L’Encyclopédie/1re édition/HABILLER

Briasson, David l’aîné, Le Breton, Durand (Tome 8p. 10-11).
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* HABILLER, v. act. & pas. (Gramm.) on dit habiller quelqu’un, habiller un régiment, & s’habiller. Le velours habille bien. Ce peintre sait habiller élégamment sa figure. Habiller un auteur étranger à la françoise. Habiller a dans les Arts des acceptions fort différentes. Habiller un animal en Cuisine, c’est le dépouiller de sa peau, si c’est un quadrupede ; le plumer, évuider, piquer, si c’est un oiseau ; le laver, le vuider, le préparer à être cuit, si c’est un poisson. Chez les Cardeurs, habiller une carde, c’est la monter ou la faire : pour cet effet, on a un instrument appellé le panteur, sur lequel est accroché la peau à des pointes renversées & placées de distance en distance. Voyez l’article Panteur. Les deux bouts de la peau sont tirés chacun par une corde qui va s’entortiller à la branche du maître-brin du panteur. Cette peau ainsi disposée est percée de trous. C’est dans cette derniere opération que consiste tout l’art du faiseur de cardes. Voyez l’article Carde. On ne se sert ni de regle ni de compas ; l’œil seul dirige la main qui pique d’une vîtesse incroyable, laissant entre les trous des intervalles toujours égaux, & faisant les rangées de trous exactement droites & paralleles. L’instrument à percer s’appelle la fourchette ; il fait deux trous à-la-fois : ensuite on fiche les pointes ; on les habille tantôt en passant la pierre sur les pointes & la tirant de gauche à droite & de droite à gauche, afin de les renverser toutes également & du même côté, tantôt en poussant la pierre droit devant soi, & la retirant dans la même direction, pour abattre le tranchant des pointes, tantôt en les redressant avec l’instrument appellé le dresseur, les refendant, &c. ces manœuvres se réiterent jusqu’à ce que la carde soit distribuée en allées bien compassées, les pointes également renversées, & le tranchant parfaitement usé. Pour en venir à l’habillage, tout étant préparé, c’est-à-dire la matiere des pointes coupée & pliée au premier doublet, mise en petits paquets ou tas contigus sur le plateau, & pliée au second doublet arrêté sur le milieu du plateau par un support de bois élevé d’environ un pouce ; le plateau est fixé sur un bloc ; l’habilleur est devant un autre bloc couvert d’un patron de la longueur du feuillet qui sert de contrepoids, quand on passe la pierre. On finit par monter le feuillet sur un bois ou fust à manche & à rebord du même côté. C’est la derniere main de la carde.

Habiller, en Jardinage, c’est avant que de planter les jeunes arbres, les couper de huit ou neuf piés de haut, & visiter leurs racines pour les raccourcir modérément ; il faut ôter toutes celles qui sont brisées, & couper les autres en pié de biche par-dessous, eû égard à la situation où doit être planté l’arbre. N’habillez pas si court, ou n’étronçonnez point, & n’ôtez point le chevelu à-moins qu’il ne soit rompu. C’est une erreur de croire qu’il soit inutile ; il sert beaucoup à la reprise des jeunes plants.

On laissera aux arbres sauvages une tige de six à sept pieds hors de terre. Les arbres fruitiers de haute tige seront rafraîchis dans leur tête, à laquelle on laissera trois ou quatre branches chacune de la longueur de dix à douze pouces ; ce qui forme sa rondeur dès la premiere année.

Les buissons ou nains seront coupés à sept à huit pouces au-dessus de la greffe qu’il faut laisser découverte, c’est-à-dire sans y mettre de terre, mais qu’on enduira de cire ou de mastic.

On prétend qu’il ne faut laisser qu’un seul étage de racines à un arbre, & choisir toujours les plus jeunes & les plus rougeâtres ; les autres étant inutiles. Voyez Racines.

Les arbres levés en motte sont exemts d’être ravalés ; ils conservent leur tête & une partie de leur ramage. Voyez Lever.

Habiller une peau, terme de Marchand Pelletier, c’est la préparer à être employée aux différens ouvrages de Pelleterie. Voyez Pelletier.

Habiller un cuir. terme de Tannerie, c’est lui donner la premiere préparation pour le mettre au tan. Voyez Tanner.

Celui qui habille les peaux s’appelle l’habilleur. Ce terme est fort en usage chez les Pelletiers ; en général il signifie dans les atteliers la personne qui prépare les différentes matieres, denrées, ou marchandises où le terme habiller peut avoir lieu.

Habiller, en terme de Potier, c’est l’action d’ajoûter une oreille, un manche, un pié, au corps d’une piece ; ce qui se fait en déchiquetant la piece de plusieurs coups, pour y insérer l’une des parties que nous venons de nommer.

On habille encore du chanvre, en le passant par le seran. Voyez l’article Chanvre.