Joies errantes/Idylle
Alphonse Lemerre, (p. 55-56).
IDYLLE
À Rachilde.
Sur la route bordée de vertes haies
Ou le chèvrefeuille chevrote, bercé
Par le tiède vent d’été,
Comme de vieux airs atténués ;
Ils vont épris ; lui et elle —
L’éternel lui et l’elle éternelle —
qui pensent être premiers
À tant s’aimer.
C’est tout le ciel pour lui — ses yeux.
C’est pour elle un cher paradis
Que le bras fort de l’amoureux,
Ou la main de l’aimée se blottit —
Comme un frêle oiseau dans un nid.
Tout le sang de leur cœur s’est fait vin de tendresse
Et tous leurs rêves sont à deux ;
Cependant viennent au devant d’eux
— Sur la route bordée de vertes haies —
Leurs inconjurables destinées
Qui sont : — La Mort
Et l’Oubli — cette pire des Morts.