Itinéraire raisonné de Marguerite de Valois en Gascogne/Année 1578


ITINÉRAIRE RAISONNÉ
DE MARGUERITE DE VALOIS EN GASCOGNE
(1578-1586)


ANNÉE 1578

« Maison de la Royne de Navarre. — Trésorerie et recepte généralle des finances et maison de la Royne de Navarre. — Estat des gaiges des dames, damoiselles, gentilshommes et aultres officiers de la Royne de Navarre, sœur unique du Roy, pour l’année commençant le premier jour de Janvier et finissant le dernier jour de décembre 1578[1].

DAMES
Mme de Picquigny, dame d’honneur 
333 éc. 1 l.
Mme de Curton 
100 éc.
Mlle d’Atrye d’Aquaviva 
133 éc.
Mme la marquise de Canillac 
100 éc.
Mme d’Estissac 
100
Mlle de Tournon la jeune 
133 éc.
Mlle de Picquigny 
100
Mlle de Saville 
100
Mme de Seignes 
100 éc.
Mme de Florac 
100
Mme de Thignonville 
100
Mme de Pibrac 
100
Mme de Béthune 
100
Mlle du Gauguier 
100
Mlle du Rezé 
100
Mme de Cheverny 
100
Mme de La Cappelle 
100
Mlle de Picquot 
100
FILLES DAMOISELLES
Thorigny 
83 éc. 1 l.
Rebours 
100
La petite fille de Mme de Curton 
100
Fousseuse 
83 éc. 1 l.
Boisbenet 
100
Béthune 
100
Aulnay 
100
Marguerite Burgensis 
56 éc.
Mlle de La Vernay, gouvernante desdites filles 
100 éc.
AULTRES DAMES ET DAMOISELLES
Mme de Riberac 
1 éc. 2 l.
Mme de Sainte-Geme 
100
Mme de Bourgon 
100
Mlle d’Épernay 
100
Mlle de la Martonie 
100
Mlle Myron 
50 éc.
FEMMES DE CHAMBRE
Jehanne Bussière 
56 éc. 2 l.
Barbe Chausson 
56
Jehanne Martin 
56
Marie Lebel 
33 éc. 2 l.
Loyse Lebel 
33
Loyse Chausson 
33
Du Verger 
33
Burgensis 
33
Anne du Haier 
33
Renée Bourgeois, lingère 
26 éc.
Sœur de Jehanne 
33 éc.
Sœur de Corbie 
33
FEMMES DES FILLES
Renée Molinau 
33 éc. 1 l.
Claude du Rube 
33
LAVANDIÈRES
Hirma Girard et Guill. La Flaiche, son mari, pour le corps et bouche 
40 éc.
Marguerite Lafleiche pour la panneterie et tous les offices 
33
MAITRES D’HOSTEL
Le sieur du Lys 
133 éc. 1 l.
Hector de Maniquot 
133
Le Sr de Rupéreulx 
133
Le Sr de Masparault 
133
Le Sr du Bosq 
133
Guill. Arthur Sr de Faiguerolles et vicomte de Caen 
133
PANNETIERS
Le Sr d’Auranches 
100 éc.
Le Sr de Boullons 
100
Le Sr de St-Pons, le jeune 
100
Le Sr de La Migernier 
100
Le Sr du Conte 
100
Richard de La Vernay 
100
Le Sr de la Tronche 
100
Le Sr de Beaumesnil, le jeune 
100
ESCHANSONS
Le Sr de Chadière 
100 éc.
Ludovic Miliorin 
100
Monthigny 
100
La Bussière 
100
ESCUYERS TRANCHANTS
Le Sr d’Anthérac 
100 éc. 1 l.
Le Sr du Plessis 
100
Le Sr de Penacore 
100
ESCUYERS D’ÉCURIE
Le chevalier Salviati 
200 éc.
Le Sr de Vermont 
100 éc.
Le Sr de Matha 
100
Le Sr de Crécy 
100
Le Sr de La Plaigne 
100
AULMONIERS
Me Gilbert de Beaufort, grand aulmonier 
1 éc. 2 l.
Me Henry Le Meignan, évêque de Digne 
1
Me François Dasquanel, abbé du Mont St-Quentin 
1 éc. 2 l.
Me Jacques du Val, abbé de Nogent 
1
Me Claude Cocquelet 
21 éc.
CONFESSEUR
Michel Ferré 
133 éc.
CHAPPELAINS
Me Firmin Morran 
40 éc. 1 l.
Me Guérin de Mizan 
40
CLERCS DE CHAPPELLE
Nicolas Cocquelet 
20 éc.
Jehan Cocquelet 
20
Jehan Bazoches pour l’entretenement du sommier de la chappelle 
20
MÉDECINS
Le Sr de Saint Pons 
156 éc. 2 l.
Raphaël La Mezure 
100 éc.
Jehan Landre, dict de La Magdeleine 
133 éc.
Choisnyn 
133
Lefebvre 
100 éc.
APOTHICAIRE
Charles Merays 
56 éc. 2 l.
CHIRURGIEN
Nicolas Ferrand 
53 éc. 1 l.
VALLETS DE CHAMBRE
Jehan Petit frère, au lieu de Moyse Crosnier 
53 éc. 1 l.
Audit Moyse Crosnier, pour l’entretenement du jardin de la maison de la Royne, à Paris 
50 éc.
À luy encore pour l’estat de garde des meubles de lad. maison 
33 éc. 1 l.
Jehan Dureau 
53 éc.
François Chausson 
53
Pierre Lory, au lieu de Pierre Paillès 
53
Estienne Le Haier 
53
Anthoine Le Bel 
53
Fraire de Mortures 
53
Jehan Dagan, dict Pacollet 
53
Gabriel Balbo 
53
Charles Bessac 
53
René du Vau 
53
Manault Raspault 
53
Bon Bousset 
53 éc.
Jehan Mathey 
53
Burgensis 
53
Laporte, violon 
53
Eustache Grinoise, tailleur d’habillement de la Royne, tant pour ses gages et façons d’habillement de la Royne que pour le fournissement du fil de soye à couldre, crochets et toutes sortes de doubleures qui ne sont pas de soye 
400 éc.
AULTRES VALLETZ DE CHAMBRE
Guillaume Raspault, joueur de luth 
100 éc.
Jehan Paulle, aussi joueur de luth 
53 éc. 1 l.
François Baillon, joueur de musette 
53 éc.
Jehan Godefroy 
53
René Le Grand 
53
Alain Beluche, au lieu de François de La Floxillière 
53
Honoré Beaujouan 
53
Me DE GARDE ROBBE
Pierre Morin 
56 éc. 1 l.
Pierre Girau 
53
VALLETS DE GARDE ROBBE
Jacques Hanne 
20 éc.
HUISSIERS DE CHAMBRE
Jehan Halligre le jeune, au lieu de Jehan Halligre l’aisné, son frère 
53 éc. 1 l.
Charles Lasserre 
53
Pasquier Le Vavasseur 
53
HUISSIERS DE SALLE
Jehan Descosse 
53 éc. 1 l.
Jacques Yvon 
40 éc.
Nicolas Putel 
53
HUISSIERS DU CONSEIL
Georges Rondellet 
16 éc. 2 l.
Germain Ferron 
20 éc.
René Poullain 
16 éc. 2 l.
TAPISSIERS
Allard, au lieu de Pierre Buccan, décédé 
40 éc.
Maurice Baudouyn, qui soulloit estre garçon de la chambre, au lieu de Nicolas La Falloys 
40 éc.
Jullian Blanchart, porte-table et chaise 
50 éc.
AYDES
Pierre Foucquet 
16 éc. 2 l.
La Royne veult et ordonne que la somme de seize escus, deux livres soit payée à la vesve et enfans dud. sieur Buccand, jusqu’à ce qu’ils soient en aige de pouvoir servir aud. estat, duquel elle leur faict don, ayant neantmoins ordonné que led. Allard fera le service et si obligera sans pouvoir avoir ny demander lesd. 16 escus 2 liv., ne aulc. augmentation de gaiges.
VALLETS POUR LES FILLES DAMOISELLES
Jehan Malletin 
13 éc. 1 l.
Balthazard Gremoise 
13
Pierre Prelat 
13
CHANCELIER
Monsieur de Pibrac, conseiller du Roy en son privé conseil, président en sa court du parlement de Paris et chancelier de la Royne de Navarre 
656 éc. 2 l.
GÉNÉRAL DES FINANCES
Monsr D’Estors, général des finances 
400 éc.
GENS DU CONSEIL
Me Nicolas Aurillot 
156 éc. 2 l.
Me Michel Erard 
256 éc.
Me Anthoine Arnault 
100 éc.
Me Anthoine Seguier 
116 éc. 2 l.
Me Anthoine Parmentier 
118 éc. 1 l.
Me Nicolas Tanneguy 
1&113
Me Denis Tronne 
113 éc. 1 l.
Me Pierre Tronne 
1&113
SECRÉTAIRES DES FINANCES
Me Loys Le Court 
100 éc.
Me Jacques Biart 
100
Me Hierosme Seguier 
100
Me Hector Chouayne 
100
AULTRES SECRÉTAIRES
Me Loys Vernes 
56 éc. 2 l.
Me Guillaume Lebel 
33 éc. 1 l.
Me Jehan de la Brosse, architecte 
33
Me Nicolas Bouchard 
33
Me Jehan Erard 
33
Me Martin Vernes 
16 éc.
Me Raoul Ollié 
18 éc.
Me Jehan Gaillard 
16 éc.
Me Jacques Goury 
6 éc.
Florent Chouayne 
6 éc.
Michel Pommereu 
6 éc.
Benigne Leragout 
6 éc.
Me Vignere 
6 éc.
Me Carloys 
6 éc.
Me Martin Sainct 
6 éc.
Ph. Lesourd 
6 éc.
Marc Manault, au lieu de Figon 
1 éc. 2 l.
CONTREROLLEURS ET DIVERS OFFICIERS
Jehan Chouayne, contrerolleur général 
256 éc. 2 l.
Jehan Beloys 
256 éc. 2 l.
Jacques Breton 
256 éc.
Symon Huguerie 
6 éc.
Jehan Bourgeois 
6 éc.
MARECHAULX DES LOGIS
Pierre Duchesne 
100 éc.
Pons du Marchant 
100c.
Claude Patin 
100c.
Jacques Crochut 
100c.
Pichery 
100c.
FOURRIERS
André de Bresme, au lieu de Gilbert Lucas 
50 éc.
Petit Jean Houblet 
50
Robert de Vignolles 
50
Jehan Chartier dict Lespine 
50
Françoys Hanri pour les villages 
50
SOMMELIERS DE PANNETERIE
Jacques Mousset 
53 éc. 1 l.
Pregent Popine 
53
AYDES
Jehan Volton 
40 éc.
Loys Pillon, au lieu de Jehan Mareschal 
40
Symon Radix décédé la Reine accorde une pension à sa veuve et à ses enfants 
40
Jehan de Coutran, au lieu de Nicolas Violier 
40 éc.
René Aubert, au lieu de Jehan Robiot 
50 éc.
Jehan de Bray qui soulloit estre garcon de la pannetterie 
23 éc. 1 l.
SOMMELIERS D’ESCHANSONNERIE
Claude Aulde 
53 éc.
Claude Panguot 
53
AYDES
Mathurin le 1er 
40 éc.
Loys Mauvoisin 
40
Françoys Mangourt dict Fichu 
40
Claude Le Grand 
40
Claude Oudart, sommier des bouteilles 
50 éc.
Pasquier Morin, sommier de la vaisselle 
50
BOULLENGER
8 éc. 1 l.
ESCUYERS DE CUISINE
Marc Virlu 
50 éc.
François Bourgeois, au lieu de Poisson 
50
QUEULX
Guillaume Cornu, au lieu de Pascal Proudhomme 
53 éc. 1 l.
Arthur Belin 
53
Martin Maillot 
53
POTAGERS
Jehan de Lespine 
40 éc.
Jehan Bonadjude 
40
HASTEUX
Pierre Maucourt 
40 éc.
Jehan Augier, dict la Haye 
40
ENFANS DE CUISINE
René Poullain, au lieu de Jehan Bonadjuge 
16 éc. 2 l.
Estienne Buisson 
16
GALLOPINS
Guillaume Gousset 
8 éc. 1 l.
Jehan de Couldray 
8
Jacques Cadisc 
8
PORTEURS
André Jamet 
20 éc.
Frans Gaultier, au lieu de René Poulain 
20
Michel Drouyn 
20 écus.
Pierre Broche, en la place de Baptiste Villeroy 
20
HUISSIERS DE CUISINE
Claude Perriau, au lieu de Jacques des Quillars 
20 éc.
Nicolas Brissot, au lieu de Guillaume de la Flèche 
20
GARDE VAISSELLE
Cartoys, tant pour ses gages que pour l’entretenement du sommier de lad. vaisselle 
100 éc.
Maurice Marchant, aussy garde vaisselle 
140 éc.
François Gavroche, pour l’entretenement du sommier du garde manger 
150 éc.
Loys Virlu, au lieu de René Aubiet, pour l’entretenement du sommier des broches 
1150
PASTICIERS
Jehan Carré 
16 éc. 2 l.
Albret Cassier 
16
VERDURIER
Symon Cahourt 
16 éc. 2 l.
BOUCHER ET POISSONIER
Charles Marie 
4 éc. 1 l.
Nicolas Fillastre 
4
FRUICTIERS
Jehan Pineau 
33 éc. 1 l.
Nicolas Fillastre 
33
AYDES
Michel Mehun 
20 éc.
René Maurice 
20
Françoys Marchant pour l’entretenement du sommier 
50 éc.
VALLETS DE FOURRIÈRE
Toussaint Hedouyx 
33 éc.
René Turges 
33
AYDES
Guillaume Fournier 
20 éc.
Pierre Jusguran 
20
Jullien Gault 
20
Claude Janet 
20
MARESCHAUX DE SALLE DES FILLES
Marc Huchelon 
16 éc. 2 l.
Vincent Suroin 
20
VERTDEAUX
Nicolas Dauvergne 
16 éc. 2 l.
PORTIERS
Marc Gouvieulx, au lieu de Claude Dumont 
33 éc. 1 l.
Jehan Machot 
33
GENS DE MESTIER
René Foussart, mercier 
33 éc. 1 l.
Jehan Du Bour, menuisier 
33 éc.
Estienne Chery, orfèvre 
13 éc. 2 l.
Pierre Dumont, vertugadier 
13 éc.
TRÉSORIER ET RECEVEUR GÉNÉRAL
Me Loys Hubault, 866 éc. 2 l., pour la valleur de 2600 livres à luy ordonnés par lad. dame chascun an pour tous gaiges, etc.
ESCURIE DE LAD. DAME
Gaiges d’officiers
LACQUAIS DU CORPS
À Estienne Bailly, qui va à cheval avec lad. dame pour tous ses gaiges, entretenement et despenses de son cheval 
400 liv.
Michel Fraugerie 
144 liv.
Pierre Mizère 
144
Jacques Geouffroy 
144
Remond Vedel 
144
LACQUAIS POUR LES FILLES ET DAMOISELLES
Nicolas Rochon 
144 liv.
Jehan Lajonie 
144
LACQUAIS DU CHARIOT BRANLANT
Guyon du Hocquet 
70 liv.
PALLEFRENIERS
Dominique Sansac 
144 liv.
Charlot Rodin 
144
AYDES
Anthoine Charret 
144 liv.
Estienne Damures 
144
MULLETIERS DE LA LICTIÈRE DU CORPS ET SECONDE LICTIÈRE
Jehan Gousse, dict Malherbe, pour la litière du corps 
144 liv.
Sanson Hadrot, mulletier de la seconde litière 
1114
Françoise Gonsse, ayde pour la lictière du corps 
172 liv.
FOURRIERS
René Balleran 
140 liv.
Nicolas Baron 
140
VALLETS DES PAIGES
Olivier Chevalier 
90 liv.
Claude Vallon 
90
AULTRES OFFICIERS
Ph. de Fontaine, mareschal de forge 
80 liv.
François Mathieu, tailleur 
10 liv.
Jacques Dollives, barbier du commun pour faire les cheveulx des paiges 
25 liv.
Jehan Grin, scellier 
10 liv.
Claude Dasquoys, lavandier 
10
Estienne Richomme, esperonnier 
10
ARGENTIER ET POURVOYEURS DE LAD. ESCURIE
Jehan Baron 
10 liv.
Goriot Traboullet 
10
COCHERS
Guillaume Fleury, cocher du corps 
120 liv.
Jehan Mizère, cocher du 2e coche 
150 liv.
Pierre Coutin, pour le coche des femmes 
1110
Nicolas Galloys pour le charriot de poste 
1110
CAPPITAINES DES MULLETS ET CHARRETIERS
Anthoine La Mère, capitaine de six mullets de la chambre 
120 liv.
Jehan Thiou, pour les besongnes de la chambre 
115 liv.
Jehan Vioche pour l’escurie 
117 liv.
AULTRES OFFICIERS
Loys Hubault, receveur en lad. escurie 
12 liv.
Jehan Chouayne, controleur 
14 liv.
Marc Cavalier, tailleur 
50 liv.
Roy, palefrenier 
50
Lubin du Pré, sellier[2] 
100 liv.

