Traduction par André Du Ryer.
Antoine de Sommaville (p. 579-581).



LE CHAPITRE DE L’ESPREUVE,
contenant dix-huict verſets,
eſcrit à la Meque.

Quelques Docteurs ont intitulé ce Chapitre de la vocation, parce qu’il traite des femmes qui ont quitté leurs marys pour ſuivre Mahomet, qui ordonne d’eſprouver leur cœur, leur intenſion, & de cognoiſtre leur vocation.


AU Nom de Dieu clement & miſericordieux. O vous qui croyez, n’obeiſſez pas à mes ennemis ny aux voſtres, vous leur tesmoignez de l’amitié lors que vous les rencontrez, neantmoins ils abjurent la verité qui vous a eſté envoyée, ils chaſtient le Prophete & vous auſſi ; & ce parce que vous croyez en Dieu voſtre Seigneur. Ne recherchez pas leur amitié lors que vous combattez pour ma loy, je ſçay ce que vous devez craindre, & vous ne le ſçavez pas, celuy qui fera ce qui eſt deffendu cy-deſſus ſuivra un tres-mauvais chemin, s’ils ont advantage ſur vous ils ſeront vos ennemis, ils eſtendront leurs mains & leurs langues contre vous, ils vous diront des injures, & ſouhaiteront que vous reniez voſtre foy, ſi vous le faites vous ne recevrez point de contentement de vos femmes ny de vos enfans au jour du Jugement, vous ſerez ſeparé d’eux, & Dieu verra tout ce que vous ferez, vous avez vu bel exemple en Abraham & en ceux qui eſtoient avec luy, lors, qu’ils ont dit au peuple, nous ſommes innocens du peché que vous faites d’adorer un autre Dieu que Dieu; Abraham diſoit à ſon pere, je ne demanderay pas pardon à Dieu pour toy, je ne te puis delivrer de ſa punition ſi tu és Idolatre ; Seigneur, toute noſtre confiance eſt en toy, noſtre refuge eſt en ta miſericorde ne protege pas les infidelles contre nous, pardonne nous nos pechez, tu eſt miſericordieux & ſage. Vous avez en eux un bel exemple pour ceux qui craignent Dieu & qui apprehendent le jour du Jugement ; Dieu n’a pas affaire de ceux qui obeïſſent aux infidelles, il n’a beſoin de perſonne, & loüange luy eſt deuë en tous lieux, peut-eſtre qu’il eſtablira à l’advenir une grande amitié entre vous & ceux que vous haiſſez, il eſt tout-Puiſſant, clement & miſericordieux, il ne vous deffend pas la converſation de ceux qui ne combatent pas contre vous pour ſa foy, & qui ne vous chaſſent pas de vos maiſons, je ne vous deffend pas de leur rendre juſtice, il ayme les perſonnes juſtes. Il vous deffend la converſation de ceux qui combattent contre voſtre foy, qui vous chaſſent de vos maiſons, & qui aydent à vous en chaſſer, il vous deffend de leur obeyr & de contracter amitié avec eux, ceux qui leur obeiront auront tres-grand tort. O vous qui croyez en Dieu, lors que les femmes de vos ennemis ſe jetteront de voſtre party, eſprouvez leur conſcience; ſi vous cognoiſſez qu’elles ſoient fidelles, & qu’elles croyent en la loy de Dieu, ne les rendez pas aux infidelles incredules, il ne leur eſt pas permis de les cognoiſtre, ny à elles de les toucher, donnez leur pour ſubſiſter, vous ne pecherés pas de les eſpouſer, ne les eſpousés pas ſelon les ſtatuts des infidelles, demandés leur quelle dote elles veulent avoir, elles vous demanderont ce que vous leur voulés donner, demeurés en d’accord, Dieu le commande de la façon, il ſera voſtre Juge au jour du Jugement, & il ſçait tout ce que vous faites & eſt tres-Sage. Si vos femmes ſe jettent du party des infidelles, & que vous en ſouffriés quelque perte, vous remplacerés cette perte à celuy qui la ſoufrira ſur le butin que vous conquerrés ; craignés Dieu & croyés en la loy de la divine Majeſté. O Prophete, lors que les femmes voudront embraſſer ta Religion avec ferme propos de croire en ſeul Dieu, de ne pas derober, de ne pas paillarder, de ne pas tuer leurs enfans, de ne mentir ny blaſphemer, & d’eſtre obeiſſantes, reçois les avec toy, demande pardon à Dieu pour elles, il eſt clement & miſericordieux. O vous qui croyés, n’obeiſſés pas ceux contre qui Dieu eſt courroucé, ils deſeſperent de leur ſalut comme en ont deſeſperé les impies qui ſont cy-devant mots en les impieté,