Dictionnaire historique d’argot /Édition Dentu/1881/Supplément, C

C


ÇA (il a de) : Il a de l’argent, il a du courage. — ELLE A DE ÇA : Elle a des appas. (Rigaud.) — IL Y A DE ÇA : Il y a de l’argent.

CABANDE, CABOMBE : Chandelle. — Jargon d’ouvrier. (Rigaud.)

CABASSER : Bavarder. — CABASSEUR : Cancanier. (Delvau.) — Du verbe cabosser : bosseler, pris au figuré.

CABOCHARD : Tête. — Augmentatif de Caboche. V. Rien.

CABOCHON : Contusion. (Id.)

CABOMBE : V. Cabande.

* CABOT : Chien. V. Cabo, p. 67.

* CABOULOT : Étymologie : Vieux mot qui a signifié d’abord cabane, puis guinguette.

CACA : Double-quatre de dominos. (Rigaud.) — Redoublement de la première syllabe de quatre.

CACHE-MISÈRE : Vêtement boutonné jusqu’au menton, pour dissimuler l’absence de chemise. (Delvau.)

CACHE-FOLIE : Postiche en cheveux (Rigaud), caleçon. (M. Tourneux.)

CACHEMAR, CACHEMINCE, CACHEMUCHE : Cachot. (Rigaud.) — Changement de finale.

CADAVRE : Corps. — Ironie philosophique et religieuse. — « SE METTRE QUELQUE CHOSE DANS LE CADAVRE : Manger. » (Delvau.)

CADOR : Chien. CADOR DU QUART : Secrétaire du commissaire. Jargon de voleurs. (Rigaud.) V. Chien de commissaire, Quart d’œil. — Du mot de langue d’oc cadel : petit chien.

CADRATIN : Chapeau de haute forme. (Boutmy.) — Allusion à la forme du cadratin d’imprimerie.

CAGE : « À Paris, l’ouvrier a donné le nom de cage à tout atelier recouvert de vitres. » (Ladimir.)

CAGNE : Agent de police. — Pour cogne. (Rigaud.)

CAHUAH : « Par ce, nom, les soldats qui ont été en Afrique désignent le café. » — POUSSE-CAHUAH : Eau-de-vie. Mot à mot : pousse-café. (D. Lacroix.) — Ce doit être un équivalent du mot indigène.

CAILLASSE : Caillou. Argot du peuple. (Delvau.) — Changement de finale.

CAILLOU : Nez. (Id.) — Allusion de forme.

CAISSE D’ÉPARGNE : La bouche. (Id.) — Jeu de mot des buveurs qui y font des versements quotidiens. — On le peut prendre ironiquement aussi, car c’est là que se place tout l’argent du pauvre monde.

CALANCHER : Mourir. Argot de vagabonds. (Delvau.) — Augmentatif de caler : ne rien faire. La mort est le repos éternel.

CALANDE : Promenade. Jargon de voleurs. (Rigaud.) — Mot à mot : action de caler (ne rien faire). V. page 71.

CALANDRINER LE SABLE : Traîner sa misère. Argot de voyous. (Id.) — Diminutif du verbe calandrer : presser, lustrer. Le terme de polir le bitume (faire le trottoir) rappelle exactement la même image.

CALENCE : Manque d’ouvrage. Jargon d’ouvrier. (Rigaud.) — Mot à mot : action de ne rien faire, de caler.

* CALER : Rester sans ouvrage par nécessité, et non par paresse. (Boutmy.) — Du vieux mot de langue d’oc calar : discontinuer.

CALER DES BOULINS : Faire des trous. V. Bouliner, p. 56. — CALER SA BITTURE : Faire ses besoins. Mot à mot : donner congé à sa nourriture. — SE CALER LES AMYGDALES : Manger. (Rigaud.)

CALETER : Décamper. (Id.)

* CALEUR : Ouvrier sans travail. (Boutmy, 78.)

CALEUR : Ouvrier paresseux (Rigaud.) V. Caler, p 71.

CALEUR : Garçon. De l’allemand Kellner. (Id.)

CALIGULER : Ennuyer. — Allusion à la chute du Caligula de Dumas père au Théâtre-Français. (Delvau.)

CALOT : Œil saillant : — Acception figurée de calot : coquille de noix.

CALOTTÉE : Boîte à asticots. Argot de pêcheurs à la ligne. (Privat d’Anglemont.)

CAMARO : Camarade. — Abréviation. — « Amusez-vous. Je reste de cœur avec les camaros. » (Zola.)

CAMBRIAU : Chapeau. (A. Pierre.) — Forme de Combriau.

CAMBROUX : V. Cambrouse, p. 73.

CAMBRURE : Savate. (Rigaud.) — Ironie.

CAMÉLIA, DAME AUX CAMÉLIAS : « Quand la lorette arrive à la postérité, elle change de nom et s’appelle dame aux camélias. Chacun sait que ce nom est celui d’une pièce de Dumas fils, dont le succès ne semble pas près de finir au moment où nous écrivons. » (E. Texier, 52.)

CAMELOTE : Prostituée de bas étage. (Rigaud.) — Mot à mot : mauvaise marchandise.

CAMOUF : Chandelle. (A. Pierre.) — Abrév. de Camoufle.

CAMOUFFLÉ : Homme portant fausse barbe. (A. Pierre.) — De Camoufler (se) : se déguiser. Mot à mot : cacher son mufle.

CAMOUFLE : Signalement. — V. page 13 de l’introduction.

CAMOUFLER LA BIBINE, LE PIVE : Falsifier (mot à mot : déguiser) la bière, le vin, (Rigaud.)

CANAPÉ : Lieu public fréquenté par les pédérastes. (Vidocq.) — Allusion ironique aux parapets des quais et aux bancs de certains boulevards.

CANARDER : Plaisanter. (A. Pierre.) — Mot à mot : conter des canards.

* CANARD : « Nom familier par lequel on désigne les journaux quotidiens. » (Boutmy.)

CANARDIER : Compositeur de journal. (Id.)

* CANASSON (vieux) : Mot d’amitié. — « Tu vas venir avec nous, mon vieux canasson. » (Huysmans, 79.) — On prononce can’son.

CANER : Faire ses nécessités. Argot du peuple. (Delvau.) — La peur produit parfois ce résultat, et caner c’est avoir peur. La cause est prise ici pour l’effet.

CANETON : Petit journal sans importance. (Id.)

CANONNER : Boire beaucoup de canons. — CANONNEUR : Buveur. (Delvau.)

CAPISTON : Capitaine. — CAPISTON BÉCHEUR : Capitaine adjudant-major. (Rigaud.) — Ce dernier a la police de son bataillon et bèche par devoir.

