Histoire naturelle des cétacées/Le Dauphin de Commerson

LE DAUPHIN DE COMMERSON[1].



Les trois grandes parties du monde, l’Amérique, l’Afrique et l’Asie, dont on peut regarder la Nouvelle-Hollande comme une prolongation, se terminent, dans d’hémisphère austral, par trois promontoires fameux, le cap de Horn, le cap de Bonne-Espérance et celui de Diémen. De ces trois promontoires, les deux plus avancés vers le pôle antarctique sont le cap de Diémen et le cap de Horn. Nous avons vu des troupes nombreuses de dauphins remarquables par leur vélocité et par l’éclat du blanc et du noir qu’ils présentent, animer les environs du cap de Diémen, où le naturaliste Péron les a observés : nous allons voir les environs du cap de Horn montrer des bandes considérables d’autres dauphins également dignes de l’attention du voyageur par le blanc resplendissant et le noir luisant de leur parure, ainsi que par la rapidité de leurs mouvemens. Ces derniers ont été décrits par le célèbre Commerson, qui les a trouvés auprès de la terre de Feu et dans le détroit de Magellan, lors du célèbre voyage autour du monde de notre Bougainville. Mais le blanc et le noir sont distribués bien différemment sur les dauphins de Péron et sur ceux de Commerson : sur les premiers, le dos est noir, et l’extrémité du museau, de la queue et des nageoires, offre un très-beau blanc ; sur les seconds, le noir ne paroît qu’aux extrémités, et tout le reste reluit comme une surface polie, blanche, et, pour ainsi dire, argentée. C’est pendant l’été de l’hémisphère austral, et un peu avant le solstice, que Commerson a vu ces dauphins argentés, dont les brillantes couleurs ont fait dire à ce grand observateur qu’il falloit distinguer ces cétacées même parmi les plus beaux habitans des mers. Ils jouoient autour du vaisseau de Commerson, et se faisoient considérer avec plaisir par leur facilité à l’emporter de vîtesse sur ce bâtiment, qu’ils dépassoient avec promptitude, et qu’ils enveloppoient avec célérité au milieu de leurs manœuvres et de leurs évolutions.

Ils étoient moins grands que des marsouins. Si, contre nos conjectures, les dauphins de Commerson et ceux de Péron n’avoient pas de nageoire dorsale, nous n’avons pas besoin de dire qu’il faudroit les placer dans le genre des delphinaptères, avec les bélugas et les sénedettes.


  1. Delphinus Commersonii.
    Le jacobite.
    Le marsouin jacobite.
    Tursio corpore argenteo, extremitatibus nigricantibus. Commerson, manuscrits adressés à Buffon, et remis par Buffon à Lacepède.