L’Encyclopédie/1re édition/KEBER

KEBER, s. m. (Hist. mod.) noms d’une secte chez les Persans, qui pour la plûpart sont des riches marchands.

Ce mot signifie infidele, de kiaphir, qui en langue turque veut dire renegat ; ou plutôt l’un & l’autre viennent de caphar, qui en chaldéen, en syriaque & en arabe, signifie nier, renier.

Quoiqu’ils soient au milieu de la Perse, & qu’il y en ait beaucoup dans un fauxbourg d’Hispahan, on ne sçait s’ils sont persans originaires, parce qu’ils n’ont rien de commun avec les Persans que la langue. On les distingue par la barbe qu’ils portent fort longue, & par l’habit qui est tout-à-fait différent de celui des autres.

Les kebers sont payens, mais en même tems fort estimés à cause de la régularité de leur vie. Quelques auteurs disent que les kebers adorent le feu comme les anciens Perses : mais d’autres prétendent le contraire. Ils croient l’immortalité de l’ame, & quelque chose d’approchant de ce que les anciens ont dit de l’enfer & des champs Elisées. Voyez Gaures.

Quand quelqu’un d’eux est mort, ils lachent de sa maison un coq, & le chassent dans la campagne ; si un renard l’emporte, ils ne doutent point que l’ame du défunt ne soit sauvée. Si cette premiere preuve ne suffit point, ils se servent d’une autre qui passe chez eux pour indubitable. Ils portent le corps du mort au cimetiere, & l’appuient contre la muraille soutenu d’une fourche. Si les oiseaux lui arrachent l’œil droit, on le considere comme un prédestiné ; on l’enterre avec cérémonie, & on le descend doucement & avec une corde dans la fosse ; mais si les oiseaux commencent par l’œil gauche, c’est une marque infaillible de réprobation. On en a horreur comme d’un damné, & on le jette la tête premiere dans la fosse. Olearius, voyage de Perse.