CAPITAINE : Capitaliste, agioteur. Argot des voleurs. (Delvau.) — C’est capitaliste avec changement de finale.

CAPITONNÉE (elle est) : Se dit d’une femme assez grosse.

CAPITONNER (se) : Garnir sa robe d’avantages en coton. (Delvau.)

CAPITOLE : « Nom donné aux arrêts ou cachot, qui est souvent un grenier. On dit : « monter au Capitole. » — Allusion à la citadelle romaine du Capitole. — Argot des écoles.

CAPOULS : Coiffure féminine à bandeaux en cœur, inaugurée par le ténor Capoul, adoptée par les élégants et les commis qui visent à l’élégance. (Rigaud.)

CAPRE : Chèvre. (Id.) — Vieux mot.

CAPSULE : Schako d’infanterie. (D. Lacroix.) — Allusion de forme.

CARABINER : Jouer timidement. Argot de joueurs. (Delvau.) — Allusion aux tirailleurs qui ne risquent qu’à bon escient leur coup de carabine.

CARAFE : Gosier. Jargon de voyous. — On y verse l’eau et le vin, comme dans la carafe. — FOUETTER DE LA CARAFE : Avoir l’haleine infecte. (Rigaud.)

* CARAPATA : Pour comprendre son étymologie il faut se reporter à Carapater : Courir. V. plus bas. Le carapata court à pattes en effet. Allusion au va-et-vient qu’il exécute en appuyant sur sa perche pour faire avancer son bateau. De même dans l’artillerie, les servants à cheval appellent court à pattes un servant à pied.

CARAPATER : Courir. Mot à mot : « courir à pattes. » — « Dans mon Paris j’ carapate comme un asticot dans un mort. » (Richepin, 77.)

CARAVANES : Aventures galantes. Argot du peuple. (Delvau.) — On a cru qu’il y avait ici un rappel de la Fiancée du roi de Garbe, mais je crois que le peuple a fait tout bonnement allusion aux chameaux de caravanes. V. Chameau , p. 91.

CARCASSE (états de) : Reins. — Jargon de voleurs. (Rigaud.)

CARCASSIER : Habile dramaturge. (Delvau.) — Mot à mot : homme habile à établir la carcasse ou scénario d’un ouvrage dramatique.

CARDER : Égratigner. Argot du peuple. (Delvau.) — Comparaison des ongles aux pointes des peignes à carder.

CARISTADE : Secours en argent. (Boutmy.) — C’est une forme méridionale qui se rapproche du caritat (charité) provençal.

* CARME : Miche. — Appelée ainsi sans doute parce qu’elle était blanche de farine comme une robe de carme (dominicain).

CARME À L’ESTORGUE : Fausse monnaie. (Rigaud.) V. Carme, p. 81.

CARMER : Donner de l’argent. (Id.)

CAROTTE (cheveux) : Cheveux très roux. (Rigaud.)

CAROTTE DANS LE PLOMB (avoir une) : Chanter faux, avoir l’haleine infecte. Argot de faubouriens. (Delvau.) — Comparaison du gosier au canal d’eaux ménagères dit plomb. V. page 286.

CAROUBLE : Soir, nuit. Jargon de voleur. (Rigaud).

CARRE (à la) : Mettre de côté. (A. Pierre.) — Une traduction plus exacte serait en cachette. V. Carrer, p. 82.

CARRÉ : Voyez Bizut.

CARRÉ DES PETITES GERBES : Police correctionnelle. Mot à mot : chambre des petits jugements. (Rigaud.)

CARRÉ DU REBECTAGE : Cour de cassation. Mot à mot : chambre de la médecine. (Id.) — La médecine est faite pour les malades (prisonniers).

CARREAUX BROUILLÉS : Maison de tolérance de dernier ordre. — Les fenêtres sont dépolies par ordre de police. — « Il va aux carreaux brouillés. C’est son pain quotidien. » (Le Sublime.)

CARRÉE : Chambre. Jargon d’ouvrier. (Rigaud.) — Allusion de forme.

CARRELURE DE VENTRE : Réfection plantureuse. Argot du peuple (Delvau.) — Comparaison du ventre plein au soulier carrelé à neuf. Les marins disent de même se radouber l’estomac.

CARREUR : Receleur. (A. Pierre.) — De Carrer : Cacher.

* CARTAUD (page 83) : Lisez Cartaude.

CARTE (piquer la) : Marquer la carte pour les reconnaître. Argot des Grecs. (Rigaud.)

CASQUE (avoir du) : Avoir la faconde du saltimbanque. Allusion au casque d’un marchand de crayons en plein vent nommé Mangin, qui eut de 1850 à 1861 son heure de célébrité à Paris. (Rigaud.)

CASQUE (avoir le) : Avoir la tête lourde un lendemain d’ivresse. (Id.) — Allusion au poids du casque.

CASQUE (avoir le) : Avoir un caprice. Argot de filles. (Delvau.) — C’est l’équivalent de être coiffé.

* CASQUER : Donner dans un piège. — J’ai casqué pour le roublard : Je l’ai pris pour un malin. (Delvau.)

CASSANT : Noyer, biscuit de mer. (Id.) — Le noyer produit la cassante : noix. (V. page 85) et le biscuit de mer est dur à casser les dents.

CASSE-GUEULE : Eau-de-vie de première force. — Elle emporte la bouche, comme on dit familièrement. — « Elle regarda ce que buvaient les hommes, du casse-gueule qui luisait pareil à de l’or. » (Zola.)

CASSE-MUSEAU : Coup de poing. Argot de faubourien. (Delvau.) — Coup destiné, bien entendu, au visage.

CASSER LA MARMITE : S’enlever tout moyen d’existence par une folie. Argot de faubourien. (Id.) — C’est-à-dire de souteneur. Pour comprendre le terme, voyez Marmite, page 234.

CASSER SA FICELLE : S’évader. Argot de voleur. (Id.) — V. Ficelles : Menotes, p. 171.

CASSER UNE ROUE DE DERRIÈRE : Entamer une pièce de cinq francs. (Rigaud. — V. Roue, p. 320.)

* CASSEROLE : Agent de police. (Id.) — Le sens primitif est dénonciateur. V. Casserole, p. 86. — V. Gameler.

CASSEROLE : L’hôpital du Midi, à Paris. Argot des faubouriens. (Delvau.) — On y soigne les vénériens. Voyez Casserole, p. 86.

CASSEUR DE SUCRE À QUATRE SOUS LE MÈTRE : Prisonnier des compagnies de discipline. Il est employé en Algérie à l’empierrement des routes. Les pierres cassées lui sont payées à quatre sous le mètre cube. (D. Lacroix.)

CASSIN : Petite maison, petite boutique. — Abréviation de cassine. — « Il est bien avec la bourgeoise du cassin, il a l’œil là-dedans. » (Le Sublime.)

