Histoire politique des États-Unis/Tome 2/Leçon 15

Charpentier (2p. 304-329).
QUINZIÈME LEÇON
déclaration d’indépendance — 4 juillet 1776.

Le Congrès de 1775 avait placé l’Amérique dans une situation qui n’était ni la paix ni la guerre ; c’était une défensive menaçante, une opposition armée. En même temps que le Congrès faisait un dernier et impuissant appel à l’humanité du roi d’Angleterre, à la justice du peuple anglais, et qu’il protestait une dernière fois de son désir de conserver l’union entre les deux pays, Washington arrivait devant Boston pour y prendre le commandement de l’armée du Massachusetts, premier et faible noyau de l’armée continentale. Quatorze mille hommes mal armés, sans uniforme, ayant à peine de la poudre, enrôlés à court terme, et partant quand ils étaient instruits, c’est avec ces faibles ressources qu’il fallait bloquer Boston[1].

Mais ces hommes étaient des patriotes, et déjà la guerre avait commencé. Dans un engagement plus sérieux que celui de Lexington, à Bunker-Hill, aux portes de Boston, on avait appris aux Anglais qu’ils avaient devant eux, non pas des lâches, mais des citoyens résolus à défendre leur liberté[2]. Joseph Warren, le président du Congrès provincial, était tombé dans la bataille. C’était un homme jeune, énergique, éloquent, l’espoir de la patrie, sa mort fut un deuil général ; mais c’est avec le sang des martyrs qu’en politique comme en religion on gagne les batailles.

L’Angleterre avait jeté le gant, les Américains l’avaient relevé ; du reste, on eût dit que le roi et ses ministres voulaient à tout prix précipiter une guerre dont les dépouilles pouvaient couvrir largement les frais, et dont la gloire donnerait à lord North et à son parti un renom qui effacerait celui de Chatham.

En finir avec les colonies, telle était l’ambition du ministère, quand le Parlement fut convoqué le 26 octobre 1775. Le discours du trône contenait les plaintes les plus amères sur cette conspiration désespérée[3], sur ces prétendus représentants des colonies, qui non contents d’empoisonner l’opinion avaient usurpé les pouvoirs du gouvernement et commencé les hostilités. Le roi repoussait avec dédain ces pétitions qui n’avaient d’autre objet que « d’amuser l’opinion par de vagues assurances d’attachement pour la mère patrie, tandis qu’au fond tout se préparait pour une révolte générale… La rébellion menaçait de gagner toutes les colonies, on voulait fonder un empire indépendant ; la sagesse et l’humanité même commandaient d’arrêter promptement ces désordres, par une action énergique[4]. »

L’adresse des deux Chambres fut un écho de la colère royale ; cependant il se trouva dans la Chambre des lords dix-neuf membres pour protester contre la guerre d’Amérique ; protestation énergique que lord Mahon suppose rédigée par Burke, le tuteur de lord Rockingham, comme le nommait Horace Walpole[5]. « On y blâmait la guerre comme étant injuste et impolitique dans son principe, fatale dans ses conséquences ; et on protestait contre un ministère « qui avait déshonoré le Parlement, trompé la nation, perdu les colonies, enveloppé le pays dans une guerre civile contre son intérêt évident, et qui, par les motifs les moins avouables, avait répandu avec légèreté le sang de milliers de concitoyens[6]. » Suivant l’usage, on écouta la passion et non pas la raison.

Une fois assuré de l’appui des Chambres, le ministère proposa d’agir contre les colonies comme contre un ennemi du dehors. Lord Mansfield ne craignit pas de rappeler à la Chambre le discours d’un général suédois, sous le règne de Gustave-Adolphe : « Enfants, vous voyez ces hommes là-bas ; si vous ne les tuez pas, ils vous tueront. » On vota l’enrôlement de 28 000 marins, de 55 000 soldats ; et, parmi ces derniers, on enrôla avec l’agrément du Parlement des mercenaires étrangers, qu’on acheta au landgrave de Hesse-Cassel et au duc de Brunswick[7]. C’était ainsi que le roi George entendait l’humanité.

Un autre bill, du 20 novembre 1778, interdit tout commerce avec les treize colonies unies. Tout vaisseau, toute marchandise américaine saisis sur la haute mer ou dans les ports furent déclarés prise de guerre, et attribués à l’équipage qui en ferait la capture.

Enfin, par une clause injustifiable, que l’Angleterre a cependant maintenue après l’indépendance de l’Amérique, clause qui a amené la guerre des États-Unis en 1812, et qui dort aujourd’hui dans quelque statute-books sans avoir été formellement révoquée, il fut déclaré que les maîtres d’équipage et autres personnes capturés sur des vaisseaux américains seraient transportés sur les navires de Sa Majesté, pour y servir comme s’ils eussent été librement enrôlés. En d’autres termes, il fallait que, sous peine d’être fustigé et au besoin fusillé, un matelot américain portât les armes contre ses compatriotes, et aidât à les tuer. C’est là un mépris de la liberté et du droit qu’on n’a jamais trouvé qu’en Angleterre, et qui devait bientôt amener les neutres, c’est-à-dire toutes les puissances d’Europe à se coaliser contre d’abominables prétentions.

Le même bill autorisait la couronne à envoyer aux colonies des commissaires, portant d’une main l’épée et de l’autre la branche d’olivier, pour redresser les griefs particuliers ou généraux, et décider si une colonie ou une portion de colonie était rentrée dans l’obéissance ; auquel cas, et sur simple déclaration des commissaires, les sévérités de la loi cessaient à l’instant.

