L’Encyclopédie/1re édition/CASOAR, ou CASUEL
CASOAR, ou CASUEL, s. m. (Hist. nat. Ornith.) oiseau des Indes, qui est aussi appellé emeu ou emé, par les naturels du pays. Voyez Plan. IX. fig. 3. on n’avoit point vû de casoar en Europe avant l’an 1597, & aucun auteur n’en avoit fait mention. Les Hollandois au retour de leur premier voyage, en rapporterent un qui leur avoit été donné comme une chose rare, par un prince de l’île de Java. Le gouverneur de Madagascar en acheta un des marchands qui retournoient des Indes, & il l’envoya à la ménagerie de Versailles en 1671. cet oiseau y vécut quatre ans ; sa description est dans les Mém. de l’Acad, royale des Sciences, Tome III. part. II.
Il avoit cinq piés & demi de longueur depuis le bout du bec jusqu’à l’extrémité des ongles ; la longueur des jambes étoit de deux piés & demi depuis le ventre jusqu’au bout des ongles. La tête & le cou avoient ensemble un pié & demi ; le plus grand des doigts compris l’ongle, avoit cinq pouces de longueur, & l’ongle seul du petit doigt trois pouces & demi. L’aile étoit si petite, que les plumes du dos la cachoient ; toutes les plumes ressembloient fort à du poil, parce que leurs barbes étoient dures, pointues, & clair-semées. Cet oiseau n’avoit pas comme ceux qui volent, des plumes de deux sortes, dont les unes servent au vol, & les autres ne sont que pour couvrir le corps ; il n’en avoit que de celles-ci ; elles étoient doubles pour la plûpart ; elles avoient deux longues tiges qui sortoient d’un même tuyau fort court attaché à la peau ; leur longueur étoit inégale ; quelques-unes de celles du croupion avoient jusqu’à quatorze pouces : on a trouvé de ces plumes doubles dans un aigle & dans un perroquet. Voyez Aigle, Perroquet. Mais celles du casoar avoient encore d’autres particularités ; les barbes qui garnissoient la tige, étoient depuis environ la moitié jusqu’à l’extrémité fort longues, & grosses comme du crin de cheval, sans jetter aucunes fibres ; sa tige est platte, noire, luisante, & par nœuds en-dessous ; il sort de chaque nœud une barbe : enfin les barbes du bout des grandes plumes étoient parfaitement noires, & vers la racine, elles étoient de couleur de gris tanné, plus courtes, plus molles, & jettant de petites fibres comme du duvet ; il n’y avoit que la partie composée de barbes dures & noires qui parût ; l’autre partie composée de duvet en étant recouverte, les plumes du cou & de la tête étoient si courtes & si clair-semées, que la peau paroissoit à découvert, excepté vers le derriere de la tête, où elles étoient plus longues ; le croupion étoit extraordinairement gros ; les plumes dont il étoit garni ne différoient des autres qu’en ce qu’elles étoient plus longues.
Les ailes dépouillées de leurs plumes n’avoient pas trois pouces de longueur : il y avoit au bout cinq piquans de différentes longueur & grosseur, courbés en arc suivant la figure du corps. Ils étoient creux depuis leur racine jusqu’à la pointe, & remplis d’une moelle à peu-près semblable à celle qui se trouve dans les plumes naissantes des autres oiseaux. Ces piquans étoient de longueur différente, selon la disposition & la proportion des doigts de la main ; le plus long avoit onze pouces de longueur, & trois lignes de diametre vers la racine ; ils étoient tous d’un noir fort luisant ; il n’y a aucune apparence que les ailes du casoar lui aident à marcher ; il pourroit plûtôt s’en servir pour frapper comme avec des houssines.
La tête paroissoit petite, parce qu’elle n’étoit pas garnie de plumes ; il y avoit au-dessus une crête haute de trois pouces comme celle d’un casque ; cependant cette crête ne couvroit pas tout le dessus de la tête ; car elle ne commençoit qu’un peu au-delà du milieu du sommet, & finissoit au commencement du bec : le devant de cette crête étoit noirâtre, & le derriere & les côtés de couleur de cire ; partout elle étoit polie & luisante ; le haut étoit mince, n’ayant pas plus de trois lignes, & la base avoit un pouce ; sa substance étoit fort dure, & de la nature de la corne, étant composée de plusieurs lames comme la corne des bœufs. Clusius & Bontius disent que cette crête tombe dans la mue : cependant c’est une partie du crâne, & elle n’est point tombée pendant quatre ans que l’oiseau a été à Versailles. La partie supérieure du bec étoit fort dure par ses deux bords & par le dessus, les entre-deux de chaque côté n’étant garnis que d’une membrane, dans laquelle étoient les trous des narines tout auprès de l’extrémité du bec, qui étoit refendue en trois comme un coq Indien. Le bout de la partie inférieure étoit aussi partagé en trois, & légerement dentelé ; tout le bec étoit d’un gris brun, à l’exception d’une marque verte qui étoit de chaque côté de la partie inférieure du bec, environ vers le milieu de l’œil. Il y avoit une paupiere interne qui se cachoit vers le grand angle : la paupiere inférieure étoit la plus grande ; on y voyoit quantité de poils noirs. Il se trouvoit au bas de la paupiere supérieure un rang de petits poils, & au-dessus un autre rang de poils noirs qui s’élevoient en forme de sourcil ; le trou de l’oreille étoit fort grand, & environné seulement de petites plumes noires ; les deux côtés de la tête autour de l’œil & de l’oreille, étoient de couleur bleue, excepté le milieu de la paupiere inférieure qui étoit blanc.
Le cou étoit de couleur violette, tirant sur la couleur d’ardoise ; il y avoit aussi du rouge par derriere en plusieurs endroits, principalement vers le milieu ; ces endroits rouges étoient plus relevés que le reste par des rides dont le cou étoit entre-coupé obliquement. Vers le milieu du cou par-devant, il y avoit à la naissance des grandes plumes deux appendices formées par la peau, rouges, semblables à celles qui pendent à la partie inférieure du bec des poules, longues d’un pouce & demi, larges de neuf lignes, arrondies par le bout, & de couleur en partie rouge, & en partie bleue.
La peau qui couvre le devant du sternum étoit dure, calleuse, & sans plumes, parce que l’oiseau s’appuie sur cette partie lorsqu’il se repose.
Les cuisses & les jambes étoient couvertes de plumes ; la partie qui tient lieu de tarse & métatarse, étoit extraordinairement grosse, forte, droite, & couverte d’écailles de diverses figures ; il n’y avoit que trois doigts ; ils étoient aussi couverts d’écailles ; celui de derriere manquoit ; les ongles étoient d’une substance dure & solide, noire en-dehors, & blanche en-dedans. Mém. pour servir à l’hist. des animaux, seconde partie. Voyez Oiseau. (I)