L’Encyclopédie/1re édition/ETÉSIENS

ETÉSIENS, (Vents) Hydrogr. & Hist. anc.) Les anciens donnoient le nom d’étésiens, du terme grec ἐτήσιος, qui signifie anniversaire, à des vents dont le souffle se faisoit sentir régulierement chaque année, & rafraîchissoit l’air pendant six ou sept semaines, depuis le solstice d’été jusque dans la canicule. Le regne des vents étésiens étoit annoncé par ceux que l’on nommoit prodromes ou précurseurs, durant quelques jours.

Ces vents mettant de la température dans l’air pendant la saison des chaleurs, la plus commune opinion veut qu’ils soufflent de la bande du nord ; & c’est ainsi que le vent de nord étant le traversier des bouches du Nil, dont le cours en général est du midi au septentrion, les anciens attribuoient aux vents étésiens, pendant Juin & Juillet, le refoulement des eaux du fleuve, qui pouvoit contribuer à son débordement régulier dans la même saison. Le rhumb de ce vent n’est pas néanmoins tellement fixé à cette région du monde, qu’il ne participe de plusieurs autres ; & le nom d’étésiens est appliqué à des vents venans du couchant comme du septentrion. C’est par cette raison que dans plusieurs auteurs anciens, les étésiens sont déclarés favorables sur la Méditerranée, à ceux qui font route d’occident en orient ; & accusés d’être contraires pour la route opposée. C’est ainsi qu’on peut entendre les vents étésiens dans quelques endroits de Cicéron & de Tacite. Aristote ou l’auteur grec, quel qu’il soit, du traité intitulé le Monde, dit formellement que les étésiens tiennent également du vent ζέφυρος comme de l’ἄρκτος ; & Diodore de Sicile, liv. I. ch. xxxjx. étend la bande des vents étésiens jusqu’au couchant d’été. On trouve même dans Pline & dans Strabon, d’après Posidonius, que des vents soufflans de l’est sont appellés étésiens ; mais il est constant qu’en cela ils s’écartent de l’idée la plus générale qu’on doit avoir des vents étésiens : & cette communication du nom d’étésiens à des vents étrangers à la région ordinaire des Etésiens, ne peut être admise ou autorisée, qu’autant que la dénomination en elle-même deviendra propre à tout vent qui soufflera régulierement. Il en seroit de même du nom de vent alisé, qui vient du vieux terme alis, qui signifie réglé, quoiqu’il soit spécialement employé à désigner le vent qui regne sur les mers renfermées entre les tropiques, & qui dans la mer du Sud particulierement, conduit les navigateurs d’orient en occident. Voyez Vent & Alisé. Cet article est de M. d’Anville, de l’académie royale des Inscriptions & Belles-Lettres.