Ce bill cruel fut attaqué avec véhémence[8]. Cette rapine autorisée, qui remplaçait chez les Anglais l’honneur et la gloire par la piraterie, et qui forçait les Américains à s’unir comme un seul homme pour défendre leurs biens et leur vie, fut dénoncée comme une honte et une folie, « Il faut intituler ce bill, s’écria-t-on, Bill pour mettre plus fortement à exécution les résolutions du Congrès américain.

La presse des matelots fut dénoncée dans la Chambre des lords « comme un raffinement de tyrannie plus cruel que la mort. » On ajouta, et avec raison, qu’on ne pouvait pas confisquer les biens d’un homme, parce que c’est un ennemi, et en même temps confisquer sa personne et le forcer à servir, parce que c’est un citoyen. Contraindre des prisonniers à porter les armes contre leur famille, leurs amis, leur patrie ; les piller d’abord, et les rendre ensuite complices de la ruine de leurs frères, c’était là un acte sans exemple, sinon parmi les pirates, les bandits et les ennemis de la société humaine[9].

Qu’importait au ministère ? Il avait la majorité dans le Parlement et le pays ; il n’avait besoin ni d’être juste, ni d’être humain ; il n’y a rien d’insolent comme la force, surtout la force d’opinion qui ne craint même pas ce qui peut arrêter la force militaire. Sur cette question de la presse des matelots, le ministre répondit avec impertinence que « cette mesure était un acte de grâce et de faveur ; chacun de ces rebelles méritait la mort comme traître, et cependant pour toute punition, une fois sur les vaisseaux de Sa Majesté, on le traiterait sur le même pied qu’un grand nombre de sujets fidèles et utiles… Au surplus, la solde qu’il toucherait au service de son souverain légitime serait une compensation pour tous les scrupules que pourrait éveiller cette prétendue violation de leurs principes. »

Ce fut avec le même dédain et des sophismes de même force que le ministère défendit la légitimité et l’emploi de troupes mercenaires contre des citoyens. Les Américains, en se révoltant, s’étaient, disait-il, constitués étrangers, ils ne pouvaient se plaindre qu’on employât des étrangers contre eux. D’ailleurs, ajoutait-il, « des troupes étrangères, imbues de l’esprit militaire, et habituées à l’obéissance passive, se laisseront moins facilement égarer par cette fausse humanité à laquelle pourraient céder des soldats anglais, au grand dommage de l’intérêt national[10]. »

Si ces maximes féroces se trouvaient dans la bouche d’un jacobin, aurait-on assez de malédictions pour les flétrir ? Sont-elles innocentes sur les lèvres d’un ministre royal ?

Et quand on opposait au ministère que les Américains, repoussés par la métropole et livrés en proie à des mercenaires, pourraient, eux aussi, s’adresser aux puissances étrangères, non pas seulement pour leur emprunter quelques bandes de soldats, mais pour solliciter l’appui de quelque grande nation, heureuse de rendre à l’Angleterre le mal qu’elle en aurait reçu autrefois ; le ministère repoussait cette supposition comme étant ridicule, « Comment imaginer que l’Espagne ou la France donneraient à leurs colonies le dangereux exemple d’encourager la révolte ? Rien ne devait plus les effrayer que le voisinage d’un empire indépendant, qui maîtriserait un jour le continent tout entier. »

La seconde raison était sérieuse, M. de Vergennes le sentait ; la première ne l’était pas, car ni la France ni l’Espagne n’avaient de querelles avec leurs colonies, et c’était mal calculer que de croire qu’en 1776 elles eussent oublié cette guerre, terminée en 1763, qui les avaient humiliées en Amérique, chassant l’Espagne des Florides, les Français du Canada. Il y avait là une revanche à prendre, trop tentante pour que la France n’en eût pas le goût, et cela ne manqua pas.

Une fois ces lois votées, il fallut nommer un commandant des forces royales. Suivant l’usage, on offrit le commandement au plus ancien des officiers généraux. C’était le vieux général Oglethorpe, le bienfaisant fondateur de la Géorgie en 1732.

À la grande surprise du ministère, le respectable vétéran accepta le commandement, à la condition d’être convenablement soutenu. On lui promit une armée d’élite, une flotte nombreuse, à quoi il répondit : « Je me charge de l’affaire, sans un homme et sans un vaisseau. Autorisez-moi seulement, dès mon arrivée, à assurer aux colons que vous leur ferez justice. Je connais le peuple américain ; je puis affirmer à Sa Majesté qu’elle n’a nulle part des sujets plus obéissants et plus loyaux. En leur faisant justice vous pouvez compter sur leur obéissance, mais vous ne les soumettrez jamais par la force[11]. »

Cet avis, le dernier, donné par un vieillard, ne fut pas plus heureux que les autres ; le commandement fut donné à sir William Howe, officier de mérite qui avait déjà servi en Amérique, et qui fit tout ce qu’on pouvait attendre d’un bon soldat dans la guerre difficile dont on l’avait chargé.

Il fut résolu qu’on ouvrirait la campagne avec des forces suffisantes « pour décourager toute résistance, et amener la soumission sans effusion de sang. » On attaquerait de trois côtés, de façon à couper les colonies et à s’appuyer sur celles qu’on croyait les plus loyales. On chasserait l’invasion américaine du Canada, et de là on prendrait les provinces de l’Est à revers ; la seconde expédition serait envoyée dans le Sud, à Charleston ; la troisième et la principale s’emparerait de New-York, et par l’Hudson donnerait la main à l’armée du Canada.

