Dictionnaire historique d’argot /Édition Dentu/1881/Supplément, M

M


MABILIEN, MABILLARD : Habitué du bal Mabile, (Rigaud.)

MACABÉE : Cadavre de noyé, souteneur. (Id.) — Pour le premier sens, voyez Machabée (p. 228.) Dans le second sens, il ne s’agit évidemment que d’un dérivé de Mac (p. 227.)

MACABRE : Mort. (Boutmy.)

* MACAIRE : V. page 227. — « C’est un macaire, je ne dis pas non, mais enfin il a toujours le mot pour rire. » (Huysmans, 79.)

MACARON : Huissier. (Delvau.)

* MACARON (p. 227) : Au lieu de Macaron : dénonciation, lisez Macaron : dénonciateur.

MACARONAGE : Dénonciation. (Rigaud.)

MACARONNER (se) : Se sauver, filer. Allusion au macaroni qui file à sa manière. (Id.)

MACÉDOINE : Combustible. Argot des chemins de fer. (Id.)

MAÇON : Pain de quatre livres. (Id.) — Les maçons du Limousin vont toujours prendre leurs repas en apportant leur pain.

MACROTAGE : Maquerelage. — MACROTER : Maquereler. — MACROTER UNE AFFAIRE : Servir d’intermédiaire dans une affaire louche. — MACROTIN : Apprenti souteneur. (Id.)

MADELEINE (faire suer la) : Tricher péniblement. Argot de grec. (Id.)

MAGASIN DE BLANC : Maison de prostitution. Même allusion que dans Mangeur de blanc. — « Désirant une maîtresse, il allait se galvauder dans les magasins de blanc du quartier Montrouge. » (Huysmans, 79.)

MAGNE : Manières. — Abrév. (Rigaud.)

MAGNÉE : Même sens que Ponifle. (Halbert.)

MAGNEUSE : Synonyme de Magnusse. (Michel.) V. p. 228.

MAIGRE (du) : Silence ! — Formule impérative pouvant se traduire par il n’y a pas gras pour toi. — « Oh ! du maigre ! va t’asseoir sur le bouchon ! Tu me gênes ! » (Huysmans, 79.)

MAILLOCHER : Surveiller une prostituée. Argot de souteneur. (Rigaud.)

* MAINS COURANTES : Souliers. (D. Lacroix.)

MALDINE : Collège. (Michel.) — On y dîne mal.

MALSUCRÉ : Faux témoin. (Rigaud.)

MALTÈS : Écu. (Id.) — Pour Maltaise. Voyez page 229.

MANCHEUR : Saltimbanque exerçant sur la voie publique, sans autre ressource que celle de faire la manche ou (quête).

MANDARIN (tuer le) : Commettre une mauvaise action par la pensée et avec la certitude de l’impunité. L’image date du xviiie siècle. (Delvau.)

MANDAT IMPÉRATIF : Engagement pris par un député de voter en toute occasion comme le lui prescrivent ses électeurs. — Expression souvent et ironiquement employée dans la polémique des journaux conservateurs. Elle a été prise dans la déclaration de principes de candidats, il y a une dizaine d’années.

MANDOLE : Soufflet. (Delvau.) MANDOLET : Pistolet. (Rigaud.) — On doit remarquer le double sens de ces deux mots qui paraissent n’en faire qu’un (mandole-mandolet), car mandolet a un pendant exact dans soufflant et bayafe (p. 33), qui signifient chacun souffleur et pistolet.

* MANESTRINGUE : Lisez mannstrinque. Puis à la 3e ligne, lisez les deux derniers mots au lieu de les trois mots. — Je ne cite pas d’exemple justificatif de mannstrinque, mais j’ai souvent entendu jadis prononcer ce mot, et comme notre langue tend toujours à se débarrasser des accumulations de consonnes, je crois que mannezingue ; puis minzingue, sont des formes postérieures. Je persiste donc dans ma conjecture étymologique, bien qu’il en ait été donné deux autres différentes.

MANGEOIRE : Restaurant (Delvau.) — Animalisme.

MANGER À TOUS LES RÂTELIERS : Accepter de tous côtés. (Rigaud.) — Se prend au figuré pour être subventionné par des partis contraires, recevoir des deux mains.

MANGER DU LAPIN : Aller à l’enterrement. (Boutmy.) — Même genre d’allusion que dans manger du fromage. V. p. 230.

MANGER DU LARD : Dénoncer. (Rigaud.) Variante de manger le morceau, p. 230.

