Dictionnaire historique d’argot /Édition Dentu/1881/M

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M


M ! : Abréviation d’une injure employée déjà par Rabelais. « Merde ! mot ignoble et grossier, dont le bas peuple se sert dans un sens négatif, » écrivait Dhautel en 1808. Ce n’est pas seulement dans le bas peuple que M… est usité, comme on va le voir par le second des textes suivants. Celui-ci est extrait du Temps du 16 août 1872 :

INCIDENT D’AUDIENCE AUX ASSISES.

L’accusé Lhermine est un jeune homme de vingt-cinq ans, mais qui parait à peine âgé de dix-huit ; blond, grêle, court. Sa petite figure blême et vicieuse semble taillée en lame de couteau. Il n’a pas commis moins de quarante-sept vols qualifiés. C’est lui-même qui, au cours de l’instruction, les a indiqués au magistrat et en a fait vérifier les détails. Il est en outre accusé de coups volontairement portés à sa mère légitime. M. le président se tourne vers l’accusé et, comme il est prescrit par la loi, il l’interroge.

M. le président : Accusé, levez-vous. Vos nom et prénoms ?

L’accusé : Auguste Lhermine.

M. le président : Votre âge ?

L’accusé : Merde !

Ce mot ordurier, prononcé à haute voix, est entendu par tout le monde. L’auditoire fait entendre des rumeurs.

M. le président : Accusé, dans votre propre intérêt, je dois vous engager à la circonspection. Vous avez peut-être été victime d’habitudes grossières ou d’un mouvement irréfléchi. Magistrats, nous voulons bien oublier cet outrage, qui ne saurait d’ailleurs nous atteindre. Veillez sur vous désormais. Votre défenseur va vous entretenir. Il vous conseillera. Je le répète, c’est dans votre propre intérêt que je parle.

Après un quart d’heure de suspension, les jurés reprennent place, au milieu de l’émotion vive de l’auditoire, et la cour reprend séance.

M. le président : Messieurs les jurés, mon devoir m’oblige à faire subir, avant la prestation de votre serment, un interrogatoire à l’accusé pour constater son identité, je vais le reprendre… Accusé, vos nom et prénoms ?

L’accusé ne répond pas.

M. le président renouvelle sa question.

L’accusé, d’une voix plus décidée : Merde !

Des murmures éclatent dans toute la salle. Sur les réquisitions du ministère public, la cour condamne Lhermine à deux ans de prison. C’est le minimum de la peine en cas d’outrage à la cour.

Notre second texte (pris dans la Liberté du 8 septembre), rend compte d’une affaire jugée le 7 septembre 1872, par le tribunal de Pont-l’Evêque. Voici la déposition d’un témoin :

Le troisième témoin, Leprêtre (Auguste-Émile), vingt-quatre ans, douanier à Deauville, est appelé. Lecture est donnée de sa déposition devant le juge d’instruction : « Le 14 août, vers cinq heures, j’étais de service sur la jetée de Deauville, avec mon camarade Ollivier, lorsque je vis rentrer une embarcation. Des personnes qui s’y trouvaient criaient : « Vive Napoléon ! À bas Thiers ! Vive ta France ! Merde pour Thiers ! » Ces cris ont été poussés à plusieurs reprises par quatre personnes. Ils ont continué jusqu’à l’avant-port. Nous laissâmes approcher l’embarcation et pûmes prévenir notre capitaine. Je remarquai surtout une personne criant. » Mis en présence de l’inculpé, le témoin a reconnu M. de V… pour être la personne la plus animée.

M. de V… fut condamné à trois jours de prison, mais la politique s’en mêlant, il vit plaider sa cause par un certain nombre de journaux, dont pas un n’exprima son dégoût pour le mot.

Dire m… : Insulter, emmerder. — « Moi, si j’étais nommé, je monterais à la tribune et je dirais : Merde !… Oui, pas davantage ; c’est mon opinion.» (Zola.)

MAC, MAQUE, MACQUE, MACCHOUX, MACROTIN : Souteneur, entremetteur. — Le dernier mot est un diminutif de maquereau ; l’avant-dernier est une modification du même mot par changement de finale ; les trois, premiers sont des abréviations. Il y a de plus des synonymes innombrables, rappelant tous le côté ichthyologique du mot. Tels sont barbeau, barbille, barbillon, dauphin, dos vert, dot d’azur, brochet, poisson, etc. Aussi a-t-on été chercher vainement de ce côté l’origine du mot. Le poisson n’y est pour rien ; maquereau est un simple jeu de mot, comme grenouille. Au moyen âge, le mot maque signifiait : vente, métier de marchand. De là sont venus maquerel et maquillon, qui a fait maquignon. Le maquereau n’est autre chose qu’un maquignon de femmes, et pendant tout le moyen âge il s’est appelé maquerel ou maqueriau.

