Sous les Galeries du Palais-Royal, Chez la petite Lolotte (p. 175-187).
Chapitre XV

Lèvres de Velours, bandeau de début de chapitre
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CHAPITRE XV


LES DÉBUTS DE MISS PIROUETT À PARIS


Nous étions à Paris depuis huit jours, quand nous apprîmes par la voie des journaux, les débuts pour le lendemain de miss Pirouett aux Folies X… La comtesse de Lesbos, surprise que la première visite de la ballerine n’eût pas été pour elle, se demandait si la blonde Miss ne l’avait pas un peu oubliée. Son regain de passion pour Cécile durait toujours, mais ne la prenait qu’à des intervalles périodiques, et elle gardait à la blondinette une large place dans son cœur. La mignonne, avec son air de pucelle, ses yeux si doux, pleins de myosotis et d’amour, son attachement sans bornes pour sa maîtresse, était bien digne d’être la favorite ; ses appas, qui présentaient l’aspect de charmes virginaux, lui gardaient aussi les faveurs de sa maîtresse, et quand des désirs impétueux assaillaient la comtesse, c’était une orgie de caresses inédites, que peut seule inventer une folle Lesbienne, comme l’était Mercédès. L’arrivée de Miss Pirouett allait peut-être faire une diversion, car la comtesse se souvenait avec plaisir des joyeuses folies de la ballerine, qui s’entendait si bien à varier et à pimenter les jeux et les divertissements.

La comtesse m’envoya retenir aux Folies X… une loge d’avant-scène pour le lendemain. Je trouvai tout loué, et nous allions être réduits à assister au spectacle, mêlés dans la salle à la foule des spectateurs, ce à quoi la comtesse ne consentirait pas certainement, malgré son violent désir d’assister aux débuts de Miss Pirouett. Quand je rentrai, fort ennuyé de la mission désagréable que j’avais à remplir, je fus surpris de voir le visage de la comtesse rayonnant, et avant que je n’eusse ouvert la bouche pour m’acquitter de ma commission elle me mit au courant de ce qui la comblait de joie. Elle venait de recevoir la missive suivante, qu’elle me communiqua tout de suite.

Perle des comtesses.

J’arrive à l’instant à Paris ; si je ne veux pas vous voir avant mes débuts, malgré la folle envie que j’ai de vous serrer sur mon cœur, mon cher trésor, c’est que je veux garder toute mon énergie (que je perdrais bien vite dans vos bras) pour vous faire honneur dans mes débuts, devant le Tout-Paris. Envoyez-moi votre coupé vers dix heures, demain soir. Par exemple, je vous défends de vous montrer dans la salle ; si je vous apercevais, l’émotion paralyserait mes moyens, et compromettrait mon succès. Après mes débuts, tout ce que vous voudrez et tant que vous voudrez.

Votre folle adoratrice,

Pirouett.

Heureusement que l’adresse n’était pas au bas de la lettre, sans cela la comtesse eût fait atteler sur le champ. Elle l’aurait bien certainement dénichée, en allant aux informations à son théâtre, mais la réflexion aidant, elle se rendit aux bonnes raisons qu’on lui donnait, et elle se consola en relisant la dernière phrase du billet, si pleine de tendres promesses.

Le lendemain soir, ayant dix heures, un coupé attendait à la sortie des artistes des Folies X… Une tête inquiète se montrait de temps en temps à la portière, interrogeant une petite porte qui s’ouvrait fréquemment, livrant passage à quelque homme ou quelque femme qui s’en allaient droit leur chemin, sans paraître attendre ou chercher quelqu’un. Dix heures sonnèrent à une horloge voisine, puis le quart, la petite porte se rouvrit, et une femme emmitouflée, malgré l’élévation de la température, parut accompagnée d’un homme, le directeur du théâtre, sans doute ; elle s’arrêta, jeta les yeux sur le coupé, puis, saluant l’homme qui lui donnait le bras, elle se dirigea vers la voiture ; la tête qui se montrait à la portière l’avait sans doute renseignée sur ce qu’elle cherchait ; un valet de pied ouvrit la portière, elle se glissa dans le coupé, qui partit aussitôt au trot allongé de ses deux steppers russes.