MANGER DU SUCRE : Être applaudi. V. Sucre, p. 336.

MANGER LA BOUILLIE AVEC UN SABRE : Avoir une grande bouche (Rigaud.) — Mot à mot : avoir une bouche aussi large que le sabre est long.

MANGER LE BON DIEU : Communier. — Allusion au symbole de l’hostie. Ne se dit pas toujours en mauvaise part. — « Et c’est du propre d’aller manger le bon Dieu en guignant les hommes. » (Zola.)

MANGER LE GIBIER : Ne pas faire payer un client, cacher ses profits au souteneur. Argot de prostitution. (Delvau.) — Terme de chasse. Le chien qui mange le gibier ne rapporte pas.

MANGER LE MOT D’ORDRE, MANGER LA CONSIGNE (avoir) : Oublier le mot d’ordre, la consigne. Mot à mot : ne plus les avoir dans la bouche, ne plus pouvoir les répéter. (D. Lacroix.)

MANGER LE NEZ (se) : Se battre avec acharnement. (Delvau.)

MANGER LE PAIN HARDI : Être domestique. (Id.)

MANGER LE POULET : Partager en déjeunant un bénéfice illicite. Argot des entrepreneurs et architectes. (Michel.)

MANGER LES SENS (se) : S’impatienter. (Id.) — M. Rigaud écrit sangs, ce qui vaut mieux pour faire comprendre le mot. L’impatience fait affluer le sang à la tête qui en mange alors, au figuré.

MANGER L’HERBE PAR LA RACINE : Être enterré : — L’image n’a pas besoin d’explication. — « Bien d’autres encore étaient en train de manger l’herbe par la racine. » (Hennique.)

* MANGER SUR L’ORGUE : La musique n’y est pour rien. L’orgue est ici pour lorgue, qui veut dire en argot lui et le dictionnaire de Vidocq, en mettant une apostrophe mal à propos, a jusqu’ici obscurci le sens : Voyez Orgue.

* MANGEUR DE BLANC (page 230) : le terme est long et cependant ce n’est qu’un abrégé. On disait d’abord mangeur de blanc à la cuiller. Cette forme primitive en révèle plus long que nous ne pourrions le faire sur l’allusion contenue dans les six mots. — Allusion qui va droit aux moyens d’existence du souteneur de filles.

MANICLE (frère de la) : Filou. (Michel.) — Pour manique.

MANIQUE : Pratique du métier. — Terme de compagnonnage. — « Il parle manique du matin au soir. » (Le Sublime.) — La manique fut d’abord une pièce de cuir destinée à protéger la main où le poignet de certains ouvriers. Ainsi, en terme de compagnonnage, les cordonniers en vieux s’appelaient-ils compagnons de la petite manique.

MANNEQUIN DE MACHABÉE : Corbillard. (Rigaud.) — MANNEQUIN DE TRIMBALLEUR DE REFROIDIS : Corbillard. (Delvau.) — Mot à mot : panier de morts, panier de croque-morts.

MANNEZINGUEUR : Habitué de cabaret. (Delvau.)

MANNSTRINGUE, MANSTRINQUE : Voyez Manestringue ci-avant et page 23.

* MANQUE (à la) : À gauche (Colombey.) ; mauvais, laid. (Rigaud.)

MANUSCRIT BELGE : Texte imprimé donné à une imprimerie comme réimpression. — Allusion au grand commerce de contrefaçons que faisait jadis la Belgique. (Boutmy.)

MAQUA, MAQUÈCÉE : Maquerelle. (Michel.) — Maquècée est une abréviation de marque de cé. Voyez ce mot page 235. Maqua date du dernier siècle.

* MAQUILLER : Farder. — On a cité comme ancienne forme de ce mot un passage de la chanson d’Antioche (xiiie s.) : « barbe sanglante et vis masquilliés. » — Mais masquillié me semble signifier plutôt ici coupé, tailladé que rouge. Ne disait-on pas masquélier pour boucher au moyen âge. On a cherché encore avec assez de vraisemblance la racine de maquiller dans le latin maculare : barbouiller. Mais il ne faut pas oublier que maculare faisait en langue d’oil maculer et en langue d’oc macular. Mieux vaut donc se résigner à considérer maquiller comme une acception du vieux mot Maquiller : faire, tripoter, maquignonner, qui se disait maquilloner. — De maquilloner à maquiller, la distance est trop courte et le sens offre trop d’analogie pour qu’on aille chercher plus loin. À titre de renseignements, rappelons que le dialecte bas-limousin a le verbe maquilhar (brouiller) et le substantif maquilhage (tripotage).

