ACTE CINQUIÈME


Une partie du parc du baron à Castellamare, donnant sur le golfe de Naples. Rivage au fond. Une terrasse avec un escalier descendant à la mer. Table et banc à gauche ; à droite, façade de la maison.


Scène PREMIÈRE


CARDILLO, assis sur un banc ; il écrit sur un carnet.
SONNET.

On dit : Propre à rien de poëtes,
Quel est votre but ici-bas ?
Les belles rimes que vous faites,
Amusent et ne servent pas !

(Il se lève.)
Je réponds : Un jeune homme offense
L’épouse à monsieur le baron.
Tandis que monsieur, sans défense,
Gémit au fond d’une prison.

Moi qui longtemps touchai ses gages,
Je veux le toucher par les gages
De mon fidèle dévouement.

Je veux dans l’eau noyer le traître,
Je veux délivrer mon bon maître
Et le chanter élégamment.


Scène II.

CARDILLO, LE BATELIER.
CARDILLO, appelant.

Ho ! batelier ! ho !…

LE BATELIER, montant l’escalier de la terrasse.

Il ne fallait pas crier si fort… J’étais là.

CARDILLO.

Approche. Ce bateau est-il celui du comte Pericoli ?

LE BATELIER.

Non ; c’est celui que vous m’avez commandé.

CARDILLO.

Exactement pareil ?

LE BATELIER.

Je le défie lui-même d’en faire la différence. J’ai amarré le mien, j’ai emmené le sien ; et maintenant le diable n’y verrait que du feu !

CARDILLO, le faisant descendre.

Et tu me réponds que ce bateau coulera au fond de la mer à deux cents brasses du rivage ?

LE BATELIER.

À deux cents brasses, non ! L’homme pourrait gagner la terre à la nage ; mais à deux mille ; et s’il se tire de là, il aura du bonheur.

CARDILLO.

C’est qu’il en a toujours eu, le damné jeune homme ! Les combinaisons les plus ingénieuses !… Il faut qu’il ait des reliques ou des amulettes plein ses poches. Dimanche encore, deux hommes superbes l’ont arrêté la nuit dans une allée de Villa-Reale. Le scélérat nous a assommé l’un et éclopé l’autre. Deux familles à la charge de M. le baron !

LE BATELIER.

Il a de quoi payer, heureusement. Je crois même qu’il paye d’avance !

CARDILLO.

Qui t’a dit ça ?

LE BATELIER.

Personne ; mais les deux cents ducats que vous m’avez promis seront aussi bien dans ma poche que dans la vôtre… et je les attends.

CARDILLO.

Ah çà, vil maraud, crains-tu qu’on te fasse banqueroute ?

LE BATELIER.

Non ! mais M. le baron del Grido est en prison depuis deux mois avec Birbone. On dit en ville qu’il sera condamné pour faux témoignage, et que ses écus pourraient bien entrer dans les coffres du roi.

CARDILLO.

Si mon maître est assez puissant pour frapper un ennemi du fond de son cachot, il est assez riche pour récompenser les amis qui le servent. Tiens ! et va-t’en ! On vient ; je ne veux pas qu’on nous voie ensemble.

LE BATELIER.

Ni moi non plus. (Il sort.)


Scène III.

CARDILLO, LÉONORA.
LÉONORA, entrant par la droite.

Qu’est-ce que vous regardez là ?

CARDILLO.

Voyez vous-même. C’est un bateau… un joli petit bateau.

LÉONORA.

Le bateau de M. le comte Pericoli ?

CARDILLO.

Vous le reconnaissez ?

LÉONORA.

Sans doute ! Je l’ai vu assez souvent autour de la villa. Pauvre jeune homme ! Voilà pourtant deux grands mois qu’il vient sonner tous les jours à la grille du parc.

CARDILLO, se frottant les mains.

Il n’y reviendra plus !

LÉONORA.

Et pourquoi ?

CARDILLO.

Mais parce que madame vit dans la retraite, conformément aux ordres de monsieur… et qu’elle ne reçoit personne, sinon les amis de monsieur !…

LÉONORA.

Eh bien ! monsieur avait-il raison de soupçonner la vertu de madame ? A-t-elle seulement répondu aux lettres de M. Pericoli ?…

CARDILLO.