Les résolutions du Parlement arrivèrent en Amérique en mars 1776 ; l’effet fut celui que l’opposition avait prédit. Jusque-là les colonies étaient pleines de gens qui voulaient espérer contre toute espérance ; on en avait eu la preuve dans les adresses et pétitions du Congrès de 1775 ; et quand, en juin 1775, le Congrès avait ordonné un jour de jeûne et de prières, un des motifs indiqués dans la proclamation avait été « de supplier le Tout-Puissant de répandre ses bénédictions sur George III, et de lui inspirer la sagesse. »

Mais l’affaire de Lexington, le sang versé à Bunker-Hill, et surtout les lois votées par le Parlement, dissipèrent les dernières illusions. On n’est pas longtemps le fidèle sujet d’un prince qui vous fait tuer par des mercenaires à cinq sous par jour. Aussi, dès le mois d’avril 1776, voyons-nous le chief-justice de la Caroline du Sud, William-Henry Drayton, dans son résumé au grand jury, ne pas craindre de dire : « Le Tout-Puissant a créé l’Amérique pour être indépendante de la Grande-Bretagne. Ce serait de notre part une impiété que de nous retirer, et de ne pas agir comme instruments dans cette main toute-puissante qui s’étend pour accomplir sa volonté. L’indépendance seule peut mettre l’Amérique à l’abri des perfides desseins de ses ennemis, qui déjà lui trouvent un pouvoir et une prospérité trop grande. Notre devoir comme chrétiens, notre salut comme Américains sont tellement mêlés ensemble, que refuser notre part de labeur dans cette œuvre divine, c’est refuser d’être un grand peuple, un peuple libre, pieux et heureux[12]. »

Ce fut à ce moment qu’un Anglais établi depuis peu en Amérique, Thomas Paine, rédacteur du Magasin de Pensylvanie, et ami de Franklin, qui l’avait introduit dans les colonies, publia en faveur de la séparation un pamphlet anonyme intitulé le Sens commun. Paine, qui avait commencé par être quaker, avait fait tous les métiers : il avait été marchand, marin, douanier, maître d’école, poëte, et en ce moment il était journaliste. C’était un homme de peu de consistance ; mais son pamphlet anonyme, attribué tour à tour à Franklin, à Samuel et à John Adams, eut un succès inouï et une influence si grande, que plus tard le Congrès se crut obligé d’en récompenser l’auteur. Longtemps après, en l’année 1783, Washington appelait Paine auprès de lui comme un homme dont l’Amérique ne pouvait trop reconnaître les services. L’Europe, et en particulier la France, ne firent pas un accueil moins favorable à cet écrit ; le nom de Paine devint si populaire, surtout après qu’il eut publié les Droits de l’Homme (1791), en réponse aux attaques de Burke contre la Révolution française, que, tout étranger qu’il fût, il fut envoyé comme député à la Convention par le département du Pas-de-Calais[13].

Aujourd’hui, quand on lit ce pamphlet fameux, on est un peu désappointé. La Révolution nous a blasés.

Paine commence par dire qu’on a tort de confondre la société et la souveraineté, il a raison ; mais il a tort quand il ajoute que la société a été produite par nos besoins, et le gouvernement par notre méchanceté, la première est une mère, la seconde un bourreau ; par conséquent, le meilleur gouvernement n’est qu’un mal nécessaire. Le gouvernement, comme les habits, est la marque de l’innocence perdue ; les palais des rois sont bâtis sur les ruines des bosquets du paradis.

Paine combat la royauté par le droit naturel et par la Bible ; pour lui, la monarchie est au gouvernement ce que le papisme est à la religion, et il combat la royauté par l’éternel argument des dangers auxquels l’enfance, la vieillesse, la maladie, la faiblesse, l’ignorance, les passions des souverains exposent un pays.

« Mais, continue-t-il, où est le roi d’Amérique ? demanderont quelques personnes. Mes amis, il est au ciel, et ne s’amuse point à faire entre-tuer les hommes comme la royale brute de la Grande-Bretagne. Et, pour qu’il ne nous manque rien des pompes de la terre, fixons un jour solennel où nous proclamerons notre Constitution ; qu’on apporte la Charte, placée sur la loi divine, sur la parole de Dieu ; qu’une couronne y soit déposée, pour que le monde apprenne qu’en Amérique le roi, c’est la loi ; car, de même que dans les gouvernements absolus le roi est la loi, ainsi, dans les pays libres, la loi doit être le roi, et il n’en faut pas d’autre. Mais, pour qu’on n’abuse point de ce symbole, brisez la couronne après la cérémonie, et partagez-en les morceaux au peuple, car c’est à lui qu’elle appartient. »

À ces vaines déclamations, Paine ajoutait des réflexions plus justes.

La protection de l’Angleterre, disait-il, avait toujours été ruineuse pour l’Amérique ; on avait toujours engagé les colonies malgré elles dans toutes les guerres que soulevait l’ambition anglaise ; il suffisait à l’Amérique de se déclarer indépendante pour vivre en paix avec tout le monde, et en même temps pour donner l’essor à ce commerce, qui ne demandait que la liberté pour se déployer.

