Histoire universelle de l’Église (Alzog)/Période 1/Époque 1/Partie 2/Chapitre 04

CHAPITRE IV.
CONSTITUTION DE L’ÉGLISE CATHOLIQUE.


Canones et constit. Apost., et beaucoup de canons des conciles de cette période. Voyez infra, § 85. Cypriani epp. et de unitate Ecctesiæ. Petavius, de Hierarch. Ecclesiæ. Voyez infra, § 86. Thomassini ; de Marca, de Concord. sacerdot. Du Pin, Diss. de antiq. Ecclesiæ discipl. Colon., 1691.


§ 82. — La suprématie épiscopale.

Dès les temps apostoliques, la distinction entre les laïques et les clercs[1], et parmi ceux-ci, entre les évêques, les prêtres et les diacres, fut bien marquée. C’est cette distinction que nous avons considérée comme l’élément de la constitution de l’Église, élément divin, fondamental et immuable, au milieu des formes variées, dont les temps, les circonstances, l’activité des hommes l’ont revêtue plus tard. Les hérésies contribuèrent surtout à déterminer les attributions de l’épiscopat, fondé d’ailleurs sur une institution divine. Pour les garantir des atteintes de l’hérésie, on exhorta les croyants à se tenir étroitement unis aux évêques, successeurs légitimes des apôtres, seuls conservateurs intègres et interprètes fidèles de la doctrine du Christ. Telle était la vive et pressante recommandation d’Ignace d’Antioche[2], qui pensait que c’était bien moins par une réfutation dogmatique que par l’union intime des fidèles et des évêques qu’on rendrait les hérésies impuissantes. Le schisme des Novatiens fit ressortir davantage encore la position des évêques possédant, comme centre de la vie de l’Église, la plénitude de la doctrine et de l’autorité[3], suivant le langage de saint Ignace, de Tertullien et de saint Irénée. On les nomme parfois prêtres[4], il est vrai, a l’exemple des apôtres ; mais on n’en désigne pas moins leur prééminence par des attributs spéciaux[5], et l’on a soin de marquer toujours la série successive des évêques de chaque Église. Les écrits et la vie de saint Cyprien en sont la preuve la plus évidente[6]. Les évêques seuls faisaient les ordinations, prêchaient, administraient les sacrements en vertu de leur plein pouvoir ; quant à ces deux dernières fonctions, les prêtres et les diacres ne pouvaient les exercer qu’au nom des évêques. Ceux-ci seuls présidaient les conseils, décidaient en dernier ressort l’admission ou l’exclusion des membres de la communauté, donnaient des lettres de recommandation (litterœ formata) et maintenaient l’union entre les nombreuses paroisses qu’ils gouvernaient. Autour d’eux, les prêtres formaient une sorte de sénat ou de conseil, sans l’avis duquel les évêques, se souvenant de la faiblesse humaine, ne devaient rien entreprendre d’important[7].

§ 83. — Le nombre des fonctions ecclésiastiques augmente.

Avec le nombre toujours croissant des fidèles augmentaient aussi les affaires nécessaires pour leur direction, et surtout celles dont les évêques et les prêtres ne pouvaient se charger sans nuire à leurs fonctions spirituelles. Aussi vit-on bientôt s’accroître le nombre des diacres qui, outre la prédication, le baptême et le soin des malades, servaient aux solennités de l’autel, lisaient l’Évangile, administraient l’eucharistie aux fidèles, la portaient aux malades dans leurs maisons et recevaient les offrandes du peuple[8]. Les dénominations de lévites, ministres (ministri) les distinguèrent nettement des prêtres et des évêques, auxquels ils étaient subordonnés, comme le déclare nettement un concile d’Arles [314][9], provoqué par leur conduite orgueilleuse vis-à-vis des prêtres. Toutes leurs attributions nous montrent qu’ils étaient les intermédiaires entre les évêques et les communautés chrétiennes. Celui qui était employé plus spécialement par l’évêque pour des affaires particulières obtenait un rang privilégié, et se nomma dans la suite archidiacre[10]. Cependant cela ne suffisait point encore aux besoins croissants de l’Église, et c’est pourquoi nous voyons, au commencement du IIIe siècle, et plus tôt même, le clergé s’augmenter d’un certain nombre de membres d’une hiérarchie inférieure, de sous-diacres (hypodiaconi, ὑηπρέται), lecteurs, acolytes, portiers et exorcistes. Une lettre de l’évêque de Rome, Cornélius, adressée à Fabien, évêque d’Antioche [vers 250][11], fait mention de tous ces degrés inférieurs de la hiérarchie comme existant déjà en Occident, et elle nous apprend, en même temps, que l’Église romaine avait alors quarante-six prêtres, sept diacres, sept sous-diacres, quarante-deux acolytes et cinquante-deux exorcistes, lecteurs et portiers. Ces fonctions subalternes étaient en même temps une épreuve et une préparation aux charges supérieures du clergé ; et, pour les distinguer encore davantage de celles-ci, l’ordination qui les conférait avait lieu, non dans l’assemblée des prêtres et par l’imposition des mains, mais simplement par la prière[12]. Les sous-diacres mêmes, dont parle saint Cyprien et dont il se servait durant son exil pour communiquer avec son Église[13], mais qui ne paraissent qu’au IVe siècle en Orient, ne remplissaient d’abord aucune fonction dans la célébration des mystères : ils n’étaient chargés que de la surveillance des portes de l’église durant les assemblées religieuses[14]. Les lecteurs, sans contredit plus anciens que les autres degrés inférieurs[15], avaient la garde des livres sacrés et en lisaient des passages au peuple. Les acolytes, accompagnaient et servaient les évêques et les prêtres. On ne les trouve que dans l’Église d’Occident. Les exorcistes, qui soignaient les énergumènes et leur imposaient les mains pour les délivrer des mauvais esprits, étaient choisis parmi les chrétiens d’une foi robuste, afin que les fonctions de l’Église ne pussent recevoir aucune atteinte. Les portiers veillaient au service des portes de l’église, surtout afin que ceux-là seuls entrassent qui en avaient le droit. Mais tout ce développement historique de l’organisation de l’Église ne changea en rien les trois degrés de la hiérarchie, instituée de Dieu même.

