Gouvernement des Lacédémoniens (Trad. Talbot)/04

Gouvernement des Lacédémoniens (Trad. Talbot)
Traduction par Eugène Talbot.
Œuvres complètes de XénophonHachetteTome 2 (p. 464-465).



CHAPITRE IV.


Éducation des hommes faits.


Mais il s’est occupé surtout avec attention de ceux qui sont à la fleur de l’âge, persuadé qu’en étant ce qu’ils doivent être, ils rendent à la république les plus grands services.

Voyant donc que, quand l’émulation s’en mêler les chœurs sont entendus avec plus de plaisir, les combats gymniques regardés avec plus d’intérêt, il a pensé que, s’il existait aussi parmi les adolescents une concurrence de vertu, il les rendrait capables au dernier point d’arriver à la perfection. Je vais dire comment il les a mis aux prises. Les éphores choisissent parmi les adolescents trois hommes, auxquels on donne le nom d’hippagrètes[1], et chacun d’eux choisit cent hommes, en alléguant les motifs du choix ou de l’exclusion. Ceux qui n’ont pas obtenu cette distinction deviennent également ennemis de ceux qui les ont exclus et de ceux qui leur ont été préférés, et ils s’observent les uns les autres, pour voir quiconque péchera contre les lois de l’honneur.

Cette lutte est, entre toutes, la plus agréable aux dieux, la plus utile à l’État, puisqu’on y montre comment doit agir l’homme de cœur, que chacun en particulier s’applique à se placer au-dessus des autres, et qu’au besoin tous, sans exception, sont prêts à secourir la patrie de toute leur âme. Par là aussi ils entretiennent nécessairement leur vigueur. Leur rivalité fait qu’ils se battent partout où ils se rencontrent. Cependant tout homme qui passe a le droit de séparer les combattants ; et celui qui désobéit au survenant, est conduit aux éphores par le pédonome. Ceux-ci le condamnent à une forte amende, pour lui apprendre à ne pas se laisser dominer par la colère, au point de désobéir aux lois.

Ceux qui ont passé l’adolescence, et parmi lesquels on choisit les magistrats, sont dispensés chez les autres Grecs des exercices du corps, quoique astreints au service militaire. Lycurgue a prescrit par une loi qu’il fût honorable à cet âge de se livrer à la chasse, à moins d’une fonction publique, afin de pouvoir, ainsi que les adolescents, supporter les fatigues de la guerre.



  1. Chevaliers, mais celle désignation n’entraîne pas rigoureusement l’idée d’hommes à cheval.