L’Encyclopédie/1re édition/INSOLUBILITÉ et INSOLUBLE

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 791).
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INSOLUBILITÉ & INSOLUBLE, (Chimie.) l’insolubilité est la propriété d’un corps incapable d’être dissout, ou ce qui est la même chose, résistant invinciblement à l’action menstruelle. Voyez Menstrue.

Cette propriété, ainsi que la propriété opposée à la solubilité, voyez Soluble, ne doit être considérée que dans les corps homogènes & inorganisés, ou dans les vrais aggrégés chimiques, les métaux, les sels, les pierres & terres simples, les verres, &c. Voyez l’article Chimie au commencement ; car une masse formée par la confusion de plusieurs substances hétérogènes, est de sa nature hors de la sphere des corps, dont les chimistes considerent les affinités & les diffinités, & les corps organisés, comme tels, sont aussi des objets non-chimiques.

Ainsi, quoique les corps de ces deux ordres soient de leur nature véritablement & absolument insolubles ; ce n’est pas de l’insolubilité de ces sujets que la Chimie s’occupe ; & c’est même principalement parce qu’ils sont invinciblement insolubles : car comme cette propriété dérobe les sujets qui en sont doués à la plus grande partie des opérations, & par conséquent des recherches chimiques ; & que le grand but de la Chimie, à l’égard des corps qu’elle a trouvés jusqu’a présent insolubles, est de parvenir enfin à les dissoudre ; il est clair qu’elle ne doit compter parmi ses objets que les corps qui sont constitués de façon à ne pas exclure, par leur nature ou essentiellement, l’espoir de les rendre solubles, ou ce qui est la même chose, qui sont essentiellement analogues à d’autres substances déjà reconnues solubles : or c’est dans l’ordre des vrais aggrégés chimiques seulement que se trouvent les substances vraiment solubles.

Il y a, ou du moins on peut concevoir une insolubilité absolue, & une insolubilité relative. La premiere seroit celle d’un corps qu’aucun menstrue, de quelque façon & sous quelque forme qu’il fût appliqué, & de quelque degré de feu qu’il fût animé, ne sauroit attaquer. L’insolubilité relative est celle d’un corps, par rapport à un certain menstrue seulement.

La Chimie ne connoît plus d’insolubilité absolue dans les objets propres ; il n’en est aucun qu’elle ne sache véritablement combiner avec une autre substance. Les pierres & les terres ont été les dernieres substances que l’art ait parvenu à dissoudre ou combiner ; mais enfin il n’en est plus aucune qui n’ait trouvé un dissolvant dans les divers mélanges que le célebre M. Pott a tentés, ensorte qu’il n’est point de substance terreuse qui ne soit soluble par quelque sel, par quelque substance métallique, ou par quelque autre substance terreuse, soit terre proprement dite, soit pierre. Voyez Terre & Pierre.

L’insolubilité relative reside dans tous les sujets chimiques, aussi-bien qu’une solubilité relative, ou pour mieux dire, ne faisant qu’une seule propriété avec cette derniere ; c’est-à-dire, que tout sujet chimique est soluble par tout menstrue approprié, & est insoluble par tout menstrue anomale : car un alkahest, ou une substance combinable avec tous les sujets chimiques quelconques (en ne lui accordant même que cette propriété), est du moins jusqu’à présent un être chimérique. Ces expressions sont familieres dans le langage chimique ; la résine est insoluble par l’eau, la gomme est insoluble par l’huile, l’or par l’eau forte, la glaise pure par les acides, &c.

Nous exposerons la théorie de la solubilité & de l’insolubilité à l’art. Rapport, Chimie. Voyez aussi Solubilité & Menstrue. (b)