* MAQUILLEUR : Tricheur. (Rigaud.) Voyez Maquillage et Maquille, page 231.

MARAILLE : Monde. Argot de voleur. (Id.)

MARAUDER : Prendre des voyageurs en dehors du règlement. Argot de cochers de fiacre (Delvau). — Pour éviter les stations de contrôle, ils roulent à vide, cherchent des voyageurs dans la rue, comme le maraudeur cherche des fruits aux arbres.

MARAUDEUR : Cocher qui maraude. (Rigaud.)

MARBRE : Grand comptoir d’atelier d’imprimerie, sur lequel on trouve rangées des parties composées de livre ou de journal, en attendant la mise en page. De là les expressions avoir sur le marbre : avoir en réserve ; être sur le marbre : être prêt à passer. (Boutmy.) — Allusion au marbre qui a dû d’abord recouvrir le comptoir en question.

MARCHAND D’EAU CHAUDE : Limonadier. (Rigaud.)

MARCHAND D’EAU DE JAVELLE : Marchand de vin. (Id.) — Allusion à la mauvaise eau-de-vie ; elle brûle comme l’eau de javelle.

MARCHAND DE CERISES : Voyez Cerisier, p. 89.

MARCHAND DE CERISES : Ouvrier travaillant hors de Paris. (Rigaud.)

MARCHAND DE MORT SUBITE : Charlatan nomade. — Allusion aux débitants de mort aux rats. — « Il fait galerie devant les marchands de mort subite. » (Le Sublime.) — D’après l’Assommoir, ce nom serait donné par le peuple aux médecins.

MARCHAND DE MORT SUBITE : Maître d’armes. — Il vend le moyen de tuer d’un seul coup. « D’abord, moi, je suis avec mon marchand de mort subite. » (De Goncourt.)

MARCHAND DE SOMMEIL : Logeur à la nuit. — On lui paye le droit de dormir. V. Becquetance. — « Il vous amène son marchand de sommeil. » (Le Sublime, 72.)

MARCHE (je) : J’approuve, je suis de ton avis. (Boutmy.) — Mot à mot : je marche avec toi.

MARCHE DE FLANC : Repos sur le lit. Jargon de soldat. (Rigaud.) — Jeu de mots sur la manœuvre dite marche de flanc et sur l’homme qui présente le flanc au lit en se reposant sur un côté.

MARCHE DE FLANC : Maraude. Argot d’Afrique. (Id.) — Pour marauder, on se détache de la colonne, ce qui est marcher sur ses flancs.

MARCHEF : Maréchal-des-logis chef. Abréviation. (Id.)

MARCHER AU PAS : Être discipliné comme un soldat. (Id.)

MARCHER DANS LES SOULIERS D’UN MORT : Avoir hérité. (Delvau.)

MARCHER SUR LA CHRÉTIENTÉ : Marcher pieds nus. (Id.) — Mot à mot : sur une chair de chrétien.

MARGOULETTE : Visage. (Id.) — Voyez margoulette : bouche, p. 233. C’est comme dans gueule, la partie prise pour le tout.

MARGOULIN : Mauvais ouvrier. — « Il n’y a que des margoulins, et puis on ne gagne pas sa vie. » (Le Sublime, 72.)

MARI MALHEUREUX : V. malheureux, p. 229.

MARIAGE EN DÉTREMPE : Concubinage. (Rigaud.) — On dit plutôt à la détrempe. Ce qui est peint à la détrempe n’est pas solide.

MARIANNE : Guillotine. — En 1878, le Figaro a demandé l’origine de ce nom qui a été bien certainement celui d’une société secrète républicaine sous la monarchie de juillet, mais non, comme on semble le croire, celui de la République ? La Marianne avait des ramifications en province ; elle existait encore en 1855. Le 8 mai 1850, dit M. Fr. Michel, le Pays relatait la condamnation d’un soldat accusé d’avoir crié : Vive Marianne ! Vive la guillotine !

Maintenant, pourquoi ce nom de Marianne ? Mais Guillotine n’est-il pas déjà un nom d’homme (Guillotin) féminisé ? Et Louisette n’est-il pas un autre surnom qui peut avoir rappelé l’exécution de Louis XVI, comme Marianne a rappelé celle de Marie-Antoinette ?