Il disait encore, et c’était la pensée de tout le monde, que l’Amérique rebelle ne pouvait trouver d’appui au dehors ; on ne se compromet pas inutilement ; mais que l’Amérique indépendante, en offrant au commerce étranger un marché de trois millions d’hommes et une alliance contre le monopole et l’ambition de l’Angleterre, devait trouver des amis en Europe, et surtout en France. En ce point il avait raison, et lisait dans l’avenir.

Le pamphlet de Paine eut un grand effet, mais l’Angleterre fit plus encore, et précipita la séparation. L’arrivée des soldats étrangers, l’occupation de Boston, les traités avec les Indiens, l’expédition dirigée sur Charleston rendirent la révolution nécessaire.

Le Congrès, qui venait de se réunir au mois de mai, prit aussitôt un parti vigoureux. Des lettres de marque furent accordées, les ports d’Amérique ouverts à tous les peuples, des mesures sévères prises contre les tories (c’est ainsi qu’on appelait les partisans de l’Angleterre ) ; enfin, on recommanda à toutes les provinces de se donner un libre gouvernement, en choisissant celui qui dans l’opinion des représentants du peuple assurerait le mieux le bonheur et la sécurité de leurs constituants et de l’Amérique. C’en était fait de l’ancienne alliance de l’Angleterre et des colonies.

Le 7 mai, Richard-Henri Lee porta devant le Congrès la grande question de l’indépendance, demandant « que l’allégeance fût rompue, ainsi que l’union ;

« Qu’on prît immédiatement des mesures pour obtenir le secours des puissances étrangères ;

« Et qu’une confédération fût formée pour lier ensemble plus étroitement les colonies[14]. »

La question fut débattue le lendemain, soutenue avec une grande chaleur par Richard-Henri Lee et par John Adams, combattue par John Dickinson[15].

Le 10, la majorité des colonies l’adopta en principe[16]. Le Maryland et la Pensylvanie s’y opposèrent ; New-York, New-Jersey, New-Hampshire et le Connecticut, demandèrent des instructions à leurs commettants. Pour obtenir l’unanimité, on renvoya au 1er juillet la résolution finale. Au 1er juillet, toutes les colonies avaient pris leur parti.

En attendant cette date, un comité avait été chargé de préparer la déclaration d’indépendance, comité composé de Thomas Jefferson, qui fut chargé de rédiger l’acte, de John Adams, de Franklin, de Roger Sherman et de Robert Livingston.

Le 1er juillet, sur la proposition des députés de Virginie (et déjà la Virginie s’était proclamée État indépendant), on délibéra sur la déclaration d’indépendance. John Adams en fut le plus ardent et le plus habile défenseur ; après quelques difficultés (ce n’était pas chose aisée que de faire marcher ensemble treize États souverains, l’exemple de l’Allemagne en donne quelque idée), la proposition fut unanimement acceptée.

Le projet de Jefferson fut adopté, sauf deux paragraphes, dont l’un fut remanié et l’autre supprimé.

Celui qui fut remanié contenait des reproches véhéments à l’adresse du peuple anglais ; il fut adouci à la prière de gens timides qui ne voulaient pas qu’on blessât les amis qu’on avait en Angleterre, et sur lesquels on comptait encore, dernière faiblesse de l’esprit humain qui se retient souvent à une chance impossible.

« Nos frères d’Angleterre ont été sourds à la voix de la justice et du sang. Quand le cours régulier de leurs institutions leur a permis d’éloigner des conseils de la nation ceux qui troublaient l’harmonie, ils les ont rétablis au pouvoir par un libre choix. En ce moment même ils laissent leur premier magistrat envoyer contre nous, non-seulement des soldats de notre sang, mais des Écossais et des mercenaires étrangers. Ces actes ont donné le dernier coup à notre affection mourante ; le cœur nous dit de renier à jamais ces frères insensibles. Nous essayerons d’oublier notre ancien amour, et de les considérer comme le reste des hommes, ennemis en guerre, amis en paix.

« Nous aurions pu former ensemble un peuple libre et grand, mais il paraît que le partage de la grandeur et de la liberté est au-dessous de la fierté anglaise. Qu’il en soit donc ainsi qu’ils l’ont voulu ; la route du bonheur et de la gloire nous est aussi ouverte ; nous y marcherons à part, nous acceptons la nécessité qui nous annonce une éternelle séparation. »

Le paragraphe retranché concernait la traite des nègres et l’esclavage. Il fut retranché, nous dit Jefferson dans ses Mémoires, pour plaire à la Géorgie et à la Caroline du Sud, qui n’avaient jamais voulu suspendre l’importation, et qui entendaient la continuer. « Quant à nos frères du Nord, ajoute Jefferson, ils furent aussi blessés de ma censure ; car, encore bien qu’ils eussent très-peu d’esclaves parmi eux, ils en étaient grands marchands pour les autres. »

Ce paragraphe était ainsi conçu :

« Le roi a déclaré une cruelle guerre à la nature humaine, il a violé les droits sacrés de la vie et de la liberté dans la personne d’un peuple lointain qui ne l’a jamais offensé. Ces hommes innocents, il les a réduits en captivité, il les a transportés dans un autre hémisphère pour y être esclaves, ou pour périr misérablement dans la traversée. Cette conduite de pirate, l’opprobre des puissances infidèles, est la conduite du roi chrétien de la Grande-Bretagne. Décidé à tenir ouvert un marché où l’on vend et l’on achète des hommes, il a prostitué son veto en annulant toutes les décisions de nos assemblées qui avaient pour objet de prohiber ou de restreindre cet exécrable commerce. Et pour que cet assemblage d’horreurs soit complet, en ce moment il excite ces populations d’esclaves à se lever en armes au milieu de nous, afin d’acheter la liberté dont il les a privés par le meurtre du peuple auquel il les a imposés, leur vendant au prix de l’assassinat cette liberté dont il les a dépouillés par un crime. »

