L’Encyclopédie/1re édition/EXPILATION
EXPILATION D’HÉRÉDITÉ, (Jurispr.) c’est la soustraction en tout ou partie des effets d’une hérédité jacente, c’est-à-dire non encore appréhendée par l’héritier. Il faut aussi, pour que cette soustraction soit ainsi qualifiée, qu’elle soit faite par quelqu’un qui n’ait aucun droit à la succession ; ainsi cela n’a pas lieu entre co-héritiers.
Ce délit chez les Romains étoit appellé crimen expilatæ hæreditatis, & non pas furtum, c’est-à-dire larcin, parce que l’hérédité étant jacente, il n’y a encore personne à qui on puisse dire que le larcin soit fait. L’héritier n’est pas dépossédé des effets soustraits, tant qu’il n’en a pas encore appréhendé la possession ; & par cette raison l’action de l’avoir appellée actio furti, n’y avoit pas lieu : on usoit dans ce cas d’une poursuite extraordinaire contre celui qui étoit coupable de ce délit.
Cette action étoit moins grave que celle appellée actio furti ; elle n’étoit pas publique, mais privée : c’est-à-dire que celui qui l’intentoit, ne poursuivoit que pour son intérêt particulier, & non pour la vengeance publique.
Le jugement qui intervenoit, étoit pourtant infamant ; c’est pourquoi cette poursuite ne pouvoit être intentée que contre des personnes contre lesquelles on auroit pû intenter l’action furti, si l’hérédité eût été appréhendée ; ainsi cette action n’avoit pas lieu contre la femme qui avoit détourné quelques effets de la succession de son mari : il y avoit en ce cas une action particuliere contr’elle, appellée actio rerum amatarum, dont le jugement n’étoit pas infamant.
Au reste la peine du délit d’expilation d’hérédité étoit arbitraire chez les Romains, comme elle l’est encore parmi nous.
Outre la restitution des effets enlevés, & les dommages & intérêts que l’on accorde à l’héritier, celui qui a soustrait les effets peut être condamné à quelque peine afflictive, & même à mort, ce qui dépend des circonstances ; comme, par exemple, si c’est un domestique qui a soustrait les effets.
L’héritier qui, après avoir répudié la succession, en a soustrait quelques effets, peut être poursuivi pour cause d’expilation d’hérédité.
A l’égard du conjoint survivant, ou des héritiers du prédécédé qui recelent quelques effets, voyez Recelé. Voyez le titre du digeste expilatæ hæreditatis. (A)