« Dépense des journées payées par ledit sieur Loys Hubault, maître de chambre aux deniers de la Reine de Navarre[3].

Août 1578

Le vendredy, premier jour dudict mois d’aoust, ladicte dame Royne de Navarre et son train à d’Ollainville. 25 éc. 12 s. 18 d.

« Et partans de Paris, écrit Marguerite dans ses Mémoires, le Roy nous mena à son d’Ollinville, où, après nous avoir traictez quelques jours, nous prismes congé de luy… » L’Estoile nous apprend dans son Journal que la terre d’Ollainville, aujourd’hui canton d’Arpajon, arr. de Corbeil (Seine-et-Oise), était un des séjours favoris d’Henri III. Il l’avait achetée 60 000 livres, donnée à sa femme et meublée avec une richesse inouïe. C’est de ce lieu que partirent Marguerite et la Reine-Mère, le 2 août au matin.

Le samedi, 2e jour dudict moys et an, ycelle dame et partie de son train disne à Dollainville, et le reste disne à Chastre[4], souppe et couche à Estampes… 518 éc. 19 s. 7 d.

Le dimanche, 3e jour dudict moys, ladicte dame et son train disne à Angerville[5] et souppe et couche à Artenay… 57 éc. 2 s. 7 d.

Le lundi, 4e jour dudict mois, ladicte dame et son train disne aux faulxbourgs d’Orléans et souppe et couche à Cléry[6]… 74 éc. 3 s. 8 d.

Le mardi, 5e jour dudict mois, ycelle dame et son train disne souppe à S. Dye[7] et couche à Blois… 47 éc. 12 s. 9 d.

Le mercredi 6e jour dudict mois, ladicte dame et son train à Chenonceaux… 43 éc. 14 s. 10 d.

Du 7 au 10, séjour à Chenonceaux[8].

Le lundy, 11e jour dudict mois, ladicte dame et son train tout ce jour à Tours.

Le mardy 12, ladicte dame et son train disne à Tours, souppe et couche à Azé-le-Rideau.

Le mercredy 13, ladicte dame et son train disne à Azé-le-Rideau, souppe et couche à Chinon.

Le jeudy 14, ladicte dame et son train disne à Chinon, souppe et couche en l’abbaye de Fontevrault.

Le vendredy 15, tout le jour en l’abbaye de Fontevrault.

Le samedy 16, ycelle dame et son train disne à Chinon, souppe et couche à Champigny[9].

Le dimanche 17, tout le jour à Champigny.

Le lundy 18, ladicte dame et son train disne à Mont-sur-Guêne, souppe et couche à Mirebeau.

Le mardy 19, ladicte dame et son train disne au Pont-d’Oranse, souppe et couche à Poictiers.

Le mercredi 20, tout le jour à Poictiers.

Le jeudi 21, ladicte dame et son train disne à Poictiers, souppe et couche à Vyvonne.

Le vendredi 22, ladicte dame et son train disne à Vyvonne, souppe et couche à Couay[10].

Le samedi 23, ladicte dame et son train disne à Couay, souppe et couche à Civray.

Le dimanche 24, tout le jour à Civray.

Le lundi 25, ladicte dame et son train disne à Ruffec, souppe et couche à Verteuil.

Le mardi 26, ladicte dame et son train disne à Renay[11] et couche à Nègre[12].

Le mercredi 27, ladicte dame et son train disne à Anville, souppe et couche à Neufvy[13].

Le jeudi 28, ladicte dame et son train disne et souppe à Cognac.

Du 29 au 31 août, séjour à Cognac.

Total des dépenses pour le mois d’août : 2 617 écus, 8 sols, 6 deniers.

Septembre 1578

Du 1er au 5, séjour à Cognac.

« Je me souviens, car j’y estois, écrit Brantôme, que lorsque la Royne, mère du Roi, mena ceste Royne sa fille au roy de Navarre, son mary, elle passa par Coignac où elle fit quelque séjour ; et là, plusieurs grandes, belles et honnestes dames du pays les vindrent voir et leur faire la révérence ; que toutes furent ravies de voir la beauté de cette royne de Navarre, et ne se pouvoient saouler de la louer à la Royne sa mère qui en estoit perdue de joie, etc.[14] »

Catherine espérait, en s’arrêtant à Cognac, que le prince de Condé, gouverneur d’Aunis et de Saintonge, viendrait la saluer en ce lieu. Mais Condé, jaloux de plus en plus du roi de Navarre, n’en eut garde ; si bien qu’après l’avoir attendu cinq jours, la Reine-Mère, dépitée profondément, dut continuer son chemin.

Le samedi, 6e jour de septembre, ladicte dame et son train disne et souppe à Pons.

Du dimanche 7 au mardi 9, séjour à Pons.

Le mercredi 10, ladicte dame et son train disne à Plassac, souppe et couche à Mirambeau.

Le jeudi 11, ladicte dame et son train disne à Tollyer[15], souppe et couche à Blaye.

Le vendredi 12, ladicte dame et son train disne à Blaye, souppe et couche à Bourg.

Le samedi 13, tout le jour à Bourg.

Le dimanche 14, disne à Bourg, souppe et couche à Lybourne.

Du lundi 15 au mardi 16, séjour à Lybourne.

Le mercredi 17, disne et couche à Créon.

Le jeudi 18, disne à Créon, souppe et couche à Bordeaux.

Du vendredi 19 au lundi 29, séjour à Bordeaux.

Jusqu’à ce moment, aucun incident n’avait marqué le voyage des deux Reines. Les lettres de Catherine, écrites à son fils Henri III soit de Chenonceaux, soit de Cognac, n’ont trait qu’aux affaires générales du royaume. Le temps était chaud, les routes mal entretenues. Les étapes ne pouvaient être bien longues. Il fallait laisser à la suite si nombreuse des deux princesses le temps de les rejoindre. De là ces arrêts forcés. Mais une fois arrivée à Bordeaux, Catherine reprend son rôle de reine et de médiatrice.

Cette ville avait, peu de temps avant, refusé d’ouvrir ses portes au roi de Navarre. Celui-ci, blessé dans son amour-propre, répondit à l’appel de Catherine qu’il ne la rejoindrait qu’ailleurs. La Reine-Mère exigea, pour ces motifs, que la capitale de la Guyenne fît à la Reine de Navarre une entrée solennelle. Bordeaux le comprit et n’y manqua point.

Le maréchal de Biron, gouverneur de la province, y avait devancé la Cour.

« Au mois de septembre 1578, écrit de Lurbe dans sa Chronique Bordelaise, fut donné advis à Messieurs les Jurats de l’arrivée prochaine de la Reyne, mère du Roy, et de la Reyne de Navarre, et furent aprestées incontinent deux maisons navales ; et leurs Majestés estans à Bourg, deux de Messieurs les Juratz y furent députéz, ensemble le procureur de la Ville, chargés de mémoires pour faire entendre à leurs Majestés. Cependant ledit sieur maréchal de Biron arrive qui fit son entrée à Bordeaux, comme lieutenant du Roy, le mardy 18 septembre 1578. L’une des maisons navales, préparée pour la Reyne, lui fust emmenée au port de la Bastide par deux de Messieurs les Jurats, l’artillerie rangée sur la rivière, les habitans aussi tous en armes et en ordre[16]. »

Et Jean de Gauffreteau, ajoute : « Le dimanche 21 septembre, la Royne de Navarre alla descendre aux Chartreux, où les Jurats de Bourdeaux luy avoient faict dresser une maison en laquelle tous les ordres de la ville la vindrent saluer, et chacun d’eux luy fit sa harangue. De là, elle alla à la porte du Caillau, là où le poësie luy fust présenté par les Jurats, qui de là la conduisirent, avec les compaignies de la ville en armes, dans l’église Saint-André, où elle presta le serment, en tel cas accoustumé, entre les mains du seigneur archevêque[17]. Sa Majesté fust logée en la maison du Président Villeneuve, sur les fossés appelés du Chapeau Rouge[18]. »

« Le 18 septembre, dit l’abbé O’reilly, dont la version diffère quelque peu, la Reine-Mère fut reçue sur le port, au Portau-Barrat, par les autorités de la ville : elle fut conduite avec pompe chez M. de Pontac, trésorier, d’autres disent chez M. de Villeneuve, président au Parlement ; on lui présenta un dauphin de huit pieds qu’on venait de pêcher. La Reine de Navarre logea chez M. Guérin, conseiller, près du Palais[19]. »

C’est bien le 18 septembre qu’eut lieu l’entrée des deux Reines à Bordeaux ; car cette date concorde, d’abord avec celle de l’itinéraire, puis avec celle d’une lettre adressée, le soir même, de cette ville par Catherine à M. de Bellièvre[20].

Tous les honneurs furent pour la Reine de Navarre. « La Reine sa mère, écrit Brantôme qui s’y trouvoit, le voulut ainsy, car elle l’aimoit infiniment et l’estimoit fort. Elle étoit montée sur une belle haquenée blanche, harnachée fort superbement, et elle estoit vestue toute d’orangé et de clinquant, si somptueusement que rien plus, laquelle le monde ne se pouvoit assez saouler de voir, la regarder, l’admirer et l’exalter jusqu’au ciel. »

Aux discours de l’Archevêque pour le clergé, du maréchal de Biron comme maire et lieutenant général, de M. Lagebaston premier président pour le Parlement[21], Marguerite, toujours d’après Brantôme, « qui estoit près d’elle sur l’eschaffaut par son commandement, leur respondit à tous les uns après les autres, si éloquemment, si sagement et si promptement, et avecques telle grâce et majesté… que je vis le soir ledit sieur président qui me vint dire, et à d’autres en la chambre de la reyne, qu’il n’avait jamais ouy mieux dire en sa vie[22]. »

Nous ne raconterons pas ici les multiples détails des réceptions, fêtes, réjouissances, négociations qui marquèrent le séjour des deux Reines dans la capitale de la Guyenne. Tous les chroniqueurs locaux les ont suffisamment narrés[23]. La lettre de Catherine au Roi, du 29 septembre, en dit plus long du reste que n’importe quel document[24].

Rappelons seulement que le Parlement se tint sur une grande réserve, se trouvant depuis quelque temps en lutte ouverte avec la Cour, que les Jurats au contraire assurèrent les Reines de leur inébranlable fidélité et leur firent présent « d’un pentagone d’or massif, bien élaboré, avec certaines inscriptions diverses et chifres à leur louange », qu’il fut fait « un reiglement concernant le gouvernement de la ville et la nomination des Intendants », et que les capitaines renouvelèrent tous leur serment en présence du maréchal de Biron, etc.

« J’espère partir demain de cette ville, écrit à la fin de cette lettre du 29 septembre la Reine-Mère au Roi son fils, y laissant toutes choses si bien ordonnées que j’estime, comme aussy font tous lesdicts seigneurs ceux de vostre Conseil qui sont icy auprès de moy, que tout y continuera en repos et union. J’iray, Dieu aidant, ledict jour de demain coucher à Cadaillac et le jour d’après qui sera mardy, j’irai de bonne heure à Saint-Maquaire, ny aiant que la rivière de Garonne entre ledict Saint-Maquaire et Langon, où se doibt trouver le Roi de Navarre, vostre frère, vers lequel j’ay renvoié ce matin les sieurs de Pibrac et de La Mothe-Fenélon, pour luy faire entendre ma délibération, afin que ce jour-là nous nous puissions voir, et dès le lendemain, je ne fauldrai de vous faire une ample despêche du tout. »

Rencontrer enfin le roi de Navarre, lui remettre son épouse et assurer la paix, tel est le but que poursuit ardemment Catherine et pour lequel elle ne craint d’affronter ni les dangers, ni les fatigues de ce long voyage.