Soyons équitable ; madame est une digne personne, et nous l’avions calomniée.

LÉONORA.

Parlez pour vous !

CARDILLO.

Je n’ai jamais mal pensé de madame. C’est à M. le comte que j’en ai. C’est sa faute ! Sans lui, monsieur ne serait pas en prison depuis soixante-trois jours avec Birbone et tous ces malfaiteurs.

LÉONORA.

Mais puisqu’il doit sortir aujourd’hui !

CARDILLO.

Hélas ! nous n’en savons rien, c’est aujourd’hui qu’on le juge.

LÉONORA.

Moi ! je suis persuadée qu’on l’acquittera ; il est si vieux ! On ne peut pas le condamner à une peine qu’il n’aurait pas le temps de subir… Avez-vous envoyé une voiture à Naples, comme madame vous l’a ordonné ?

CARDILLO.

Certainement ; mais qui peut dire si on nous le ramènera vivant ?

LÉONORA.

Et pourquoi pas ?

CARDILLO.

Parce qu’il a trop souffert là-bas ; le chagrin l’a rongé, mademoiselle. La dernière fois que je l’ai vu, je l’ai trouvé vieilli de vingt ans !

LÉONORA.

Ah ! la colère… Et puis, quand on ne peut pas se venger !…

CARDILLO.

Ah ! pourquoi ne l’ont-ils pas jugé tout de suite ?…

LÉONORA.

Pourquoi ?… Ah ! voilà ! C’est Birbone.

CARDILLO.

L’infâme !

LÉONORA.

C’est lui qui a traîné l’affaire en longueur. Il connaît la chicane mieux qu’un vieil avocat.

CARDILLO.

Il a tué mon maître à petit feu… Savez-vous ce qu’il a osé dire à la dernière audience ? « Messieurs, si vous me faisiez l’injure d’acquitter M. del Grido, je ne resterais pas une heure de plus sous le toit de la justice. » Je voudrais bien voir qu’il essayât de s’évader !

LÉONORA.

Chut ! Madame la baronne.


Scène IV.

LÉONORA, GARDILLO, GAËTANA ; elle entre sans les voir, une lettre à la main.
LÉONORA.

Pauvre madame ! Comme elle est pâle ! Elle aussi a bien souffert, et pourtant c’est la meilleure de tous !…

GARDILLO.

Rassurez-vous, mademoiselle Léonora ! À partir de demain, elle n’aura plus personne à craindre. (À Gaëtana.) Madame n’a pas besoin de nous ?

GAËTANA.

Non, mes amis !… laissez-moi !… (Ils sortent à droite.)


Scène V.

GAËTANA, seule. Elle s’assied sur le banc, déplie lentement la lettre et lit.

« Vous ne lisez pas mes lettres, Gaëtana ; je le sais, j’en suis sûr, et pourtant je trouve un plaisir amer à vous écrire. Je ne vis plus, je ne dors plus ; la fièvre qui me brûle ne me laisse de repos ni jour ni nuit. Ingrate ! qu’ai-je donc fait pour mériter votre haine ? Avez-vous peur de moi ? Doutez-vous de mon respect et de mon obéissance ? J’en suis sûr, on m’a ruiné dans votre estime, chassé de votre cœur ! Je ne sais pas ce qu’ils ont pu vous dire, mais je jure que vous ne me condamnerez pas avant de m’avoir entendu ! Accumulez les obstacles, doublez les verrous, (Entre le comte.) j’arriverai jusqu’à vous par des chemins que l’audace de l’homme n’a jamais tentés. Je tomberai au milieu de la solitude et de la paix qui vous environnent, et je vous dirai… »

LE COMTE.

Gaëtana, jugez-moi !


Scène VI.

GAËTANA, LE COMTE.
GAËTANA, se rejetant en arrière.

Lui ! Partez !…

LE COMTE.

Non, j’ai trop souffert !

GAËTANA.

Et moi donc ? Partez !…

LE COMTE, vivement.

Eh bien, soit ! mais quand vous m’aurez dit ce que vous avez contre moi.

GAËTANA.

Ce que j’ai ? (S’avançant.) J’ai qu’un homme est prisonnier, malade, malheureux, condamné peut-être !… et ses douleurs, ses angoisses et ses larmes ont creusé un abîme entre nous.

