L’Encyclopédie/1re édition/HYPOSTASE

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 412-413).

HYPOSTASE, s. f. hypostasis, (Théolog.) est un mot grec qui signifie à la lettre substance ou essence, & en Théologie, personne. Voy. Personne. Ce mot est grec ὑπόστασις, & composé d’ὐπὸ, sub, sous, & ἵστημι, sto, existo, je suis, j’existe, d’où subsistentia.

On dit qu’il n’y a qu’une seule nature en Dieu, & trois Hypostases, ou Personnes. Voyez Trinité, &c.

Le mot d’hypostase est très-ancien dans l’Église. S. Cyrille le répete souvent, aussi-bien qu’union, selon l’hypostase. Il se trouve pour la premiere fois dans une lettre de ce pere à Nestorius, où il l’emploie au lieu de πρόσωπον, que nous rendons ordinairement par celui de personne, & qui n’étoit pas assez expressif. Les philosophes, dit S. Cyrille, ont reconnu trois Hypostases. Ils ont étendu la Divinité jusqu’à trois Hypostases, & employé même quelquefois le terme de Trinité ; de sorte qu’il ne leur manqueroit que d’admettre la consubstantialité des trois Hypostases, pour faire entendre l’unité de la nature divine à l’exclusion de toute triplicité par rapport à la distinction de nature, & de ne plus prétendre qu’il soit nécessaire de concevoir aucune infériorité respective des hypostases.

Ce mot excita autrefois de grands démêlés entre les Grecs, & puis entre les Grecs & les Latins.

Dans le concile de Nicée, hypostase est la même chose que substance ou essence. Ainsi c’étoit une hérésie de dire que Jesus-Christ est d’une autre hypostase que le Pere, parce que hypostase signifioit essence ; mais l’usage changea. Voyez Arien & Arianisme.

Dans le besoin qu’on eut de s’exprimer contre les Sabelliens, les Grecs choisirent le terme d’hypostase, & les Latins celui de personne, & ce changement fut la source de la contestation. La phrase τρεῖς ὑποστάσεις, dont se servoient les Grecs, scandalisa les Latins, qui ont accoûtumé de rendre le mot ὑπόστασις par celui de substantia. La stérilité de la langue latine, en matiere de Théologie, ne leur fournissoit qu’un seul mot pour deux grecs οὐσία & ὑπόστασις, & les mettoit hors d’état de distinguer l’essence de l’hypostase. Ils aimerent donc mieux se servir du terme de trois personnes que de celui de trois hypostases. On termina enfin cette dispute dans un synode qui se tint à Alexandrie vers l’an 362, auquel S. Athanase assista ; & depuîs ce tems-là, les Latins ne se sont plus fait un scrupule de dire trois hypostases, ni les Grecs trois personnes. Les Grecs prirent la coûtume de dire μία οὐσία, τρεῖς ὑποστάσεις, une essence, trois subsistances, & les Latins non dans le même sens, una essentia, tres substantiæ, mais, una essentia ou substantia, tres personæ. Ceux qui prenoient le mot d’hypostase dans son ancienne signification, ne pouvoient supporter qu’on admît trois hypostases, c’étoient trois essences divines selon eux, mais ce mot fut expliqué. Ceux qui s’en servoient contre les Sabelliens, déclarerent qu’ils entendoient par-là trois individus, ou trois sujets qui subsistent également, & non pas trois substances ou essences différentes. Dans ce sens, ils reconnoissoient trois hypostases dans une seule essence. D’autres entendoient par essence une nature commune & indéfinie, comme l’humanité à l’égard de tous les hommes en général, & par hypostase une nature singuliere & propre à chaque individu, comme chaque homme en particulier est une modification de la nature ou essence universelle. Mais cette derniere interprétation, que quelques-uns attribuent à S. Basile appliquée à la Divinité, emporteroit le trithéisme ; parce que si les trois Personnes de la Trinité sont trois Hypostases, précisément comme Pierre, Jacques & Jean, il y a manifestement trois Dieux. Diction. de Trévoux.

Hypostase, sedimentum, s. m. (Med.) ce terme grec signifie la partie la plus grossiere de l’urine, qui se dépose ou tend à se déposer au fond du vase, où elle est contenue ; c’est le sédiment de l’urine qui est aussi appellé quelquefois hyposteme, mot qui est par conséquent synonyme d’hypostase. Voyez Urine, Sédiment.