« L’entrevue des deux Reines et du Roi de Navarre, écrivait à cette date l’ambassadeur Saracini à son maitre le grand duc de Toscane, est encore retardée pour divers obstacles, notamment à cause de M. le maréchal de Biron. Néanmoins, à Bordeaux, où elles sont, les Huguenots leur ont fait un bon accueil[25]. ».

Enfin le départ eut lieu le 30 septembre.

Le mardi, 30e jour de septembre, ladicte dame et son train disne à Bordeaux, souppe et couche à Cadillac.

Total des dépenses en ce mois de septembre pour la maison de la Reine Marguerite qui seule doit nous occuper : 2 983 écus, 4 sols, 3 deniers.

Il ne put être payé que 2 646 écus.

Octobre 1578

Le mercredi 1er jour d’octobre 1578, la dame royne de Navarre disne à Cadillac, souppe et couche à Sainct-Macaire.

Le jeudi 2, ladicte dame et son train disne à Sainct-Macaire et couche à la Réole.

C’est dans cette journée, et entre ces deux villes, « en une maison seulle, écrit Catherine à son fils, qui est sur le chemin, appelée Casteras, où nous sommes descendus » que le Roi de Navarre, rencontra enfin sa femme Marguerite ainsi que sa belle-mère. « Il estoit escorté, écrit-elle, d’une fort belle trouppe de gentilshommes qui estoient au nombre d’environ cent cinquante maistres, fort en ordre et bien montez. Il m’a trouvée et la royne de Navarre vostre sœur, vostre nepveu, et mes cousines les princesses de Condé et Montpensier, l’attendant en une salle haulte de ladite maison, nous ayant fort honnestement de très bonne grâce et, ce semble, de très grande affection et avec fort grand aize salué ; le vicomte de Tourenne est entré avec luy et quelques ungs des principaulx ; et, après le bon accueil que vous pouvez bien penser que nous luy avons faict et nous estans entretenus ung peu de temps de propos commungs, nous sommes descendus de ladicte salle et montez en mon chariot, où il est aussi entré et venu avec nous jusques en ce lieu, faisant toujours, et nous à luy, la plus grande démonstration d’aize et de contentement qu’il est possible[26]. »

La lettre entière est à citer. Sa longueur nous force de la résumer brièvement. Et d’abord, il accompagne la Reine-Mère chez elle, dans sa chambre ; puis « il a voulu mener votre sœur la Royne de Navarre, en son logis, qui est de l’austre costé de la rue, où ils logeront et coucheront ensemble ; mais de peur de luy donner peyne, vostre dicte sœur n’a poinct été plus loing que mondit logis ; et luy, qui avait fort grand chault et pour ce aussy qu’il a faict aujourd’huy très grande challeur, s’est allé rafreschir ; et madicte fille et luy sont revenuz en ma chambre. » Là, sans plus tarder, Catherine engage les négociations. Elle lui dit que le Roi Henri III « l’aime parfaictement, comme s’il estoit son frère et comme celuy qui est non seulement son beau-frère, mais son héritier après son frère. » La rusée Florentine manœuvra si bien dans cette première entrevue qu’Henri de Navarre consentit à tout. Se réservait-il de prendre plus tard sa revanche, ou ne pensait-il en ce moment qu’à sa femme Marguerite, dont il était séparé depuis deux ans et huit mois et qui lui revenait dans tout l’éclat de son opulente beauté ?

Dans ses Mémoires, la reine de Navarre ne consacre qu’une ligne à l’entrevue de La Réole. Henri est plus explicite : « Je m’en viens, écrit-il de Nérac le 10 octobre à M. de Montesquiou, de recueillir la Royne-Mère et ma femme à la Réole, où toutes choses se sont passées au souhait et contentement d’un chascun, mesme pour l’establissement et entretenement de la paix, dont nous avons déjà commencé à traicter, et l’on fera, Dieu aydant, une bonne résolution à l’Isle en Jourdain où je les iray retrouver, et partiray d’ici le xve du mois[27], »

Les deux reines restèrent cinq jours à la Réole.

Du 3 au 6 octobre, séjour à La Réole.

Si Marguerite et Henri de Navarre furent, durant ces cinq jours, tout à la joie de se revoir, Catherine de son côté ne perdit pas son temps. Elle assembla Conseils sur Conseils, entreprit de réconcilier le Roi de Navarre avec le maréchal de Biron, ce en quoi elle fut fort aidée par la Reine sa fille, Henri se montrant très courroucé contre lui, et finalement arrêta, avec son gendre, la nomination de commissaires spéciaux chargés dans chaque ville importante de la province de faire exécuter l’édit de pacification précédemment signé à Poitiers, en septembre 1577. Leur liste, fort intéressante pour l’histoire locale, ainsi que l’énoncé des articles conclus entre les deux partis, ont été déjà publiés[28]. Nous n’y reviendrons pas. Disons seulement que le tout fut arrêté solennellement en Conseil, se trouvant du côté de la Reine-Mère,MM. le cardinal de Bourbon, le duc de Montpensier, de Saint-Sulpice, d’Escars, de La Mothe-Fénélon, de Pibrac, de Foix et Jean de Monluc, évêque de Valence, tandis que du côté protestant signèrent le Roi de Navarre, le vicomte de Turenne, Gratin, Montguion, Guitry, Lusignan et Ségur-Pardaillan[29].

On ne peut douter, en lisant ces pièces, de la sincérité réelle des deux partis et de leur désir d’arriver à une paix durable. Les nombreuses correspondances échangées de chaque côté en font foi. Rien donc ne résistait en ce moment à l’habile diplomatie de Catherine, encore moins aux charmes de ses filles d’honneur, au premier rang desquelles se remarquait la Cypriote Dayelle, dont la beauté avait déjà subjugué le Vert-Galant, et l’espiègle Anne d’Atri, plus tard comtesse de Château-Vilain, qui, en se jouant de lui, faisait tomber à ses pieds, le vieux d’Ussac, gouverneur de La Réole et huguenot endurci.

Le mardi 7, ladicte dame et son train disne à La Réolle, souppe et couche à Saincte-Bazeille.

Le mercredi 8, tout le jour à Saincte-Bazeille.

De cette ville, Catherine écrit une longue lettre à M. de Pailhès, gouverneur du comté de Foix, pour lui intimer l’ordre, ainsi qu’aux autres commissaires nommés, d’assurer au plus vite la paix dans son gouvernement[30].

Puis, elle réinstalle les prêtres catholiques dans l’exercice de leur culte et leur promet au nom du Roi, son fils, aide et protection. Enfin elle met en présence, pour la première fois depuis longtemps, le Roi de Navarre et le maréchal de Biron, arrivé, sur son ordre, l’après-dîner de ce jour : « Où il trouva en ma chambre mondict fils le Roy de Navarre, qui luy parla plus brusquement que nous ne pensions, vostre sœur la Royne de Navarre et moy, pour ce qui s’est passé entre eulx, dont ledit mareschal montra d’estre fort en collère. Et vous asseure, Monsieur mon filz, que je feuz aucunement en peyne comme je rabillerois le tout. Mais les bons offices de vostre sœur et de mon cousin le cardinal de Bourbon, et la peine que j’y prins envers l’ung et l’aultre pour le bien de vostre service fut cause de les accorder, tellement quellement. Toutefoys j’espère qu’en continuant comme nous ferons ils se remecteront du tout au bon mesnaige que je désire pour le bien de vostre service[31]. »

Le jeudi 9, ladicte dame et son train disne à Marmande, souppe et couche à Thonnynx.

Ce jour-là le roi de Navarre se sépara, à Marmande, des deux reines.

« J’ay accompagné lesdites dames Reynes jusqu’à Marmande, écrit-il de Nérac, le 23 octobre, à M. le baron d’Uhard[32] et m’en suis venu de là icy. Elles sont à présent à Agen sur le poinct de partir pour aller à L’Isle en Jourdain et là y séjourner. Et moy j’ai délibéré de les y aller retrouver et partir dans quelques jours. Et d’autant que j’ay congédié la plupart des sieurs gentilhommes qui m’ont accompagné, j’escrips à d’aultres que je sçais m’estre amys et affectionnés et les prie de m’accompagner audict voiage. »

Henri de Navarre fut fort bien reçu par les Jurats de Marmande, qui, sur les prières de Catherine « promirent d’oublier ce qui s’était passé durant les troubles. Aussy leurs a-t-il faict fort bonne chère ; et leurs ay commandé qu’ils eussent à y recepvoir et laisser entrer suivant votre édit de paciffication ceulx de la religion prétendue réformée qui y avoient leurs maisons et qui avoient accoustume d’y demeurer[33]. »

Henri de Navarre précéda les deux Reines à Tonneins, ville protestante qui tenait pour lui.

« Je suis venue couscher en ce lieu de Thonnins, écrit Catherine, qui tenoit pour ceulx de lacdite religion, où mon dict fils le roy de Navarre est venu disner et faire pourveoir à ce qui estoit necessaire pour mon arrivée en ce dict lieu, où j’espère, avant en partir, restablir avant toute œuvre nostre religion catholique[34]. »

Nous ne savons si elle y réussit. Toujours est-il qu’elle en repartit le lendemain.

Le vendredi 10, ladicte dame et son train disne à Esguillon, souppe et couche au Port-Saincte-Marie.

Pourquoi Marguerite ne suivit-elle pas son mari à Nérac, comme son devoir le lui dictait, et resta-t-elle avec sa mère, l’accompagnant dans toutes les étapes de son voyage ? C’est que la Reine-Mère tenait avant toutes choses à la garder auprès d’elle pour l’utiliser dans ses diplomatiques négociations avec le Roi de Navarre. Elle n’eut pas à se plaindre, on le verra, de cette combinaison.

En arrivant au Port-Sainte-Marie, Catherine fit exécuter l’édit de pacification, comme partout où elle passait, c’est-à-dire « par acte publicqs enregistrés au registre du greffe de la justice de chascun d’iceux lieux. » C’est elle-même qui l’écrit au roi son fils[35].

Les deux reines, en se promenant rencontrèrent M. de Turenne qui leur était envoyé par le Roi de Navarre, « lequel n’estoit pas loing de nous de l’austre costé de la rivière où il estoit venu à la chasse. » Turenne avait mission de les entretenir de l’affaire du château de Beaucaire en Languedoc et de celle des châteaux de Montaignac et Nontron en Périgord[36].

En même temps, Catherine écrivait une longue lettre à Damville, pour le prévenir de son arrivée prochaine à Toulouse.

C’est également ce jour là, au Port-Sainte-Marie, que la Reine-Mère reçut pour la première fois le sénéchal de Bajaumont, qui vint la saluer avec une escorte de vingt-cinq gentilshommes et l’assurer de sa fidélité. Elle les remercia de leurs offres et leur promit sa protection ainsi que celle du Roi son fils[37].

Le samedi 11, ladicte dame et son train disne au Port-Saincte-Marie, souppe et couche à Agen.

Les deux Reines étaient à peine sorties du Port-Sainte-Marie qu’elles eurent la surprise de rencontrer le roi de Navarre. Il vint fort galamment les saluer « allant, écrit Catherine à son fils, à la chasse à Lézignan[38], qui est icy auprès. J’ay esté bien aize de ce qu’ainsy librement il commence à se comporter envers moi. » Néanmoins il ne lui donne rendez-vous à l’Isle en Jourdain que vers le 15 de ce mois d’octobre, ce dont elle se plaint fort. On verra qu’elle dut attendre un mois encore, les protestants cherchant le plus possible à retarder le jour de la conférence.

Avant d’arriver à Agen, Catherine eut une longue conférence avec le maréchal de Biron, qui l’accompagnait, à propos de la garnison de cette ville. Elle lui donna des ordres précis pour son entrée solennelle et lui exposa comment elle entendait qu’elle et sa fille, la Reine de Navarre, fussent officiellement reçues.

Catherine entra seule à Agen, le soir du 11 octobre, par la porte Saint-Georges. Bien que l’itinéraire indique le même jour, Marguerite n’y fit son entrée que le lendemain 12 (jour de dimanche) par la porte du Pin. Catherine fut logée à l’Évêché, Marguerite dans la maison de Pierre de Nort, seigneur de Naux[39].

Du 12 au 14, séjour à Agen.

Le 16 septembre déjà, de Bordeaux, le maréchal de Biron écrivait aux Consuls d’Agen : « Messieurs, je voy bien que la Reyne mère du Roy et la Reyne de Navarre s’en iront jusques en vostre ville d’Agen, et pour ce advisés de bien tenir toutes choses en bon estat pour les bien recevoir et accueillir, ainsi qu’il leur appartient. Il fauldra faire quelque belle entrée à la Reyne de Navarre, comme on l’a accoustume de faire à toutes les filles de France. Je n’ay poinct oblyé de faire entendre à la Reyne la bonne volonté que vous avez au service du Roy. Je vous prie n’estre point nonchallans à bien préparer ceste entrée et y pourvoir[40]. »

Ainsi prévenue, la municipalité Agenaise se mit en devoir de recevoir le mieux possible les deux Reines. Elle leur prépara une magnifique entrée. Tous les honneurs furent pour la Reine de Navarre. Les mémoires du Consul Trinque (1570-1615) que nous a conservés la chronique du Frère Hélie[41], sont les seuls, avec le Journal des Consuls, qui nous en ont transmis le souvenir.

« Et le 12 octobre 1578, feust faite l’entrée à la Reyne de Navarre Marguerite de Valois. On lui fist une maison à la Porte-du-Pin ; on lui porta un pavillon de damas blanc. La mère de la Reyne estoit entrée dans Agen le samedy devant, accompagnée du cardinal de Bourbon, de M. de Montpensier et des deux frères du prince de Condé. » Un emprunt de 800 livres fut contracté à cet effet par la municipalité[42].