« Le métier de mac n’était guère exercé autrefois que par des voleurs et des mouchards… » (Vidocq.) — « Le macque est le souteneur des filles de la plus basse classe. Presque toujours c’est un repris de justice. » (Canler.)

MACA : Entremetteuse, femme vieillie dans le vice. (Dhautel, 08.) — Même origine que le mot précédent,

MACAIRE : Malfaiteur affectant les dehors d’un homme du monde. Le mot date du drame de l’Auberge des Adrets ; il doit moins sa fortune à Frederick-Lemaître, créateur du rôle de Macaire, qu’aux nombreuses caricatures qui ont fait ensuite de l’assassin Macaire le type du filou cynique. — « Ils se croyaient des Macaires et n’ont été que des filous. » (Luchet.)

MACAIRISME : « Le macairisme, c’est la filouterie érigée en système. » (Boursicotiérisme, 58.)

MACARON : Dénonciation. — Même origine que mac. Celui-ci vend des hommes au lieu de vendre des femmes. — « Dans le nez toujours tu auras macarons et cabestans. » (Vidocq.)

MACARONER : Trahir. (Halbert.)

MAC-FARLANE : Pardessus sans manches, avec grand collet sur le devant. — Anglicanisme. « Ils portent des mac-farlanes. » (Les Étudiants, 60.)

MACHABÉE : « On appelle Machabée tout être, homme ou animal privé de vie, que l’on rencontre flottant sur un cours d’eau ou échoué sur le rivage. » (V. Dufour.) — Faut-il y voir une allusion à la légende populaire des sept Machabées qui périrent tous pour la foi, ou un dérivé du vieux mot macquer : briser, écraser, frapper ? En langue d’oc, on dit macat pour écrasé, brisé. Je n’irai pas chercher d’étymologie dans le grec, mais je ne puis m’empêcher de faire observer que makarios veut dire privée de vie. Le Breton même a mach’an : estropié, mutilé.

MACHABÉE : Juif. — Allusion biblique.

MÂCHER (ne pas le) : Parler sans détour. Mot à mot : sans mâcher les paroles entre ses dents. — « Quand j’ai lieu d’ vous en vouloir. Ah ! n’ayez pas peur que j’ vous l’ mâche ! » (Longchamps, 09.)

MACHIN : Homme ou chose dont on ne se rappelle pas le nom. « Monsieur Machin, pardon ! je ne me rappelle jamais de votre nom. » (H. Monnier.) — Dans la Gabrielle d’E. Augier, l’avoué Chabrière prie sa femme de lui faire « un machin au fromage. » V. Chien.

MACHINE : Œuvre quelconque, œuvre dramatique. — « C’était à Nohant, l’illustre écrivain venait de lire trois actes. L’auditoire semblait hésitant : « Allons, dit l’auteur, il faudra faire une autre machine, » et elle jette le manuscrit au feu. » (E. Lemoine.)

MÂCHOIRE : Suranné. — « L’on arrivait par la filière d’épithètes qui suivent : ci-devant, faux toupet, aile de pigeon, perruque, étrusque, mâchoire, ganache, au dernier degré de la décrépitude, à l’épithète la plus infamante, académicien et membre de l’Institut. » (Th. Gautier, 33.) — « Vieille mâchoire : Personne sans capacité, ignorant, sot. » (Dhautel.)

MADRICE : Malice. (Colombey.)

MADRIN : Malin. (Idem.) — C’est madré, avec changement de finale.

MAGNUSSE : V. Être (en).

MAIL COACH : Voiture attelée à quatre chevaux en poste à grandes guides. (Paz.)

MAIN : Série de coups heureux au baccarat ou au lansquenet. — « Au baccarat, pour gagner, il faut avoir une main. » (Cavaillé.) V. Pharamineux. — On a pris cette expression au figuré, et on dit : il a la main, pour : il obtient une série de succès.

MAIN CHAUDE (jouer à la) : Être guillotiné. V. Raccourcir.

MAINS COURANTES : Pieds. (Rabasse.) Jeu de mots commercial.

MAISON (être en) : Faire partie d’une maison de tolérance.

MAISON (fille, femme, maîtresse de) : Habitante ou propriétaire d’une maison de tolérance. Le mot est plus vieux qu’on ne croirait. Un petit livre intitulé la Revue de l’an VIII, contient une description des filles qui se promenaient au Palais-Royal : « Leurs bas de soie à coins brodés que la dame de maison, c’est le mot technique (sic), avait lavés le matin, se dessinaient sur un mollet arrondi. »

MAJOR DE TABLE D’HÔTE : Officier de contrebande, portant un grade et des croix qui ne lui ont jamais appartenu. — « Laissez-moi donc tranquille, s’écria une espèce de major de table d’hôte. » (G. Vassy, 75.)