MARIONETTE : Soldat. (Michel.) — Allusion à la régularité automatique qui préside aux manœuvres de troupe.

MARLOUPIN : Diminutif de marlou : souteneur. — « Quand on paye en monnaie de singe, nous autres marloupins. » (Richepin, 77.)

MARLOUSIER : V. Marlou, p. 234.

MARMITE : Femme secourant son mari en prison. (A. Pierre.)

MARMITON DE DOMANGE : Vidangeur. (Delvau.) Domange était le nom d’un entrepreneur de vidanges.

MARMOTTE : Boite de commis placier. (Rigaud.) — Allusion aux boîtes à marmottes montrées par les petits savoyards.

MARNER, FAIRE LA MARNE, MARNEUSE : Exercer la prostitution sur une berge de rivière, prostituée qui marne. (Id.) — Malgré la similitude des mots, je ne crois pas que la rivière de Marne soit ici pour rien. Marner et Marneuse ont signifié d’abord voler et voleuse. V. p. 235. Delvau donne aussi marner en ce sens, comme usité au marché du Temple.

* MARQUE : On doit remarquer que larque et marque signifient tous deux femme de voleur. On dit aussi marquise, qui est un dérivé de marque et non une allusion aux manières de la femme. Pour hasarder une étymologie, il faudrait connaître le mot le plus ancien. Si marque a précédé larque, ce dernier est une forme altérée. Et vice versa. Jusqu’à preuve du contraire, je crois que marque a produit larque, car ce mot a plus de dérivés (marque de cé, marque franche, marquise), et surtout il a son pendant dans marquant (souteneur).

MARQUÉ : Marqué par la petite vérole.

MARQUE-MAL : Margeur, ou plutôt receveur de feuilles à la machine. (Boutmy.) — Ironie.

MARQUÉ À LA FESSE : Maniaque, ennuyeux. (Delvau.)

MARQUER (ne plus) : Vieillir. (Id.) — Un vieillard ne marque plus, c’est-à-dire ne compte plus.

MARQUER BIEN : Faire bel et bon effet. (Rigaud.)

MARQUER À LA FOURCHETTE : Voyez Fourchette.

MARQUER LE COUP : Trinquer. (Delvau.) — Allusion au choc des verres.

MARQUIS D’ARGENT-COURT, DE LA BOURSE PLATE : Vaniteux et misérable. (Id.)

MARQUISE : V. ci-dessus Marque.

MARRON : Brochure clandestine. (Id.) — Mot à mot : imprimée en contravention. Voyez Marron, p. 235.

MARK ON : Procès-verbal des chefs de ronde. (Id.) — Ce mot vient de l’armée où il désignait non un procès-verbal, mais un marron jeté d’abord dans une boîte de poste par le chef de ronde pour y constater son passage.

MARRON SCULPTÉ : Tête grotesque, comme celles qu’on s’amuse à sculpter dans la pulpe des marrons. — « Quand tu donnes ce que tu appelles une soirée à tes marrons sculptés d’amis. » (Durandeau, 78.)

MARSOUIN : Homme laid (Delvau) ; — Contrebandier (Rigaud). — On dit aussi vieux marsouin pour vieux matelot, par allusion au poisson.

MARTYR : Caporal. (Delvau.) — Le caporal de semaine fait le plus dur métier du régiment.

MASCOTTE : Fétiche de joueur. (Rigaud.)

MASSACRE : Gâcheur, gaspilleur. (Delvau.)

MASSAGE : Action de masser. — « Je ne travaille pas par tocades, ce qu’on appelle des coups de massage, pour tirer une loupe après. » (Le Sublime, 72.)

* MASSER : Travailler. Mot à mot : donner des coups de masse faire de gros efforts. — « Il y a trop à masser pour y arriver. » (Id.)

MASSÉ : Coup de queue donné perpendiculairement à une bille de billard. (Delvau.)

MASSEUR : « Un masseur est un ouvrier laborieux. » (Le Sublime.)

MASTIC : Discours embrouillé. — Faire un mastic : s’embrouiller en voulant s’expliquer. (Boutmy.)

MASTIC : Désordre de mise en pages. (Id.)

MASTIC : Homme. Argot de voleur. (Rigaud.)

MASTIQUER : Manger. Verbe régulier, car nous usons du substantif mastication. — « Si on ne parlait guère, on mastiquait ferme. » (Zola.)

MASTIQUER, MASTIQUEUR : Mastiquer c’est masquer les avaries d’une chaussure, sans la rapiécer. (Rigaud, ) — Le mastiqueur est à la cordonnerie ce que le pommadeur est à l’ébénisterie. V. p. 291.