CASSOLETTE : Pot de chambre, tombereau de boueux. (Delvau.) — Allusion ironique aux parfums de cassolette.

CATAPLAMIER : Infirmier. (D. Lacroix.) — Mot à mot : poseur de cataplasmes.

CATHOLIQUE À GROS GRAINS : Catholique peu pratiquant. Argot de bourgeois. (Delvau.) — Mot à mot : ne disant de prières qu’aux gros grains de son chapelet.

CAUCHEMARDER (se) : S’inquiéter, se tourmenter. — « Hein ! est-elle assez canulante ! Il faut qu’elle se cauchemarde. » (Zola.)

CAVALER AU REBECTAGE : Se pourvoir en cassation. Mot à mot : galoper à la médecine. (Rigaud.) — Rebectage veut dire médecine, et médecine veut dire à son tour conseil d’avocat. V. p. 238. — Le malade est l’inculpé. V. p. 229.

CAVALER CHER AU REBECTAGE : Se pourvoir en grâce. (Id.) Mot à mot : courir au triple galop à la médecine. — Cher est ici pour rude, raide.

CAYENNE : Atelier, cimetière extra muros. Argot du peuple. (Delvau.) — Allusion au Cayenne de la Guyanne qui passait pour un vrai cimetière. Pour le premier sens, c’est une assimilation de l’ouvrier au condamné aux travaux forcés.

CENDRILLON : Jeune fille sacrifiée dans l’intérieur de sa famille. — Allusion à Cendrillon du conte de fées. (Id.)

CENTRAL : Détenu de maison centrale. (Rigaud.)

CENTRÉ (être) : Avoir fait de mauvaises affaires. Argot d’ouvriers du fer. (Id.)

CENTRE DE GRAVITÉ (perdre son) : Être ivre, gris. Mot à mot être assez ivre pour ne plus se tenir bien droit. « Après le dîner, il perd ses belles manières et souvent son centre de gravité. » (Vie paris., 77.)

* CERCLE (page 89) : Lisez Cerclé.

CHABIER : S’évader. V. page 13 de l’Introduction. Verbe construit sur les expressions faire M. Chibis, voir M. Chibis, qui ont le même sens.

CHACAL : Zouave. « Le chacal, animal rusé et maraudeur, a été pris comme type par le zouave qui s’est donné à lui-même ce surnom. » (D. Lacroix.)

CHAFFOURER (se) : S’égratigner. (Delvau.) — Allusion aux griffes du chat.

CHAMBERLAN, CHAMBRELAN : Ouvrier en chambre. (Rigaud.) — Deux formes anciennes du mot chambellan qui signifiait bien officier de la chambre.

CHAMBRE À LOUER (avoir une) : Être fou. (Delvau.) — Mot à mot : avoir une case vide dans le cerveau.

CHAMBRELAN : V. Chamberlan.

* CHAMEAU : Rusé exploitant toujours ses compagnons. (Delvau.) — C’est le sens du chameau femelle appliqué au masculin. Les prostituées sont des exploiteuses.

CHANDELIER : Nez. — Il en sort des chandelles. (Rigaud.)

* CHANDELLE : Mucosité. « Celui-ci reniflant de merveilleuses chandelles, celui-là sa chemise au vent. » (Hennique.)

* CHANDELLE : Bouteille. Étymologie : elle éclaire l’ivrogne et lui fait voir… en dedans. V. Voir p. 362.

CHANGER SON POISSON D’EAU : Uriner. (Rigaud.) — Allusion au robinet lâché d’un petit aquarium.

CHANGEUR : Marchand d’habits fournissant aux voleurs de quoi se déguiser. (Delvau.)

CHANGEUR : Filou prenant les pardessus neufs dans les cafés en échange des vieux dont il fait tout exprès collection. (Rigaud.)

CHANTEUR : Voleur spéculant sur l’humanité. (A. Pierre.) — Allusion aux faux chanteurs qui mendient dans les cours.

CHANTIER : Embarras, complication. — Allusion à l’encombrement des chantiers.

Minuit sonnait. Ah ! quel chantier !
Mon épouse va gronder peut-être.
(Guy Marie, chans.)

CHAPARDEUR : Mari qui trompe sa femme. (Rigaud.) — Il chaparde l’amour conjugal.

CHAPELLE : Comptoir de marchand de vins. (Id.) — Les burettes n’y manquent pas. Puis il y a presque toujours une niche figurée au fond.

CHARCUTIER : Chirurgien. (Delvau.) — Ouvrier estropiant l’ouvrage. (Rigaud.)

CHARENTON : Absinthe. — Elle trouble la raison de ses fidèles. (Rigaud.)

* CHARGER : Avoir trouvé un galant. Argot de filles qui se comparent aux cochers. (Id.)

CHARMER LES PUCES : Être ivre. (Delvau.) — Mot à mot : ivre à griser ses puces.

CHARRIEUR-CAMBROUSIER : Voleur à l’aide de moyens chimériques. (A. Pierre.) — Mot à mot : voleur campagnard n’ayant point la force des voleurs de ville.

CHARRIEUR DE VILLES : Voleur appelant la chimie à son aide (Idem) ?

CHARRON : Voleur. (Vidocq.) — Voyez Charon, page 94.

CHASSE-COQUIN : Bedeau. (Rigaud.)

CHASSE-MARAIS : Chasseur d’Afrique. (Idem.) Pour chassemar. V. ce que nous avons dit de cette désinence arbitraire. (Mar. page 232.)

CHÂSSIS : Œil. V. Chasse, p. 96.

CHAT : Couvreur. Il court les toits comme le chat. (Rigaud.)

CHAT : Enrouement subit. (Id.) — On ne peut alors chanter, on miaule. De là, l’expression avoir un chat dans le gosier.

CHATEAUBRIAND : Beefsteak cuit entre deux autres, d’après une recette de Chateaubriand. (Delvau.)

CHATTE : Pièce de cinq francs. Argot de filles. (Id.) — Nom d’amitié.

CHEMIN DE FER : Baccarat où chaque joueur tient à son tour les cartes. Cela va plus vite. (Rigaud.)

CHENILLON : Avorton. Diminutif de chenille. — « Veux-tu décaniller de là, bougre de chenillon ! » (Zola.)

CHER : Beaucoup. (Rigaud.) — On dit de même il est richement laid pour très laid. La richesse devient un superlatif général.

CHÉTIF : Enfant de Limousin, apprenti maçon. (Rigaud.)

CHEULARD : Licheur. — « Ah ! les cheulards ! dit-il… J’ai senti ça. Hein ? Qu’est-ce qu’on mange. » (Zola.)

CHEVAL DE TROMPETTE (bon) : Aguerri. — « Moi, d’abord, je suis bon cheval de trompette. Le bruit ne m’effraie point. » (H. Monnier.)

