L’Encyclopédie/1re édition/LIS

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LIS, lilium, s. m. (Hist. nat. Botan.) genre de plante dont la fleur forme une espece de cloche. Elle est composée de six pétales plus ou moins rabattues en dehors ; il y a au milieu un pistil qui devient dans la suite un fruit oblong ordinairement triangulaire & divisé en trois loges. Il renferme des semences bordées d’une aîle & posées en double rang les unes sur les autres. Ajoutez aux caracteres de ce genre la racine bulbeuse & composée de plusieurs écailles charnues qui sont attachées à un axe. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Lis-asfodele, lilio asphodelus, genre de plante à fleur liliacée monopétale ; la partie inférieure de cette fleur a la forme d’un tuyau, la partie supérieure est divisée en six parties. Il sort du fond de la fleur un pistil qui devient dans la suite un fruit presqu’ovoïde, qui a cependant trois côtes longitudinales ; il est divisé en trois loges & rempli de semences arrondies. Ajoutez à ces caracteres que les racines ressemblent à des navets. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Lis blanc, (Botan.) c’est la plus commune des 46 especes de Tournefort du genre de plante qu’on nomme lis. Cette espece mérite donc une description particuliere. Les Botanistes nomment le lis blanc lilium album vulgare, J. Bauh. 2. 685. Tournefort, I. R. H. 369. lilium album, flore erecto, C. B. P. 76.

Sa racine est bulbeuse, composée de plusieurs écailles charnues, unies ensemble, attachées à un pivot, & ayant en dessous quelques fibres. Sa tige est unique, cylindrique, droite, haute d’une coudée & demie, garnie depuis le bas jusqu’au sommet de feuilles sans queues, oblongues, un peu larges, charnues, lisses, luisantes, d’un verd-clair, plus petites & plus étroites insensiblement vers le haut, & d’une odeur qui approche du mouton bouilli quand on les frotte entre les doigts. Ses fleurs ne se développent pas toutes ensemble ; elles sont nombreuses & rangées en épi à l’extrémité de la tige sur une hampe : elles sont belles, blanches, odorantes, composées de six pétales épais, recourbés en dehors, & représentant en quelque maniere une cloche ou une corbeille ; leur centre est occupé par un pistil longuet à trois sillons, d’un blanc verdâtre & de six étamines de même couleur, surmontées de sommets jaunâtres. Le pistil se change en un fruit oblong, triangulaire, partagé en trois lobes remplis de graines roussâtres, bordées d’un feuillet membraneux, posées les unes sur les autres à double rang.

Les feuilles, les tiges & les oignons de cette plante sont remplis d’un suc gluant & visqueux : on la cultive dans nos jardins pour servir d’ornement, à cause de sa beauté & de sa bonne odeur. On dit qu’elle vient d’elle-même en Syrie.

Ses fleurs & ses oignons sont d’usage en Medecine ; le sel ammoniacal qu’ils possedent, joint à une médiocre portion d’huile, forme ce mucilage bienfaisant d’où les oignons tirent leur vertu pour amollir un abscès, le conduire en maturité & à suppuration. On les recommande dans les brûlures, étant cuits sous la cendre, pilés & mêles avec de l’huile d’olive ou des noix fraîches. (D. J.)

Lis de saint Bruno, liliastrum, genre de plante à fleur liliacée, composée de six pétales, & ressemblant à la fleur du lis pour la forme. Il sort du milieu de la fleur un pistil qui devient dans la suite un fruit oblong : ce fruit s’ouvre en trois parties qui sont divisées en trois loges & remplies de semences anguleuses. Ajoutez aux caracteres de ce genre que les racines en sont en forme de navets, & qu’elles sortent toutes d’un même tronc. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Lis-jacinthe, lilio hiacinthus, genre de plante à fleur liliacée, composée de six pétales, & ressemblant à la fleur de la jacinthe ; ce pistil devient dans la suite un fruit terminé en pointe, arrondi dans le reste de son étendue, & ayant pour l’ordinaire trois côtes longitudinales. Il est divisé en trois loges, & rempli de semences presque rondes. Ajoutez à ces caracteres que la racine est composée d’écailles comme la racine du lis. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Lis-narcisse, lilio-narcissus, genre de plante à fleur liliacée, composée de six pétales disposés comme ceux du lis : le calice, qui est l’embrion, devient un fruit ressemblant pour la forme à celui du narcisse. Ajoutez à ces caracteres que le lis-narcisse differe du lis en ce que sa racine est bulbeuse & composée de plusieurs tuniques, & qu’il differe aussi du narcisse en ce que sa fleur a plusieurs pétales. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Lis des vallées, (Botan.) genre de plante que les Botanistes nomment lilium convallium, & qu’ils caractérisent ainsi. L’extrémité du pédicule s’insere dans une fleur monopétale en cloche pendante en épi, & divisée au sommet en six segmens. L’ovaire croît sur la sommité du pédicule au-dedans de la fleur, & dégénere en une baie molle, sphérique, pleine de petites semences rondes, fortement unies les unes aux autres.