MATA : Faiseur d’embarras. Abrév. de matador. (Id.) — On sait que le matador est le toréador chargé de donner le coup de grâce à l’animal.

MATERNELLE : Mère. Argot des écoles.

MATH : Mathématiques. (Id.)

MAUVIETTE : Décoration. (Delvau.) — Ne doit se dire que d’une décoration accompagnée de plusieurs autres et formant avec elles une brochette. Allusion aux brochettes de mauviettes.

MAYER : homme qui paye les filles. De l’all. meier : fermier.

MÈCHE (demander) : Offrir ses services dans une imprimerie. (Boutmy.) — Mot à mot : demander s’il y a mèche d’être employé.

MECQUE : Victime. (A. Pierre.)

MÉDECINE : Plaidoyer. (Michel.) V. Médecin, p. 238.

MÉLASSE, MÉLASSON : Mélasse est un jeu de mots pour peindre une situation embrouillée, emmêlée. Mélasson veut dire englué, gauche. — « Faut-il que vous soyez mélasson pour vous être ainsi fourré la gueule dans le beurre. » (Huysmans, 79.) —

MÊLÉ-CASS : Mélange de cassis et d’eau-de-vie. — « Voyons ! un mêlé-cass, cela vous va-t-il. » (Durandeau, 78.)

MÉNAGE À TROIS : Bonne intelligence du mari, de la femme et de l’amant. — « Les gens finissaient par trouver ce ménage à trois naturel. » (Zola.)

MENDIGOTER : Mendier. (Rigaud.) V. Mendigo, p. 238.

MENER PISSER : Forcer à un duel. Jargon de troupiers. (Delvau.)

MENOUILLE : Monnaie. — C’est une déformation du mot. — « Quand on déballe la menouille de la paie sur la table, elle calcule. » (Le Sublime, 72.)

MENUISIÈRE : Redingote d’ouvrier endimanché. (Rigaud.)

MERCANTI : Vivandier pillard suivant les armées. (D. Lacroix.) — Mot levantin passé dans l’argot militaire.

MÈRE ABBESSE : Directrice d’une maison de tolérance. (Delvau.)

MÈRE D’OCCASION : Fausse mère, entremetteuse. (Id.)

MERINGUE (en) : En décomposition. — Allusion à la fragilité de la pâtisserie meringuée. — « Un vieil homme qui avait tant bu qu’il avait l’estomac en meringue. » (Huysmans, 79.)

* MERRIFLAUTÉ : Mot mal imprimé sans doute. Pour Moufflanté.

MESSE (être à la) : Être en retard. — « Nous nous sommes mouillés un peu et nous avons été à la messe de cinq minutes. » (Le Sublime.)

METTRE BIEN (se) : Ne se priver de rien. (Rigaud.)

METTRE DANS LE MILLE : Avoir grand succès. — Allusion au plus heureux coup du jeu populaire du tonneau qui consiste à obtenir le numéro 1000 en lançant son palet dans le crapaud. — « Les mêmes auteurs ne mettent pas deux fois de suite dans le mille. » (De Banville, 79.)

METTRE EN DEDANS : Forcer une porte. Argot de voleur. (Rigaud.)

METTRE UNE GAMELLE (se) : Se sauver de prison. (Id.)

MEURT DE FAIM : Pain d’un sou. (Michel.)

MICHAUD (faire un) : Dormir. (Boutmy.)

MICHAUD : Tête. (Michel.)

MICHE : Dentelle. Allusion à la blancheur et aux trous du pain. (Id.)

MICHELET (faire le), — LE MICHELIN : Palper les femmes dans une foule. (Rigaud.)

* MIDI (il est) : Cela n’est pas vrai. Défions-nous ! (Id.)

* MIE DE PAIN : De peu d’importance, de mince valeur. (Boutmy.)

MIEL : Merde. Argot de bourgeois. (Delvau.)

MIEL (c’est un) : C’est très agréable, (et par ironie) c’est très désagréable. (Rigaud.)

* MINCE : Assignat, billet de banque. (Michel.)

* MINCE : Page 242, colonne 2, ligne 2. Au lieu de oui, certes, lisez beaucoup. — Terme ironique semblable à celui de Rien. V. p. 315.

MINCE DE : Beaucoup de (Rigaud.)

MINISTRE : Mulet de l’armée d’Afrique. — Jeu de mots. Il est chargé des affaires de l’État. (D. Lacroix.)