Les communautés chrétiennes qui s’élevaient à la campagne, dans la proximité des villes, avaient soin de se faire comprendre dans le ressort de l’évêque de la ville (παροικία)[16]. Pour celles qui étaient plus éloignées de la ville, il fallait que l’évêque y pourvût, en instituant un prêtre spécial et un diacre[17], qui restaient momentanément ou en permanence dans ces paroisses rurales. Dans la seconde moitié du IIIe siècle, le concile d’Antioche [260] fait mention d’évêques de lieux rapprochés les uns des autres[18], et le concile d’Ancyre [314] publie des décrets, particuliers sur la juridiction des chor-évêques (ὲπίσκοποι, τῆς χώρας)[19]. Ils avaient la plupart du temps plusieurs paroisses à gouverner en même temps mais ils dépendaient de l’évêque urbain qui les avait institués, et la condition qui leur était imposée, de n’ordonner que pour les degrés inférieurs, fait présumer que la plupart n’étaient que de simples prêtres[20].

§ 84. — Éducation, élection, ordination et entretien du clergé.

Ce fut surtout par la pratique que le clergé se forma dans les premiers temps. Pour exercer les fonctions du ministère sacré de renseignement, il suffisait de savoir exposer l’histoire de la mission du Fils de Dieu, de pouvoir par là fonder dans les cœurs la foi en sa venue, et de confirmer la vérité de la doctrine par la pureté de sa conduite. Paul et Jean furent les apôtres qui réunirent autour d’eux le plus grand nombre de disciples. Ceux de Paul sont cités dans le Nouveau-Testament. Jean forma à Éphèse Polycarpe, Ignace, Papias ; ceux-ci en formèrent beaucoup d’autres, surtout par la pratique, comme ils avaient été formés eux-mêmes. Les premiers écrivains chrétiens, plus particulièrement les apologistes, étaient déjà formés au point de vue littéraire avant leur entrée dans l’Église. Cependant nous voyons, dans cette période, l’école catéchétique d’Alexandrie non-seulement élever et instruire la jeunesse chrétienne, mais préparer des maîtres et des ouvriers évangéliques. Origène en était sorti. Les apôtres eux-mêmes avaient recommandé de soumettre à des épreuves sérieuses et de régler avec beaucoup de prudence le choix des évêques, des prêtres et des diacres. Ceux qu’on nommait, étaient d’ordinaire, connus du haut clergé et de la paroisse, par les degrés inférieurs et préparatoires qu’ils avaient traversés. La paroisse prenait non-seulement part à l’élection des prêtres et des diacres, mais encore à celle des degrés inférieurs, tels que les lecteurs[21]. L’élection de l’évêque était soumise, comme il convenait à cette haute dignité, à des formalités et à des précautions particulières. En général, et dans la règle, on ne nommait que des hommes âgés, remarquables par leurs vertus, et de préférence de courageux confesseurs de la foi. Le peuple, ainsi que le remarque saint Cyprien, y prenait aussi part[22], et il conserva ce droit tant que l’Église fut, en général, composée de ceux qu’une véritable impulsion intérieure et divine avait poussés au Christianisme, et qui, par conséquent, n’avaient pas d’autre désir que de voir fleurir l’Église, et n’agissaient point par des vues intéressées et impures. Cependant, on ne connaît pas clairement la forme de cette participation populaire, qui se retrouvait encore dans d’autres affaires concernant la paroisse. Elle ne rendait, en aucune façon, l’autorité épiscopale dépendante des fidèles[23], qui, tout en élisant l’évêque, n’avaient aucun droit de le déposer. La mission de l’évêque était regardée comme émanant directement du Christ, et son ordination comme l’œuvre du Saint-Esprit. La paroisse devait, par conséquent, se soumettre dans toutes les affaires ecclésiastiques, à l’évêque comme au successeur des apôtres et pleinement revêtu de leur autorité. Dans le IIIe siècle, les évêques provinciaux, ou le métropolitain, assistaient à l’élection[24]. S’il y avait désaccord, le métropolitain décidait, et l’ordination, suivant immédiatement, se faisait par deux ou trois évêques[25]. On donnait communication de l’élection aux paroisses les plus importantes (litterœ communicatoriœ).

Il n’y eut, dans les premiers temps de l’Église, rien de déterminé pour l’entretien du clergé. Beaucoup d’ecclésiastiques, à l’exemple de l’apôtre saint Paul, exerçaient un métier et vivaient du travail de leurs mains. Le plus souvent les fidèles, en retour des soins spirituels dont ils étaient l’objet, pourvoyaient à l’entretien des ecclésiastiques comme les fidèles de l’Ancien Testament y subvenaient par la dîme[26], et conformément aux paroles du Christ et de ses apôtres[27]. Les offrandes, que le peuple fit d’abord en nature, les contributions du dimanche et du mois, servaient aussi en partie à l’entretien du clergé, de manière que les ecclésiastiques n’eurent plus à s’occuper de travaux qui les auraient distraits ou dérangés de leurs fonctions spirituelles. On voit même de temps à autre les travaux de ce genre positivement interdits[28].

§ 85. — Célibat des ecclésiastiques.
Mœhler, Examen des écrits tendant à l’abol. du célibat des prêtres cath. Mélang., t. I, p. 177-267. Le célibat avec l’épigr. Δοκῶ κἀγώ πνεῦμα Θεοῦ ἔχειν. I Cor. VII, 40 ; en deux parties. Ratisb., 1841. Cf. le Célibat dans le clergé de Frib., t. II, p. 656-63. Pabst, Adam et le Christ. Vienne, 1835, p. 198-216. Klistche, Hist. du célibat. Augsb., 1830, p. 31-50.

Le mode d’élection et d’ordination des membres du haut clergé, mais bien plus encore le célibat, l’une des institutions les plus hardies, les plus sublimes et les plus saintes de l’Église catholique, prouvent la haute idée que l’Église conçut dès l’origine du sacerdoce. Représenter dans sa personne le nouvel homme, le second. Adam et continuer sa mission, se consacrer par conséquent sans partage dans toute son existence, et par toute son activité, au Christ et à son Église, telle est l’idée du célibat du prêtre[29] ; et le prêtre réalise cette idée quand, par une foi vivante en la divinité du Christ, il entre en un rapport si intime avec lui, que son être en est transformé et tout renouvelé dans le Saint-Esprit. Le Sauveur avait parlé de ceux qui sont nés eunuques dès le ventre de leur mère et de ceux qui se rendent eunuques eux-mêmes pour le royaume des Cieux[30] ; et l’apôtre des Gentils avait, dans l’esprit de son Maître, dit aux fidèles « Il est avantageux à l’homme de ne toucher aucune femme : je voudrais que vous fussiez tous comme moi (non marié)… Mais chacun a son don particulier, suivant qu’il l’a reçu de Dieu[31]. » Puis il ajoutait, comme pour exciter plus sérieusement encore à l’amour de la virginité : « Celui qui n’est point marié s’occupe du soin des choses du Seigneur, et de ce qu’il doit faire pour plaire à Dieu. Mais celui qui est marié s’occupe des choses du monde, et de ce qu’il doit faire pour plaire à sa femme, et ainsi il se trouve partagé[32]. » Il ajoute, pour répondre au besoin qui le presse, à l’esprit qui l’inspire : « Moi, qui crois avoir l’esprit de Dieu, je vous le redis : Heureuse la vierge qui reste vierge[33] ! » Ailleurs le même apôtre, répondant à Timothée, dit que l’évêque ne doit avoir épousé qu’une femme, qu’après la mort de celle-ci, il ne doit pas se remarier et qu’on prenne pour diacres ceux qui n’auront épousé qu’une femme[34].