Observons d’abord que le nom de lis est bien mal donné à ce genre de plante, qui n’a point de rapport aux lis : observons ensuite que le petit lis des vallées, lilium convallium minus de Bauhin, n’appartient point à ce genre de plante, car c’est une espece de similax.

M. de Tournefort compte sept especes véritables de lis des vallées, dont la principale est le lis des vallées blanc, lilium convallium album, que nous appellons communément muguet. Quelquefois sa fleur est incarnate, & quelquefois double, panachée. Voyez la description de cette plante au mot Muguet. (D. J.)

Lis des vallées, (Mat. med.) Voyez Muguet.

Lis ou Lis blanc, (Chimie, Pharmacie, & Mat. med.) La partie aromatique de la fleur des lis n’en est point séparable par la distillation ; l’eau qu’on en retire par ce moyen n’a qu’une odeur desagréable d’herbe, & une très-grande pente à graisser. Voyez Eaux distillées. L’eau de lis que l’on trouve au rang des remedes dans toutes les pharmacopées, & qui est fort vantée, comme anodine, adoucissante, &c, doit donc être bannie des usages de la Medecine.

L’huile connue dans les dispensaires sous les noms d’oleum lirinum, crinimum & susinum, qu’on prépare en faisant infuser les fleurs des lis dans de l’huile d’olive, est chargée de la partie aromatique des lis, mais ne contient pas la moindre portion du mucilage qui constitue leur partie vraiment médicamenteuse. L’huile de lis n’est donc autre chose que de l’huile d’olive chargée d’un parfum leger, peu capable d’altérer les vertus qui lui sont propres, & par conséquent un remede qui n’augmente pas la somme des secours pharmaceutiques. Voyez Huile.

Les fleurs de lis cuites dans l’eau & réduites en pulpe, sont employées utilement dans les cataplasmes émolliens & calmans ; mais l’on emploie beaucoup plus communément les oignons de cette plante préparés de la même maniere ; ces oignons sont un des ingrédiens les plus ordinaires des cataplasmes dont on se sert dans les tumeurs inflammatoires qu’on veut conduire à suppuration ; souvent même ce n’est qu’un oignon de lis cuit sous la cendre qu’on applique dans ces affections extérieures. Ce remede réussit presque toujours : ses fréquens succès en ont fait un médicament domestique dont personne n’ignore les usages. (b)

Lis de pierre, lilium lapideum ; (Hist. nat.) nom donné par quelques naturalistes à une pierre sur laquelle on voit en relief un corps qui ressemble à un lis. M. Klein croit que c’est une espece d’étoile de mer dont l’analogue vivant est étranger à nos mers ; il l’appelle entrochus ramosus. Il trouve que par la figure il a du rapport avec l’étoile de mer de Magellan. Quelques auteurs croient que cette pierre est la même que l’encrinos ou l’encrinite dont Agricola donne la description, aussi-bien que Lachmund dans son Oryctographia Hildesheimensis. Voyez l’article Encrinite. Cependant Scheuchzer appelle pierre de lis un fragment de corne d’ammon, sur la surface ou l’écorce de laquelle on voyoit comme imprimées des fleurs de lis semblables à celles qui sont dans les armes de France. Mais il paroît que c’est l’encrinos qui doit à juste titre rester en possession du nom de pierre de lis ou de lis de pierre. (—)

Lis, ou Notre Dame du Lis, (Hist. mod.) ordre militaire institué par Garcias IV. roi de Navarre, à l’occasion d’une image de la sainte Vierge, trouvée miraculeusement dans un lis, & qui guerit ce prince d’une maladie dangereuse. En reconnoissance de ces deux événemens, il fonda en 1048 l’ordre de Notre Dame du Lis, qu’il composa de trente-huit chevaliers nobles, qui faisoient vœu de s’opposer aux Mores, & s’en réserva la grande-maîtrise à lui & à ses successeurs. Ceux qui étoient honorés du collier, portoient sur la poitrine un lis d’argent en broderie, & aux fêtes ou cérémonies de l’ordre, une chaîne d’or entrelacée de plusieurs M M gothiques, d’où pendoit un lis d’or émaillé de blanc, sortant d’une terrasse de sinople, & surmonté d’une grande M, qui est la lettre initiale du nom de Marie. Favin, hist. de Navarre.