CHEVALIER DE LA GRIPPE : Filou. (Rigaud.) — Lisez de l’agrippe (d’agripper : prendre).

CHEVANCE : Ivresse. (Id.) — Vieux mot qui signifiait gros bien, richesse. L’ivrogne a toutes les richesses de la terre en imagination.

CHEVEU : Caprice amoureux. On dit avoir un cheveu pour un homme. (Delvau.) — Ce doit être une variante de Coiffé, car sans cheveu, on ne saurait être coiffé, c’est-à-dire : être tout à fait épris.

CHEVEU : « Travail difficile, ennuyeux et peu lucratif. » (Boutmy.)

CHEVEUX (trouver des) : Trouver à reprendre tout. (Rigaud.) — Allusion aux vétilleux qui cherchent des cheveux dans le potage.

* CHÈVRE (gober sa) : En 1660, Molière dit déjà :

D’un mari sur ce point j’approuve le souci,
Mais c’est prendre la chèvre un peu bien vite aussi.

CHEVROTIN : Irascible, mécontent. (Boutmy.) — Mot à mot : qui a souvent sa chèvre. V. page 99.

CHIADE : Bousculade. — Argot des écoles.

CHIASSE : Chose sans valeur, marchandise avariée, maîtresse. Argot du peuple. (Delvau.)

CHIBIS (faire), voir M. Chibis : S’évader. — Argot des voleurs de province. V. l’Introd. p. 13 et 14.

* CHIC (V. p. 100) : Je dois tenir note de l’étymologie qui en fait une forme du schick allemand (tournure, talent), qui est lui-même une abréviation du mot ancien geschick (même sens). Comme nous usions déjà du mot chic sous le premier empire, dans l’armée, ce serait, en ce cas, un mot qui aurait repassé le Rhin avec les armées républicaines.

CHICORÉE : Réprimande. (Rigaud.) — La chicorée est amère.

CHIÉ (tout) : Tout à fait ressemblant. (Id.)

CHIEN (faire du) : Faire un ouvrage payé d’avance. (Id.)

CHIEN (avoir un) : Avoir un caprice pour un homme. (Id.)

CHIEN DE FUSIL (se tenir en) : Se replier sur soi-même. — Allusion au profil du chien de fusil. — « Sur le tas de paille, Gervaise, toute habillée, se tenait en chien de fusil. » (Zola.)

CHIEN PERDU : On appelle ainsi un fait divers de journal. — « Le metteur en pages a besoin d’un chien perdu pour boucher un trou quand les rédacteurs n’ont pas fourni assez de copie. » (Boutmy.)

CHIER DANS LE PANIER DE QUELQU’UN : Lui jouer un tour impardonnable. — On dit : « il a chié dans mon panier jusqu’à l’anse. » — On lit déjà dans la satire Ménippée, au xvie siècle : « Cettuy-là a fait caca en nos paniers. » (Delvau.)

CHIER DUR : Travailler ferme. — CHIER DANS LA MAIN : Être trop familier. — CHIER DU POIVRE : Se dérober quand on a besoin de vous. — ENVOYER CHIER : Éconduire. — FAIRE CHIER : Obséder. (Rigaud.)

CHIEUR D’ENCRE : Employé de bureau, homme de lettres. (Id.) — Même genre de plaisanterie que dans buveur d’encre.

CHIFFARD : Pipe. (A. Pierre.) Pour Chiffarde.

CHIFFE : Langue. Abrév. de Chiffon rouge. (Id.) V. p. 103.

CHIFFON : Fille à minois chiffonné. (Delvau.)

CHIFFONER : Contrarier. — Vieux mot qui s’est dit en langue romane achaifonner. — « On ne peut plus faire de farces à sa Nini ; c’est ce qui vous chiffonne. » (Gavarni.)

CHINE (aller à la) : Crier dans les rues : vieux habits, vieux galons ! (Rigaud.) — Pour « aller en Chine. » Allusion à la longueur des tournées quotidiennes des marchands d’habits.

CHINER : Aller à la chine. (Id.)

* CHINEUR (page 104). Mot à mot : allant à la chine. Voyez Chine.

CHIPE : Action de chiper. (Rigaud.)

CHIQUE (avoir sa) : Être de mauvaise humeur. (Id.) — Allusion à la moue que produit une chique logée dans la bouche.

CHIQUE (avoir une) : Être saoul. (Delvau.) — Pour avoir chiqué (mangé et bu) outre mesure.

* CHIQUER : Manger. Vieux mot.

* CHIQUER : Faire de chic, c’est-à-dire sans les études nécessaires. « Voyez ces deux fragments… Comme c’est négligé, comme c’est chiqué ! Ne dirait-on pas une gravure à deux sous. » (V. Bouton.)

CHIQUEUR DE BLANC : Souteneur. (Rigaud.) — Même étymologie que Mangeur de blanc. V. Mangeur.

CHIRURGIEN EN VIEUX : Savetier. (Delvau.) — Il travaille la peau comme le chirurgien.

CHOCOTTE : Os gras. Jargon de chiffonnier. (Rigaud.)

CHOLÉRA : Zinc, zingueur. (Id.) — Viande malsaine. (Delvau.)

CHOLET : Pain blanc délicat. — Du vieux mot de langue d’oil chollat qui a le même sens.

CHOQUOTTE : Doit être une forme de Chocotte,

Tout cela s’rait de la choquotte,
Mais c’ qu’est triste, hélas !
(Richepin, 77.)

CHOUFFLIC : Mauvais ouvrier. (Boutmy.) — Forme française de l’allemand schuflick : savetier.

CHOUFLIQUÉ : Mal fait. Mot à mot : saveté. — « C’est tout des bons à rien. Comme c’est choufliqué, saboté ! » (Le Sublime.)

* CHTIBBE. — Germanisme. Déformation de l’allemand Stiefel : botte, qui se prononce schtiffle.

CHYLE (se refaire le) : Faire un bon dîner. (Rigaud.) — Si le mot est populaire, il doit avoir un point de départ scientifique. On dit aussi faire du chyle.

CIGALIER : Membre d’une société poétique du Languedoc nommée La Cigale. — « Cigalier de cœur et d’âme. » (Bardoux, 78.)

CINGLER LE BLAIR : Se souler. (Rigaud.) — Mot à mot : se piquer le nez. V. Nez, p. 253.

CINQ CENTIMADOS : Cigare de cinq centimes. (Id.) — Ironie à l’adresse de la Havane.

CINQ ET TROIS FONT HUIT : Boiteux. (Id.) — Mot à mot : faisant cinq pas d’un pied et trois de l’autre pour arriver à huit.

CIRÉ : Nègre. (Rigaud.) — Mot à mot : passé au cirage.