Mais qui le premier fit une loi du célibat ? le peut-on dire ? N’est-ce pas l’esprit même qui anime les chrétiens qui leur a inspiré la libre adoption de cette noble loi ? En remontant aux sources on trouve que, pour la première fois, il est fait mention du célibat dans Tertullien, devenu une sorte d’oracle Montaniste[35]. Est-ce une preuve que l’origine du célibat est montaniste ? Non certes : c’est tout au plus une preuve que les Montanistes restaient en ce point, comme en plusieurs autres, d’accord avec l’Église catholique, pour laquelle, à cette époque, le célibat n’était plus rien de nouveau. Si les Montanistes en eussent été les inventeurs, dans leurs rudes attaques contre l’Église ils en eussent fait mention, ils s’en seraient vantés au lieu de se contenter de tirer du célibat quelques conséquences exagérées. La loi du célibat ne fut écrite sur du papier que lorsqu’elle commença à s’effacer du cœur des prêtres. On reprochait déjà comme une infraction à la loi au mondain Paul de Samosate et à son clergé d’avoir introduit des femmes dans leurs maison (συνεὶσακτοι γυναῑκες)[36].

Les canons apostoliques, qui contiennent la discipline de l’Église du IIe et du IIIe siècle, font un devoir du célibat au clergé supérieur[37]. Le concile d’Elvire [300 ou 305] et celui d’Ancyre [314] désiraient que ceux qui s’étaient mariés avant leur ordination s’abstinssent de tout commerce avec leurs femmes[38] ; et le concile de Néocésarée [314] prononce la déposition d’un prêtre qui s’était marié depuis son ordination[39]. Ainsi, déjà à la fin de cette période, des lois sévères concernant le célibat remplacent çà et là la libre admission de cette sainte pratique.

§ 86. — Autorité du métropolitain et institution des conciles provinciaux.

Les apôtres nous apprennent déjà que, d’après leur désir, des communautés chrétiennes isolées entrèrent en relation mutuelle, sans être cependant encore hiérarchiquement subordonnées les unes aux autres. Mais bientôt l’Esprit saint, agissant dans l’Église et stimulant les besoins de ses membres, les réunit en un tout spirituel, dont l’unité vivante et intérieure s’exprima par l’unité extérieure et formelle d’un corps, non-seulement dans chaque diocèse, mais pour tous les diocèses entre eux. Les rapports des communautés les plus éloignées devinrent de plus en plus intimes et vivants ; et les chrétiens se regardèrent de jour en jour davantage comme les membres d’une même unité. Clément de Rome, Ignace d’Antioche, Polycarpe de Smyrne, insistèrent, en diverses circonstances, par leurs lettres et dans leurs voyages, sur la nécessité de cette union des fidèles dans l’Église. Irénée et Tertullien la défendirent également contre les hérétiques, comme la condition nécessaire de l’unité de la doctrine et le caractère essentiel de l’Église universelle mais c’est à Cyprien surtout qu’appartient l’honneur de l’avoir exposée, dans toute sa force, par son profond Traité de l’unité de l’Église contre les Novatiens :

« Comme les rayons solaires émanent tous d’un même foyer, comme les branches d’un arbre partent d’une même racine, ainsi toutes les communautés chrétiennes, dispersées sur la surface de la terre, se rattachent et sont unies à une seule et même Église. Le rayon ne vit que dans la lumière du soleil, la branche ne subsiste que par son union avec le tronc ainsi le vrai chrétien ne vit que par son union avec l’Église. Qui ne vit pas en elle est un étranger, un profane, n’a pas de part avec Jésus-Christ. Celui-là n’a point Dieu pour père qui n’a pas l’Église pour mère ; il mourrait de la mort du martyre, sa mort serait sans valeur et sans mérite. » Cette idée de l’unité interne et externe de l’Église, résumée dans le mot catholique, se réalisa partout de la manière suivante. De même que les fidèles d’une ou de plusieurs Églises s’attachaient à leur évêque, de même les diocèses les plus rapprochés les uns des autres se rattachèrent à un centre commun et formèrent une sorte de diocèse plus vaste, ordinairement autour de l’évêque de la capitale de la province, ou de la métropole civile[40], dénomination dont on se servait aussi au IVe siècle pour désigner un centre d’action ecclésiastique. L’idée de cette union métropolitaine se trouve réalisée pour la première fois dans l’Église mère des judéo-chrétiens de Jérusalem, unie aux Églises de Galilée, de Judée et de Samarie[41]. Après de tristes destinées, la dignité métropolitaine de Jérusalem passa, sous Adrien, à l’Église de Césarée. L’Église d’Antioche, composée de juifs et de païens, fut la seconde métropole chrétienne, à laquelle s’en rattacha une troisième, celle d’Alexandrie. En Occident, Rome, quatrième métropole, comprit les Églises de la basse Italie et de l’Italie centrale, les îles de Sardaigne, de Corse et de Sicile (provinces suburbaines). Outre les trois grandes métropoles de Rome, d’Antioche et d’Alexandrie, les Églises d’Éphèse et de Carthage jouissaient d’une sorte d’indépendance et d’une considération particulière. Cette union des divers diocèses sous un métropolitain exerçait une influence favorable dans les circonstances les plus importantes, telles, que les élections épiscopales[42]. Les communications régulières, par lesquelles les Églises se faisaient part des nouvelles ecclésiastiques, des élections des évêques (litterœ communicatoriœ), des excommunications, l’introduction des lettres de recommandation (litterœ formatœ), furent les conséquences naturelles[43] de cette union intérieure, en même temps que les signes de l’unité extérieure de l’Église.

Les conciles provinciaux eurent encore une influence plus décisive. Ils naquirent[44], non, comme pense Gieseler, d’une imitation profane des assemblées des amphyctions de la Grèce, mais de l’esprit d’unité vivant dans l’Église et d’après le modèle de l’assemblée des apôtres à Jérusalem[45]. Les premiers conciles se tinrent en Grèce[46], puis en Asie, contre les Montanistes et au sujet de la pâque[47], dans la seconde moitié dut IIe siècle [160-170][48] ; en Afrique [vers 200], sous la présidence de l’évêque Agrippinus, assisté de soixante-dix évêques.