Nous étions réunis à l’hôtel de l’Avenue de Messine, dans la chambre à coucher de la comtesse, depuis dix heures : les quatre soubrettes, les deux Parisiennes, la princesse russe, qui avaient été avisées par un mot de la comtesse, et votre serviteur, qui est de la famille. La comtesse, impatiente de serrer son amie dans ses bras, était allée l’attendre seule, dans son coupé, à la sortie des artistes. À dix heures et demie, le timbre retentit, la porte cochère s’ouvrit, on entendit le roulement de la voiture sous la voûte, et Lola, qui guettait les pas dans l’escalier, ouvrit à deux battants les portes de la chambre. Les deux amies firent leur entrée de front, se donnant le bras, et se souriant, les yeux dans les yeux, étalant leur bonheur réciproque ; leur air rayonnant disait clairement que les deux chaudes amoureuses, impatientes de s’entr’aimer, avaient dû transformer en boudoir le coupé qui les emportais et la langueur qui était dans tous les traits de la comtesse, montrait qu’elle avait dû se laisser aimer à plusieurs reprises. Miss Pirouett se dégage cependant et vient nous embrasser les uns après les autres, en commençant par le mâle et en finissant par la plus jeune, la blonde Cécile, nous prodiguant, sans préférence marquée, les plus tendres caresses.

Miss Pirouett, après s’être débarrassée de ses dessus les plus gênants, nous raconta qu’elle avait à Paris un engagement d’un mois aux Folies X…, renouvelable à son gré, si son succès était consacré par le public ; et à en juger par les rappels et les applaudissements unanimes de la salle, elle y resterait longtemps, si elle le désirait ; mais elle voulait nous consacrer le meilleur de son talent. Pendant qu’elle discourait, onze heures sonnèrent. Les Parisiennes, dont le temps est compté, n’ayant plus qu’une heure à passer au milieu de nous, veulent la bien employer. Nous, qui avons tout notre temps, nous nous dévouons, nous mettant au service des plus pressées. Sophie, Blanche et Agnès retirent leur pantalon, et montent chacune sur deux tabourets rapprochés ; là, retroussant leurs jupes, elles les prennent dans les mains, découvrant très haut leurs appas antérieurs et postérieurs ; la comtesse et Miss Pirouett, qui sont devant le double autel de Sophie, la première devant, la seconde derrière, viennent réjouir les deux joyaux voisins ; Mina et Lison entourent Blanche ; Cécile et Lola enveloppent Agnès, pendant que je contemple leurs ébats. Les deux pourvoyeuses d’amour de Sophie s’aperçoivent que la mignonne a besoin de stimulants, car, froide comme un marbre, elle reste insensible à toutes leurs caresses. Miss Pirouett se retire de l’embouchure, lève la main et se met à cingler la mappemonde ; mais le centre des opérations est trop élevé, et les claques y arrivent trop timides, pour produire de l’effet.

On fait descendre la princesse qui vient se mettre debout entre les deux groupes ; la comtesse s’agenouille devant le minet. Miss Pirouett, qui me fait signe de venir la suppléer dans son office de bourreau, s’agenouille en travers, du côté droit de la croupe, caresse les fesses de ce côté, fait courir un moment les doigts dans la raie, s’arrête dans le bas, où elle enfonce l’index. La joue qui s’appuie sur la fesse droite, cache ainsi une moitié de la mappemonde, laissant à découvert l’autre moitié, sur laquelle je m’escrime à tour de bras, cinglant vertement du haut en bas l’unique hémisphère qui est à la portée de ma main, et qui rougit à chaque gifle retentissante que je lui décoche. La main levée retombe brutalement de toute la force de mon bras, froissant les chairs, et laissant sur la peau les empreintes rouges des quatre doigts et du pouce. Je vois enfin les fesses se remuer sous la grêle de coups que j’applique à l’une d’elle, et aux deux dernières gifles, qui viennent la cingler, des gouttelettes de sang jaillissent sous mes doigts, comme sous des piqûres d’épingles. La courageuse Russe tient toujours ses vêtements relevés, quand elle n’aurait eu qu’à les lâcher pour mettre fin au châtiment, et elle jouit ainsi troussée, montrant les plus plaisantes mines, tandis que ses deux compagnes de plaisir ont laissé retomber leurs jupes, ensevelissant dans l’ombre les aimables ouvrières de leur bonheur.