CISEAUX (travailler à coup de) : Compiler. — C’est fait à coups de ciseaux : Il n’y a rien de neuf.

CISEAUX (tenir les) : Tenir le poste de secrétaire de rédaction dans un journal. Il coupe les extraits.

CITRON : Tête. Argot de voleurs. (Rigaud). — Allusion de forme.

CIVADE : Avoine. (Vidocq.) — C’est le mot de langue d’oc civada.

CIVARD : Pâturage. (Id.) — De Cive.

CIVE : Herbe. (Id.) — Vieux mot. La cive était une ciboule ; de là notre mot civet (ragoût aux cives).

CLAMART : Cimetière des suppliciés. — « L’hippodrome désormais destiné à devenir le Clamart, le champ des navets de la musique. » (Vie parisienne, 79.)

CLAPOTER : Manger. (Rigaud.) — Allusion au bruit de la mastication.

CLAQUE (en avoir sa) : En être repu, las. — Mot à mot : plein à claquer, à éclater. — « Toujours la même rengaine… Je finis par en avoir une claque. » (Durandeau, 78.)

CLAQUE-DENTS : « Il fut introduit par quelques amis dans les cercles appelés vulgairement claque-dents. » (National, janv. 79.) — Est-ce parce qu’on y claque (mange) son argent, ou parce que la fièvre du jeu vous y ruine. Avoir la fièvre c’était jadis aller au pays de claque-dent. Allusion au frisson qui commence l’accès.

CLAQUER : Vendre. (Delvau.) — Acception figurée de manger.

* CLARINETTE : Fusil. On a dit d’abord clarinette de cinq pieds. La baïonnette figurait le bec, et la crosse s’évasant figurait le pavillon.

* CLÉ : — « Il y a des femmes à la clé, il y a des côtelettes à la clé : Il y aura des femmes à la réunion, il y aura des côtelettes au repas. » (Delvau.)

CLICHE : Diarrhée. (Rigaud.)

CLIENT : Individu volé ou à voler. A remplacé pante. (Id.) — Ironie. Les voleurs ont suivi la mode des boutiquiers qui appellent clients tous ceux qui leur font gagner de l’argent.

CLOQUE : Pet. (Rigaud.) — Onomatopée.

CLOQUER : Péter. (Id.)

CLOU : « Le soldat appelle clou sa baïonnette. » (D. Lacroix.) — Allusion de forme.

CLOU : Ouvrier travaillant mal. (Rigaud.) — Le clou accroche et déchire.

CLOUS : Outils de graveur sur bois. (Id.) — Allusion de forme.

COCARDE : Excès de boisson. Il rougit et bleuit le visage comme une cocarde. — « On était bien venu à lui reprocher une cocarde prise de temps à autre. » (Zola.)

COCARDER : Avoir sa cocarde. V. ce mot. — « On était gai. Il ne fallait pas maintenant se cocarder. » (Zola.)

* COCHONNERIE : « L’amour ! L’amour ! ne me parlez jamais de cette cochonnerie-là. » (Hennique.)

COCO : Mauvaise eau-de-vie. — Marchand de coco : Mauvais marchand de vin. (Rigaud.) — Ironie. Le coco est une boisson d’eau et de réglisse.

COCO : Soulier. Argot du peuple. (Delvau.) — Se trouve déjà au dernier siècle dans le Monsieur Nicolas, de Rétif.

* COCO (monter le) : Monter la tête, exciter. — « Ça te chatouille les belles frusques. Ça te monte le coco. » (Zola.) V. Coco.

* COCODETTE : « La cocodette est un type féminin du second empire, comme la merveilleuse le fut du Directoire, et la lionne, de la monarchie de juillet. Semblable à la courtisane par son faste et ses allures, elle en diffère par la régularité de sa position sociale. Son existence est une pose incessante. » (Souvenirs d’une cocodette, 78.)

CŒUR (par) : Pour mémoire. Ironie. — « Dîner par cœur, c’est dîner en esprit, immatériellement, c’est-à-dire négativement. » V. Danse devant le buffet.

COFFIN : Table volante pour le travail, en souvenir du général Coffinières qui a donné ce meuble aux polytechniciens. (Rigaud.)

COLLARDÉ : Prisonnier. (Id.) — Augmentatif de Collé : emprisonné.

* COLLER : Punir. (Argot des écoles.)

* COLLER (se) : Avaler. (Rigaud.) — Pour se couler.

COLLEUR : Homme qui se lie trop facilement. (Delvau.) — Mot à mot : qui colle volontiers. V. Coller, p. 113.

COLLIGNON : Mauvais cocher. — Allusion à un cocher de fiacre qui tua son voyageur dans un accès de colère, il y a vingt ans environ.

COLO : Colonel. — Abrév. (Rigaud.)

COLOMBE : Dame de jeu de cartes. Jeu de mots. Colombe désigne aussi une femme aimée. V. Borgne.

COLONNE (avoir chié la) : Être adroit dans son métier. (Rigaud.) — Mot à mot : faire une chose jugée impossible. Ce terme s’emploie plutôt négativement (il n’a pas chié la colonne, il n’est pas fort). — Il s’agit ici de la colonne Vendôme, autrefois fort admirée par le peuple.

COLTIN : Fort de la halle. Partie prise pour le tout. V. Colletin, p. 113.

COLTIN, COLTINER : V. Colletin, Colletiner.

COLTINEUSE : Ouvrière de gros ouvrage. — « Ma sœur n’est pas une coltineuse…, elle fait les travaux délicats. » (Huysmans, 79.)

COMBERGE : Confession. Abrév. de Combergeante.

* COME : Abrév. de Comite : officier de galères. Vieux mot.

COMÉDIE (envoyer à la) : Faire chômer. — Quand on va au théâtre on ne travaille pas. — « C’est y pas vexant d’envoyer comme ça les ouvriers à la comédie ! » (Le Sublime.)

COMÈTE : Jettatore. — Argot de joueurs. (Rigaud.)

* COMFORT : Vieux mot plus français qu’il n’en a l’air. — « Tout le monde sait que nous avons repris aux Anglais les termes autrefois français de comfort, comfortable ; mais nous avons laissé entre leurs mains celui de discomfort. Pourtant discomfort, (malaise, désagrément), se trouve dans nos anciens poètes, notamment dans Charles d’Orléans. » (J. Amero.)

COMMANDITE : Association d’ouvriers pour un travail quelconque. (Boutmy.) — Ironie, car c’est le contraire de la commandite.

COMPOSE : Composition. Argot des écoles. — Abrév.

COMPRENDRE (la) : Voler. (Rigaud.) — Jeu de mots sur les deux dernières syllabes.

COMPTE : Comptoir de marchand de vin. (Id.) — Abrév.