Lorsque l’union des diocèses avec leur métropole se fut consolidée, les conciles provinciaux prirent une forme plus marquée et une périodicité régulière, surtout en Grèce, au commencement du IIIe siècle[49]. Ils devaient se tenir une ou deux fois par an. On y examinait, sous la présidence du métropolitain, toutes les affaires ecclésiastiques, et surtout on y définissait, contre les hérétiques, la vraie doctrine de l’Église de manière à instruire et à tranquilliser entièrement les fidèles. Que si l’on ne trouve pas encore de lois organisant la tenue régulière des synodes diocésains, du moins est-il certain que ces synodes furent tenus avant les synodes provinciaux. Les germes de ces assemblées, ainsi que des chapitres métropolitains, qui naquirent plus tard, se trouvaient déjà dans le presbytère[50] qui entourait l’évêque et l’assistait de ses conseils.

§ 87. — Primauté de l’évêque de Rome, — Centre d’unité de toute l’Église.
Mœhler, l’Unité dans l’Église ; p. 260. Katercamp, de la Primauté de l’apôtre Pierre et de ses successeurs. Münster, 1820. Rothensée, la Primauté du pape dans tous les siècles chrétiens. Mayence, 1836-1838, 3 vol. Aug. Theiner, la Suède et ses rapports avec le saint-siége. Augsb., 1838, t. I, p. 1-71. Kenrick, Archiv. de Baltimore, la Primauté du saint-siége apostolique. New-York, 1853. Bossuet, Sermon sur l’unité de l’Église.

L’évêque était le centre d’unité de son diocèse ; le métropolitain, celui de la province : il manque encore le centre des métropoles elles-mêmes, la clef de voûte de l’Église, la pierre angulaire de tout l’édifice. Elle se trouve à Rome. L’évêque de Rome est le centre d’unité de toute l’Église. Une Providence toute spéciale avait conduit à Rome, mis à la tête de la première communauté chrétienne, dans la capitale du monde païen, l’apôtre à qui le Fils de Dieu avait accordé la prééminence sur ses collègues et confié le soin de diriger toute son Église. Rome, ville aussi éminemment pratique que la Grèce était scientique et spéculative, devenait ainsi le centre d’action du Christianisme, si pratique dans toute sa tendance[51] ; et les successeurs de Pierre devaient être en même temps, suivant les desseins providentiels, les successeurs de sa primauté.

Déjà saint Clément de Rome en est la preuve ; saint Ignace d’Antioche le reconnaît : il dit que l’Église de Rome préside l’alliance de l’amour, c’est-à-dire toute la chrétienté[52]. Saint Irénée affirme que tous les fidèles doivent être unis à l’Église romaine à cause de sa puissante primauté [53], et saint Cyprien, à son tour, explique cette primauté d’après l’essence même et le but sublime de l’Église : « L’Église est fondée sur Pierre à cause de l’unité ; Pierre est le foyer, le centre de l’Église romaine ; c’est pourquoi le siége épiscopal de Rome est le siége de Pierre, l’Église de Rome la première de toutes les Églises. C’est à l’évêque de Rome que doivent être unis tous les évêques du monde. » « Quoi, s’écrie-t-il contre les schismatiques Fortunatus et Félicissimus, ils essayent de faire entrer leur barque dans le port de l’Église romaine, d’où est sortie l’unité sacerdotale ! Ils ne songent donc pas que ce sont là ces Romains dont l’Apôtre exaltait la foi, parce que l’infidélité ne peut avoir accès auprès d’eux [54] ! » Et si telle était la doctrine de Cyprien, telle était sa pratique. Il engage l’évêque de Rome, Étienne, à déposer Marcien, évêque d’Arles, partisan des Novatiens, et à en élire un autre à sa place ; il lui envoie les actes des conciles d’Afrique contre les prétentions de Félicissimus, et les décisions prises contre les chrétiens tombés (lapsi) dans la persécution. Que si, dans un cas particulier, Cyprien semble[55] méconnaître la suprématie d’Étienne, et attaquer dans un langage acerbe la conduite passionnée de celui-ci, il s’agit de décider qui mérite plus de confiance, de Cyprien exposant paisiblement ses vues sur l’Église et sa constitution et les confirmant par sa conduite, ou de Cyprien irrité, dans une cause personnelle, par la contradiction qu’éprouve son opinion évidemment erronée (l’invalidité du baptême des hérétiques). Le privilège que Rome réclame, les évêques le reconnaissent, tantôt spontanément, tantôt en répondant aux circonstances qui les sollicitent. Qu’on se rappelle particulièrement la conduite de Corneille dans celle de Novatus et de Félicissimus, d’Étienne dans les affaires des rebaptisants, de Denys contre Paul de Samosate et Denys d’Alexandrie. Les schismatiques Montanistes reconnurent eux-mêmes cette puissance de l’évêque de Rome lorsqu’ils en appelèrent à lui. Il en fut de même de l’empereur Aurélien.

Ainsi se manifeste de bonne heure, dans ses caractères fondamentaux cette organisation régulière et ferme qui devait constituer l’unité de l’Église, et qui allait, selon le temps et les circonstances, se développer, se fortifier, se compléter[56]. Le pontife qui contribua le plus, autant par sa vie que par sa science, à développer d’une manière simple et lucide, et à populariser dans toute la chrétienté les principes de cette organisation de l’Église, fut

Thascius Cœcilius Cyprien[57].