Le Parlement de Toulouse envoya une députation à Agen, afin que dès ce moment, elle offrit aux deux Reines ses services. Catherine la reçut et s’entretint longtemps avec les divers délégués des affaires du Languedoc.

Puis, elle réunit dans la grande salle de l’Évêché, où elle logeait, tous les gentilshommes de la province, qui étaient venus la saluer. Elle prononça un grand discours.

« Voyant ici tant de noblesse assemblée, écrit-elle au Roi son fils à la date du 15 octobre, combien que j’eusse parlé à eulx en diverses foys et particulièrement, toutesfoy je feiz assembler tous ceulx qui estoyent icy dimanche au matin à ma salle, où ilz se trouvèrent fort grand nombre et des plus grands de toute ceste Guienne, je parlay longuement à eulx et vous asseure que je n’oubliay rien de tout ce qu’il m’a semblé leur devoir dire pour le bien de vostre service[43]. »

Dans ce discours, dont le texte a été conservé et publié récemment[44], Catherine proclame avant toutes choses la paix nécessaire à la France ; elle assure tous les seigneurs Gascons de la bonne volonté et des bons offices du Roi son fils ; elle leur présente tout particulièrement sa fille Marguerite, devenue comtesse de l’Agenais[45], « que j’ay chèrement nourrye et instruicte à honorer et recognaistre le Roy son frère et singulièrement à avoyr soing du bien et conservacion de ses bons subjects, comme je m’asseure qu’elle aura de vous… M’asseurant que Dieu luy fera ceste grâce de se conduire si saigement que pourrez mectre vostre entière confiance en elle. » Elle leur recommande enfin d’obéir au maréchal de Biron, « personnaige duquel la valleur bonne et droicte affection au service du Roy est assez congneue pour tenir la main et pourveoir à tout ce qui appartiendra au bien et conservation de ceste province. »

Marguerite d’un autre côté s’emploie de toutes ses forces à seconder la politique de sa mère, et elle ne néglige rien pour convaincre et ramener son époux.

« Le Roi de Navarre, écrit toujours Catherine au Roi son fils, continue à montrer de désirer bien fort l’exécution de la paix, se comportant envers ma fille la royne de Navarre, et elle envers luy, aussi heureusement et bien que nous sçaurions désirer ; ma dicte fille m’aiant dict que résolument son dict mary veult la paix, mais que ceulx qui sont auprès de luy ne la désirent pas. »

Le mercredi 15, ladicte dame et son train disne à La Fox, souppe et couche à Vallance.

En quittant Agen le 15 octobre au matin, les deux Reines s’arrêtèrent pour dîner au château de Lafox, situé au confluent de la Garonne et de la petite rivière de la Séoune à dix kilomètres au sud-est d’Agen. Ce château appartenait au sénéchal de Bajaumont, Catherine le connaissait bien. Elle s’y était arrêtée, également pour dîner, treize ans auparavant, le 23 mars 1564-1565, avant de faire son entrée dans Agen, alors que, parcourant pour la première fois ce pays en sens inverse, elle venait de Toulouse et descendait la Garonne avec toute la Cour de France, le roi Charles IX et Marguerite sa fille, âgée seulement de onze ans.

Le château de Lafox avait joué un rôle important dans les annales du pays. Au xiiie siècle, il appartenait à la grande famille des Alaman ; puis il passa à la maison de Lévis. Deux fois assiégé à l’époque des guerres anglaises, il fut plusieurs fois rebâti. En 1562, son propriétaire Armand de Durfort, seigneur de Lafox et de Bajamont y provoqua une réunion de tout le parti catholique sous les ordres de Monluc. Plus tard, il fut pris par Charles de Monluc à la tête de ses ligueurs et en partie dévasté. Il devint dans les derniers temps la propriété des Montpezat, puis des Monestay de Chazeron, enfin des Turenne et des Sinéty. Il appartient aujourd’hui à M. Henri de Brondeau.

Du vieux château, tel qu’il existait à l’époque où les deux Reines vinrent y dîner, il ne reste qu’une tour carrée à fenêtres à plein cintre, paraissant remonter au xiie siècle. L’élégant corps de logis, situé au Midi, et qui renferme ces grandes salles aux cheminées monumentales, éclairées par de hautes fenêtres à meneaux doubles, ne date que de l’extrême fin du xvie siècle ou plutôt du commencement du xviie siècle. Il dut être bâti après les dégâts qu’y commit Charles de Monluc, postérieurement, par suite, aux séjours qu’y firent Catherine et Marguerite.

Ce jour-là, 15 octobre, le Roi de Navarre vint les y trouver, pour les accompagner jusqu’à Valence d’Agen, « où il a cousché, combien qu’il eust délibéré de s’en retourner à Nérac, d’où il doibt passer à Agen et à Florence[46]. »

Le jeudi 16, ladicte dame et son train disne et souppe à Mouassac.

Toute la noblesse du Quercy vint y saluer les deux Reines, le sieur de Vesin, sénéchal du pays, et l’évêque de Cahors, en tête. Catherine les harangua comme ceux de l’Agenais et leur demanda de l’aider à établir la paix. Une indisposition passagère l’empêcha de repartir le soir même : « Je me trouvay hier mal de ma collique, écrit-elle le lendemain à son fils ; mais, graces à Dieu, je me porte à présent bien[47]. »

Le vendredi 17, ladicte dame et son train disne à Mouassac, souppe et couche à Chasteau-Sarrazin.

« Je disnerai à Moissac et j’iray couscher à Castel-Sarrazin ; et, demayn, Dieu aidant, qui est samedy, je serai à Toulouze, qui est où vostre sœur fera le lendemain son entrée, qui sera dimanche. » Marguerite, en effet, s’arrêta une nuit à Saint-Jorry.

Le samedi 18, ladicte dame et son train disne à Montèche, souppe et couche à Sainct-Jorry.

Le dimanche 19, ladicte dame et son train disne à Sainct-Jorry, souppe et couche à Tholouze.

Il semble, d’après la correspondance de Catherine que les deux Reines firent leur entrée simultanée dans Toulouse seulement ce jour de dimanche, 19 octobre. Elles ne devaient y rester que « quatre ou cinq jours » ; elles y restèrent, la Reine-Mère dix-huit jours, Marguerite vingt-trois jours.

Du lundi 20 au vendredi 31, séjour à Toulouse avec tout son train.

Dépenses de la Reine de Navarre pour ce mois d’octobre : 2 986 écus, 15 sols, 10 deniers. Payé seulement, 2 560 écus.

Novembre 1578

Du samedi 1er au dimanche 9, séjour à Toulouse avec tout son train.

Ce n’est guère que la correspondance de Catherine qui nous donne, comme toujours, des détails précis sur le séjour des deux Reines dans la capitale du Languedoc et sur ses occupations politiques.

Et d’abord, elle écrit le 20 octobre, lendemain de son arrivée, qu’elle a trouvé les gens de ce pays bien disposés pour la paix, souffrant tous de la guerre, « qui se faict jusqu’aux portes de la ville. » Aussi a-t-elle de suite conféré avec Joyeuse, en attendant le maréchal de Damville, et ayant retardé volontairement l’entrée officielle de la Royne de Navarre, sa fille[48].

Le 24, elle commence à se plaindre des lenteurs voulues, apportées par le Roi de Navarre et surtout par son parti, pour se trouver à la réunion projetée de l’Isle-en-Jourdain. Il est vrai que Turenne qui vient d’arriver lui a dit que « l’occasion de ce retardement dudict sieur Roy de Navarre estoit le furoncle qu’il avoit eu à la fesse, pour lequel il gardoit encore le lict, le jour qu’il partit de Nérac. » Des deux côtés, du reste, on commence à s’accuser de mauvaise foi. Et les raisons invoquées par le Vicomte ne convainquent plus la Reine-Mère, qui voit juste et comprend que les chefs du parti protestant, sinon le Roi de Navarre, cherchent à la leurrer.

L’entrée de la Reine de Navarre est encore remise au dimanche 26.

Elle eut lieu en effet ce jour-là au milieu d’un immense concours de peuple. Dom Vaissette dans son Histoire du Languedoc[49], Lafaille dans les Annales de la ville de Toulouse[50] et tous les chroniqueurs modernes nous fournissent à cet égard, à défaut des lettres de la Reine-Mère, les détails les plus circonstanciés. Le maréchal de Damville, plus tard duc de Montmorency et gouverneur du Languedoc, vint à leur rencontre, escorté de toute la noblesse de la province, des capitouls et des membres du Parlement. Les deux Reines entrèrent par la porte Saint-Étienne et furent conduites sous des arcs de triomphe et par les rues jonchées de fleurs jusqu’au palais archiépiscopal où elles logèrent. Une magnifique procession eut lieu ce jour-là, que suivirent les princesses ainsi que tous les gens de leurs maisons. Enfin une fête splendide fut offerte par Damville en leur honneur. L’accueil de la population fut des plus enthousiastes.

Le lendemain, 27 octobre, tomba malade Marguerite, sans doute des suites de la fatigue qu’elle avait endurée le jour de son entrée. « Je suis en grande peine, écrit Catherine le 29 octobre au Roi, son fils, de la malladie survenue à vostre sœur la Royne de Navarre, qui, depuis deux jours, a eu la fiebvre, et crains bien que sa dicte malladie nous arreste ici plus que nous ne pensions. »

Néanmoins elle espère partir quand même dans deux ou trois jours, après la fête des Morts, pour L’Isle-en-Jourdain, bien que le Roy de Navarre lui ait écrit « qu’elle ne trouverait pas en ce lieu grande commodité de vivres et de logis, » proposant de revenir à Castelsarrasin, « qui est, ajoute Catherine, ung aussi maubvais logis que L’Isle en Jourdain. » Aussi, puisque cela est décidé, ira-t-elle en ce dernier endroit et lui envoie-t-elle à Nérac, où il est toujours, le sieur de La Mothe Fénélon pour le prévenir qu’elle sera sans faute à L’Isle-en-Jourdain le 6.

Catherine quitta en effet Toulouse le jeudi 6 novembre au matin et arriva ce jour-là à L’Isle-en-Jourdain, d’où elle écrivit le soir même au Roi son fils pour lui dire qu’elle attendait le lendemain vendredi le roi de Navarre. Elle passa par Pibrac, où elle s’arrêta juste le temps d’écrire une courte lettre à sa cousine la duchesse d’Uzès[51], restée à Toulouse auprès de sa fille encore malade.

Marguerite demeura en effet, ainsi que nous l’apprend son livre de dépenses, dans la capitale du Languedoc trois jours encore. Elle n’en repartit que le lundi 10 novembre[52].

Le lundi 10, ladicte dame et son train disne à Tholouze, souppe et couche à Pibrac.

Le château de Pibrac, à 23 kilomètres ouest de Toulouse, venait d’être rebati à neuf et contenait un splendide mobilier. Il appartenait à Gui du Faur de Pibrac, conseiller au Parlement, conseiller d’État et chancelier de la Reine de Navarre. Quoique âgé à ce moment de cinquante-quatre ans, il subissait, l’accompagnant depuis Paris, le charme irrésistible de la beauté de Marguerite, passion qui devait lui susciter dans la suite, comme nous le verrons, tant d’embarras. Aussi fut-elle splendide la réception que « ce vieux fou de Pibrac » eut la joie de pouvoir faire en son propre château à l’objet encore inavoué de sa naissante flamme[53]. Marguerite en repartit le lendemain pour rejoindre sa mère à L’Isle en Jourdain.

Le mardi 11, ladicte dame disne à Pibrac, souppe et couche à l’Isle en Jourdain.

Du 12 au 18, séjour à l’Isle en Jourdain avec tout son train.

Catherine attendit quatre jours en ce petit village Henri de Navarre, qui toujours ne venait pas : « Il faut que je vous dye, écrit-elle le 8 novembre au soir au Roi son fils, que je suis merveilleusement faschée et ennuyée d’avoir esté desja icy trois jours sans avoir eu aucunes nouvelles de mon filz le roi de Navarre, ny du sieur de Lamothe-Fenelon que j’ay envoyé vers luy pour le haster de venir. Je leur viens encore de despecher ung lacquais, combien que l’on me dye que ce soir mondict filz vient coucher à Mauvesin, pour estre icy demain à disner. »

Le 13 novembre, Henri n’était point encore arrivé. Son entourage, craignant une surprise, l’empêchait de partir. Il se décida pourtant, sur les instances de M. de La Mothe-Fénélon, à quitter Nérac le 13 novembre, pour venir coucher le 14 à Mauvezin. De là il députe à la Reine-Mère, d’abord M. de Miossens, puis M. de Chaumont-Guitry, afin qu’ils tâtent le terrain, voient si on ne lui ménage pas quelque embûche et proposent pour lieu de conférence la ville de Pamiers, ou bien celle de Nérac. Catherine furieuse de se voir ainsi jouée refusa ces deux villes : « Et sur cela s’est retiré ledict Guitry, après toustefois que je luy ay bien lavé la teste, et fait sentir combien luy particulièrement m’avait d’obligation, voire de sa vie, ce qu’il n’a pas nié. » Puis elle envoya Pibrac à Mauvesin, afin de proposer au roi de Navarre Condom, Auch ou Agen, ou en fin de compte Nérac[54].

Celui-ci fit répondre par Pibrac et le vicomte de Turenne qu’il préférait Castelsarrasin, à condition qu’il eut la garde du château. Un conseil fut tenu, et finalement on accepta de part et d’autre la ville de Nérac.

Henri de Navarre ne vint donc point rejoindre les deux Reines à L’Isle-en-Jourdain, comme presque tous les auteurs l’ont écrit[55].

Catherine et Marguerite se décidèrent aussitôt à quitter ce lieu et à se diriger sur Auch et sur Nérac[56].

Le mercredi 19, ladicte dame et son train disne à L’Isle en Jourdain, souppe et couche à Gimont.