CONDITION (en) : « Le cheval en condition est dans un haut état de santé, il n’a ni chair ni graisse superflues. » (Carnet des courses, 77.)

CONDUITE (acheter une) : Mener un nouveau genre de vie. (Rigaud.) — Se dit surtout des fous auxquels il en coûte d’être sages.

* CONDUITE DE GRENOBLE : « Jérôme prend un bâton et fait la conduite à l’exempt, conduite que le vulgaire appelle de Grenoble. » (P. 21, 2e partie, Paulin ou les aventures du comte de Walter. Paris, Desenne, 1792.)

CONFIRMER : Souffleter. (Rigaud.) — Allusion à la petite tape de la confirmation.

CONFRÈRE DE LA LUNE : Mari trompé. (Delvau.) — Allusion aux deux cornes de la lune.

CONILLER : Chercher à se soustraire. (Rigaud.) — Du vieux mot conil : lapin. On connaît l’adresse avec laquelle cet animal fuit le chasseur.

* CONNASSE : Femme stupide. (Rigaud.)

CONNOBRE : Connaître. (Id.) — Abrév. de Connobrer. V. page 116.

CONSCIENCE (homme de) : Ouvrier typographe payé à la journée et non aux pièces. — Allusion à la conscience nécessaire dans un travail aussi libre.

CONSERVATOIRE : Mont de piété. (Michel.) — On y conserve les effets engagés,

CONSERVES : Pièces du vieux répertoire. Argot théâtral. (Rigaud.) — Ce ne sont pas des primeurs dramatiques.

CONSIGNE : Tisonnier de poêle. Argot militaire. (Id.)

CONTRE-COUP : Contremaître. — « C’est vous qu’êtes le contre-coup de la boîte. » (Le Sublime.)

CONTREMARQUE DU PÈRE LACHAISE : Médaille de Sainte-Hélène. (Delvau.) — Les vétérans qui la reçurent sous le second Empire étaient déjà vieux. Néanmoins, il en reste encore pour donner à cette ironie anti-nationale un glorieux démenti.

COP : Copie. Argot de typographe (Id.) — Abrév.

COPIE SUR QUELQU’UN (faire de la) : « C’est au figuré dire du mal de lui ou médire. » (Boutmy.) — Allusion aux articles méchants des petits journaux.

COQUARD : Œil. (Rigaud.) — Mot à mot : œil à la coque, gros œil bouffi.

COQUARDEAU : Mari imbécile, mari trompé, entreteneur ridicule. — Surnom ravivé par la vogue des caricatures de Gavarni où Mosieu Coquardeau joue un rôle constamment ridicule. Au moyen âge, le coquardeau était un jeune fanfaron d’amour, un gâteux. On connaît ces vers du Blason des fausses amours :

S’un (si un) coquardeau
Qui soit nouveau
Tombe en leurs mains,
C’est un oiseau
Pris au gluau.
Ne plus ne mains (moins).

COQUILLARD : Œil. (Rigaud. — Diminutif de coquard.

COQUILLARD : Pèlerin. Argot de faubouriens. (Delvau.) — Je ne crois pas toutefois ce mot connu des faubouriens de notre siècle qui n’ont jamais vu de pèlerins (à pèlerines garnies de coquilles, d’où le vieux nom de coquillard.) Le coquillard était le faux pèlerin de la cour des miracles.

* CORBEAU : Se prend aussi pour prêtre en général. — « Six francs ! le prix d’une messe à l’autel des pauvres. Certes, il n’aimait pas les corbeaux. » (Zola.)

CORBUCHE LOF : Ulcère factice. (Delvau.) — Lof est évidemment l’adjectif faux écrit fo et soumis à un procédé de déformation en l, qui consiste à remplacer par l la première lettre du mot qu’on rejette à la fin. Fo fait ainsi lof. Voyez lem (parler en), p. 218.

CORDE (dormir à la), coucher à la corde : Passer la nuit au cabaret. (Delvau.) — S’est dit d’abord d’un marchand de vins de dernier ordre qui faisait payer a ses dormeurs le droit de s’accouder sur une corde.

CORDER : S’accorder. (Id.) — Abrév.

CORDES (faire des) : Être constipé. (Id.) — Mot imagé.

CORNAGE : « Respiration bruyante et difficile : le cheval est dit corneur, joueur de flûte. » (Carnet des Courses, 77.)

CORNET D’ÉPICES : Capucin. (Vidocq.) — Allusion au capuchon et au papier brun de l’épicerie. Le mot est donné de nos jours comme appartenant à l’argot des voleurs, mais il a disparu dès 1789.

CORNICHERIE : Niaiserie. Abréviation de Cornichonnerie, mot à mot : acte de cornichon. V. ce mot, page 118.

CORVÉE (aller à la) : Se livrer au travail professionnel. Argot des filles. (Rigaud.) — Faire passer à la corvée se dit de plusieurs hommes réunis, traitant, de gré ou de force, une femme en prostituée.

CORVET (page 119) : Lisez Corvette.

COSAQUE : Poêle à chauffer. (Rigaud.)

COSMO : Cosmographie. — Argot des écoles.

COTE (frères de la) : Commis d’agent de change. (Id.) — Jeu de mots qui fait allusion à la cote de la bourse et au roman populaire consacré par Emmanuel Gonzalès aux boucaniers gentilshommes appelés Frères de la côte.

COTE (G), page 119, Lisez Cote G.

COTÉ COUR : Coulisses de droite. — COTÉ JARDIN : Coulisses de gauche. Argot théâtral. (Bouchard.)

COTELARD : Melon. — Allusion à ses côtes. Argot du peuple. (Michel.)

CÔTELETTE DE PERRUQUIER, CÔTELETTE DE VACHE, CÔTELETTE DE MENUISIER : Morceau de fromage de Brie. (Delvau, Rigaud.) — La facétie peut s’appliquer de même à tous les corps de métier, ce qui promet encore bien des pages aux dictionnaires spéciaux.

COTERIE : Assemblée d’ouvriers. (Rigaud.) — Désigne aussi l’ouvrier seul. « Hé ! la coterie ! » dit un maçon à un autre maçon.

* COTON (donner du) : Donner de la peine. — « Ça ne fait rien, il lui a donné du coton. » (Le Sublime.)

COTRETS : Jambes. Argot de faubouriens. (Delvau.) — Comparaison d’une jambe maigre à un brin de fagot dit cotret. V. son synonyme Fumeron, p. 185.

COUCHE (il y) : Se dit de quelqu’un qui se trouve continuellement dans une maison, sans y passer toutefois la nuit.

* COUENNE : Joue pendante. Argot du peuple. (Delvau.)

COUINER : Parler en larmoyant. (Rigaud.) — Abrév. de Couyonner.