Né à Carthage, de parents distingués, élevé dans les écoles des rhéteurs païens, il y acquit une science qui le rendit l’orgueil de ses maîtres et du peuple de Carthage. Sa brillante éducation ne le mit point à l’abri des égarements des passions humaines et de la corruption du paganisme. Il en fut tiré et guéri par le prêtre catholique Cæcitius, qui eut le bonheur de le convertir au Christianisme [246]. Dans la ferveur de sa régénération spirituelle, Cyprien distribua en dons divers une grande partie de ses biens ; il en consacra le reste à la bienfaisance et à des œuvres chrétiennes, « ayant eu le bonheur d’expérimenter » par lui-même ce que naguère, indécis et flottant sur la mer orageuse du monde, il croyait difficile ou impossible, à savoir qu’on peut renaître une vie nouvelle dans les eaux sacrées du baptême, se dépouiller du vieil homme et être régénéré dans son esprit et son cœur, tout en conservant la même enveloppe terrestre. » Cyprien se forma par l’étude des ouvrages de Tertullien, dont la profondeur et le sérieux moral répondaient à son génie. Élu évêque de Carthage [248], il voulut, dans son humilité, fuir cet honneur, mais les instances du peuple le forcèrent de l’accepter. Pénétré de sentiments véritablement éclairés et chrétiens[58], il crut devoir fuir devant la persécution de Dèce ; mais le pasteur n’oublia point, dans sa solitude, le troupeau qui lui était confié et sur lequel il ne cessait de veiller. Idéal d’un véritable évêque, il sut, dans sa sagesse et suivant les circonstances, unir la douceur à la sévérité. Ce ne fut que pour le bien de l’Église et pour ses principes qu’il combattit, avec une persévérance toute chrétienne, le diacre Félicissimus et l’évêque intrus Fortunatus, surtout depuis son retour à Carthage [251]. Il n’en fut pas de même de sa discussion avec Étienne, évêque de Rome, dans laquelle il opposa passion à passion. Un édit de Valérien contre les chrétiens le surprit durant cette controverse [257]. Cette fois Cyprien, désireux d’obtenir la couronne du martyre, ne s’enfuit point il confessa avec une sainte et joyeuse hardiesse, devant le proconsul, qu’il était chrétien et évêque. On l’exila à Curbi. L’Église de Rome voulut s’adresser en sa faveur aux fonctionnaires supérieurs de l’État, mais il l’en détourna en lui écrivant, comme jadis saint Ignace « Je vous écris plein de vie, mais plus encore du désir de mourir : mon amour a été crucifié ; le feu qui me consume ne doit pas s’éteindre ; la voix que j’entends et qui me dit Viens au Père ! doit être exaucée. » Un an après son exil, son arrêt fut prononcé : « L’évêque de Carthage, ennemi des dieux de Rome, sera décapité. — Dieu soit loué ! » répondit-il. Il mourut le 14 septembre 258. Lorsque la nouvelle en parvint aux fidèles de Carthage, ils s’écrièrent, dans leur chrétienne douleur « Oh ! venez, mourons avec lui ! » C’est dans ces pieux sentiments qu’ils reçurent sa dépouille et qu’ils l’ensevelirent sans rencontrer d’obstacle ; et ces paroles, échappées à leur douleur, restèrent à la fois comme un monument perpétuel qu’ils élevèrent à sa mémoire, et comme le symbole de l’union intime qui doit régner entre l’évêque catholique et son troupeau[59].