LE COMTE.

Et moi aussi, j’ai été prisonnier ! on a dressé mon échafaud sous les fenêtres de votre palais !

GAËTANA.

Je ne m’en souviens plus ! C’est lui qui est à plaindre. D’ailleurs, il est mon mari.

LE COMTE.

Il est indigne de vous.

GAËTANA.

J’ai juré devant Dieu de lui rester fidèle ! Et si j’ai pu vous résister lorsqu’il était là, je ne suis pas assez infâme pour le trahir lorsqu’il est enchaîné et sans défense.

LE COMTE.

Eh ! s’il est en prison, c’est par son crime !

GAËTANA, revenant.

Mais il n’aurait jamais été criminel, si vous ne m’aviez pas aimée !

LE COMTE.

Ah ! vous me reprochez mon amour !

GAËTANA.

Faut-il donc que je vous en remercie ? Je pouvais être heureuse, ou du moins tranquille ! Je pouvais vivre dans une douce ignorance de ces passions qui tuent !

LE COMTE.

Et de quoi vous plaignez-vous si vous ne m’aimez pas ?

GAËTANA, à part.

Je ne l’aime pas ! moi !… Va-t’en !

LE COMTE.

Non ! Tu ne m’as jamais aimé ! Tu es plus belle et plus pure, mais plus froide et plus altière que ces montagnes virginales qui portent sur leurs fronts une neige éternelle !

GAËTANA.

Tu mens ! Je suis une femme, aussi faible, aussi folle et aussi déplorable que toutes les créatures de mon sexe !… (Lui prenant la main.) Crois-tu que mon cœur n’ait pas battu bien fort le jour de notre première rencontre ? N’as-tu pas deviné que le son de ta voix éveillait quelque chose d’étrange et de nouveau dans ma pensée ? Lorsque tu jouais cette comédie de réserve et de timidité qui m’a séduite ; lorsque tu affectais d’étouffer tes ardeurs au fond de ton âme, ne voyais-tu pas briller dans mes yeux toutes les flammes d’une passion funeste ? Le jour où tu as bravé en face l’homme qu’on m’avait appris à craindre et à respecter, ne savais-tu pas quel irrésistible empire ton courage maudit te donnerait sur moi ? Et, lorsque tu marchais à l’échafaud, ne comprenais-tu pas, cœur sans pitié, que j’étais trop faible et trop perdue pour te survivre ? Va t’en ! (Elle s’éloigne à droite.)

LE COMTE, allant à elle.

Que je m’en aille ! moi ! lorsque ma vie commence, lorsque le ciel s’éclaire, lorsque tu viens de déchirer le voile qui me cachait tout un horizon de bonheur !… Non ! Tu m’en as trop dit ! Si tu voulais lutter plus longtemps contre moi, enfant que tu es, il ne fallait pas me livrer le secret de ta faiblesse !… Ah ! tu m’aimes !… Tu m’appartiens !… Je t’arracherai, malgré toi, s’il le faut, à ces prétendus devoirs auxquels on a enchaîné ta jeunesse ! Viens !

GAËTANA.

Mais alors tu es un lâche !… Je suis incapable de résister, je ne te le cache pas ! Je t’avoue que si tu tendais la main vers moi, je me laisserais tomber dans tes bras. La solitude, le chagrin, l’amour ont épuisé le peu qui me restait de force… Je me montre à toi telle que je suis… dans toute la tristesse de mon accablement, et tu veux, misérable que tu es, pour le plaisir de quelques jours ou de quelques années, ruiner mon honneur en ce monde et mon salut dans l’autre ! Sais-tu bien que c’est infâme ce que tu fais là ?

LE COMTE, marchant sur elle.

Oui, je suis un lâche, un misérable, un infâme !… (Il lui prend les mains.) mais, je t’aime !… Honneur, devoir, réputation, le salut même, tout cela pâlit et s’efface à la lumière éblouissante de l’amour !… Il n’y a point de douleur qu’il ne console, point de danger qu’il ne brave, point « de crime[1] » qu’il ne justifie ! Viens, nous serons blâmés, nous serons maudits, nous serons coupables, mais nous serons heureux !

