Discours de M. Saint-Marc-Girardin sur les prix de vertus de l’Académie française

DISCOURS


DE M. SAINT-MARC-GIRARDIN


DIRECTEUR DE L’ACADÉMIE FRANÇAISE


23 juillet 1863





Messieurs,


J’aurais mauvaise grâce à louer l’Académie du soin particulier qu’elle apporte à remplir les fonctions que lui a confiées M. de Montyon. Je puis dire, cependant, que les conversations qui suivent le rapport fait par la Commission chargée spécialement d’examiner les bonnes actions qui nous sont signalées, m’ont toujours semblé être un résumé complet de tout ce qui peut se dire pour et même aussi contre l’institution de M. de Montyon.

C’est une de ces conversations, celle de cette année, que je voudrais rapporter aujourd’hui le plus simplement du monde. L’Académie, quand elle examine les actes de dévouement qui lui sont transmis, sait bien qu’il y a d’autres dévouements qui restent ignorés d’elle et du public. Elle ne se croit donc pas appelée à fixer le contingent annuel de la vertu dans notre pays, et elle est persuadée, quoique beaucoup de bonnes actions soient présentées à son examen, qu’il y en a encore beaucoup plus qu’elle ne connaît pas. Elle a eu cette année à prononcer entre cent six concurrents : que serait-ce que cent six bonnes actions seulement pour une population de 38 millions d’âmes ? La part contributive de chacun de nous dans ce contingent serait bien petite ; mais, encore un coup, la plus grande partie des bonnes actions nous échappe. Nous sommes heureux et reconnaissants de celles que nous couronnons au nom de M. de Montyon ; mais nous vouons la même reconnaissance à tous ces dévouements inconnus et modestes, qui se trouvent presque partout dans notre société pour remédier aux maux de l’humanité, pour adoucir ses peines physiques et morales.

Nous ne pouvons pas faire une enquête générale des bonnes actions. Nous n’en avons pas le pouvoir ; nous ne pouvons que vérifier les témoignages qui nous sont adressés. Ici nous devons rendre hommage à l’administration : jamais son concours ne nous a manqué, et, toutes les fois que nous nous adressons aux préfets, aux sous-préfets, aux maires, leur bienveillance nous aide à instruire ces affaires d’un nouveau genre qui, sous le titre de prix de vertu, commencent à figurer dans la nomenclature administrative. Souvent même l’affaire nous arrive déjà instruite, et nous n’avons plus qu’à juger la bonne action de tel département ou de tel arrondissement.

L’Académie, dans la conversation que je rapporte, exprimait cette année le vœu qu’à côté de cette régularité administrative dont rien ne peut se passer dans notre pays, nos concitoyens voulussent bien nous aider par leur intervention individuelle. Nous serions heureux que le public, s’associant à nos scrupules et à nos souhaits, nous envoyât beaucoup de témoignages, beaucoup d’informations, sans leur donner dès le commencement l’autorité de la forme administrative. Nous savons bien que cette initiative individuelle aurait ses inconvénients, ses abus, ses ridicules même. On nous contait, par exemple, qu’une femme qui se trouvait très-bonne épouse et très-bonne mère avait demandé le prix de vertu, non pas pour elle-même, mais pour sa mère qui l’avait si bien instruite aux vertus et aux devoirs de son état. La pétitionnaire oubliait que sa mère se trouvait déjà dignement récompensée par le bonheur d’avoir une si excellente fille.

Nous ne préférons pas d’une façon absolue la voie de l’information individuelle à la voie de l’information administrative. Nous voudrions que les deux méthodes concourussent à nous éclairer dans l’accomplissement de nos devoirs. Les présentations qui se font par les autorités sont très-bien faites ; mais pourquoi nos concitoyens ne s’habitueraient-ils pas à nous faire aussi les leurs ? Nous demandons au public son assistance et sa coopération, non pour exclure les présentations administratives, mais pour avoir à choisir entre un plus grand nombre de candidats, et pour que les candidats viennent de tous les points de l’horizon moral que nous devons embrasser.