Lis, (Hist. mod.) nom d’un ordre de chevalerie institué en 1546 par le pape Paul III. qui chargea les chevaliers de défendre le patrimoine de saint Pierre, contre les entreprises de ses ennemis, comme il avoit établi pour le même but, ceux de saint Georges dans la Romagne, & de Lorette dans la Marche d’Ancone, quoique Favin rapporte l’origine de celui-ci à Sixte V. & le fasse de quarante-un ans postérieur à la création qu’en fit Paul III. selon d’autres auteurs.

Les chevaliers du lis étoient d’abord au nombre de cinquante, qu’on appelloit aussi participans, parce qu’ils avoient fait au pape un présent de 25000 écus, & on leur avoit assigné sur le patrimoine de saint Pierre, un revenu de trois mille écus, outre plusieurs privileges dont ils furent décorés. La marque de l’ordre est une médaille d’or que les chevaliers portent sur la poitrine ; on y voit d’un côté l’image de Notre-Dame du Chesne, ainsi nommée d’une église fameuse à Viterbe, & de l’autre un lis bleu céleste sur un fond d’or, avec ces mots : Pauli III. Pontific. Max. Munus. Paul IV. confirma cet ordre en 1556, & lui donna le pas sur tous les autres. Les chevaliers qui le composent portent le dais sous lequel marche le pape dans les cérémonies lorsqu’il n’y a point d’ambassadeurs de princes pour faire cette fonction. Le nombre de ces chevaliers fut augmenté la même année jusqu’à trois cens cinquante. Bonanni, catalog. equestr. ordin.

Lis d’argent, (Monnoie.) monnoie de France, qu’on commença à fabriquer ainsi que les lis d’or, en Janvier 1656. Les lis d’argent, dit le Blanc, pag. 387, étoient à onze deniers douze grains d’argent fin, de trente pieces & demie au marc, de six deniers cinq grains trébuchant de poids chacune, ayant cours pour vingt sols, les demi-lis pour dix sols, & les quarts de lis pour cinq sols. (D. J.)

Lis d’or, (Monnoies.) piece d’or marquée au revers du pavillon de France. Ce fut une nouvelle espece de monnoie, dont la fabrication commença en Janvier 1656, & ne dura guere. Le lis d’or, dit le Blanc, pag. 387, pese trois deniers & demi-grain. Ils sont au titre de vingt-trois carats un quart, à la taille de soixante & demi au marc, pesant trois deniers trois grains & demi trébuchant, la piece, & ont cours pour sept livres. Voilà une évaluation faite en homme de métier, qui nous mettroit en état de fixer avec la derniere exactitude, s’il en étoit besoin, la valeur du lis d’or, vis-à-vis de toutes les monnoies de nos jours. Voyez Monnoie. (D. J.)

Lis, fleur de (Blason.) Voyez Fleur-de-lis, & lisez que ces fleurs ont été réduites à trois sous Charles V. & non pas sous Charles VII. Je persiste à regarder la conjecture de Chiflet comme plus hasardée que solide ; mais il est vraissemblable, que ce qui fut long-tems une imagination de peintres, devint les armoiries de France. D’anciennes couronnes des rois des Lombards, dont on voit des estampes fideles dans Muratori, sont surmontées d’un ornement semblable, & qui n’est autre chose, que le fer d’une lance lié avec deux autres fers recourbés. Quoi qu’il en soit, cet objet futile ne valoit pas la peine d’exercer la plume de Sainte-Marthe, de du Cange, de du Tillet & du P. Mabillon. Je ne parle pas de Chiflet, de la Roque, des PP. Tristan de Saint-Amand, Ferrand, Ménestrier & Rousselet, jésuites. Ces derniers écrivains ne pouvoient guere se nourrir d’objets intéressans. (D. J.)

Lis, s. m. (Ourdissage.) c’est la même chose que les gardes du rot, ou les grosses dents qui sont aux extrémités du peigne.

Lis, la (Géogr.) en latin Legia, riviere des pays-bas françois. Elle prend sa source à Lisbourg en Artois, & se jette dans l’Escaut à Gand. On voit que le nom de cette riviere, joint à ceux de l’Escaut, de la Meuse, du Rhin & de la Moselle, dans les vers des poëtes françois, lors des conquêtes de Louis XIV. en Flandres, ils lui disent sans cesse, d’une maniere ou d’autre, également éloignées de la vérité :

Et la Meuse, le Rhin, la Moselle & la Lis,
Admirant vos exploits, tendent les bras aux lis.


(D. J.)