  1. Quant au passage de Tertullien, de Exh. cast., c. 7, on objecte à tort : « Differentiam inter ordinem et plebem constituit Ecclesiæ auctoritas et honor per ordinis consessum sanctificatus a Deo. Ubi ecclesiastici ordinis non est consessus, et offers et tinguis, sacerdos tibi solus. Sed ubi tres, ecclesia est ; licet laïci, unusquisque enim « de sua fide » vivit nec est « personarum acceptio apud Deum. » Quoniam « non auditores legis justificabuntur a Deo sed factores » secundum quod et Apostolus dicit, etc. Cf. de Præscr., c. 41, où Tertullien blâme les hérétiques de ce que Sacerdotalia munera laïcis jungant. Et encore, de Monog., c. 10 : Sed quum extollimur et inflamur adversus clerum, tunc unum omnes sumus, tunc omnes sacerdotes, qui « sacerdotes nos Deo et Patri fecit ; quum ad peræquationem disciplinæ sacerdotalis provocamur, deponimus infulas, impares sumus, etc. » Voy. Dœllinger, Man. de l’hist, ecclés., t. I, sect. I, p. 319.
  2. Ignat. ep. ad Smyrn., c. 8. Cf. aussi infra, note 3, les paroles de Cyprien.
  3. Ep. ad Smyrn., c. 8 ; Tertull., de Baptismo, c. 17 : « Dandi quidem habet jus summus sacerdos, qui est episcopus, dehinc presbyteri et diaconi, non tamen sine episcopi auctoritate. Cf. § 53.
  4. Iren. IV, 26, n. 2, p. 262. Cette confusion se trouve constamment dans Cyprien, ep. 55 : « Neque enim aliunde hæreses obortæ sunt aut nata sunt schismata, quam inde, quod sacerdoti Dei non obtemperatur nec unus in Ecclesia ad tempus sacerdos et ad tempus judex vice Christi cogitatur : cui si secundum magisteria obtemperaret fraternitas universa, nemo adversus sacerdotum collegium quidquam moveret, nemo post divinum judicium, post populi suffragium, post coepiscoporum consensum, judicem se jam non episcopi sed Dei faceret. »
  5. Præses presbyteror., summus sacerdos, benedictus papa, etc.
  6. Ep. 52, ad Antonian. de Cornelio et Novatiano « Ac si minus sufficiens episcoporum in Africa numerus videbitur, etiam Romam super hac re scripsimus ad Cornelium, collegam nostrum, etc. « Ep. 55 ad Cornelium de Feticissimo « Actum est de episcopatus vigore et de Ecclesiæ gubernandæ sublimi ac divina potestate. Cf. ep. 66, ad clerum et plebem Furnis consistentem, de Victore ; ep. 69, ad Florentium Pupianum.
  7. Ignat. ep. ad Ephes., c. 2 ; ad Magnes., c. 2 ; Cypr. ep. 5, ad presbyteros et diaconos : « Ad id — solus rescribere nihil potui, quando a primordio episcopatus mei statuerim nihil sine consilio vestro et sine consensu plebis mea privatim sententia gerere. » P. 134.
  8. Justin Mart. Apol. I, n. 65, sub fin. ; Cypr., lib. de Lapsis, p. 381.
  9. Conc. Arelat. can. 15. Cf. can. 18, dans Harduin, t. I, p. 266 ; Mansi, t. II, p. 473.
  10. L’institution des prêtresses et des diaconesses persista, malgré diverses défenses, en Occident jusqu’au Ve siècle, en Orient plus longtemps encore. Cf. Conc. Laod. [V. 364] can. 11, dans Mansi, t. II, p. 586 : « Non oportere eas, quæ dicuntur presbyteræ et præsidentes, in Ecclesiis constitui. »
  11. Euseb. Hist. eccles. VI, 43.
  12. Cela paraît contredit par la constitution apost. VIII, 21 : Ὑποδιάκονον χειροτονῶν, ὧ ἐπίσκοπε, ἐπιθήσεις ἐπ' αὖτῷ τὰς χεῖρας, κ. τ. λ., ce qui, d’un autre côté, est contredit de nouveau par le can. 51 de Basile et le can. 5 du quatrième conc. de Carthage. Il faut probablement, comme le pense Drey (Nouv. rech. sur les const. et les can. des apôtres, p. 140), distinguer χειροτονία de χειροθεσία. On se servait de cette dernière expression même pour l’ordination dans laquelle il n’y avait point d’imposition des mains formelle, comme par exemple, c. 22, cela est dit des lecteurs, pour lesquels certainement il n’était pas question d’imposition des mains : Ἀναγνώστην προχείρισας, ἐπιθείς αὐτῷ τὴν κεῖρα καὶ ἐπευξάμενος πρὸς τὸν Θεὸν, λέγε ὁ Θεὸς ὁ αἰώνιος, κ. τ. λ.
  13. Cypr. : « Didicimus a Crementio subdiacono. » Ep. 2 ; ep. 3 ; ep. 29, 30. « Litteræ tuæ, quas per Herrenianum hypodiaconum, etc. » Ep. 79.
  14. Const. apost. VIII, 11 (Galland., t. III, p.211 ; Manzi., t. I, p. 551 ; Harduin, t. I, p. 254). M. Drey infère d’un texte fautif du 33e can. du conc. d’Elvire [305], que, dès le commencement du IVe siècle, les sous-diacres avaient déjà le droit de servir à l’autel ; mais la leçon correcte ne les nomme pas : « Placuit in totum prohiberi episcopis, presbyteris et diaconibus vel omnibus clericis positis in ministerio abstinere se, » etc. (Mansi, t. II, p. 11).
  15. Tertull. de Præscr., c. 41, p. 247.
  16. Just. Apol. I, 67.
  17. Cypr. : « Et Credideram quidem presbyteros et diaconos, qui illic præsentes sunt, monere vos et instruere plenissime circa Evangelii legem. » Ep. 10, p. 51. Concil. Illiberit. [305], can. 77 : « Si quis diaconus regens plebem sine episcopo vel presbytero aliquos baptizaverit, episcopus eos per benedictionem perficere debebit. » (Mansi, t. II, p. 18 ; Harduin, t. I, p. 254. Ce dernier place le concile en 313.)
  18. Ep. Synodi Antioch. dans Euseb. Hist. eccles. VII, 30, n. 6. Ἐπισκόπους τῶν ὁμόρων ἀγρῶν τε καὶ πρεσβυτερους, κ. τ. λ.
  19. Concil. Ancyran. can. 13. Χορεπισκόπους μὴ ἐξεῖναι πρεσβυτέρους ἧ διακόνους χειροτονεῖν. (Mansi, t. II, p. 517 ; Harduin, t. I, p. 275.)
  20. Phillips s’efforce d’établir dans son Droit Canon (t. II, p. 95) que tous avaient le caractère épiscopal, mais ses preuves sont peu satisfaisantes. Cf. Nat. Alex. Append. ad dissert. XLIV. Hist. eccl., sæc. IV.
  21. Cyprian. ep. 34, ad clerum et plebem de Celerino, lectore ordinato. P. 108.
  22. Déjà dans Clem. Rom. ep. I ad. Corinth., c. 44, il est dit de l’élection des évêques, συνευδοκησάσης τῆς Ἐκκλησίας πάσης, (comprobante universa Ecclesia). Cypr. ep. 68, p. 256.
  23. Le peuple ne donnait son témoignage qu’en faveur du mérite de l’élu ; aussi Cypr. dit : Episcopus eligatur plebe præsente, quæ singulorum vitam plenissime novit, et uniuscujusque actum de ejus conversatione perspexit, etc. » Ep. 68, p. 256. De même, Constitut. apost. VIII, 4 « Ordinandum esse episcopum inculpatum in omnibus, electum a populo ut prœstantissimum. » (Galland., t. III, p. 203. Mansi, t. I, p. 538). C’est pourquoi Cyprien dit « Referimus ad vos Celerinum fratrem nostrum, virtutibus pariter et moribus gloriosum, clero vestro, non humana suffrafatione, sed divina dignatione conjunctum, » Ep. 34, p. 108.