GAETANA, reculant.

Heureux !… Crois-tu ?

LE COMTE, l’entraînant.

Oui, nous fuirons ensemble, aujourd’hui même, tout est disposé. J’ai recueilli les débris de ma fortune ; un navire nous attend ! Nous irons auprès de Florence, dans le jardin de l’Italie délivrée. Un ami sûr a choisi pour nous une maisonnette aux bords de l’Arno. Nous vivrons seuls, l’un pour l’autre, inconnus du monde entier, invisibles à la curiosité des villes, entourés de quelques braves paysans qui admireront ta grâce, qui béniront ta bienfaisance… qui t’adoreront comme « la patronne de leur église[2]… » et la Providence de leur foyer !… Viens !


Scène VII.

Les Mêmes, LE BARON, paraissant au fond, pâle et défait. Il entre en scène en faisant un geste de menace ; mais, aux premiers mots de Gaëtana, il faiblit et s’appuie à la balustrade.
GAËTANA, au comte. Elle recule jusqu’au banc où elle tombe.

Mon ami !… ayez pitié de moi ! (Le comte s’agenouille.) Permettez-moi de vivre et de mourir sans reproche. Ma mère, qui ne m’a donné que de beaux exemples, serait trop malheureuse là-haut, si elle me voyait hors de la bonne route ! Moi-même, Gabriel, j’ai pris l’habitude de regarder dans mon miroir la figure d’une femme de bien. (Elle se lève) Le devoir, qui est une loi pour tout le monde, est pour moi quelque chose de plus. C’est l’atmosphère que j’ai respirée dès l’enfance, le milieu où j’ai vécu. Si vous me transportiez hors de là, je croirais que l’air me manque, et bientôt, mon pauvre ami, il n’y aurait plus de Gaëtana ! (Le comte se lève.)

LE COMTE.

Et moi, je vois dans l’avenir une Gaëtana nouvelle !… Non plus timide et languissante et soumise en esclave aux lois « absurdes[3] » de la société ; mais libre, radieuse, marchant d’un pas résolu dans la lumière et dans la joie, et s’éblouissant elle-même par l’éclat de son bonheur et de sa beauté. Viens ! l’univers est à nous ! nous sommes les maîtres de la terre !

GAËTANA, se débattant.

Laisse-moi !

LE COMTE.

Viens !

GAËTANA.

Jamais !

LE COMTE.

Il faudra donc que je t’emporte dans mes bras ?

GAËTANA, se reculant.

Comte Pericoli ! j’ai dit que je voulais vivre et mourir en femme de bien !… Si vous faites un pas, je me précipite du haut de cette terrasse, et vous irez là-bas chercher votre maîtresse !

LE COMTE, la ramenant.

Non, tu ne mourras point quand la vie peut être si belle ! Je te défendrai par la force contre la folie de ta vertu !

GAËTANA.

Tu le veux ! Que Dieu me pardonne ! (Elle court au parapet, aperçoit le baron et recule en poussant un cri.)

LE BARON, s’avançant en se soutenant à peine ; au comte.

Je vous trouverai donc toujours sur mon chemin ! Dieu soit loué ! j’arrive à temps ! (Il chancelle.) Ah ! mes forces… !

LE COMTE veut le soutenir.

Monsieur le baron…

LE BARON, le repoussant avec horreur.

Non.

GAËTANA, le soutenant.

Vous êtes blessé ?

LE BARON, tristement.

Non, mais brisé !

LE BARON.

Les juges m’ont acquitté ; je suppose qu’ils ont eu pitié de mon grand âge !… Ils ont cru que j’avais cent ans pour le moins !… N’est-ce pas, monsieur le comte, que j’ai l’air d’un vieillard de cent ans ?

GAËTANA.

Vous vivrez de longues années !

LE BARON.

Non ! non ! Rassurez-vous… voici la fin de vos peines.

GAËTANA, doucement.

Monsieur !

LE BARON.