« Dès lundi, écrivait Catherine à son fils, Dieu aydant, je partiray d’icy pour aller coucher à Agimont, de là à Auch et à Condom, où je me délibère séjourner tant que je scaiche au vray que leurs dépputés soient tous ensemble arrivés audict Nérac ou ès environs, et qui seront pretz à commencer nostre dicte conférence. »

Ce jour-là, Henri de Navarre se décida enfin à venir à la rencontre des deux Reines. C’est Catherine qui nous l’apprend dans une de ses lettres, du 22 novembre, écrite d’Auch. « Le Roy de Navarre, dès le jour mesme que je party de l’Isle en Jourdain, vint au devant de moy et m’accompaigna jusqu’à Gimont, où il couscha, et vint encore le lendemain disner avec nous en une petite ville nommé Biet (sic)[57], qui est à deux lieues d’icy, dont il alla couscher à my chemin de Florence, où son train et la plupart de ses gens l’attendaient ; mais pour ce que la Reyne sa femme se trouva ung peu mal au Biet, elle y coucha, qui fut cause que je séjournay hier icy l’attendant[58]. »

Le jeudi 20, ladicte dame et partie de son train à Aubyet et le reste à Aulch.

Le vendredi 21, ladicte dame et tout son train disne à Aubyet, souppe et couche à Aulch.

Du 22 au 23, séjour à Aulch avec tout le train.

À cette date du 23 novembre s’arrête brusquement le livre des comptes de la Reine de Navarre et par suite son itinéraire. La correspondance de Catherine que sa fille ne quitta point jusqu’à son départ du Languedoc, l’année suivante, nous permettra de combler facilement cette lacune de trente-huit jours, le livre de comptes et l’itinéraire reprenant au 1er janvier 1579.

Les deux Reines, contrairement aux prévisions de Catherine qui pensait n’y rester que deux jours, séjournèrent à Auch du 22 novembre au 9 décembre 1578. Des incidents mémorables, que nous allons mentionner rapidement, signalèrent leur séjour dans la capitale de la Gascogne.

Catherine, qui avait se séparer de sa fille malade à Aubiet, fit son entrée la première le jeudi 20 novembre. Prévenus par une lettre du maréchal de Biron, du 16 novembre, datée de L’Isle-en-Jourdain[59]. les consuls se mirent en devoir de lui préparer, ainsi qu’à sa fille, une superbe réception. Leurs registres nous apprennent en effet que ce jour-là, cinq d’entre eux, en tête desquels marchait le sieur Vivès, qui la harangua, allèrent à sa rencontre « jusques au-dessus de la tour dicte de Las Lasserres et droict le coffin de la ville qui est auprès d’une grande borde sur le chemin de Toulouse. » La Reine « dans une grande coche, saillie sur le derrière », les remercia et les assura de la bonne volonté du Roi. Puis un enfant de la ville prononça un discours d’apparat. Après quoy la Reine fit son entrée par la porte de La Treille, où les consuls lui offrirent les clefs de la ville qu’elle refusa, disant qu’on les gardast pour le Roy son fils. » Elle fut conduite par toute la population « jusques au grand portail de l’église métropolitaine d’Auch, où elle feust receue avec ung Te Deum laudamus par Messieurs du chappitre honorablement en orgues, sonnant les grandes cloches. »

Le lendemain vendredi, 21 novembre, entrait à son tour solennellement la Royne de Navarre. « Au devant de laquelle, nous apprend le même document, et pour lui offrir la ville, feust Me Anthoine Laburguière, licentié, avec une bonne trouppe d’habitans à cheval ; et arrivés à la porte de La Trille, sur les deux heures après midy, les huict consuls avec leurs livrées virent ladicte Royne dans une litière couverte de velours noir, estant les quatre consuls d’ung cousté et les aultres d’un aultre. » Vivès la harangua et lui présenta les clefs, qu’elle refusa comme avait fait sa mère. Puis le cortège se mit en marche, « les consuls ayant mis le poesle sur la litière, sonnant les trompettes à l’entrée ; et les pièces de canon de la ville commencèrent à lascher sur le chevet de la rue du Puy, près l’Escalier Vieilh. » On se dirigea ainsi vers la cathédrale, au-devant de laquelle attendait le chapitre métropolitain en habit de chœur. « Mais pour ce que ladite Royne se trouvait mal, feust conduicte à son lougis, qui estoit à la Chanoynie, et où est la Mirandole. On avait semé les armoiries par les portals ; on avait faict portals de triomphes ; on luy fist chanter par les enfans de la ville des odes à l’entrée de ladicte ville[60]. »

Enfin le lendemain samedi, 23 novembre, entra le Roi de Navarre, « comte d’Armagnac, qui arriva de bon matin, sur les neuf heures, en Aux, veoir les Roynes, auquel dans le chasteau archiépiscopal et au grand tinel d’iceluy se présantèrent lesdits huict consuls, avec ledit Vivès leur assesseur. » Ces derniers ne purent s’empêcher, dans leur harangue, et en lui offrant les clefs, de regretter ce qui s’était passé deux ans auparavant, alors qu’ils lui avaient fermé les portes de la ville. « Non, non, répondit vivement Henri, je ne me souviens point du passé, mais que vous soiez gens de bien à l’advenir. Et prenant, ajoute le procès-verbal officiel, les clefs des mains dudict Vivès, dict tels mots : « Et bien, baillez les clefs ; » et après les rendit audict Vivès, disant : « Tenez, je vous les rends ; si vous m’estes tels que vous devez, je vous seray aussi tel que je dois estre. » Et le soir mesme, ledict seigneur Roy s’en alla à Fleurance[61]. »

Henri de Navarre ne trouva point la Reine-Mère à Auch, « étant allée, écrit Turenne dans ses Mémoires[62], à une tente de palombes, le maréchal de Biron et autres personnes de qualité estant avec elle. Nous trouvasmes la Reyne Marguerite et les filles. Le Roy de Navarre et ladite Reine se saluèrent et se tesmoignèrent plus de préparation à un accomodement qu’ils n’avoient faict les autres fois qu’ils s’estoient veus. Les violons vinrent, nous commençames tous à danser. »

Ici se place le fameux incident de la prise de La Réole par les catholiques, et, en réponse, de celle de Fleurance par le Roi de Navarre. Tous les chroniqueurs l’ont diversement raconté. La légende même s’en est mêlée. Une lecture attentive des textes et des documents authentiques nous permettra de ramener les choses à leur véritable point.

D’après la légende, que nombre d’auteurs présentent à tort comme fait historique, Mademoiselle d’Aquaviva, Anne d’Atri, plus tard comtesse de Château-Villain, « la bouffonne d’Atri » comme l’appelle d’Aubigné dans ses pamphlets toujours empreints d’exagération, aurait séduit à ce point, par ses charmes provocateurs, le vieux baron d’Ussac, gouverneur de la Réole et calviniste des plus zélés, que celui-ci pour se venger des quolibets à lui adressés par les gentilshommes du roi de Navarre aurait ouvert aux catholiques les portes de La Réole, une des plus fortes places de sureté accordées aux protestants par le traité de paix de Bergerac. Cette nouvelle parvint aux oreilles du Roi de Navarre, alors que le bal qu’une certaine Madame de la Barthe donnait à Auch aux deux Cours battait son plein. Henri fit signe à ses principaux lieutenants, quitta le bal, monta à cheval, se dirigea sur Fleurance, s’empara de cette ville et revint le lendemain à Auch, sans que la Reine-Mère ni personne de la cour ne se fussent doutés de l’aventure[63].

La correspondance authentique de Catherine, d’accord en cela avec les Mémoires du vicomte de Turenne, plus tard le duc de Bouillon, Mathieu dans son Histoire du règne de Henri III, etc., rectifient la plupart de ces erreurs.

Turenne nous apprend en effet qu’on dansait « chez les filles de la Reine Marguerite », en l’absence de la Reine-Mère, qui était allée à une chasse aux palombes, lorsque ce samedi 22 novembre, « la danse continuant », le jeune Armagnac arrive de Nérac et prévient le Roi de Navarre que « la nuit précédente La Réole avait esté surprise par le chasteau. » Tous les chefs protestants crurent à une trahison machinée par la Reine-Mère. Le Roi appelle Turenne. « Le premier mouvement, écrit-il, fut si nous estions assez forts pour nous saisir de la ville d’Aux. Il fut jugé que non. Soudain je dis qu’il nous fallait sortir et qu’avec justice nous pouvions nous saisir du mareschal de Biron et aultres principaux qui estoient avec la Reine pour ravoir La Réole. Nous prenons congé de la compagnie, qui trouva nostre despart plus prompt qu’elle ne se l’estoit promis, n’en sçachant l’occasion. » Le Roi de Navarre et sa petite troupe sortent d’Auch. La proposition de s’emparer de Biron est repoussée. En revanche on accepte celle de prendre Fleurance, puis Lectoure. Mais on décide que le roi de Navarre ira au devant de la Reine-Mère « pour lui tesmoigner son offense et son respect » ; ce qui fut fait. « La Reine fit fort l’estonnée et avec raison et donna quantité de paroles pour asseurer une réparation. » Biron de son côté promit « de faire tout debvoir pour faire rendre la place. »

Néanmoins ce qui avait été projeté fut exécuté. Le Roi de Navarre partit pour Fleurance avec sa petite troupe de gentilshommes, y arriva à trois heures de la nuit, força le poste, essuya quelques coups d’arquebusades, s’empara des tours, se rendit maître de la ville et y établit garnison. Cela fait, ajoute Turenne, « nous nous en allâmes à Nérac où toute la négociation fut en allées et venues pour avoir réparation de La Réole. À la fin, il fut résolu qu’elle seroit remise à ceulx de la religion, mais que le sieur d’Ussac en auroit le gouvernement et le sieur de Favas n’y rentreroit[64]. » Chose qu’on n’aurait certes point fait si d’Ussac avait trahi les intérêts des protestants.

La légende de ses amours séniles avec la bouffone d’Atri est donc inexacte, encore plus celle de sa trahison.

En tous cas, Henri ne revint pas à Auch le lendemain, ainsi que la plupart des auteurs l’ont écrit. Les lettres de Catherine confirment en tous points le récit du vicomte de Turenne. Dès ce soir du samedi 22, elle écrit à Damville : « Mon cousin, je suis en extrême peyne et ennuy de la nouvelle qui est veneue à mon filz le roy de Navarre que la Réolle a esté prinse par les Catholicques… Il est party tout soudain aller coucher à Florance, se délibérant à ce que j’ay sceu de s’acheminer du costé de La Réolle, ou j’ay si tost envoyé Beauregard, guidon de la compaignie de mon cousin le mareschal de Biron… Je n’espargneray rien pour en faire la justice, y aiant bien de quoy, s’ilz ne remectent soudainement la ville par doulceur, la forcer et faire battre de pièces et munitions d’artillerye. Etc[65]. » On le voit, Catherine est sincère dans ses désirs d’établir la paix. Ce contre-temps, qui va enrayer les négociations, la rend fort malheureuse et elle dit bien haut qu’elle veult joindre ses forces à celles du roy de Navarre, afin qu’il veoye de quel pied nous marchons pour reprendre ladicte ville[66]. »

Mêmes regrets, même politique, dans la lettre autographe qu’elle écrit de sa propre main au Roi de Navarre à Fleurance, deux jours après, le 24 novembre. « Cet chause me déplet ynfiniment, de peur que cesi aporte quelque remeument soudeyn… Le maréchal de Biron part demayn au matin pour y aller et, s’il est possible, entrer dedens, pour après la vous remectre entre les mayns, ynsin que le Roy la vous ha ballaye. Et moy je m’i achemine aussy, et m’en voy demayn coucher à Gigun, où je desirerès ynfiniment pouvoyr vous voir ; etc.[67]. »

Enfin ce sont les mêmes sentiments qu’elle exprime dans la longue lettre qu’elle écrit le lendemain 25 novembre d’Auch où elle est toujours, et où elle narre au roi son fils avec d’infinis détails toute cette affaire. La vraie cause de la surprise de La Réole, elle la donne ainsi : « Les habitans de La Réolie, se sentant infiniment oppressez et maltraictez du cappitaine Favas, ayant sceu qu’il estoit allé en une maison là auprès, qu’il a acquise à ce que je puis entendre de rapines, seroient, en aulcuns d’eulx catholiques, saisy dudict lieu et chasteau de La Réolle, sans qu’il y soit mort que deux ou trois hommes de ceulx qui estoient dedans. » Quant à la surprise de Fleurance par le Roy de Navarre, elle en atténue singulièrement l’importance. Sa version diffère en tous points de celle de Turenne[68], de Sully[69], et surtout de d’Aubigné[70]. D’après elle, Henri serait entré paisiblement dans Fleurance à dix heures du soir, aurait demandé les clefs de la ville, ce qu’il ne faisait jamais, et armé cinquante à soixante protestants. Les catholiques occupèrent alors les tours. Henri menaça d’y mettre le feu. Un coup d’arquebuse blessa à la jambe un des siens, chose qu’il s’empressa de faire savoir à la Reine-Mère. Celle-ci donna l’ordre à la garnison qui occupait les tours de se retirer, ce qui était déjà fait quand l’ordre arriva[71]. Ce coup de main sur Fleurance ne fut donc pas aussi hardi, d’après elle, que l’ont écrit les chroniqueurs protestants.

Elle a espoir du reste que tout s’arrangera. Elle renonce à aller à La Réole, où elle a envoyé Biron, et ses négociations avec le roi de Navarre sont près d’aboutir.

« Ma fille, la reyne de Navarre, ajoute-t-elle dans la même lettre, faict toujours les meilleurs offices en toutes ces affaires pour le bien de vostre service. » Néanmoins, bien que servant d’instrument docile aux vues de Catherine, Marguerite semble s’être assez désintéressée de la politique durant toute cette première partie du voyage. Son rôle est d’amuser la suite de la Reine, de présider aux fêtes, de faire avec ses dames et ses filles assaut de coquetterie et peut-être aussi de galanterie. « Un jour, écrit Brantôme, elle parut vestue fort superbement d’une robe de toile d’argent et coulombin à la Bolonaise, manches pendantes, coiffée si très richement, et avec un voile blanc, ny trop grand ny trop petit, et accompaignée avec cela d’une majesté si belle et si bonne grâce, qu’on l’eust plustot dicte déesse du ciel que Reyne de la terre[72]. »

À Auch, du reste, écrit Sully dans ses Œconomies royales, « on n’oyait plus parler d’armes, mais seulement de dames et d’amour ; nous devimmes tout à fait courtisant et faisant l’amoureux comme les autres ; ne nous amusans tous à autre chose qu’à rire, danser et courir la bague[73]. » Le temps se passa ainsi jusques au 9 décembre, non toutefois sans que Catherine ait eu le samedi 29 novembre une entrevue avec le roi de Navarre à Jegun, place assez forte, à 17 kilomètres au nord-ouest d’Auch. Après quelques récriminations, il fut décidé de part et d’autre que la conférence, si souvent annoncée, se tiendrait dans la première quinzaine de décembre à Nérac. Catherine rend compte de cette entrevue d’abord au maréchal de Damville[74], puis au Roi son fils, dans une lettre datée de Jégun du pénultième novembre, d’une longueur démesurée[75]. L’affaire de La Réole, celle de Fleurance, les préparatifs de la conférence en font tous les frais.