Beaux sentiments, énergiquement exprimés. Par malheur l’Amérique laissa échapper cette occasion unique d’en finir avec une plaie que les années devaient rendre inguérissable. On a fait disparaître de la déclaration d’indépendance cette revendication des droits de l’humanité, mais la marque reste, comme une tache dans ce beau morceau, tache d’autant plus visible qu’on a pris plus de peine pour l’effacer.

Quant au reste, la rédaction fut adoptée, sauf d’interminables querelles de détail, sort ordinaire des discussions d’assemblée ; je n’en parlerais pas, si elle n’avait donné lieu à Franklin de placer un de ces ingénieux apologues qui plaisaient au Socrate américain.

Assis à côté de Jefferson qui n’était rien moins que patient, et observant son irritation, Franklin lui dit avec cette bonhomie plus apparente que réelle, qui est le cachet du bonhomme Richard :

« Je me suis fait une règle d’éviter autant que possible d’être jamais rédacteur d’un projet quelconque soumis à une assemblée. Voici d’où me vient l’expérience.

« Quand j’étais apprenti imprimeur, un de mes amis qui s’établissait chapelier consultait ses connaissances sur un sujet fort important pour lui, son enseigne. Celle qu’il avait imaginée portait le signe d’un chapeau, et au dessous : John Thompson, chapelier, fait et vend des chapeaux au comptant. Le premier qu’il consulta lui dit que le mot de chapelier était complètement inutile, puisqu’il disait ensuite fait et vend des chapeaux. Thompson trouva l’avis sage, il effaça le mot. Le second remarqua qu’il était inutile de mettre au comptant ; d’abord parce qu’on ne vend guère cet article à d’autres conditions, et ensuite parce qu’il pouvait être quelquefois avantageux de faire crédit. On effaça au comptant ; il resta John Thompson fait et vend des chapeaux. Un troisième ami fit observer que lorsqu’on achète un chapeau, on ne s’inquiète guère de savoir qui l’a fait ; le mot fait fut effacé. Mais en montrant à un quatrième l’enseigne réduite à ces mots John Thompson vend des chapeaux, ce dernier s’écria : Qui diable s’imaginera jamais que vous en faites cadeau ? Sur cette critique assez juste, les deux mots disparurent ; et il resta simplement John Thompson et le signe du chapeau. »

Revenons à un sujet plus sérieux. Ce fut le 4 juillet au soir que la déclaration adoptée par le Congrès fut signée par tous ses membres, excepté M. Dickinson ; ils étaient au nombre de cinquante-cinq.

Cet acte, qui donnait naissance à un nouvel empire, que dis-je ? à une république telle que l’antiquité n’en a jamais connu, cet acte qui inaugurait une politique nouvelle, ouvre pour les Américains l’ère de la liberté ; le 4 juillet est resté leur grande fête nationale ; c’est de ce jour-là qu’ils se nomment Américains et États-Unis ; le nom de colonies a disparu.

En Congrès, quatre juillet mil sept cent soixante seize.
DÉCLARATION
par les représentants des états-unis d’amérique assemblés en congrès.

« Lorsque le cours des événements humains met un peuple dans la nécessité de rompre les liens politiques qui l’unissaient à un autre peuple, et de prendre parmi les puissances de la terre la place séparée et le rang d’égalité auxquels il a droit en vertu des lois de la nature et de celles du Dieu de la nature, le respect qu’il doit aux opinions du genre humain exige de lui qu’il expose aux yeux du monde et déclare les motifs qui le forcent à cette séparation.

« Nous regardons comme incontestables et évidentes par elles-mêmes les vérités suivantes : Que tous les hommes ont été créés égaux ; qu’ils ont été doués par le Créateur de certains droits inaliénables ; que parmi ces droits on doit placer au premier rang la vie, la liberté et la recherche du bonheur. Que, pour s’assurer la jouissance de ces droits, les hommes ont établi parmi eux des gouvernements dont la juste autorité émane du consentement des gouvernés. Que, toutes les fois qu’une forme de gouvernement quelconque devient destructrice de ces fins pour lesquelles elle a été établie, le peuple a le droit de la changer ou de l’abolir, et d’instituer un nouveau gouvernement en établissant ses fondements sur les principes, et en organisant ses pouvoirs dans la forme qui lui paraîtra la plus propre à lui procurer la sûreté ou le bonheur. À la vérité, la prudence dira que, pour des motifs légers et des causes passagères, l’on ne doit pas changer des gouvernements établis depuis longtemps ; et aussi l’expérience de tous les temps a montré que les hommes sont plus disposés à souffrir, tant que les maux sont supportables, qu’à se faire droit à eux-mêmes en détruisant les formes auxquelles ils sont accoutumés. Mais lorsqu’une longue suite d’abus et d’usurpations tendant invariablement au même but montre évidemment le dessein de réduire un peuple sous le joug d’un despotisme absolu, ce peuple a le droit et il est de son devoir de renverser un pareil gouvernement, et de pourvoir par de nouvelles garanties à sa sûreté pour l’avenir. Telle a été la patience de ces colonies dans leurs maux, et telle est aujourd’hui la nécessité qui les force à changer leur ancien système de gouvernement. L’histoire du roi actuel de la Grande-Bretagne est un tissu d’injustices et d’usurpations répétées tendant toutes directement à établir une tyrannie absolue sur ces États. Pour le prouver, exposons les faits au monde impartial :

« Il a refusé son consentement aux lois les plus salutaires et les plus nécessaires pour le bien public.