Plusieurs de nos confrères espéraient aussi, dans cette conversation, que, si nos informations devenaient plus nombreuses et plus diverses, l’Académie aurait plus de variété dans le choix qu’elle fait des bonnes actions. L’Académie, disaient quelques-uns d’entre nous, semble se renfermer dans un cercle de vertus admirables, mais trop uniformes ; elle a des bonnes actions de prédilection et d’habitude. Les dévouements patients et persévérants sont trop préférés aux dévouements soudains et rapides. L’énergie qui produit la persévérance témoigne assurément d’une grande et belle âme ; mais l’énergie qui produit l’héroïsme est le signe aussi d’une grande âme. Que l’homme dévoue sa vie dans un moment pour sauver son prochain, ou qu’il la dévoue à l’accomplissement d’un lent et pénible devoir, c’est le même sentiment de générosité, c’est la même abnégation, c’est le même principe de vertu. Nous lisons souvent dans le Moniteur le catalogue des bonnes actions qui valent à ceux qui les font des médailles d’honneur ; ce sont des actions soudaines et hardies, des hommes qui se jettent à l’eau ou qui se précipitent au milieu des flammes pour sauver leurs semblables : le Moniteur représente le dévouement actif et militant ; le livret de l’Académie représente le dévouement résigné et patient : pourquoi les deux sortes de vertus ne partageraient-elles pas plus également nos récompenses ?

Voilà quelques-unes des critiques qui se faisaient entre nous et qui ont pu quelquefois se répéter au dehors. Nous répondions qu’à prendre notre liste de récompenses cette année même, on y trouvait les deux sortes de dévouement, et qu’il n’y avait pas dans notre choix l’uniformité qu’on nous reprochait.

Parmi nos trois premiers prix, s’il y en a deux qui appartiennent à la classe des dévouements continus et patients, il y en a un qui est donné à un ancien matelot, éclusier à Thouerac, près d’Angoulême, qui a sauvé je ne sais combien de malheureux qui sans lui auraient péri dans les flots. Il est vrai que Milasseau, c’est le nom de celui que nous couronnons, joint la persévérance à l’ardeur ; il unit les deux genres d’héroïsme. J’aime aussi en lui une certaine brusquerie de bons sentiments. Ainsi une de ses questions, après avoir sauvé un homme qui était tombé dans la Charente : « Est-ce un honnête homme au moins que j’ai tiré de là ? — Oui. — Ah ! tant mieux ! j’ai eu la main heureuse ! » Milasseau, en effet, a grandement raison de sauver les gens avant de savoir ce qu’ils sont, cela lui épargne l’hésitation.

J’aime aussi dans Milasseau la manière dont parlent de lui ses admirateurs. Nous avons des rapports sur les belles actions, dans lesquels les rédacteurs, s’adressant au préfet, qui transmet les pièces à l’Académie, ont cru devoir joindre à l’éloge de la vertu qu’ils recommandent l’éloge aussi du préfet et l’éloge de l’Académie. Nous n’avons pas pris en mauvaise part ce que nous avons regardé comme une politesse d’habitude. Mais je ne suis pas fâché qu’il n’y ait rien de pareil dahs les documents qui nous recommandent Milasseau. « Tel est, nous dit-on, le récit des bonnes et généreuses actions qui remplissent la vie de notre vieux marin. Est-il besoin d’ajouter qu’il a élevé ses enfants de manière qu’ils soient dignes du nom honorable qu’il leur laissera pour toute fortune ? Ses filles, veuves toutes deux, sont des mères de famille dévouées, et son fils, marin du port de Rochefort et ancien canotier de l’amiral préfet maritime, a déjà été décoré de deux médailles de sauvetage. » Voilà un fils qui comprend que noblesse oblige.