Marguerite n’accompagna pas sa mère à Jégun. « Et, après tout ce que dessus faict, le Roy de Navarre, s’estant retiré en son logis, m’a soubdain faict dire qu’il desiroit faire acte de bon mary et aller veoyr la reyne sa femme à Auch, dont j’ay esté bien aise, et est à l’instant monté à cheval luy quatre cinquième seullement, et s’y s’en sont allés au galop, m’asseurant qu’il sera demain matin de retour icy. »

Le 4 décembre, Henri se rendit de nouveau et pour la dernière fois à Auch, toujours, disait-il, pour voir sa femme. Il en profita pour signer ce jour-là avec la Reine-Mère un « acte public », en vertu duquel celle-ci s’engageait à restituer La Réole aux Protestants, et Henri de son côté Fleurance aux Catholiques[76].

La Cour allait enfin quitter Auch le lendemain, quand Marguerite retomba malade. Il fallut rester quelques jours encore. « Aussy, comme j’ay dit au Roy de Navarre, écrit Catherine, faut-il donner loisir à madicte fille de se bien guérir, de peur des inconvéniens quy adviennent ordinairement de telles maladies[77]. »

Enfin Marguerite se rétablit, et les deux Reines quittèrent Auch le 9 décembre pour prendre la direction de Valence, Condom et Nérac.

Décembre 1578

Le 9 décembre, ladicte dame disne à Auch, souppe et couche à Condom.

Du 10 au 15 décembre, séjour à Condom avec tout son train.

Les deux Reines arrivèrent à Condom avec tout leur train, le mardi 9 décembre au soir. Elles y séjournèrent près d’une semaine, jusqu’au lundi suivant, 15 de ce mois.

Dès son arrivée, Catherine envoie Pibrac au Roi de Navarre pour qu’il lui fixe le jour exact où elle pourra commencer la fameuse conférence, et aussi pour l’entretenir de l’affaire de La Réole, qui est loin d’être terminée[78]. En même temps, « elle donne charge auxdicts sieurs de Pibrac et de La Mothe, saichans bien que Nérac et les environs ne pourraient pas longuement suffire à la nourriture de tant de gens et de chevaulx qui y seroient, de regarder d’accorder quelque lieu, comme ceste ville (Condom), ou Agen, ou bien le Port-Sainte-Marie, qui n’est pas loing dudict Nérac, pour faire nostre dicte conférence[79]. » Au fond Catherine n’a pas grande confiance en la foi du Béarnais. Elle redoute de s’enfermer dans Nérac, ville huguenote, et si elle ne partage pas les mêmes craintes qu’Henri de Navarre, lors de son séjour à Toulouse et à L’Isle en Jourdain, elle a peur surtout qu’on lui force la main. Aussi, après y être restée deux ou trois jours, espère-t-elle que la conférence se tiendra ailleurs. Ces craintes nous expliquent le long séjour qu’elle va faire au Port-Sainte-Marie, où elle se trouvera plus en sûreté qu’à Nérac même.

En attendant, elle profite de son séjour à Condom pour mettre un peu d’ordre dans les affaires de cette ville. « Car, dit-elle, les querelles d’entre le lieutenant-général et le lieutenant-particulier ont tellement brouillé les habitants qu’ils sont tous divisez, et, oultre cela, soubz coulleur de la confrairie Saint-Pierre, qui y est il y a desja quelque temps, et d’ung aultre de Saint-Arnault qui s’y commance, la noblesse catholique, au moings une bonne partye, y sont attirez, de la sorte que la fin n’en pourrait estre que préjudiciable à vostre service[80]. » À cet effet, elle a réuni les principaux de la ville, les a harangués et leur a demandé « de se despartir desdites confréries, n’y proceddant pas du zèlle qu’ils eussent de prier Dieu, mais pour faire des menées et s’en servir bien souvent à de très maulvaises choses, comme ils avoient bien congneu par ces meurtres qui sont advenus en cette ville, et la hayne si grande que l’on veoit entre lesdits habitans, tous catholiques ; car ceulx qui sont huguenotz ont leur aultre passion à part. » Elle va en référer à la Chambre tripartie d’Agen[81].

Ce court tableau ne nous édifie-t-il pas sur les mœurs étranges et les usages, encore bien peu civilisés, des petites villes de la Gascogne, à la fin du xvie siècle ?

Le 15 décembre, départ de Condom, arrivée à Nérac.

Le 15 décembre au matin, les deux Reines quittèrent Condom et arrivèrent « d’assez bonne heure » à Nérac.

« Le Roy de Navarre, écrit le lendemain Catherine à son fils, s’est accompaigné le plus qu’il a peu, faict et faict faire tout ce qu’il se peult envers nous et ceulx de nostre suitte de bon accueil et de chère, monstrant d’estre infiniment aize que soions venu icy si franchement que nous avons[82]. »

Dès le 6 décembre en effet, Henri de Navarre se préoccupait de l’arrivée et du séjour des deux Reines, et il écrivait ce jour là une lettre à M. de Bourrouillan, gouverneur d’Eauze, pour le prier, lui et M. de Mauhy, de lui envoyer à Nérac tout le gibier qu’ils pourraient prendre[83].

C’est le 15 décembre, nous apprend la lettre de Catherine, rectifiant ainsi les nombreuses erreurs commises par la plupart des chroniqueurs[84], qu’eut lieu officiellement l’entrée de la Reine de Navarre dans sa bonne ville de Nérac. Comme à Bordeaux, comme à Agen, à Toulouse, à Auch, elle fut splendide. Pour un moment se turent tous les dissentiments politiques. Les deux partis mirent bas les armes ; et le peuple, espérant voir surgir, avec le Roi et la Reine de Navarre dans les murs de la capitale de l’Albret, une ère de prospérité et de grandeur, s’associa pleinement à la joie générale.

Les trois Cours, celle de la Reine de Navarre, qui partout passait la première, celle de Catherine, et enfin celle du Roi de Navarre, étaient au complet.

Il serait trop long d’énumérer ici les noms de ces personnages plus ou moins célèbres, qui tous jouaient ou jouèrent plus tard un rôle dans l’histoire politique ou scandaleuse de la Cour de Nérac. Aussi bien a-t-on vu en tête de notre chapitre l’état complet de la maison de la Reine de Navarre. Autour de Catherine étaient groupés les grands conseillers de la couronne et tout l’escadron volant, Madame de Sauves, Dayelle, Anne d’Atri, Hélène de Surgères, de la Vergne, etc. ; et à côté du Roi de Navarre et de sa sœur, la douce et mélancolique Catherine de Bourbon, cette glorieuse phalange de Gascons dont l’intrépidité et l’audace allaient le porter sous peu sur le trône de France, et au premier rang desquels se remarquaient Turenne, Lanoue, Favas, Miossens, de Batz, d’Aubigné, Frontenac, Duplessis-Mornay, Pardaillan, Lusignan, Roquelaure, Lavardin et tant d’autres encore, sans oublier Maximilien de Béthune, baron de Rosny, plus tard duc de Sully.

De tous les écrivains qui ont raconté l’entrée de Marguerite dans Nérac, le comte de Villeneuve-Bargemont est encore celui qui, dans sa Notice historique sur la ville de Nérac[85], nous fournit les renseignements les plus précis. Marguerite fit son entrée, montée sur une haquenée blanche, entre son époux et sa belle-sœur Catherine de Bourbon. « Des poèmes, des vers de tous genres, écrit M. de Villeneuve, exprimèrent à l’envi l’allégresse commune. Salluste du Bartas, qui habitait alors le château d’Hordosse, ne laissa pas échapper cette occasion de mettre ses talens en évidence. Il composa un dialogue en trois langues, qui fut récité à la Reine par trois demoiselles du pays qui représentaient, l’une la Muse Gasconne, l’autre la Muse française, la troisième la Muse latine. » Chacune se dispute la faveur de souhaiter à la Reine la bienvenue. La Muse Gasconne l’emporte ; et son discours en vers est si bien accueilli que Marguerite ravie « s’empresse de détacher de son cou un mouchoir de gaze et l’offre à la demoiselle Sauvage, comme un gage de satisfaction. Longtemps, ajoute M. de Villeneuve, on a conservé dans la famille Sauvage le cadeau que la Reine avait fait à la Muse Gasconne[86]. »

Les deux Reines furent logées au château de Nérac, nouvellement achevé, dont les vastes salles pouvaient facilement contenir tout leur train.

Le château de Nérac, décrit déjà par M. de Villeneuve-Bargemont[87] et par nous[88] tel qu’il se trouvait à la fin du xvie siècle, grâce au plan en relief en liège qui, très exact, est pieusement conservé au Musée de Nérac, affectait la forme d’un vaste quadrilatère. L’aile occidentale, la plus ancienne, flanquée de quatre tours rondes, remontait à la fin du xive siècle. L’aile septentrionale, la seule conservée de nos jours et qui présente encore cette élégante galerie en arceaux surbaissés, soutenus par des colonnes ornées de chapiteaux curieusement ouvragés, date de la seconde moitié du xve siècle. L’aile orientale, donnant sur la Baïse, était l’œuvre d’Alain d’Albret, qui vivait de 1471 à 1522. L’aile méridionale enfin, qui comprenait au rez-de-chaussée la salle des Gardes de vingt mètres de long sur six de large, au-dessus les grands salons de réception, et à l’extrémité, au coin oriental, la chambre du Roi, avait été la dernière construite, les uns disent par Henri d’Albret, d’autres seulement par la mère du futur Henri IV. Un large perron donnait de ce côté sur le jardin du Roi, qui se déroulait, planté d’ifs et de lauriers, sur la rive gauche de la Baïse, tandis que de l’autre côté, sur la rive droite, venait d’être plantée cette magnifique Garenne, qui subsiste encore, et dont Marguerite nous entretient dans ses Mémoires avec tant de complaisance.


Cliché Ph. Lauzun                                                                                                    
CHÂTEAU DE NÉRAC
d’après une reproduction exécutée en liège

C’est dans ce cadre que vont se dérouler pendant sept ans les évènements dont nous avons entrepris de rappeler le souvenir. C’est là qu’au moment même de l’arrivée des deux Reines s’engagèrent ces fameuses négociations, but du voyage de Catherine et si ardemment désirées par elle.

La Reine-Mère cependant ne les mena point avec autant de célérité qu’elle l’aurait voulu. Il lui fallut attendre encore près de deux mois avant d’arriver à ses fins.

Mais reprenons sa correspondance, qui est le guide le plus sûr que nous puissions trouver ; et, résumant le plus sommairement que nous pourrons ses lettres d’une prolixité extrême, arrivons à demêler pendant ces quinze derniers jours de décembre son itinéraire, en même temps que celui, un peu plus difficile à déterminer, de sa fille Marguerite.

Du 16 au 22 décembre, séjour à Nérac avec tout son train.

L’affaire de La Réole n’est point terminée, celle de Lauzerte non plus. En outre Catherine se préoccupe de ce qui est advenu à Périgueux « où Vivans a faict tuer à coup de dague, puis jeter dans la rivière cinq ou six catholiques et sans occasion[89]. » Elle a eu la veille au soir une longue entrevue avec Henri de Navarre, Turenne et Guitry, à la suite de laquelle elle a signé avec son gendre, à l’égard de La Réole, ce qu’elle appelle « des promesses réciproques[90]. » Néanmoins elle craint que la reddition de cette ville ne traîne bien en longueur[91].

Le 18, Catherine écrit, toujours de Nérac où elle est avec sa fille, une lettre à Monsieur de Bellièvre au sujet des affaires de Normandie[92].

Le 20, jour de samedi, elle prévient Damville que « Dieu aydant, elle partira de Nérac lundi prochain pour aller faire sa feste à Agen[93]. »

Elle quitta en effet Nérac ce jour là, mais ne dépassa pas le Port-Sainte-Marie.

Si, pendant ces huit jours passés à Nérac, la politique fut contraire à Catherine, sa fille Marguerite, ses dames d’honneur, le Roi de Navarre, ses courtisans, s’en consolèrent plus facilement qu’elle, en ne songeant qu’aux fêtes, qu’aux bals, qu’aux réjouissances, et disons-le aussi qu’à l’amour.

Jusqu’à ce jour en effet Henri de Navarre et ses amis n’avaient fait qu’entrevoir à La Réole, à Agen, et quelques heures à peine à Auch, le brillant cortège dont s’étaient entourées les deux Reines. À peine le temps pour chacun de jeter leur dévolu sur quelqu’une de ces jolies filles.

Cette première semaine passée ensemble à Nérac aviva leurs flammes ; si bien qu’il faut voir peut-être uniquement dans les sentiments de ces jeunes hommes, aux passions violentes, et dans leur désir de prolonger autant que possible ces heureux moments, les seuls motifs du retard apporté par eux à la fameuse Conférence. À la chronique politique et diplomatique force nous est donc d’associer dès ce moment la chronique amoureuse, et, sans donner la moindre foi aux exagérations du Divorce Satyrique, de nous faire à notre tour l’écho de ce qui se disait sous ce rapport à Nérac.