« Il a défendu à ses gouverneurs de passer des lois d’une importance immédiate et urgente, à moins qu’il ne fût sursis à leur exécution jusqu’à ce que l’on eût obtenu son consentement, et quand elles ont été ainsi suspendues, il a tout à fait négligé d’y faire attention et de les examiner.

« Il a refusé de passer d’autres lois pour l’établissement de grands districts, à moins que le peuple de ces districts n’abandonnât le droit d’être représenté dans la législature, droit inestimable pour un peuple, et qui n’est formidable que pour les tyrans.

« Il a convoqué des corps législatifs dans des lieux inusités, dénués de toute commodité, et éloignés des dépôts de leurs registres publics dans la seule vue, en les fatiguant, de les forcer à se prêter à ses desseins.

« Il a dissous à plusieurs reprises des chambres de représentants, parce qu’elles s’opposaient avec fermeté à ses entreprises sur les droits du peuple.

« Il a refusé pendant un long espace de temps, après ces dissolutions, de faire élire de nouvelles chambres de représentants ; par là l’autorité législatrice, qui ne peut pas être anéantie, est retournée au peuple pour être exercée par lui dans son entier, l’État restant pendant ce temps exposé à tous les périls d’invasions extérieures et de convulsions au dedans.

« Il s’est efforcé d’arrêter et d’empêcher la population de ces États, en mettant des obstacles à l’exécution des lois pour la naturalisation des étrangers, en refusant d’en passer d’autres pour encourager l’émigration dans ces contrées, et en augmentant le prix et les conditions des nouvelles concessions et acquisitions de terre.

« Il a gêné l’administration de la justice en refusant son consentement à des lois nécessaires pour établir des tribunaux.

« Il a rendu les juges dépendants de sa seule volonté pour la tenue de leurs offices, et pour le taux et le payement de leurs appointements.

« Il a érigé une multitude de nouveaux offices, et envoyé dans ce pays des essaims d’officiers pour harasser notre peuple et dévorer sa substance.

« Il a entretenu parmi nous, en temps de paix, des armées permanentes sans le consentement de nos législatures.

« Il a affecté de rendre le soldat indépendant de l’autorité civile, et même supérieur à elle.

« Il a combiné ses efforts avec ceux d’autres personnes[17] pour nous soumettre à une juridiction étrangère à notre Constitution et non reconnue par nos lois, en donnant sa sanction à leurs actes de prétendue législation ;

« Pour mettre en quartiers parmi nous de gros corps de troupes armées ;

« Pour protéger les gens de guerre par des procédures dérisoires contre le châtiment des meurtres qu’ils auraient commis sur la personne d’habitants de ces États ;

« Pour intercepter et détruire notre commerce avec toutes les parties du monde ;

« Pour imposer sur nous des taxes sans notre consentement ;

« Pour nous priver, dans beaucoup de cas, du bénéfice de la procédure par jurés ;

« Pour nous transporter au delà des mers, afin de nous y faire juger sur des délits prétendus ;

« Pour détruire le système de liberté des lois anglaises dans une province voisine[18], y établir un gouvernement arbitraire, et en reculer les limites, afin de faire à la fois de cette province un exemple et un instrument propres à introduire le même gouvernement absolu dans les colonies ;

« Pour abroger nos Chartes, abolir nos lois les plus précieuses, et saper par le fondement la puissance de nos gouvernements ;

« Pour suspendre nos propres législatures, et se déclarer revêtu du pouvoir de faire des lois obligatoires pour nous, dans tous les cas quelconques.

« Il a abdiqué la qualité de notre souverain en nous déclarant hors de sa protection et en nous faisant la guerre.

« Il a dévasté nos mers, ravagé nos côtes, brûlé nos villes et massacré nos concitoyens.

« Et maintenant il transporte de grandes armées de mercenaires étrangers pour accomplir l’œuvre de mort, de désolation et de tyrannie déjà commencé, avec une cruauté et une perfidie dont on aurait peine à trouver des exemples dans les siècles les plus barbares, et tout à fait indignes du chef d’une nation civilisée.

« Il a forcé nos concitoyens faits prisonniers sur mer à porter les armes contre leur patrie, à devenir les bourreaux de leurs amis et de leurs frères, ou à tomber eux-mêmes sous les coups de leurs frères et de leurs amis.

« Il a excité parmi nous des troubles domestiques, et a tâché d’attirer sur les habitants de nos frontières les Indiens sauvages, ennemis sans pitié, dont la manière connue de faire la guerre est de massacrer tout ce qu’ils rencontrent, sans distinction d’âge, de sexe et de condition.

« À chaque degré d’oppression, nous avons demandé justice dans les termes les plus humbles ; nos pétitions réitérées n’ont reçu pour réponse que des insultes et des injustices répétées. Un prince dont le caractère est ainsi marqué par toutes les actions qui peuvent désigner un tyran est incapable de gouverner un peuple libre.