Oh ! je ne vous reproche rien !… « C’est ma faute ! J’ai été bien injuste envers vous ! (Avec force.) Aujourd’hui même… lorsque les portes de la prison se sont ouvertes devant moi, je me suis élancé vers vous avec toute l’impétuosité de la haine et de la vengeance !… Je croyais… je voulais… ! Mais je sais maintenant… j’ai entendu… je suis désarmé… et brisé… J’ai vécu toute une vie en moins d’une heure… Pauvre enfant ! elle allait pourtant mourir, si je ne m’étais pas trouvé là !

« GAËTANA.

« Je vivrai maintenant pour vous faire oublier tout ce que vous avez souffert.

« LE BARON.

« Ah ! l’oubli n’est pas loin, ma pauvre fille ! Mais avant de m’en aller au pays où l’on oublie, je veux que vous me pardonniez mes injustices et le mal que je vous ai fait.

« GAËTANA.

« Mon malheur est mon ouvrage. Si j’avais su fermer mon cœur à tous les sentiments qui m’étaient défendus… »

LE BARON.

C’est moi qui n’ai pas su me faire aimer. Je vous aimais pourtant !… trop peut-être ! Je ne m’étais pas laissé le temps d’être jeune ! Je m’étais dit : Soyons riches d’abord ; nous verrons ensuite à jouir de la vie ; et, quand je suis arrivé au terme que j’avais fixé moi-même, il était trop tard, j’étais vieux !… Je me suis révolté contre la vieillesse… j’ai lutté… j’ai fait des malheureux !… Dites-moi que vous me pardonnez. Gaëtana !

GAËTANA.

Mon ami !… que Dieu me pardonne un jour comme je vous pardonne !

LE BARON.

Merci !… (Capricana entre suivi de Cardillo, de Léonora et des autres domestiques.)


Scène VIII.

Les Mêmes, CAPRICANA, CARDILLO.
CAPRICANA, entrant.

Monsieur le baron !

GAËTANA, courant au docteur qui vient de droite.

Monsieur Capricana… dites-lui, cher docteur, que vous le sauverez !

LE BARON.

Si votre pardon ne m’a pas guéri, que pourrait faire la science ? (Le baron au comte.) Approchez, monsieur le comte. Vous n’avez pas vieilli, vous ! Il a toujours trente ans ! Je vous ai détesté cordialement, je vous hais encore ! (À Cardillo.) As-tu fait ce que j’ai dit ?

CARDILLO.

Oui, monsieur le baron, tout est prêt.

LE BARON.

Merci ! (Au comte.) J’aime à croire que vous n’êtes pas curieux d’assister à mes derniers moments. Embarquez-vous pour Naples, monsieur Pericoli !… Il sera toujours temps de revenir ici quand je n’y serai plus. Demain, par exemple… Pour aujourd’hui, je vous souhaite un bon voyage… (Il tombe à demi évanoui.)


Scène IX.

Les Mêmes, BIRBONE.
BIRBONE, entrant en courant.

Ah ! monsieur le comte, sauvez-moi !

LE COMTE.

Birbone !

BIRBONE.

Les sbires sont à mes trousses ! je suis perdu si je ne trouve un bateau pour gagner les îles.

LE COMTE.

Qu’as-tu donc fait ?

BIRBONE.

J’ai percé deux gros murs, escaladé un toit, enfoncé quatre portes, et fait la route à pied jusqu’ici. Pour Dieu, prêtez-moi un bateau !

LE COMTE.

Prends le mien, pauvre diable, et tâche de vivre en honnête homme !

LE BARON, se lève.

Arrêtez… Birbone !… Je ne veux pas… (Au comte.) C’est à vous de partir !… Ah ! (Il tombe dans les bras du docteur.)

CAPRICANA.

Vous êtes veuve, madame.

GAËTANA.

Dieu ! (À Capricana.) Mon ami… vous me conduirez demain au couvent des Carmélites. (Elle se précipite sur le corps du baron.)

LE COMTE, avec désespoir.

Perdue pour toujours !

BIRBONE.

Bah ! le couvent est une prison comme une autre… on s’en échappe… (Il s’embarque.)[4]


FIN.
  1. D’action. Commission d’examen.
  2. Coupé par la commission d’examen.
  3. Coupé par la commission d’examen.
  4. Cet acte n’est pas excellent ; mais qui donc le savait, parmi ceux qui l’ont sifflé ? Les acteurs exténués l’ont joué en pantomime, et personne ne l’a entendu.