Je me reprocherais de ne pas citer encore, à propos de Milasseau, une petite note que je trouve à la fin du rapport qui le concerne : « Les signataires de cette demande affirment qu’elle a été faite à l’insu de Milasseau. »

J’ai mis le second prix avant le premier prix, l’éclusier Milasseau avant Mlle Guittaud, de Chambéry, parce que je m’attache surtout à rapporter les conversations de l’Académie, et que, dans ces conversations, le dévouement ardent de Milasseau nous a servi d’argument pour prouver à quelques-uns de nos confrères que nous n’avions pas de préférence exclusive et que tous les dévouements nous sont également précieux. La vertu de Mlle Guittaud ne mérite pas moins, en effet, notre admiration que la vertu de Milasseau. Mlle Guittaud a consacré sa fortune tout entière à fonder à Chambéry une maison de refuge, sous le nom du Bon-Pasteur, qui a servi d’asile à un grand nombre de jeunes filles. Cette maison dure depuis trente ans. Une autre maison du même genre a été fondée à Annecy par les soins de Mlle Guittaud. On ne peut lire sans émotion, dans les récits qui nous ont été adressés de la vie de Mlle Guittaud, comment, grâce à sa charité aussi ardente que persévérante, elle était devenue en Savoie une sorte de puissance et d’autorité, que l’annexion s’est bien gardée de supprimer ou d’affaiblir. Tous les malheurs de tout genre avaient recours à Mlle Guittaud. Pendant les troubles du Piémont, c’est elle qui secourait les condamnés politiques du temps ; c’est elle qui, dans un esprit tout chrétien, et que les partis respectaient, tâchait d’obtenir la grâce des vaincus du jour, et, quand elle ne pouvait pas décider le vainqueur à pardonner au vaincu, alors elle s’employait à consoler les derniers moments du vaincu et à obtenir des victimes qu’elles pardonnassent à leur tour à ceux qui les envoyaient à la mort. Un jour, en Piémont, ce fut un des vaincus des troubles politiques du pays qui monta sur le trône, et Mlle Guittaud vint lui demander la grâce d’un officier condamné à mort pour acte d’indiscipline. Cette grâce avait été refusée à tout le monde ; le roi Charles-Albert l’accorda à Mlle Guittaud, et fit mettre dans les lettres patentes que, « voulant donner à Mlle Guittaud une preuve sensible et manifeste de sa satisfaction souveraine, il accordait à ses vertus et à sa charité vraiment chrétienne la commutation qu’aucune autre recommandation ne pouvait obtenir. » Ces paroles font honneur au prince et à Mlle Guittaud.

Ce n’est pas la seule fois que le roi Charles-Albert témoignait sa déférence pour les vertus de Mlle Guittaud. Désespérée de l’état où elle avait trouvé les prisons de Chambéry, elle en avait entrepris la réforme, et, avec l’aide d’un pieux et savant magistrat, elle avait fait un règlement que le roi consacra par son approbation. En 1851, Mlle Guittaud étant reçue à Rome par Pie IX, lui raconta, sur sa demande, ce qu’elle avait fait pour les prisons de Chambéry. Le pape la pria alors de visiter les prisons de Rome, et, sur le rapport qu’elle lui en fit, introduisit dans ces prisons la même tenue, le même ordre, le même règlement que dans les prisons de Chambéry.

Rien ne me semble plus beau et plus juste que ces déférences de l’autorité publique à ces autorités privées et toutes personnelles, qui ne prennent leur pouvoir qu’en elles-mêmes et dans l’efficacité communicative de leurs sentiments.

M. l’abbé Remy, qui a fondé à Saint-Aile, près Rebaix, dans Seine-et-Marne, un orphelinat agricole, et qui y a consacré sa fortune tout entière, est aussi un de ces pouvoirs privés qui se créent dans la société par la vitalité inépuisable de la foi et de la charité chrétiennes. Je suis persuadé que ces pouvoirs individuels qui ont la véritable grandeur, celle de l’âme, ont une part considérable dans la vie de la société française. Nous n’avons pas seulement besoin d’être administrés et gouvernés : nous avons aussi besoin d’être soutenus, consolés, édifiés ; nous avons besoin d’être encouragés au bien, d’être désenchantés du mal, et c’est l’office mystérieux de tous ces pouvoirs salutaires répandus çà et là dans la société, en dehors de toute organisation et de toute hiérarchie administrative. Ce qu’ils font de bien, ce qu’ils préviennent de mal, doit compter parmi les moyens de salut de la société, parmi les causes de sa vie ; et quand, avertie de l’existence d’un de ces pouvoirs, l’Académie lui décerne, au nom de M. de Montyon, une de ces récompenses qui sont employées à continuer le bien commencé, nous sommes convaincus que nous ne faisons en cela qu’exprimer la juste reconnaissance du pays.