« Et nous n’avons pas manqué d’égards envers nos frères les Bretons. Nous les avons avertis, dans toutes les occasions, des tentatives que faisait leur législature pour étendre sur nous une juridiction que rien ne pouvait justifier. Nous avons rappelé à leur mémoire les circonstances de notre émigration et de notre établissement dans ces contrées. Nous en avons appelé à leur justice et à leur grandeur d’âme naturelles, et nous les avons conjurés, par les liens du sang qui nous unissent, de désavouer ces usurpations qui rompraient inévitablement nos liaisons et notre commerce mutuel. Ils ont aussi été sourds à la voix de la justice et de la parenté. Nous devons donc céder et consentir à la nécessité qui ordonne notre séparation, et les regarder, ainsi que nous regardons le reste du genre humain, comme ennemis pendant la guerre, amis pendant la paix.

« En conséquence, nous, les représentants des États-Unis d’Amérique, assemblés en Congrès général, en appelant au Juge suprême de l’univers qui connaît la droiture de nos intentions, nous publions et déclarons solennellement, au nom de l’autorité du bon peuple de ces colonies, que ces Colonies-Unies sont et ont droit d’être des États libres et indépendants ; qu’elles sont dégagées de toute obéissance envers la couronne de la Grande-Bretagne ; que toute union politique entre elles et l’État de la Grande-Bretagne est et doit être entièrement rompue, et que, comme États libres et indépendants, elles ont pleine autorité de faire la guerre, de conclure la paix, de contracter des alliances, d’établir le commerce et de faire tous les autres actes ou choses que des États indépendants ont droit de faire. Et, pleins d’une ferme confiance dans la protection de la divine Providence, nous engageons mutuellement au soutien de cette Déclaration notre vie, nos biens et notre honneur[19]. »

Il est curieux de nous rendre compte, à distance, de la situation des esprits après cette grande décision qui lançait l’Amérique vers des destinées inconnues ; une lettre de John Adams nous permet d’en juger ; elle a été écrite le 3 juillet 1776 ; c’est à sa femme que John Adams l’adresse.

« Le sort en est jeté, nous avons passé le Rubicon. Hier a été décidée la plus grande question qui ait jamais été débattue en Amérique, et peut-être parmi les hommes n’en décidera-t-on jamais une plus grande. Le Congrès a passé une résolution acceptée par toutes les colonies sans exception, et qui porte que : « Les Colonies-Unies sont de fait et de droit des États indépendants, et qu’à ce titre il leur appartient de faire la guerre, de conclure la paix et d’agir comme tout autre empire. » Dans peu de jours vous verrez une Déclaration où sont exposés les motifs qui nous ont décidé à cette grande résolution, et les raisons qui nous justifient devant Dieu et devant les hommes.

« Quand je me reporte à l’année 1761, et que je me rappelle les discussions concernant les mandats d’assistance devant la cour supérieure, discussions que j’ai toujours considérées comme le commencement de notre dispute avec la Grande-Bretagne ; quand je suis le cours des choses depuis cette époque, et que je me rappelle la suite des événements politiques, l’enchaînement des causes et des effets, je suis surpris de ce qu’il y a d’imprévu, de soudain et de grand dans cette révolution. L’Angleterre a été pleine de folie, et l’Amérique pleine de sagesse ; c’est là du moins mon jugement. L’avenir en décidera. C’est la volonté du ciel que les deux pays soient à jamais séparés. Peut-être aussi est-ce la volonté du ciel que l’Amérique ait encore à souffrir des maux plus terribles, des épreuves plus redoutables. S’il en doit être ainsi, ces épreuves auront du moins ce bon effet, qu’elles nous inspireront beaucoup de vertus qui nous manquent, et qu’elles nous corrigeront de cette foule d’erreurs, de folies et de vices qui menacent de nous déshonorer et de nous perdre. La fournaise de l’affliction purifie les États aussi bien que les individus.

« Quoi qu’il en soit, le jour où la Déclaration sera promulguée sera la date la plus mémorable de l’histoire d’Amérique. Je suis convaincu que les générations futures le célébreront comme le grand anniversaire. Il faudra le fêter comme le jour de la délivrance, par des actes solennels de dévotion envers Dieu, le Tout-Puissant. Il faudra le célébrer par des pompes, des revues et des jeux, par le bruit des fusils et des cloches, par la splendeur des feux de joie et des illuminations d’un bout du continent à l’autre bout, d’aujourd’hui à toujours.

« Vous me croirez fou d’enthousiasme, je ne le suis pas. Pour maintenir la Déclaration, pour soutenir et défendre les États, je sais ce qu’il en coûtera de peine, de sang, de trésors. Mais au travers de tous ces nuages je vois les rayons d’une lumière et d’une gloire ravissante. Je vois que la fin vaut cent fois les moyens ; l’acte d’aujourd’hui c’est le triomphe de nos enfants, quand bien même nous devrions regretter ce que nous avons fait ; mais, grâce à Dieu, j’espère que cela ne sera pas[20]. »

Ce patriotisme reçut ici-bas sa récompense. Non-seulement Adams et Jefferson devinrent tour à tour présidents des États-Unis, affranchis par leur courage, mais il leur fut donné à tous deux de survivre de cinquante ans à ce jour solennel, de voir pendant cinquante ans la croissance prodigieuse des États-Unis, passant de trois millions à dix millions d’hommes, de recevoir les bénédictions de toutes ces générations qui saluaient en eux les derniers survivants parmi les fondateurs de la patrie.