MINUIT (enfant de) : Voleur (Michel.)

MINZINGO : Marchand de vin. — Diminutif de Mannezingue. — « J’ai fini mon après-midi dans la cour du minzingo. » (Le Sublime.)

MION DE GONESSE : Petit jeune homme. (Michel.)

MIRECOURT : Violon. M. Michel croit avec raison que c’est le nom de la ville de Mirecourt où se fabriquent beaucoup de violons. De même en argot on dit Lillois pour fil, lingre (Langres) pour couteau, Orléans pour vinaigre.

MIRETTES (sans) : Aveugle. (Rigaud.)

MIRETTES EN GLACIS : Lunettes. (Id.) — On dit de même yeux de verre.

MIRETTE EN CAOUCHE : Télescope. (Id.) — Mot à mot : lunette en caoutchouc.

MIRLITON : Voix. (Id.)

MIRODÉ : Arrangée. (Id.)

MIRQUIN : bonnet (Halbert).

MISE À PIED : Suspension d’emploi. (Rigaud.) — C’est aussi suppression d’emploi.

MISE-BAS : Grève. (Boutmy.) — Mot à mot : mise à bas du travail.

MISE-BAS : Habillements défraîchis donnés par le maître à son valet de chambre. (Delvau.)

MISTI, MISTIGRI : Valet de trèfle. (Id.) — Se dit spécialement à un certain jeu de ce nom. Au rams, prendre le misti n’est pas prendre le valet de trèfle, mais un jeu abandonné sur la table.

MISTICHE : Demi-heure, demi-setier. (Id.) — Abrév. de demi avec finale allongée.

MISTOUFLE : Mystification. — Abréviation avec changement de finale. — « C’est des mistoufles tout ça ! Qu’est-ce que vous offrez ? » (Huysmans, 79.)

MITE-AU-LOGIS : Mal d’yeux. — Jeu de mots sur mite et mythologie. (Rigaud.)

MOCHE : Laid. (Id.) — Forme de Mouche, V. p. 248.

MODISTE : Petit journaliste voué à l’actualité. (Delvau.)

MOELLEUX : Coton. (Michel.)

MOISIR (ne pas) : Ne pas rester longtemps. (Rigaud.)

MOLÉCULE : Petit enfant. Argot des écoles.

MOLLUSQUE : Homme arriéré. (Delvau.) — Inventé par les néologistes fatigués de dire huître.

MÔME, MÔMERESSE : Jeune maîtresse. Argot de voleur. (Id.)

* MÔME (taper un) : Commettre un vol.

MOMIGNARDAGE à l’anglaise, — en purée : Fausse couche. (Rigaud.) V. Momignard.

MONDE RENVERSÉ : Guillotine. (Delvau.) — Allusion à la tête qui tombe.

MONFIER : Embrasser. Jargon de voleur. (Rigaud.) — Halbert dit monfier. Semble une altération de morfier : manger.

MON LINGE EST LAVÉ : Je suis vaincu. (Halbert.)

MONSEIGNEUR : Ce qui confirme notre étymologie (V. p. 245) est l’ancien mot de clé le Roi donné à la cognée qui servait à enfoncer les portes qu’on refusait d’ouvrir à la justice.

MONSTRE : Livret d’opéra ébauché par le compositeur (Delvau) ; — Canevas de livre. (Rigaud.)

MONT (petit) : Commissionnaire au Mont-de-piété. (Delvau.) — Le petit mont bourgeois cité page 245 est l’entreprise d’un simple prêteur.

MONTAGE : Abréviation de Montage de coup. (Boutmy.) — V. p. 245.

MONTAGNARD : partisan des doctrines de la Montagne. (Voyez ce mot.) — « Aux braves montagnards et aux jacobins. » (Hébert, 1793.)

En 1848, on donna ce nom au corps provisoire qui remplaça d’abord là garde municipale. Allusion au képi rouge, à la longue cravate rouge et à l’écharpe rouge qui composaient son uniforme avec une blouse bleue. Chenu publia un pamphlet contre les montagnards de Caussidière. C’était le nom qui était donné aussi à cette garde, à cause du nouveau préfet.

MONTAGNARD : Beignet, cheval de renfort. (Delvau.) — Ce dernier est destiné à gravir les côtes ! L’autre avait ce nom parce qu’on lui avait donné une teinte rouge. Allusion politique.