Le public voit, par le résumé que je viens de faire des conversations de l’Académie sur les prix de M. de Montyon, que les diverses formes du dévouement et de la vertu sont fort sérieusement débattues dans nos entretiens, et que chaque forme a parmi nous ses partisans. Nous nous reprochons même mutuellement l’exagération de nos préférences. Ceux d’entre nous qui aiment les vertus patientes et obscures, les vertus qui luttent sans se lasser contre les épreuves de la vie, contre les leurs, et surtout contre celles du prochain, ceux-là s’entendent accuser d’imposer au dévouement un niveau trop régulier et de ne pas faire leur part légitime aux saillies et aux entraînements généreux de l’âme humaine. Ceux, au contraire, qui cherchent surtout dans les bonnes actions qui nous sont signalées quelque chose d’original et de frappant, nous les accusons de viser trop au romanesque et de songer surtout au récit que le directeur aura à faire au public. Me sera-t-il permis, sur ce dernier point, de citer encore quelques traits de nos amicales controverses ?

« Vous êtes, disait un partisan des vertus obscures à un partisan des vertus saillantes et hardies, vous êtes plus exigeant que les romans eux-mêmes. Il y a, dans un roman du XVIIIe siècle, une distribution de prix de vertus, et ce sont peut-être même ces prix de vertus donnés à Babylone qui ont inspiré à M. de Montyon, fort imbu des sentiments du XVIIIe siècle, l’idée de fonder nos prix de vertu. — Or ce ne sont pas des dévouements éclatants ou des vertus romanesques qui sont couronnés par le roi de Babylone : ce sont les abnégations pénibles que l’âme s’impose et qu’elle supporte. » Comme à ce moment nous ne nous souvenions pas tous du chapitre de Zadig, nous l’avons relu.

En effet le premier candidat que présenta le grand satrape « était un juge qui, ayant fait perdre un procès considérable à un concitoyen, par une méprise dont il n’était pas même responsable, lui avait donné tout son bien, qui était la valeur de ce que l’autre avait perdu.

« Il produisit ensuite un jeune homme qui, étant éperdument épris d’une fîlle qu’il allait épouser, l’avait cédée à un ami près d’expirer d’amour pour elle, et qui avait encore payé la dot en cédant la fille.

« Ensuite il fit paraître un soldat qui, dans la guerre d’Hyrcanie, avait donné encore un plus grand exemple de générosité. Des soldats ennemis lui enlevaient sa maîtresse, et il la défendait contre eux : on vint lui dire que d’autres Hyrcaniens enlevaient sa mère à quelques pas de la : il quitta en pleurant sa maîtresse et courut délivrer sa mère. Il retourna ensuite vers celle qu’il aimait, et la trouva expirante. Il voulut se tuer ; sa mère lui remontra qu’elle n’avait que lui pour tout secours, et il eut le courage de souffrir la vie.

« Les juges penchaient pour ce soldat. Le roi prit la parole et dit : Son action et celles des autres sont belles, mais elles ne m’étonnent point ; hier, Zadig en a fait une qui m’a étonné. J’avais disgracié depuis quelques jours mon ministre et mon favori Coreb. Je me plaignais de lui avec violence, et tous mes courtisans m’assuraient que j’étais trop doux ; c’était à qui me dirait le plus de mal de Coreb. Je demandai à Zadig ce qu’il en pensait, et il osa en dire du bien. J’avoue que j’ai vu, dans nos histoires, des exemples qu’on a payé de son bien une erreur, qu’on a cédé sa maîtresse, qu’on a préféré une mère à l’objet de son amour ; mais je n’ai jamais lu qu’un couitisan ait parlé avantageusement d’un ministre disgracié contre qui son souverain était en colère. Je donne vingt mille pièces d’or à chacun de ceux dont on vient de réciter les actions généreuses, mais je donne la coupe à Zadig.