  24. Cyprian. « Propter quod diligenter de traditione divina et apostolica observatione servandum est et tenendum, quod apud nos quoque et fere per provincias universas tenetur, ut ad ordinationes rite celebrandas ad eam plebem, cui præpositus ordinatur, episcopi ejusdem provinciæ proximi quique conveniant et episcopus eligatur plebe præsente, etc. » Cf. Staudenmaier, Hist. des élect. épisc., p. 1-24.
  25. Canon. apost. can. 1. Ἐπίσκοπος χειροτονείσθω ὑπὸ ἐπισκόπων δύο ἢ τρίων (Mansi, t. I, p. 30 ; Harduin, t. I, p. 10). Concil. Arelat. can. 20: « Infra tres (episcopos) non audeat ordinare (episcopum.) » (Mansi, t. II, p. 173 ; Harduin, t. I, p. 266.)
  26. Levit. XXVII, 30 sq. ; Nom. XVIII, 23 sq. ; Deut. XIV, 22 sq. ; 2 Paralip. XXXI, 4.
  27. Matth. X, 10 ; Luc. X, 7 ; 1 Cor. IX, 13 ; 1 Tim. V, 17 ; Cypr. ep. 66, p. 246 : « Clerici in honore sportulantium fratrum tanquam decimas ex fructibus accipientes, ab altari et sacrificiis non recedant, sed die ac nocte cœlestibus rebus et spiritalibus serviant. »
  28. Canon. apost. can. 6: « Episcopus vel presbyter, vel diaconus, sæculares curas non suscipiat : alioquin deponatur. » Mansi, t. I, p. 30 ; Harduin, t. I, p. 10.)
  29. Creuzer raconte dans sa Mythologie et sa Symbolique, t. I, p. 600, la légende indienne qui suit : « Le brahme, créé par Birmah, se plaignit que seul, parmi ses frères, il était sans compagne ; et Birmah lui répondit que lui, prêtre, ne devait pas se dissiper, mais devait s’adonner uniquement à l’étude, à la prière, au culte divin. » Dans Cic. de Legib. II, 8, il est dit : « Ad Divos adeunto caste ! » Le passage suivant de Lampridius (Vita Alex. Severi), c. 29, est important : « Usus vivendi eidem (Alex. Severo) hic tuit :primum ut, si facultas esset, id est si non cum uxore cubuisset, matutinis horis in larario suo, in quo et divos principes sed optimos, electos, et animas sanctiores, in queis et Apollonium, et, quantum scriptor suorum temporum dicit, Christum, Abraham, et Orpheum, et hujusmodi cæteros habebat, ac majorum effigies, rem divinam faciebat. » (Historiæ Augustæ scriptores sex, ed. Bipont., 1787, vol. I, p. 278.)
  30. Matth. XIX, 12.
  31. 1 Cor. VII, 1, 7, 8.
  32. 1 Cor. VII, 32.
  33. 1 Cor. VII, 40.
  34. 1 Tim. III, 2, 12. Cf. V, 9.; Tit. I, 6.
  35. Rigaltius trouva dans un vieux manuscrit de Tertull. de Exhort. castit., c. 10, après les mots : « Vita æterna sit in Chr. Jesu Dom. nostro, » l’oracle suivant de Priscille [entre 150 et 160], qu’il présume avoir été retranché du texte ob nimias laudes Priscillæ : « Item per sanctam prophetidem Priscam ita evangelizatur, quod sanctus minister (le prêtre non marié) sanctimoniam noverit ministrare. Purificantia enim concordat, ait, et visiones vident, et ponentes faciem deorsum etiam voces audiunt manifestas, tam salutares quam et occultas, etc. » Cf. Observation. Rigaltii ad Opp. Tertull., p. 114, et Tertullien lui-même dit : « Et commendabis illas duas (uxores) per sacerdotem de monogamia ordinatum aut etiam de virginitate sanctitum ? » Exhortat. castit., c. 11, p. 671 ; Origen. hom. XVII, in Luc. (t. III, p. 953). D’après celui-ci, un second mariage excluait du sacerdoce et du diaconat. Cf. Apostolor. const. VII, 17, ad princ. (Galland., t. III, p. 155).
  36. Euseb. Hist. eccl, VII, 30.
  37. Canon. apost., can. 25 : « Innuptis autem, qui ad clerum promoti sunt, præcipimus, si voluerint uxores ducere, lectores cantoresque solos ; c’est d’après ce passage qu’il faut expliquer le 5e can. : « Episcopus vel presbyter vel diaconus uxorem suam ne ejiciat religionis prœtextu (προφάσει εὐλαβεἰας) ; sin autem ejecerit, segregetur ; et si perseveret, deponatur. » (Mansi, t. I, p. 30 et 34 ; Harduin, t. I, p. 11 et 15.)
  38. Concil. Illiberit., can. 33 : « Placuit in totum prohiberi episcopis, presbyteris et diaconibus, vel omnibus clericis positis in ministerio, abstinere se a conjugibus suis et non generare filios : quicunque fecerit, ab honore clericatus exterminetur. » (Harduin, t. I, p. 253 ; Mansi, t. II, p. 11.)
  39. Concil. Neocæsar. can. 1 : « Presbyter si uxorem duxerit, ab ordine suo illum deponi debere. » (Harduin., t. I, p. 282 ; Mansi, t. II, p. 539.) Conc. Ancyran. can. 10 : Quicunque diaconi ordinantur, si in ipsa ordinatione protestati sunt et dixerunt velle se conjugio copulari, quia sic manere non possunt : hi si postmodum uxores duxerint, in ministerio maneant, propterea quod eis episcopus licentiam dederit. Quicunque sane tacuerint et susceperint manus impositionem, professi continentiam, et postea nuptiis obligati sunt, a ministerio cessare debebunt. » (Harduin., t. I, p. 275 ; Mansi, t. II, p. 518.)
  40. Cet usage fut plus tard érigé en principe par le Concile d’Antioche, can. 9 : Τοὺς καθ’ ἑκάστην ἐπαρχίαν ἐπισκόπους εἰδέναι χρη τὸν ἐν τῇ μητροπόλει προρεστῶτα ἐπίσκοπον, καὶ τὴν φροντίδα ἀναδέχεσθαι πάσης τῆς ἐπαρχίας, διὰ τὸ ἐν τῆ μετροπόλει πανταχόθεν συντρέχεινπάντας τοῦς πράγματα ἔχοντας. (Harduin, t. I, p. 595.)
  41. Cf. Euseb.. Hist. eccles. III, 32, selon lequel, au rapport d’Hégésippe, les premiers évêques de Jérusalem jouirent manifestement d’un pouvoir métropolitain. Il est dit de Jacques et d’un autre parent de Notre-Seigneur, comme évêque de Jérusalem : Προηγοῦνται πάσης Ἐκκλησίας ὡς μάρτυρες καὶ ἀπὸ γένους τοῦ Κυρίου. Cf. Petr. de Marca, Concord. Sacerdotii et imperii, VI, 1.
  42. Voyez § 84.
  43. Cf. Ferrarius, de Antiquo epistolar. Ecclesiæ genere. Mediolani, 1613, in-4 ; Kiesseling, de Stabili primit. Eccles. ope litterrar, communicatoriar. connubio. Lipsiæ, 1744, in-4.
  44. Ce que prouve surtout l’usage de ces conciles d’en appeler aux mêmes sources et de se servir des mêmes termes que les Actes des Apôtres, c. XV ; comme les apôtres avaient dit : Il a plu au Saint-Esprit et à nous, on voit dans un concile présidé par saint Cyprien [252] les Pères répéter : « Il nous a plu, d’après l’inspiration du Saint-Esprit et les lumières du Seigneur. » Cf. Cypr. ep. 54 (Ad Corn. de Pace lapsis danda), p. 171.
  45. Act. apost. c. 15.
  46. Euseb. Hist. eccles. V, 16.
  47. Euseb. Hist. eccles. V, 23-25.
  48. Vœlli et Justelli Biblioth. jur. canon, vet. Paris, 1661, 2 t. in-f. (t. II, c. 5. n. 6, p. 1166). Fessler, des Conc. provinc. Inspruck, 1849.