Enfin, par une fortune étonnante et qu’à Rome on eût autrefois nommé divine, ce fut le 4 juillet 1826, le même jour, et presque à la même heure à laquelle cinquante ans plus tôt ils avaient risqué leur jeunesse, leur talent et leur vie pour assurer l’indépendance nationale ; ce fut, au milieu des feux de joie, des illuminations, des hymnes de reconnaissance, que ces deux vétérans s’endormirent, chargés de gloire et d’honneur, après avoir rendu à la patrie le plus grand service que puisse lui rendre un de ses enfants, et donné à leur pays les deux plus grands biens de la terre, puisqu’ils renferment et garantissent tous les autres : l’indépendance et la liberté.


  1. Lord Mahon, VI, 67.
  2. Lord Mahon, t. VI, p. 60 : Are the Americans cowards ? crièrent les Américains au colonel anglais Abercrombie.

    Les Anglais eurent 220 morts et 880 blessés, mais ils gardèrent leurs positions ; les Américains eurent 450 tués ou blessés.

  3. Lord Mahon, VI, 73.
  4. Ramsay, Amer. Rev., I, 281.
  5. Lord Mahon, VI, 76.
  6. Ramsay. ibid., 282.
  7. 16 000 suivant Pilkin, I, 358 ; Ramsay, I, 285. On avait songé à la Russie ; le landgrave de Hesse en vendit 12 000, le duc de Brunswick et d’autres petits princes 5 000 de plus. On payait, au duc 30 couronnes (180 francs) par homme, plus un subside de 450 000 couronnes par an. (Lord Mahon, VI, 90.) Ce fut avec cet argent qu’il construisit son Versailles, Wilhelms-Hœhe. Frédéric II, toujours plaisant, mais plus humain, n’autorisait pas chez lui ces enrôlements, et faisait payer à ces misérables le viehzoll, ou impôt du bétail, quand ils traversaient ses États.
  8. Lord Chatham était retombé malade, il ne put parler ; mais, pour protester, il ne voulut pas que son fils servît au Canada. (Lord Mahon, t. VI. p. 77.)
  9. Ramsay, I, 284.
  10. Id., ibid., 285.
  11. Ramsay, I, 287.
  12. Pitkin, I, 360 ; — lord Mahon, VI, 98.
  13. Paine s’honora en refusant de voler la mort de Louis XVI : 1° parce que les crimes de Louis XVI étaient ceux du roi et non de l’homme ; 2° parce que Robespierre avait demandé l’abolition de la peine de mort ; 3° parce que Louis XVI avait affranchi l’Amérique. Robespierre se vengea de cet argument ad hominem par cette petite note trouvée dans ses papiers : « Demander que Thomas Paine soit décrété d’accusation pour l’intérêt de l’Amérique autant que de la France. » Paine fut incarcéré au Luxembourg, d’où il ne sortit qu’après le 9 thermidor. Son suppléant à la Convention fut Joseph Lebon. « Quand j’ai été mis en prison, disait Paine, il a pris ma place à la Convention ; quand je suis rentré à la Convention, il a pris ma place dans la même prison et a été guillotiné à ma place. Il a été mon suppléant jusqu’au bout. »
  14. Madison, Papers, I, 9.
  15. Sur le discours de Dickinson, lord Mahon, VI, 100.
  16. Sur les divisions intérieures, Jefferson, Letter to M. Wills 12 mai 1819. — Lord Mahon, VI, 102.
  17. C’est-à-dire avec le Parlement de la Grande-Bretagne.
  18. Le Canada.
  19. La Déclaration est signée des noms suivants : John Hancock, président, Josiah Bartlett, William Whipple, Mathew Thornton, de New-Hampshire : Samuel Adams, John Adams, Robert Treat Payne, Elbridge Gerry, du Massachusetts-Bay ; Stephen Hopkins, William Ellery, de Rhode-Island ; Roger Sherman, Samuel Huntington, William Williams, Oliver Wolcott, du Connecticut ; William Floyd, Philip Livingston, Francis Lewis, Lewis Morris, de New-York ; Richard Stockton, John Witherspoon, Francis Hopkinson, John Hart, Abraham Clark, de New-Jersey ; Robert Morris, Benjamin Rush, Benjamin Franklin, John Morton, George Glymer, James Smith, George Taylor, James Wilson, George Ross, de Pensylvanie ; César Rodney, George Read, Thomas M’Kean, du Delaware ; Samuel Chase, William Paca, Thomas Stone, Charles Caroll, of Carrollton, du Maryland ; George Wythe, Richard Henry Lee, Thomas Jefferson, Benjamin Harrisson, Thomas Nelson jun., Francis Lightfoot-Lee, Carter Braxton, de Virginie ; William Hooper, Joseph Hewes, John Penn, de la Caroline septentrionale ; Edward Rutledge, Thomas Heyward jun., Thomas Lynch jun., Arthur Middleton, de la Caroline méridionale ; Button Gwinett, Lyman Hall, George Walton, de Géorgie. Quelques-uns de ces noms furent ajoutés assez longtemps après le vote, notamment celui de Charles Caroll, qui fut le dernier survivant de ceux qui prirent part à cet acte fameux. Si Washington ne figure pas parmi les signataires, c’est qu’il commandait alors l’armée continentale.
  20. Orators of the Americ. Rev., p. 177.