COULE : Abrév. de Coulage. V. p. 121.

COULE (mettre à la) : Mettre au courant. — « Ça commence à venir. On les a mis à la coule. » (Le Sublime.)

COULER (en) : Mentir. Mot à mot : couler des mensonges. (Delvau.)

COULER DOUCE (la) : Vivre sans souci, couler une douce existence. — « La vérité est qu’il la coulait douce. » (Zola.)

COULEUR (Être à la) : Être convenable, faire bien les choses. Mot à mot : offrir la couleur qu’on désire. — « Vous n’êtes pas rat, vous êtes chouette et à la couleur. » (Le Sublime.)

COULEUR : Soufflet. — Il colore la joue. — « Je vous ficherai une couleur sur la figure. » (Huysmans, 79.)

COULEUVRE : Femme enceinte. (Delvau.)

COUP : Manœuvre faite dans le but de tromper. On dit : il m’a fait le coup (il m’a trompé) ; c’est le coup du suicide (c’est un faux suicide annoncé pour attendrir la dupe).

COUP D’ACRÉ : Extrême-onction. Argot de voleurs. (Rigaud.) — Mot à mot : coup du défions-nous. Voyez Acré. Les plus braves n’ont pas leur confiance entière au dernier moment.

COUP D’ANATOLE, COUP DU PÈRE FRANÇOIS : Voyez La faire au père François, page 182. — Le nom d’Anatole comme celui du père François est probablement celui d’un spécialiste fameux en ce genre. J’en ai interrogé deux en 1868 sans obtenir sur ce point aucun éclaircissement.

COUP D’ARROSOIR : Verre de vin bu sur le comptoir. (Delvau.) — Il arrose le gosier.

COUP DE BOUTEILLE (avoir son) : Être ivre. — « Il avait son coup de bouteille comme à l’ordinaire. » (Zola.)

COUP DE CANIF : Voyez Canif, p. 77.

COUP DE CASSEROLE : Dénonciation. (A. Pierre.) — V. Casserole, p. 86.

COUP DE CHANCELLERIE : Coup de lutteur qui consiste à tenir sous le bras la tête de l’adversaire. (Rigaud.) — On fait ainsi chanceler son homme. Jeu de mots sur chanceler et chancellerie.

COUP DE CHASSELAS : Demi-ébriété. (Delvau.)

COUP DE FEU, COUP DE PICTON (avoir un) : Être allumé par l’ivresse. Jeu de mots sur coup (blessure) pris au figuré. — « Le coup de feu est la barbe commençante. » (Boutmy, 78.)

COUP DE FIGURE : Repas soigné. (Rigaud.) — Jeu de mots. Un bon repas porte à la tête comme le coup d’escrime appelé coup de figure.

COUP DE FOURCHETTE : Vol à l’aide de deux doigts. (A. Pierre.) — Mot ancien qui doit remonter au temps où la fourchette n’avait que deux pointes. — On appelle aussi coup de fourchette un coup consistant à pointer deux doigts dans les deux yeux de l’adversaire.

COUP DE FOURCHETTE (avoir un joli) : Bien manger.

COUP DE MANCHE : Mendicité à domicile. (Rigaud.)

COUP DE MARTEAU : Folie. On sous-entend : Coup de marteau sur la tête. — « Elle finit par oser lui parler de son coup de marteau, surprise de l’entendre raisonner comme au bon temps. » (Zola.)

COUP DE PICTON : V. Coup de feu.

COUP DE PIED (donner un) : Demander une avance d’argent. (Rigaud.) — Jeu de mots, car donner un coup de pied se dit aussi pour avancer, marcher.

COUP DE POUCE : Exaction. (Id.)

COUP DE RAGUSE : Défection. Allusion à celle qui fut reprochée au duc de Raguse. (Id.)

COUP DE RIFLE : Ivresse. (Id.) — Mot à mot : coup de feu. V. Riff, p. 315. L’ivresse enflamme.

COUP DE SIFFLET : Couteau. (Rigaud.) — Pour coupe-sifflet. V. p. 123.

COUP DE SIROP (attraper un) : Se soûler. — « S’il a attrapé un coup de sirop, c’est que le torchon brûlait. » (Le Sublime.)

COUP DE TORCHON, COUP DE VAGUE : Voyez Torchon et Vague.

COUPE-CUL (À) : Sans revanche. Argot de faubouriens. (Delvau.)

COUPÉ : Sans argent. (A. Pierre.) — Mot à mot : « ayant les vivres coupés. »

COUPELARD : V. Couplard.

COUPER (se) : Se contredire en faisant un récit mensonger.

COUPER-CUL : Abandonner le jeu. Argot de joueur. (Delvau.)

COUPER LA QUEUE À SON CHIEN : Se faire remarquer par quelque excentricité. (Id.) — Allusion au chien d’Alcibiade.

COURER (se) : Se garer. Jargon de voleur. (Rigaud.) — Forme de se la courir. V. page 124. Le voleur court quand il veut se garer. — Tu me la coures : Tu m’ennuies. (Id.)

COUREUSE : Machine à coudre. (Id.) — Allusion à sa rapidité.

* COURIR (se la) : « Je m’ai mis à pleurer, ça l’a embêté, et il se la court encore. » (Durandeau, 78.)

COURT À PATTES : Artilleur à pied. Il va sans dire que c’est un terme inventé par l’artilleur à cheval.

COUSIN DE MOÏSE : Mari de catin. Allusion aux cornes flamboyantes de Moïse. (Delvau.) — Le côté flamboyant accuse ici une grande publicité.

COUSINE : Un synonyme de plus pour la nomenclature donnée à la fin d’Être (en), p. 162.

COUTURASSE : Couturière, femme grêlée. (Michel.)

COUVRANTE : Casquette. (Rigaud.) — C’est revenir à notre couvre-chef.

COUVRE-AMOUR : Chapeau d’homme. Argot de bourgeois. (Delvau.) — Ironie.

CRACHER : Faire des aveux en justice. (Rigaud.) — Cracher signifie parler, p. 124.

CRACHER BLANC, CRACHER DU COTON, DES PIÈCES DE DIX SOUS : Avoir soif. (Delvau.) Allusion aux petits crachats écumeux de l’assoiffé qui n’a plus de salive.

CRACHER DESSUS (ne pas) : En user avec plaisir. — Ironie.

CRAMER UNE SÈCHE : Fumer une cigarette. Argot de collégiens. (Rigaud.)

CRAMSER : Mourir. Argot des pompes funèbres. (Id.) — Ailleurs on dit crapser.

CRÂNER : Faire le crâne, poser. — « Sans chercher à crâner il entendait agir en homme propre. » (Zola.)

CRÂNEUR : Fanfaron d’audace. (Delvau.)

