L’Encyclopédie/1re édition/CONQUÊT

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CONQUÊT, s. m. (Jurisp.) dans la signification la plus étendue, est un bien acquis en commun par plusieurs personnes.

Dans quelques pays on confond le terme d’acquêt avec celui de conquêt ; mais dans l’usage le plus général les acquêts sont les biens non propres acquis avant la communauté, au lieu que par le terme de conquêts on entend ordinairement ceux qui ont été acquis pendant la communauté par ceux qui sont communs, ou par l’un d’eux pour tous les autres.

Comme c’est principalement entre conjoints par mariage que la communauté de biens a lieu, c’est aussi le plus souvent par rapport à eux que l’on parle des conquêts. Il y a cependant aussi des conquêts entre d’autres personnes qui sont en communauté ou société tacite, dans certaines coûtumes où ces sortes de communautés ont lieu, telles que celles de Nivernois, Poitou, &c.

Il y a même des conquêts en Normandie, où la communauté de biens n’a point lieu : ces conquêts sont les biens acquis pendant le mariage. L’art. 329. de cette coûtume donne à la veuve la moitié des conquêts faits hors bourgage, & la moitié de ceux faits en bourgage ; en propriété dans le bailliage de Gisors, en usufruit au bailliage de Caux, & le tiers aussi en usufruit dans les autres bailliages & vicomtés, le tout à titre de succession.

On distingue par rapport à la communauté de biens deux sortes de conquêts ; savoir les conquêts meubles, & les conquêts immeubles.

Dans les pays où la communauté de biens a lieu, tous les meubles y entrent de plein droit, même ceux que les conjoints possédoient avant le mariage ; mais il n’y a de conquêts meubles proprement dits que les meubles acquis pendant le mariage.

Les conquêts immeubles sont toutes les terres, maisons, & autres héritages ; les rentes foncieres & constituées, les offices, & autres biens réputés immeubles, acquis, non pas depuis le contrat de mariage, mais seulement depuis le moment de la bénédiction nuptiale jusqu’à la dissolution de la communauté.

Quand on dit que les conquêts immeubles sont les biens acquis en commun pendant la communauté, on entend tout immeuble advenu aux conjoints depuis le mariage, non-seulement par acquisition proprement dite ou contrat de vente, mais aussi par échange ou autre acte contenant aliénation à leur profit, par donation, legs, ou autrement, à l’exception des immeubles échus par succession, soit directe ou collatérale, & de ceux échûs par donation en ligne directe, lesquels sont réputés propres.

L’héritage du côté & ligne de la femme que les conjoints ont retiré pendant le mariage, est réputé conquêt jusqu’à la dissolution de la communauté, tellement que le mari en peut disposer comme d’un conquêt ; mais la dissolution de la communauté arrivant, la femme peut retenir ce bien comme propre, à la charge par elle de rembourser le mi-denier.

Tous conquêts acquis aliquo dato, sont présumés faits des deniers de la communauté.

S’il y a des conquêts faits en différentes coûtumes, ils se reglent tous par le contrat de mariage, ou par la loi qui en tient lieu, relativement à la communauté ; du reste ils se reglent chacun par la loi de leur situation.

Les conquêts faits en Normandie où la communauté de biens n’a pas lieu, ne laissent pas d’entrer dans une communauté stipulée à Paris ou autre coûtume semblable ; ce qui a lieu en vertu de la convention expresse ou tacite, qui ne permet que l’on donne atteinte à la communauté en faisant des acquisitions dans une coûtume qui ne l’admet pas.

Anciennement la femme n’avoit qu’un tiers des conquêts, c’est-à-dire de la communauté en général : sous la troisieme race de nos rois on lui en a accordé la moitié, & tel est l’usage qui s’observe encore présentement.

Le mari & la femme n’ont chacun pas plus de droit sur les conquêts proprement dits, que sur tous les biens meubles & immeubles de la communauté en général. Voyez ce qui est dit ci-devant au mot Communauté (A)

Conquet, (le) Géog. mod. petite ville maritime de France en basse Bretagne, au pays de Cornouailles, avec un bon port.