MONTAGNE : Parti républicain avancé. — Allusion à la place qu’il occupait sur les gradins les plus élevés de l’ancienne Convention nationale.

MONTER : Préparer une pièce nouvelle. C’est aussi un animalisme introduit par l’argot de sport qui progresse en France. — « A l’Opéra, M. Halanzier vient de monter Jeanne d’Arc… Pas de commentaires, n’est-ce pas ? » (Le Tintamarre, 76.)

MONTER UN SCHTOSSE : Mentir. (Rigaud.) — C’est littéralement monter un coup, car stoss veut dire en allemand coup de fleuret. Germanisme.

MONTRETOUT (aller à) : Aller à la visite. Argot de fille soumise. (Id.) — Jeu de mots sur le nom de lieu et sur l’examen exigé.

MONTREUIL : Pêche. V. p. 246.

MONUMENT : Chapeau de haute forme. (Rigaud.)

MONZU : Mamelle. (Michel.)

MORBAQUE : Enfant désagréable. (Delvau.) — Même étymologie que pour Morbec.

MORBEC : Vermine. (Rigaud.) — C’est morp…, avec changement de finale.

MORCEAU DE PÂTE FERME : Écrit lourd. (Id.) — Allusion à l’aspect présenté par le texte qui n’a ni alinéas ni phrases courtes.

MORESQUE : Danger. (Michel.) — Forme de Morasse. V. p. 246.

MORICAUD : Charbon. (Id.) — Allusion de noirceur.

* MORNIFLE : Soufflet. Vieux mot. (Id.)

MORNINGUE : Monnaie. (Rigaud.) — C’est Mornifle (V. p. 247) avec changement de finale.

MORNE : Manuscrit à imprimer. Argot d’ancienne librairie. (Michel.)

MORVIAU : Nez, morve (Delvau), petit morveux. (Rigaud.)

MOU ENFLÉ : Grossesse. (Id.)

MOUCHARD : Portrait peint. (Delvau.)

MOUCHARD À BECS : Réverbère. (Michel.) — V. Moucharde, p. 248.

MOUCHE : Espion de police. — En 1455, les gueux ou coquillards de Dijon disaient déjà mouschier à la marine, pour dénoncer à la justice. On connaît l’indiscrétion des mouches ; elles se fourrent partout. — Dans une brochure de circonstance, qui parut en 1625 (le Marchand arrivé sur les affaires du temps), on enjoint aux cabaretiers de frauder les droits de perception en ayant du vin chez leur voisin et n’allant en chercher que la nuit « pour n’estre pas veuz des mouches de ce pais icy qui valent pire que des guespes d’Orléans. »

MOUCHE (la) : L’administration de la police. (Rigaud.)

MOUCHIQUE À LA SECTION : Mal noté dans son quartier. (Michel.) — Le mot de section semble être ici contemporain de notre première révolution. En ce cas, mouchique serait mouchardé avec changement de finale. Plus tard, par extension, il aurait signifié laid, mauvais. Voyez mouchique et mouche, pages 248 et 249.

MOUCHOIR : Pistolet. (Michel.) — On le cache dans la poche comme un mouchoir et on s’en sert pour moucher… les autres, c’est-à-dire pour les tuer.

MOUCHOIR À BŒUFS : Pré. — Les bœufs ont toujours le nez dans l’herbe.

MOUCHOIR D’ADAM : Les doigts des gens qui n’ont pas autre chose pour se moucher. (Delvau.) — Allusion biblique.

MOUDRE UN AIR : Jouer de l’orgue. (Rigaud.) — Allusion à la rotation de la manivelle.

MOUFFLAUTÉ : Chaudement habillé. (A. Pierre.) — Semble la forme primitive de merriflauté qui ne s’explique pas, tandis que moufflauté peut venir de mouffle : gant fourré, gant chaud.

MOUFFLET : Enfant. (Delvau.) Mot à mot moufflé : tenu au chaud, emmaillotté : Voir ci-dessus.

MOUILLER (se) : Se griser un peu. Même ordre d’images que dans s’humecter. Comparaison de l’ivrogne à une éponge. — « Si les autres sont là, on se mouille un peu. » (Le Sublime, 72.)

MOUISE : Soupe. (Michel.)

MOULE À BOUTONS : Louis d’or. (Delvau.) — Allusion au rond de métal qui est le corps du bouton.

MOULE À CLAQUES : Figure insolente. (Id.)