C’est le sage Sully qui, dans ses Mémoires, nous en apprend déjà fort long : « Le mélange des deux Cours, qui ne cédaient en rien l’une à l’autre du côté de la galanterie, produisit l’effet qu’on devait en attendre. On se livra aux plaisirs, aux festins, ballets et fêtes galantes. Mais, pendant que l’amour étoit devenu l’affaire la plus sérieuse de tous les courtisans, Catherine ne s’occupait que de sa politique. Pour ceste fois elle ne réussit point… De cette bigarrure de politique et de galanterie, il y aurait de quoi grossir considérablement ces Mémoires, etc.[94] »

C’est Marguerite elle-même qui, dans ses Mémoires, proclame hautement les infidélités de son mari, mais non les siennes. « La Reyne ma mère pensait demeurer peu de temps en Gascogne ; mais il survinst tant d’accidents, et du costé des Huguenots et du costé des Catholiques, qu’elle fust contrainte d’y demeurer dix-huit mois ; et, en estant faschée, elle vouloit quelquefois attribuer que cela se faisait artificieusement pour voir plus longtemps ses filles, pour ce que le Roy, mon mary, estoit devenu fort amoureux de Dayelle, et M. de Thurene de La Vergne ; ce qui n’empeschoit point que je ne reçeusse beaucoup d’honneur et d’amitié du Roy, qui m’en tesmoignait aultant que j’en eusse peu désirer[95]. »

Il est donc bien avéré, sans aller plus loin, que le Roi de Navarre, dédaignant Mme de Sauves, brûlait d’amour pour Dayelle, la belle Grecque, échappée miraculeusement d’après d’Aubigné au sac de Chypre en 1571 et sœur de l’historien Davila ; que Turenne n’avait des yeux que pour Mademoiselle de La Vergne ou de La Vernay, comme l’écrit Castelnau, toutes deux demoiselles d’honneur de Catherine ; que Marguerite, oubliant les absents et les morts, Henri de Guise, La Mole, Bussy, semblait se rapprocher de Turenne ; que Pibrac enfin, « ce vieux fou de Pibrac », ne craignait point, malgré ses cheveux blancs, de se jeter aux pieds de Marguerite « qui ne le regardait même pas. » Marguerite est l’âme de toutes ces fêtes. C’est elle qui préside au bal, qui mène la danse, qui organise les collations, répondant ainsi aux secrets désirs de sa mère, la rusée Florentine. Aussi un de nos plus aimables poètes a-t-il pu avec raison s’écrier :

« Quel désastre à Nérac ! Ces yeux d’enchanteresses,
Comme neige au soleil, fondirent tous les cœurs ;
Vénus, comme toujours, y vainquit les vainqueurs.
Mars désarmé baissa le front sous les caresses
De la grecque Dayelle, et Fosseuse et Rebours
Firent de son grand casque un nid pour les amours[96]. »

Henri de Navarre du reste ne négligeait rien pour rendre le séjour de Nérac agréable aux deux Reines et à leur suite. Les livres des comptes, à l’article dépenses, conservés à Pau[97], nous édifient pleinement à ce sujet. « Il paie 138 livres à maître François Geoffrion, son apothicaire, pour l’achat d’un tonneau de vin de Graves, pris à Bordeaux, et l’avoir fait mettre en bouteilles et apporter à Nérac, pour servir aux festins faits par S. M. aux Reines. »

« Idem, au sieur d’Espalungue, écuyer de son écurie, 500 l. 13 sols t. pour onzes pipes de vin blanc et clairet, achetées à La Réole pour la venue des Reines. »

« À Jehan de Lignac, chasseur, demeurant à Nérac, 13 l. 6 s. pour 50 perdrix vives, 46 cailles, 8 tourtres, 12 palombes et un épervier que S. M. a achetés. »

« À François Du Vignau, l’un des jardiniers du Roy ès jardins du château de Pau, 50 l. t. pour faire porter de Pau à Nérac des pavies, pêches, poires et autres fruits, en deux voiages. »

« Puis, c’est un don de 25 écus à des joueurs de violon[98] ; de « 35 écus à Masimiano Milanino, chef de la compagnie des comédiens italiens, qui suivent le Roi[99] ; à Guillaume Meret 6 l. 10 pour aller et retour de Nérac à Pau, chercher du beurre frais et des milhas pour servir aux festins faits par S. M. aux Reines ; à divers habitants de Nérac, 44 l. 19 s. t. pour louage de chevaux qui avaient esté prins pour porter et conduire les Italiens, joueurs de comédies, par ordre du Roy, durant les festins, à la Vénerie et arrivée de la Reyne-Mère, du Roy et de la Reyne, nostre maîtresse. »

Et toujours « à Jehan Perichot, sommelier de panneterie, 7 l. 5 s. t. pour deux douzaines de grands couteaux achetés pour servir aux festins que S. M. donna à la Reine-Mère et aux dames et filles de sa suite, durant le mois de février. » Enfin « à Bertrand, laquais du Roy, 43 s. 6 d. t. pour sa dépense et celle de quatre de ses compagnons, étant allé conduire la Reine, nostre maîtresse, du Port-Sainte-Marie à Agen » et, dépense caractéristique, « le 7 février 1579, le Roy étant chez Madame et chez les filles, deux boîtes de massepains, 3 écus, 15 sols t. ; une boîte de massepains à M. de Roquelaure pour porter chez les filles ; pour le Roy, douzes onces de sucre pour les filles de la Reine-Mère, pour leur faire de l’eau sucrée ; massepains pour elles, au sortir du bal ; enfin, détail plus caractéristique encore, le 11 mars, par ordre du Roi, pour Mlle Fousuze (sic), une fiole de sirop de capillaire et jumbe par l’ordonnance de M. de la Magdaleine, un sirop somnifère, conserves de roses, sucre candi, etc.[100] »

Mais n’anticipons pas.

Nous avons laissé les deux Reines à Nérac le dimanche 21 décembre. Elles en partirent le lendemain 22 pour le Port-Sainte-Marie. Bien que les livres de comptes de Marguerite contiennent une lacune jusqu’au 1er janvier suivant et que nous ne puissions ainsi préciser d’une façon absolue quel fut son itinéraire durant ces quinze derniers jours de l’année 1578, les lettres de sa mère sont assez explicites pour nous permettre d’affirmer non seulement qu’elle la suivit au Port avec une partie de son train, mais qu’elle ne la quitta même pas de tout ce mois de décembre.

Du 22 au 31 décembre, séjour au Port-Saincte-Marie.

Le départ de la Reine de Navarre, suivant sa mère au Port-Sainte-Marie, est précisé par cette lettre de Pinart au Roi, datée de cette dernière ville. « Le sieur Pinart mande au Roi que la Reyne sa mère et la Reyne de Navarre sont parties de Nérac et sont arrivées au Port-Sainte-Marie[101]. »

Catherine ne voulait et ne pouvait point rester dans Nérac, ville huguenote, pour les fêtes de Noël. Elle choisit le Port-Sainte-Marie, aussi bien pour faire librement ses dévotions ce jour-là qu’avec l’espoir que ce serait dans ce lieu ou tout autre voisin, mais jamais à Nérac, que se tiendrait la conférence.

« Il y a, écrit-elle à son fils le jour de la feste de Noël, une petite abbaye de religieuses qui est tout icy contre, mais de-là la rivière de la Garonne, où nous pourrions nous assembler, si leurs dépputez font difficulté de venir en cette ville. Je pense en avoir response avant disner, et peut-estre que mondict fils le roi de Navarre, à ce que m’a dict ma dicte fille, pourra venir icy à disner, afin que nous nous résouldions du lieu et du jour ; car ils n’ont plus d’excuses et ne sçauroient avec que raisons davantaige prolonger, estans tous leurs dictz députez arrivez, ou ce qui reste à venir sera icy demayn[102]. »

Catherine fait allusion dans cette lettre au prieuré du Paravis, situé sur la rive gauche de la Garonne, dans la plaine, en face du Port-Sainte-Marie, qui était un couvent de filles nobles de l’ordre de Fontevrault. Fondé en 1130 par Amalvin de Paradis et sa femme Onor, sous l’épiscopat de Raymond Bernard du Fossat, ce monastère prospéra jusqu’à la Révolution[103]. Il n’en reste plus aujourd’hui que l’église, vaisseau roman du xiie siècle, de 47 mètres de long sur 9 de large à l’intérieur, une partie des cloîtres, refaits en 1604 après les dévastations commises par les troupes protestantes du capitaine Marchastel en septembre 1569, et, sans doute grâce aux libéralités de Catherine qui semble l’avoir affectionné tout particulièrement, quelques autres constructions appropriées aux besoins modernes. L’inventaire des titres du couvent du Paravis, qui attend encore son historien, gros registre in-folio d’une réelle importance, a été retrouvé naguère dans une maison du Port-Sainte-Marie et acheté pour la bibliothèque départementale de Lot-et-Garonne.

Dans sa remarquable Introduction au tome vi des Lettres de Catherine de Médicis, p. xii, M. le comte Baguenault de Puchesse écrit sur la foi d’un simple renseignement, fourni par notre regretté collègue M. Ph. Tamizey de Larroque, que pendant tout son séjour au Port, c’est-à-dire durant six semaines entières, Catherine logea au couvent du Paravis. Nous croyons cette assertion erronée. Toutes les lettres de Catherine, à cette époque, sont en effet datées, non du Paravis, mais du Port-Sainte-Marie. Le Paravis était en outre sur la rive gauche, c’est-à-dire en Gascogne ; le Port-Sainte-Marie sur la rive droite, en Agenais, c’est-à-dire dans le domaine de sa fille. Au Port, Catherine était chez elle ; au Paravis, elle aurait été plutôt chez son gendre. De plus, avec toute sa suite, aurait-elle pu se loger dans un monastère relativement petit et déjà entièrement occupé par les religieuses ? Nous croyons donc que durant ces six semaines la Reine-Mère et sa fille logèrent au Port-Sainte-Marie même, et s’il fallait leur assigner une maison plutôt qu’une autre, nous pencherions pour le fort de Balan, vieux logis sur les bords mêmes du fleuve, qui passait, il y a quelques années encore avant d’être en partie détruit, pour avoir servi de tout temps à recevoir les hôtes illustres.

Malgré les visites presque quotidiennes du roi de Navarre, les négociations n’étaient pas près d’aboutir. Elles étaient arrêtées par de continuelles complications, telles que l’affaire de Lauzerte, celle de Périgueux, la prise de Langon par les catholiques pour venger le meurtre du capitaine La Salle du Siron[104], un des leurs, par les habitants presque tous huguenots, et surtout l’affaire de La Réole, toujours en suspens.

Condom cependant avait été pacifié. « Je disposé si bien les choses, « écrit Catherine à son fils, quand j’y feust et despuis j’ay escript si fréquemment pour les faire vivre en paix, puisque les deux lieutenans en estoient sorty, que lesdits habitans se sont accordez d’observer ung ordre duquel je vous envoi le double et que le sieur de Saint-Orens que j’y ay laissé, le chevalier de Montluc et les autres gentilzhommes et habitans ont signé[105]. »

Un grand conseil est tenu au Port, le 26 décembre, « où estoient le Roy de Navarre, le vicomte de Turenne, Guitry et Segur » et du côté de la Reine-Mère, sa fille et tous ceulx du conseil. Les affaires de Langon, de la Réole, en ont fait les frais ; et il a été décidé en outre qu’on choisirait Nérac comme lieu de la conférence. « Car, si l’on parloit de changer ledict lieu de Nérac avant que lesdicts députez y fussent arrivez, il y auroit danger, entendant ces nouvelles, qu’ilz s’en retournassent ; ce qui m’a faict taire, » écrit mélancoliquement Catherine. Et elle ajoute :

« Excusez-moy, si je ne vous escriptz pour ceste heure de ma mayn ; car j’ay mon mal de bras que m’avez veu quelquefois, qui me descend jusques sur la main que j’en ay enflée. Mais j’espère pourtant d’en estre bientost de tout guérye[106].

La patience de la Reine-Mère est extrême ; et il n’est pas de choses qu’elle ne fasse pour asseoir la paix. « Il y a beaucoup de leur costé, aussy bien que du nostre, qui font tout ce qu’ils peuvent pour nous troubler. Toustefois, je persévère tousiours pour surmonter tout cela. »

Là est sa vraie politique. Elle ne voit rien en ce moment que le bonheur du Royaume ; elle ne négocie que pour l’intérêt de ses sujets.

Ainsi se passa cette fin de l’année 1578, chaque parti gardant ses positions, mais le Roi de Navarre d’un côté, la Reine-Mère de l’autre, n’épargnant aucune peine pour arriver à la solution tant désirée.