CRAPAUD : Petit garçon. (Delvau.)

CRAPOUSSIN : Petit homme. (Id.) — Dérivé de crapaud.

CRAPSER : Mourir. — « À Cayenne-les-Eaux, v’là dans le bataillon de la guiche comment crapsent les dos. » (Richepin, 77.)

CRAVATE DE CHANVRE : Corde. Argot du peuple. (Delvau.) — Se disait au temps où on pendait.

CRAVATE DE COULEUR : Arc en ciel. Argot de faubouriens. (Id.) — Mot imagé.

CREVAISON : Mort. Animalisme. — « Le long du corridor, il y avait un silence de crevaison. » (Zola.) — Faire sa crevaison : Mourir.

CREVARD : Enfant mort-né. Argot de voyous. (Delvau.)

CREVÉ : Homme ruiné de corps et d’âme (Id.)

CREVER L’ŒIL AU DIABLE : Réussir malgré les envieux. (Id.) — Le diable aveugle est supposé inoffensif.

CRIBLEUR DE FRUSQUES : Marchand d’habits. (Rigaud.)

CRIBLEUR DE LANCE : Porteur d’eau. (Delvau.) — Mot à mot : crieur d’eau. Les porteurs d’eau criaient autrefois à leur passage dans la rue.

CRIBLEUR DE MALADES : Celui qui appelle des détenus au parloir. (Delvau.) — Mot à mot : crieur de prisonniers.

CRIBLEUR DE VERDOUZE : Marchand de légumes. (Rigaud.) — Mot à mot : crieur de pommes.

* CRIE : Viande. Le mot pourrait être ancien, car on disait au moyen âge massecrier pour boucher.

CRIN : Homme irritable et irrité. Mot à mot : raide et piquant comme le crin. — « Tous les trois restaient pareils à des crins, avec de la haine plein les yeux. » (Zola.)

CRINOLIER : Boucher. V. Criollier, p. 127.

CRINOLINE : Dame de cartes. (Rigaud.) Sa jupe est raide.

CROCHER : Crocheter. (Delvau.) — Abréviation.

CROCODILE : Homme avide et fourbe, créancier. (Id.) — Usurier. — Allusion à la voracité des crocodiles.

CROCODILE : Étranger suivant les cours de l’école Saint-Cyr. (D. Lacroix.) — Est-ce parce qu’il y eut dès l’origine plusieurs Égyptiens dans ce contingent exotique.

CROQUENEAU : Soulier. — CROQUENEAU VERNEAU : Soulier verni. — Ils craquent en marchant. (Delvau.)

CROQUER : Craquer, crier. (Id.).

CROSSEUR : Sonneur. (Delvau.) — V. Crosser, p. 128.

CROUME : Crédit. (Rigaud.) — Pour crome. V. page 128.

CROUPIR DANS LE BATTANT : Ne pas se digérer, incommoder. (Id.)

CROUTÉUM : Collection de croûtes (mauvais tableaux.) — « Bientôt la boutique, un moment changé en croutéum, passe au muséum. » (Balzac.)

CRUCHE, CRUCHON : Épais de forme et creux d’esprit. — « Il est assez cruche, pour ne pas comprendre. » (E. Sue.)

CUBE : V. Bizut.

CUCURBITACÉ : Imbécile. Synonyme de melon. (Delvau.)

* CUIR : Peau. Cet animalisme est du moyen âge. En décrivant une bataille, Guillaume Guiart dit :

Coutiaux trespercent armeures,
Sanc saut de cors et de visages,
Là ou li cuir et la char s’euvre.

(… Le sang saute des corps et des visages là où le cuir et la chair s’ouvrent.)

CUIR DE BROUETTE (escarpins en) : Sabots. (Id.) — C’est-à-dire souliers de bois.

CUIRASSÉ : Urinoir parisien. Modèle de 1876. (Rigaud.) — Allusion aux énormes remparts de tôle placés là pour protéger la pudeur publique.

* CUIRASSIER : « Veux-tu savoir ta langue et l’ostographe ? Prends moi z’un cuir, prends-moi z’un cuirassier. » (Festeau.)

CUIRE DANS SON JUS : Étouffer de chaleur et de transpiration. Le mot est ancien. On connaît la répartie de Piron suant au parterre et entendant ses voisins chuchotter : « Voilà Piron qui cuit dans son jus. — Ce n’est pas étonnant, s’écria-t-il, je suis entre deux plats. »

CUITE (avoir une) : Être ivre. — « La parole d’un homme ivre est sans valeur. On ne doit pas être cru quand on a une cuite. » (Tamtam, 76.) — Allusion à la quantité liquide qui cuit dans l’estomac de l’ivrogne.

CUITE (prendre une) : S’enivrer. — « Comme à l’occasion de la paye, il avait pris une cuite énorme. » (Petit Parisien, 77.)

CUIVRE : Monnaie. Argot du peuple. (Delvau.)

CUIVRES : Instruments de musique en cuivre. On dit d’une partition bruyante : qu’il y a trop de cuivres.

CUL (montre son) : Faire faillite. (Rigaud.) — Jeu de mots. Le failli n’a rien pour se couvrir, financièrement parlant.

CUL DE PLOMB : Homme sédentaire, peu alerte. (Dhautel, 1808.)

CUL GOUDRONNÉ. Matelot.

CUL ROUGE : Soldat porteur du pantalon rouge d’uniforme. Autre temps, autres culottes. Au dix-huitième siècle, on disait cul blanc, témoin ce passage des Mémoires de Bachaumont : « Le 27 janvier 1774. Il est encore arrivé à Marseille à la Comédie une catastrophe sanglante. Un officier du régiment d’Angoulême était dans une première loge ; il s’était retourné pour parler à quelqu’un. Le parterre, piqué de cette indécence, a crié à bas, cul blanc ! (le blanc est le fond de l’uniforme de l’infanterie), etc., etc. »

CUL TERREUX : Paysan. (Delvau.)

CULOTTE (grosse) : Maître ivrogne, se donnant habituellement de grosses culottes. V. ce mot. (Le Sublime.)

CULOTTE ROUGE (donner dans la) : Avoir un ou plusieurs militaires pour amoureux. — « Elle fut la maîtresse du prince de L… En ce moment, donne dans la culotte rouge. » (Cancans du boudoir, 77.)

CYCLOPE : Derrière. (Rigaud.) — L’anus compte ici pour un œil, et on sait que le cyclope de la fable n’en avait pas davantage.

CYCLOPE : Chapeau de haute forme. (Id.)

CYMBALES : Pannonceaux de notaire ou d’huissier. (Id.) — Ils sont jaunes et accouplés comme les cymbales.

CYMBALE : Lune. (Id.) — C’est la pleine lune qui doit être ici désignée,