« Sire, dit Zadig, c’est Votre Majesté seule qui mérite la coupe ; c’est elle qui a fait l’action la plus inouïe, puisque, étant roi, vous ne vous êtes pas fâché contre votre esclave, lorsqu’il contredisait votre passion. » (Zadig, ch. V.)

Ainsi, Messieurs, l’Académie, quand elle couronne les abnégations généreuses, les dévouements patients et persévérants, a pour elle l’autorité même des romans. Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que nous soyons à ce point apposés aux saillies de la vertu et du dévouement que nous ne les admettions jamais au partage de nos récompenses. Il y a, cette année même, dans l’histoire de l’une de nos héroïnes les plus charitables, un trait qui témoigne d’une vivacité et d’une vaillance de charité capables de contenter ceux qui aiment la vertu hardie. Il faut presque remonter aux histoires des saints pour trouver des récits dans le genre de celui que j’ai à faire, et c’est même ce souvenir qui m’enhardit à le faire.

Une pieuse et sainte fille s’est dès sa jeunesse consacrée tout entière aux soins des pauvres. Elle s’est faite dans sa ville natale l’infirmière des malades abandonnés à cause de leur misère ou à cause de la nature repoussante de leurs maladies. Elle était belle ; elle avait un petit patrimoine ; on voulait la marier : « Non, dit-elle, je ne veux pas être infidèle aux pauvres et aux infirmes : ce sont mes maris ; » et elle continua à aller soigner ses chers malades, sortant sans cesse, seule, le jour, la nuit, partout respectée, partout connue. Un soir, cependant, un homme, un étranger sans doute, la suivit, l’aborda et lui fit d’indignes propositions : « Suivez-moi, » répondit la pieuse infirmière sans se déconcerter, et elle le conduisit dans je ne sais quelle misérable chambre où gisaient, malades et presque mourantes, dans un seul et même grabat, une mère et une fille qu’elle soignait depuis longtemps ; « Voilà mon boudoir, Monsieur, » dit-elle. L’homme tressaillit, reconnut le piège de charité où il était pris, et, jetant sa bourse sur ce lit de douleur, se retira plein de confusion et de respect.

J’ai voulu, Messieurs, en vous rapportant les pensées, les réflexions que nous suggèrent les choix que nous avons à faire, vous engager à aider l’Académie dans l’accomplissement de ses fonctions. Signalez les actes de dévouement qui vous sont connus ; dites quels sont les pieux sacrifices, les charités infatigables que vous avez rencontrés çà et là ; faites que nous ayons à choisir entre un nombre chaque jour plus grand et plus divers de bonnes actions. Les solennités du genre de celle qui nous réunit aujourd’hui sont des manifestations de la force morale de notre société, et plus la société y prend part, non point seulement par son approbation, mais par son attention, par sa curiosité, plus elle y coopère, si je puis ainsi parler, plus elle en augmente l’utilité. Nous souhaitons que les prix de vertu se popularisent ; nous allions presque dire, pour nous servir d’un mot en crédit, qu’ils se décentralisent, et ce n’est pas sans un vif plaisir que nous avons vu que l’académie des sciences et belles-lettres de la ville d’Aix avait pu aussi, grâce à la fondation d’un de ses concitoyens, décerner un prix de vertu[1], et le décerner, comme nous décernons les nôtres, à quelqu’un qui ne savait pas l’avoir mérité. La bonne condition, en effet, de nos prix de vertu, c’est qu’ils n’étonnent personne, excepté celui qui les reçoit.

(i)


  1. Rapport présenté par M. de Seranon, avocat, sur le prix de vertu fondé par M. Rambot, pour l’arrondissement d’Aix.