion dans les hôpitaux, faire inhumer les morts ; & on établit quelquefois plusieurs de ces prevôts ; on leur donne aussi les noms de capitaine ou bailli de la santé. Ils ont un certain nombre d’archers pour se faire obéir. Voyez le tr. de la police, tome I. p. 652. (A)

Prevôt seigneurial ou subalterne, est un juge de seigneur, qui a le titre de prevôt ; en d’autres endroits, ces juges sont appellés châtelains ou baillifs. Voyez Juge de seigneur, Justice seigneuriale. (A)

Prevôt de salle, (Escrime.) celui qui seconde un maître en fait d’armes, & qui exerce les écoliers pour les fortifier dans l’art de l’escrime.