Quand Miss Pirouett quitte la place, nous avons sous les yeux un adorable tableau ; la moitié de la mappemonde est à vif, d’un rouge sanguinolent ; l’autre moitié, d’un blanc de neige, faisait avec sa sœur jumelle un plaisant contraste. Comme la princesse tient toujours son derrière découvert, je me figure qu’elle ne veut pas qu’il y ait une jalouse dans les deux jumelles, et sans m’enquérir de ce qu’elle désire, je me mets à changer en roses les lis de la fesse épargnée. Je lui administre une volée de giffles, pendant que Miss Pirouett, qui a pris la place de Mercédès devant le chat de la mignonne, le bouffe si gentiment, si habilement, si tendrement, que je n’ai pas le temps de donner à la fesse que je cingle le ton cramoisi de sa sœur ; car bien que ce soit son second voyage à Cythère, sans un répit, sans reprendre haleine, la princesse fait celui-ci si promptement, que malgré la rigueur de la correction, la fesse est à peine rose quand elle se pâme.

Chacune des visiteuses voulut tâter à son tour du velours de Miss Pirouett, qui les contente l’une après l’autre, avant de se séparer jusqu’au lendemain.

Dès que les Parisiennes furent parties, la comtesse, les soubrettes, la ballerine et moi, nous étions brillamment disposés et chacun étant pressé d’avoir son tour, nous nous réjouîmes en chœur. Nous quittons tous nos vêtements. Miss Pirouett, toujours ingénieuse, installe les quatre soubrettes à se gamahucher, l’une sur l’autre, deux par deux, côte à côte, les croupes de Lola et de Cécile en l’air, sur la même ligne, se touchant ; elle fait asseoir la comtesse sur les deux postérieurs voisins, une fesse à droite, une fesse à gauche, occupant ainsi une moitié de chaque mappemonde, les mains posées sur les deux autres moitiés ; elle lui écarte les jambes de façon à mettre au jour son gros clitoris ; puis elle vient se faire prendre en levrette, et, se renversant sur les mains, elle me conduit vers le bosquet où elle a affaire. Mercédès, moelleusement assise sur deux hémisphères rebondis, patine les deux autres sous ses mains qui s’y reposent, caressant tendrement les deux quartiers, l’un surtout, avec une prédilection marquée, et sur lequel elle jette un regard de convoitise, que j’observe, tout en manœuvrant dans mon gîte. Miss Pirouett, que je tiens par les cuisses, me fait une ceinture de ses jambes, me serrant nerveusement la taille et m’obligeant à enfoncer la quille jusqu’au fond.

Bientôt, Mercédès que je ne perds pas de vue, respire plus fort, sa gorge berce violemment sur ses deux beaux seins de neige la jolie fraise mûre qui les coupe d’un gros point vermeil, ses paupières tremblent, voilant l’éclat de ses yeux, son nez bat l’air de ses ailes roses, son corps se penche à droite, pressant la fesse de Cécile, et elle reste ainsi pâmée, toute de travers, pendant que toute la bande se trémousse et jouit.

Chacun ayant un peu apaisé sa fringale d’amour, on vient souhaiter la bienvenue à Miss Pirouett, qui se laisse faire volontiers. Installée debout sous le trapèze, elle s’accroche à la barre, et chaque gougnotte vient à son tour s’agenouiller devant la chapelle, pour y réciter une courte prière, passant ensuite derrière l’autel, pour y déposer les hommages qui sont dûs à l’humble tabernacle, pendant qu’une autre la remplace devant ; chaque amoureuse fait ainsi le tour, allant de l’un à l’autre envers de l’autel.

Quand chacune y est passée, Lola qui est la dernière, reste collée aux bords du sanctuaire d’où je la déloge bientôt, pour venir saluer à mon tour le joli mignon d’amour, qui suinte déjà sous ma langue, dès que je l’y repose. Lola, délogée du devant, va exercer son talent derrière, et s’y comporte avec l’habileté qui la distingue.

J’ai à peine fouetté le bouton pendant quelques secondes, que je le sens palpiter sous ma langue et se mouiller d’une douce rosée, qui met des perles à mes moustaches.

Miss Pirouett, un peu fatiguée de son récent voyage et aussi par les émotions de son début, veut aller se reposer, pour être mieux disposée demain. On la conduit à la chambre qui lui est destinée, les soubrettes regagnent leur appartement, à l’exception de Cécile, comme je l’avais prévu aux yeux brillants de la comtesse et aux myosotis langoureux de la blondinette.


Lèvres de Velours, vignette fin de chapitre
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