MOULE À PASTILLES : Grêlé. — Allusion aux plaques à cavités où se moulaient jadis les pastilles. — « Ce qui l’a surpris, c’est de voir le moule à pastilles commander des dix litres. » (Le Sublime, 72.)

MOULE DE PIPE À GAMBIER : Être grotesque (Rigaud.) — Gambier était le nom d’un fabricant de pipes à têtes grotesques.

MOULIN À CAFÉ : Mitrailleuse. — « Nos soldats les appellent moulin à café à cause du mouvement circulaire qui détermine leur décharge. » (Moniteur, 70.)

MOULIN À VENT : Derrière. (Delvau.) — Jeu de mots.

MOULINAGE : Bavardage. (Michel.) Comparaison du bavardage au tic-tac du moulin.

MOULOIR : Dents. (Id.) — Elles procèdent à la mouture des aliments.

MOULOIR : Batelier. — C’est évidemment une faute d’impression du dictionnaire d’argot qui a le premier mis au jour ce mot. Il faut lire ratelier (mâchoire).

MOULURE : Excrément. (Rigaud.) — La médecine se sert presque du même mot pour distinguer les excréments provenant d’une digestion régulière.

MOUNNIN : Petit garçon. (Delvau.) — MOUNNINE : Petite fille. (Rigaud.) — Ces deux mots sont une forme de notre vieux mot Menin qui se dit encore dans le Centre.

MOUSCAILLE : Excrément. (Michel.) — C’est Mousse avec adjonction de la finale Caille, qui exprime toujours une idée de projection.

MOUSCAILLOUX : Fantassin. (Rigaud.) — M. Fr. Michel écrit Mouscouilloux. Il doit y avoir à l’origine quelque faute d’impression dans le texte primitif suivi par les lexicographes. Si Mouscailloux a dû être mis par erreur pour poussecailloux, il veut dire merdeux (de mouscaille).

MOUSQUETAIRE GRIS : Pou. (Delvau.) — Allusion de couleur.

MOUSSU : Riche, puissant. (Michel.) — C’est Monsieur, en gascon.

MOUSTACHU : Ayant de fortes moustaches. — « Un jeune compositeur dont la physionomie moustachue rappelle celle d’un chat ébouriffée. » (A. Second.)

MOUT : Beau. (Rigaud.) — Semble être une abréviation de Moussu si ce n’est l’ancien adverbe moult, qui se prononçait mout et signifiait beaucoup.

MOUTARDE : Excrément. (Delvau.)

MOUTARDIER : Derrière. — L’allusion se devine. — « Et en face ! je n’ai pas besoin de renifler ton moutardier. » (Zola.)

MOUTARDIER DU PAPE : Vaniteux. (Delvau.)

MOUTON : Matelas. — Allusion à la laine du matelas. (Id.)

MOUTON : « En prison, le mouton est un mouchard qui paraît être sous le poids d’une méchante affaire et dont l’habileté consiste à se faire prendre pour ami. » (Balzac.) — Allusion à la fausse candeur de ces compères. V. Coqueur.

MOUTONNAILLE : Foule. (Delvau.) — Les moutons font toujours troupe.

MOUTONNER : Dénoncer. (Rigaud.)

MOYEN-AGISTE : Admirateur du moyen âge. — « Aussi devint-elle moyen-agiste. » (Balzac.)

MUCHE : Excellent, parfait (Delvau) ; — jeune homme timide. (Rigaud.)

MUFLETON : jeune imbécile (Delvau). Voyez mufleton, page 250 ; — apprenti maçon. (Rigaud.)

MULET : Compositeur aide-metteur en pages. (Boutmy.) — Allusion à la descente des formes qu’il est chargé de faire aux machines.

MULET : Diable. (Michel.)

MUSÉE DES CLAQUÉS : Morgue. (Rigaud.) — C’est-à-dire musée des morts.

MUSELÉ : Imbécile, incapable. — Celui qui est muselé ne mord pas, et ne pas mordre veut dire être sans talent, — « Va donc, rapointi de ferraille, triple muselé. » (Le Sublime.)

* MUSICIEN : Dictionnaire. (Rigaud.)

* MUSIQUE : Doléances, mise au jeu, lot d’objets de bric à brac (Rigaud) ; — petit pain (Michel) ; — assemblage de petites pièces de drap ; résidu de verre, culot d’auge (Delvau) ; — marge d’épreuve surchargée de corrections. (Boutmy.)

MUSIQUER : Marquer une carte d’un petit coup d’ongle. (Rigaud.) V. Maquillage, p. 231.