  1. Arch. nat., KK, vol. 163.
  2. Que nos lecteurs nous pardonnent cette longue liste de noms, dont la plupart ne présentent que peu d’intérêt. En la donnant in extenso pour cette première année du voyage, 1578, nous avons tenu à leur montrer ce que pouvait être à cette époque l’état de maison d’une fille de France, en même temps reine de Navarre. Pour les autres années, nous nous contenterons de signaler simplement les changements survenus dans ce nombreux personnel.
  3. Arch. nat. KK, vol. 163, p. 87 et suivantes.
  4. Chastres est aujourd’hui Arpajon.
  5. Angerville-la-Rivière, canton de Puiseaux, arr. de Pithiviers (Loiret).
  6. Cléry-sur-Loire, arr. d’Orléans.
  7. Saint-Dye-sur-Loire, canton de Bracieux, arr. de Blois.
  8. Nous croyons devoir arrêter, dès à présent, le chiffre journalier des dépenses de la reine Marguerite. Nous nous contenterons de donner à la fin de chaque mois le total de ses dépenses et de celles de sa maison.
  9. Champigny, canton de Richelieu, arr. de Chinon, célèbre par sa sainte chapelle.
  10. Sans doute Couhé-Vérac, arr. de Civray (Vienne).
  11. Bien qu’on lise Bonay, ce doit être Renay, près de Mansle, arr. de Ruffec.
  12. Nègres pour Aigre, chef-lieu de canton de l’arr. de Ruffec.
  13. Neufvy pour Neuvicq, canton de Malha (Charente-Inférieure).
  14. Brantôme. Vie des Dames Illustres, art. Marguerite de Valois.
  15. Tollyer pour Étauliers, canton de Saint-Ciers, arr. de Blaye (Gironde).
  16. Chronique Bordelaise par de Lurbe, p. 91.
  17. L’archevêque de Bordeaux était alors Antoine de Sansac.
  18. Chronique Bordelaise par Jean de Gauffreteau, p. 204, t. i.
  19. Histoire de Bordeaux par l’abbé Patrice John O’reilly. t. ii, p. 302.
  20. Bibl. nat. Fonds français, no 15905, fo 139. — Cf. : Lettres de Catherine de Médicis, par M. le comte Baguenault de Puchesse, t. vi, p. 87.
  21. Dom Devienne écrit M. de L’Agebaston.
  22. Brantôme, Vie des Dames Illustres, art. Marguerite.
  23. Chronique Bordelaise par Jean de Gauffreteau. — Id. par de Lurbe. — Id. par Jeban Darnalt (1606). Histoire du collège de Guienne par E. Gaullieur (Paris, 1874). — Histoire du Parlement de Bordeaux par M. Boscheron des Portes (1877). — Histoire de Bordeaux par M. C. Jullian (1895). — Archives historiques de la Gironde : pièces diverses ; etc.
  24. Fonds français, no 3300 fo 41, ancien fonds Béthune, 8803. « Despeches faictes par la Reine-Mère au voiage faict par elle en Guienne, Languedoc, Provence, Dauphiné, etc. — Voir aussi Lettres de Catherine de Médicis, publiées par M. le comte Baguenault de Puchesse t. vi, p. 40.
  25. Négociations diplomatiques de la France avec la Toscane, documents publiés par Abel Desjardins dans la collection des Documents inédits de l’Histoire de France, t. iv, p. 193.
  26. Fonds français, no 3300, fo44. — Voir aussi Lettres de Catherine de Médicis, publiées et si bien annotées par M. le comte Baguenault de Puchesse, t. vi, p. 46.
  27. Lettres missives d’Henri IV par Berger de Xivrey, t. 1, p. 200.
  28. Lettres de Catherine de Médicis, t. vi., Appendice, p. 388 et suiv.
  29. Lettre de Catherine au roi son fils, du 4-5 octobre 1578. Fonds français, no 3300, fo 46 verso et fo 50 verso. — Cf. : Lettres de Catherine, t. vi, p. 30 et suiv.
  30. Archives de M. Eugène de Serres. Cf. : Lettres de Catherine, t. vi, p. 60.
  31. Fonds français, no 3300, fo 52. — Cf. Lettres de Catherine, t. vi, p. 63.
  32. Lettres missives d’Henri IV, 1, p. 201.
  33. Fonds français, no 3300, fo 52. — Lettre de Catherine au roi son fils. — Cf. : t. vi, p. 63. — On n’a pas oublié que l’année précédente, le roi de Navarre, à la tête de ses troupes, avait mis le siège devant cette ville.
  34. Fonds français, no 3300, fo 52. Lettre de Catherine au roi son fils.
  35. Fonds français, no 3300, fo 55. Longue lettre, datée d’Agen du xie d’octobre.
  36. Idem.
  37. Idem.
  38. Lézignan pour Lusignan-Grand, à 12 kil. d’Agen, canton du Port-Sainte-Marie.
  39. Archives mun. d’Agen. BB. 33, fo 32 et 33, où est relaté le curieux récit de l’entrée des deux Reines, et aussi CC. 314.
  40. Arch. mun. d’Agen, BB. 33, fo 28. Lettre publiée déjà par M. G. Tholin dans le tome ix, 2e série, p. 145, du Recueil de la Société Académique d’Agen, 1885.
  41. L’original de cette chronique appartient à l’Évêché d’Agen. Une bonne copie en existait à la bibliothèque du château de Saint-Amans, laquelle, après diverses péripéties, a fini par être achetée par la bibliothèque départementale de Lot-et-Garonne où elle se trouve aujourd’hui. (Voir le chapitre sur les Ermites de Saint-Vincent, t. 1, de nos Couvents de la ville d’Agen.)
  42. Arch. mun. d’Agen, BB. 33.
  43. Fonds français, no 3300, fo 55 et suiv.
  44. Idem. fo 62. — Cf. : Lettres de Catherine de Médicis, t. vi, p. 398.
  45. Le 18 mars en effet de cette année 1578 et afin de payer autrement qu’en argent, comme il le lui avait promis au moment de son mariage, la dot de sa sœur, Henri III, par lettres patentes, lui céda les comtés d’Agenais, de Rouergue et de Quercy, les jugeries de Rivière, Verdun, et le comté de Gaure, pour lui tenir lieu des 67 500 livres de rente qui constituaient sa dot. — Arch. mun. d’Agen, BB. 33, fo 30. — Idem. BB. 33. Voir aussi Archives historiques de la Gironde, t. xxix, p. 163, 1894.
  46. Fonds français, no 3300. Lettre de Catherine à Henri III. — Cf., t. vi, p. 77.
  47. Lettres de Catherine. Fonds français, no 3300. — Id. t. vi, p. 78.
  48. Fonds français, no 3300, fo 64. — Cf. t. vi, p. 80.
  49. Dom Vaissette, Histoire du Languedoc, t. xi, p. 18.
  50. Annales de la ville de Toulouse, par Lafaille. — id. Archives municipales de Toulouse, etc.
  51. Fonds français, no 3385, fo 5.
  52. Il n’est pas un chroniqueur ancien ou moderne qui n’ait modifié à sa guise ou d’après des documents erronés l’itinéraire des deux Reines. Les uns, comme M. de Saint-Poncy, les font aller directement d’Agen à Auch (tome ii, p. 29), d’Auch à L’Isle-en-Jourdain, et de là à Toulouse (id. p. 36). D’autres comme Mongez, dans son Histoire de Marguerite de Valois, p. 235, les font quitter La Réole pour se rendre directement à Auch, etc. Le travail que nous entreprenons rectifiera ces erreurs qui se renouvèlent tout le temps que les deux Reines passèrent en Gascogne.
  53. Histoire générale du Languedoc, t. v. — Voir d’Aubigné, le Divorce satirique, etc.
  54. Lettre du 14-15 novembre 1578. Fonds français, no 3300, fo 85. Cf. t. vi, pp. 117-121.
  55. M. Léo de Saint-Poncy, Histoire de Marguerite de Valois, t. ii, p. 38. — De Batz, Henri IV en Gascogne, p. 126, etc.
  56. C’est par une erreur incompréhensible que M. le comte de Saint-Poncy, qui se targue d’avoir eu en mains « les comptes authentiques de la trésorerie de la Reine de Navarre », écrit à la page 38 du t. ii de son Histoire de Marguerite de Valois que ce fut à la suite du séjour des Reines à l’Isle-en-Jourdain qu’Henri de Navarre les convia à une chasse à l’ours dans le pays de Foix. Cet épisode, sur lequel nous reviendrons ne se présenta que l’année suivante, en mai 1579.
  57. Biet pour Aubiet, village à 18 kilomètres à l’est d’Auch.
  58. Lettre de Catherine au roy son fils du 22 novembre. Fonds français, no 3300, fo 90 vo. — Idem, t. vi, pp. 129-130.
  59. Arch. mun. d’Auch. BB. 5. Reg. in-fo (1556-1581).
  60. Archives de la ville d’Auch. Livre vert. Ce procès-verbal de l’entrée des deux Reines a été publié in-extenso par M. Lafforgue, dans son Histoire de la ville d’Auch, t. I, p. 402-407. Appendice. — Cf. : Monlezun, Histoire de la Gascogne, t. v, 421, Manuscrits d’Aignan du Sendat, etc.
  61. Archives municipales d’Auch. Livre vert Rég. des délibérations.
  62. Mémoires du duc de Bouillon. Collect. Petitot, t. xxxv., p. 174.
  63. Mongez, Histoire de la reine Marguerite, p. 236. — Sully, Œconomies royales. — Comte de Saint-Poncy, Histoire de Marguerite, t. ii, p. 33. — Lafforgue, Histoire de la ville d’Auch, p. 211. etc.
  64. Mémoires du Vte de Turenne, Coll. Petitot, vol. xxxv, p. 176-177.
  65. Bibl. nat. Fonds français, vol. 3194, fo 132. — Cf. t. vi, p. 127.
  66. Idem.
  67. Bibl. nat. Fonds Dupuy, no  211, fo 13. — Cf. t. vi, p. 131.
  68. Mémoires du vicomte de Turenne. Oper. cit.
  69. Œconomies royales, collection Petitot, t. i, 2e série, p. 283-284.
  70. D’Aubigné, Histoire universelle, t. v, p. 350 et suiv. Éd. de Ruble.
  71. Lettres de Catherine. Fonds français, vol. 3300, fo 92.
  72. Brantôme, Vie des Dames illustres, chap. Marguerite.
  73. Œconomies royales, collect. Petitot, t. i, 2e série, p. 282.
  74. Lettres de Catherine. Fonds français, vol. no 3384, fo 60.
  75. Idem, no 3300, fo 95. — Cf. t. vi, p. 140 et suiv.
  76. Lettres de Catherine de Médicis, publiées par M. Baguenault de Puchesse, t. vi, p. 405 (in extenso). — Cf. : Fonds français, no 3300, fo108.
  77. Idem.
  78. Lettre de Catherine au roi son fils du 12 décembre. Fonds français, no 3300, fo 111. — Cf. : t. vi, p. 167.
  79. Idem, no 3300, fo 111. — Cf. : t. vi, p. 168.
  80. Nous avons déjà rappelé ailleurs (Lettres inédites de Marguerite de Valois, tirées des archives de Saint-Pétersbourg, p. 4), que, durant les deux années de 1578 et 1579, la ville de Condom fut le théâtre de graves désordres, dont furent victimes Me Jehan Duffranc, lieutenant-général, et le sieur Imbert, lieutenant-particulier, qui se virent enlever leurs offices par Lettres patentes du Roi, sur la demande formelle du président Bousquet. Ils furent même exilés de la ville. Une longue enquête s’en suivit, qui aboutit à la réintégration par la Jurade des deux magistrats. (Arch. mun. de Condom, Reg. des Jurades pour 1578-1579).
  81. Lettre de Catherine au roi son fils du 13 décembre 1578 au soir. Fonds français, no 3300, fo  111. — Cf. : t. vi, p. 170.
  82. Lettre de Catherine à son fils, du 16 décembre 1578 (Fonds français. No 3300, fo 113, vo). — Cf. : t. vi, p. 173.
  83. Archives historiques de la Gironde, t. xv, p. 280.
  84. La plus impardonnable est l’erreur commise par le comte Léo de Saint-Poncy. À la page 39, t. ii, de son Histoire de Marguerite de Valois, il écrit : « Avant de se rendre à Nérac, le roi et la reine de Navarre passèrent tout le mois de janvier au Port-Sainte-Marie, où Marguerite resta avec tout son train jusqu’au 2 février inclusivement. » Puis, à la page 40, il ajoute : « Ce fut un jour mémorable dans les annales de Nérac que l’entrée de Marguerite de Valois, mardi 3 février 1579 », et, en note, « cette date nous est fournie par les livres de dépense de Marguerite. » Contrairement à cette assertion, il ressort, on vient de le voir, du texte même de la lettre de Catherine au Roi son fils que Marguerite fit son entrée le 15 décembre. Quant aux livres de comptes de la Reine de Navarre que nous publions ici avec son itinéraire, ils ne contiennent (on le verra dans la suite, puisqu’interrompus du 23 novembre au 31 décembre 1578, ils reprennent jour par jour à partir du 1er janvier 1579), aucune mention spéciale de l’entrée solennelle de la jeune Reine à Nérac, à la date du 3 février. On remarquera au contraire que pendant tout le mois de janvier, et il dut en être de même pendant les derniers jours de 1578, ce fut de sa part un va et vient continuel entre le Port-Sainte-Marie, où s’était installée sa mère, et Nérac où elle se rendait à chaque moment pour voir son mari et négocier avec lui.
  85. Agen, imp. Noubet, 1807.
  86. Notice historique sur la ville de Nérac, par le comte de Villeneuve-Bargemont, Agen, 1807. On trouvera dans cet opuscule, pp. 68-77, le texte du poème « dressé par Salluste du Bartas pour l’accueil de la Reine de Navarre, faisant son entrée à Nérac. »
  87. Idem.
  88. Le château de Nérac, avec planches et plan (1896).
  89. Voir : Faits d’armes de Geoffroy de Vivans par Ad. Magen. Agen, 1887.
  90. Acte publié in extenso par M. le comte Baguenault de Puchesse, t. vi, p. 413. Appendice.
  91. Lettre de Catherine du 16 décembre. Fonds français, no 3308, fo  113. — Cf. : t. vi, p. 173.
  92. Idem. Fonds français, no 15905, fo  212. Cf. : t. vi, p. 177.
  93. Lettre de Catherine. Ancien fonds français, no 3202, fo  18.
  94. Mémoires de Sully, Londres, 1778, t. I, p. 154.
  95. Mémoires de Marguerite, Éd. Guessard, p. 158.
  96. L’Escadron volant, joli sonnet, sigué M. L., publié dans la Guirlande des Marguerites, p. 73. Nérac 1876.
  97. Archives départementales des Basses-Pyrénées, B. 33, 34, 35, 37 et suiv.
  98. Archives départementales des Basses-Pyrénées, B. 2322.
  99. Idem, B. 2326.
  100. Archives départementales des Basses-Pyrénées, Livres des comptes du Roi de Navarre, B. divers (1578-1579).
  101. Fonds français, no 15560, fo 150.
  102. Lettre de Catherine au Roi son fils « escript sudict Port-Saincte-Marie, le vendredy 26 décembre 1578 au matin. » Fonds français, 3300, fo  116. — Cf. : t. vi, p. 190.
  103. Voir pour l’acte de fondation du Paravis, Samazeuilh : Dictionnaire de l’arrondissement de Nérac. Abbé Barrère, Histoire du diocèse d’Agen, t. I, p. 319. J. de Laffore, Notes sur les monuments religieux ou féodaux du Lot-et-Garonne, pp. 153 et suiv., etc., etc.
  104. Lettre du roi de Navarre au vicomte du Turenne, du 26 décembre 1578. (Lettres missives, Supplément, t. viii, p. 131.)
  105. Lettre de Catherine du 24 décembre 1578. Fonds français, no 3300, fo 116. — Cf. : t. vi, p. 181. — Idem, appendice : Pièce transcrite in extenso, p. 415.
  106. Idem.