  49. Tertull. de Jejun., c. 23 : « Aguntur præterea per Grœcias illa certis in locis concilia ex universis Ecclesiis, per quæ et altiora quæque in commune tractantur, et ipsa repræsentatio totius nominis christiani magna veneratione celebratur. » P. 771. Firmiliani ep. ad Cyprian. « Qua ex causa necessario apud nos fit ut per singulos annos seniores et præpositi in unum conveniamus ad disponenda ea quæ curæ nostræ commissa sunt, ut, si qua graviora sunt, communi consilio dirigantur. (Opp. Cyprian. ep. 75 p. 30 :.) Cf canon apost., can. 36 « Bis in anno fiat episcoporum synodus, et inter se examinent decreta religionis et incidentes ecclesiasticas controversias componant. » Harduin, t. I, p. 18 ; Mansi, t. I, p. 35.) Euseb. Hist. eccl., V, 16. Pour les conciles tenus durant cette période, cf. encore du Pin, Biblioth. des auteurs, etc., éd. d’Utrecht, 1731, t. I, p. 212 sq. ; et Ruttenstock, Institut. hist. eccles., t. I, append. de Conc., p. 537-558.
  50. Voyez plus haut, § 82, n. 5, et Phillipps, les Synodes diocésains. Frib., 1849, p. 25 sq.
  51. Optat. de Mil. (v. 368) « Qui peut nier que Pierre n’a établi le premier siège épiscopal à Rome que pour réunir toutes les Églises dans son unité ? » (In qua una, cathedra unitas ab omnibus servaretur.) « Cette Providence spéciale, dit Jos. Goerres, choisit, non la Grèce spéculative avec son Athènes si raffinée, pour devenir le centre de l’Église, mais Rome habituée depuis des siècles au positif des affaires ; Rome, dont la population impérissable se développe à travers les siècles avec l’histoire elle-même et possède un sens pratique tel qu’on n’en avait jamais vu. L’Esprit-Saint tourne alors ce sens tout terrestre vers un but plus élevé, et quand le Christianisme l’a transformé, il lui confie le gouvernement de l’Église. »
  52. Ignat. ep. ad Rom.: Προκαθημένη τῆς άγαπῆς (non ἐν ἀγάπῃ), in proœm. Voyez, sur le sens de cette expression, Wocher, Lettres de saint Ignace d’Antioche. Tüb., 1820, p. 82.
  53. Iren. Contra hær. III, 3, n. 2, p. 175 : « Ad hanc enim Eccles. propter potentiorem principalitatem (διὰ τὸ ἱκανώτερον κῦρος vel πρωτεῖον ; après III, 38, n. 3 ?) necesse est omnem convenire Ecclesiam, hoc est eos qui sunt undique fideles ; in qua semper ab his qui sunt undique conservata est ea quæ ab apostolis traditio. » Voyez pour l’éclairc. de ce passage, Dœllinger, Man. de l’hist. eccles., t. I, P. I, p. 356 sq. ; Mœlher, l’Unité dans l’Église, p. 268 sq.
  54. Cypr, de Unitate Eccles., p. 396 sq. Cf. surtout les notes 11 et 12 de Prudent. Maranus traitant des interpolat., ep. 27, p. 90. — Ep. 70 : « Quando et baptisma unum sit, et Spiritus sanctus unus, et una Ecclesia a Chr. Domino super Petrum origine unitatis et ratione fundata. » P. 270, C. — Ep. 71 : « Nec Petrus, quem primum Dominus elegit, et super quem ædificavit Ecclesiam suam, quum secum Paulus de Circumcisione postmodum disceptaret, vindicavit sibi aliquid insolenter aut arroganter assumpsit, ut diceret se primatum tenere et obtemperari a novellis et posteris sibi potius oportere. » P. 273, B. — Ep. 55 : « Navigare audent, et ad Petri cathedram atque ad Ecclesiam principalem, unde unitas sacerdotalis exorta est, etc. » P. 183, A. — Cf. les notes 64 et 65, de Prudent. Maranus, p. 193.
  55. Semble, parce que l’authenticité n’en est pas bien établie. Voy. infra, § 89. L’observation de Liebermann est très-juste : Cyprianus (in ep. 74, p. 294) in summum Pontificem ita acerbe invehitur, ut qui virum noverat tam moderatum, tam verecundum in Sedem romanam, jam Cyprianum in Cypriano quærat (Instit. theol. ed. V, t. IV, p. 235).
  56. Voici, d’après Iren. Contra hær. III, 3, n. 3 ; Euseb. Hist. eccl. III, 2, 13, 15, 34 ; V, 6, la série la plus vraisemblable des sept premiers évêques romains de cette période : 1. S. Pierre [42-67] ; 2. S. Lin (2 Timoth. IV, 21) ; 3. S. Anenclet (Anaclet ou Clet) ; 4. S. Clément (Philipp. IV, 3, 68-77, ou 92-101) ; 5 Évariste ; 6. S. Alexandre [jusq. 119] ; 7. S. Xyste (Sixte) [119-127] ; S. Télesphore [127-139]. Il est impossible de mettre d’accord les séries qui se trouvent dans Epiph., Optat. Mitevit., et August., surtout pour les quatre premiers évêques. On crut pouvoir conclure de l’épître de Clément aux Corinthiens qu’il régna de 68 à 77. Voyez Dœllinger, Man. de l’hist. eccles., t. I, sect. I, p. 87-90. À l’appui viennent les indications du plus ancien catalogue des évêques rom. (composé probablement vers 354), allant jusqu’au pape Libérius, et d’après lesquelles Lin et Clet auraient déjà été ordonnés évêques par Pierre, durant son premier séjour à Rome. C’est ce que confirme Rufin, Præf. ad recognition. Clementis : « Linus et Cletus fuerunt quidem ante Clementem episcopi in urbe Roma, sed superstite Petro, videlicet ut illi episcopatus curam gererent, ipse vero apostolatus impleret officium. » (Galland., t. II, p. 218.) — Le plus ancien catalogue, appelé Libérien, renfermant les jours et mois des pontificats et des consulats du commencement et de la fin du règne des papes, ainsi que la continuation faite plus tard jusqu’à Félix III ; enfin le catal. III jusqu’à Étienne II, etc., se trouvent imprimés, commentés, ornés du portrait des papes dans Conatus chronico-historicus ad catalogum pontificum (celui-ci remplit tout le tome II des Præfationes, tractatus, etc., in Bollandi act. SS.). Cf. F. Pagi, Breviarium hist. chron. critic. illustriora pontif. rom. gesta complectens. Antverpiæ, 1717, 6 vol. in-4 (les derniers vol. continués jusqu’à Grégoire XIII par A. Pagi.) Gius Piatti, Storia criticoronol. de Rom. Pontific. Napoli, 1765-1770, 12 vol. in-4 (jusque Clément XIII). A. Sandini, Vita Pontificum roman. Patav., 1739.
  57. Vita Cypr. per Pontium ejus diacon. en tête des Opp. Cypr. ed. Erasmus. Bas., 1520 ; Pamelius, Antv., 1568, et souvent Rigaltius. Paris, 1648, et Fell. Oxon., 1682. Baluzii stud. et labor. absolvit unus ex monach. congreg. S. Mauri (Prudent. Maranus). Paris., 1726 ; Ven., 1728. Nous citons d’après la dernière. Rettberg, Cyprien, sa vie et ses œuvres. Gœtt., 1831 ; Mœlher, Patrologie, t. I, p. 809-893 ; Bœhringer, Hist. eccles. sous forme de biograph., t. I, p. 375-435.
  58. Matth. X, 23.
  59. Augustin. de Baptismo, III, 3 « Ego Cyprianum, catholicum episcopum, catholicum martyrem, et quanto magis magnus erat, tanto se in omnibus humiliantem, etc. » Cf. Prudent. de Coronis, hymn. XIII.