MAJOR : « Le chirurgien, le tambour-major, le sergent-major sont dénommés indistinctement majors. » (Louis Huart.)

MAKACH : Formule négative originaire d’Algérie. « Les Mauresques ont des costumes adorables. Quant à leurs figures, makach !… Incognito complet. » (Loriot.) — «  Tu trouveras des concombres. Quant aux poires, makach ! comme dit l’Arabe. » (A. Lecomte, 61.)

MAL (faire) : Faire pitié. — « Qu’on vienne baiser son vainqueur ! — Comme tu me fais mal. » (Gavarni.)

MALADE : Prisonnier. V. Maladie.

MALADE (être) : Être fautif. (Rabasse.)

MALADE DU POUCE : Fainéant dont la paresse constitue la seule infirmité.

MALADE DU POUCE : Avare. — Cet exemple explique l’allusion : « Il est malade du pouce. Ça empêche les ronds de glisser. » (Monselet.) V. Rond.

MALADIE : Emprisonnements (Vidocq.)

MAL BLANCHI : Nègre. — « Va donc, mal blanchi, avec ta figure de réglisse. » (Bourget.)

MALHEUREUX : Trompé par sa femme. — « S’il est malheureux dans son intérieur, il le sait, tandis qu’à Paris un employé peut n’en rien savoir. » (Balzac, 41.)

MALINGRER : Souffrir. (Vidocq.) — Malingre se dit encore pour souffreteux.

MAL PEIGNÉE : « Pour le moment, c’est sous cette épithète que l’on désigne une courtisane (nous avons pour ces dames un vocabulaire qui menace de devenir par trop volumineux). » (P. de Kock, 65.) — Allusion aux chevelures hérissées, dont la mode commença vers 1865.

MALTAIRE : Louis d’or. (Halbert.) — Pour maltaise.

MALTAIS : Café-restaurant de bas étage. — Cabaretier. — Beaucoup de Maltais exercent cette profession en Algérie.

MALTAISE : Pièce d’or. (Colombey.)

MALTOUZE : Contrebande. V. Pasquiner.

MALTOUZIER : Contrebandier.

MANCHE (faire la) : Faire la quête. — « La fille du barde fait la manche. Elle promène sa sébille de fer blanc devant les spectateurs. » (H. Monnier.)

MANCHE DE VESTE (jambe en) : Arquée comme une manche d’habit. — « Mosieur Belassis, moi j’ai pas des jambes en manches de veste. » (Gavarni.)

MANCHE À (être) : Avoir fait autant de progrès qu’un adversaire. Mot à mot : être manche à manche. — Terme de whist. — « Ça nous met manche à manche. À quand la belle ? » (E. Sue.)

MANDOLET : Pistolet. (Halbert.)

MANETTE (Mlle ) : Malle. (Vidocq.) Jeu de mots sur manne (malle) et sur le nom propre.

MANGER : Avouer. (Grandval.) — « Paumé, tu ne mangeras dans le taffe du gerbement. » (Vidocq.) — « François a mangé sur vous. » (Canter.)

MANGER DU FROMAGE : Aller à l’enterrement. — Allusion à l’usage populaire à Paris de collationner chez le marchand de vins au retour du cimetière. — « Aux gens qui ne manquent pas d’aller faire un repas toujours fortement arrosé en revenant du cimetière. Ce qu’on appelle vulgairement manger du fromage. » (P. Moniteur, 75.)

C’est surtout au mangeur de fromage que s’applique la définition précédente, car si manger du fromage n’entraîne pas l’idée d’un excès, mangeur de fromage se dit de l’homme qui le commet volontiers.

MANGER LE MORCEAU : Dénoncer : « Le morceau tu ne mangeras, de crainte de tomber au plan. » (Vidocq.)

MANGER DE CE PAIN-LÀ (ne pas) : Refuser des moyens d’existence dont la source ne paraît pas honorable. « Moi, que j’dis, merci, je n’ mange pas de ce pain-là ! » (H. Monnier.)

MANGER DU PAIN ROUGE : Vivre du produit d’un assassinat.

MANGER LA SOUPE AVEC UN SABRE : Avoir une grande bouche. — Ironie. « Une bouche grande à faire croire que le prévenu mange la soupe avec un sabre (style de régiment). » (Courrier de l’Ouest, 72.)

MANGER SUR L’ORGUE : Dénoncer. (Vidocq.) L’orgue complète ici l’allusion, car l’orgue est un instrument de musique. V. Musique.

MANGER SON NIÈRE : Dénoncer son complice. (Rabasse.)

MANGERAIT (on en) : Appétissant. — Se dit de tout ce qui peut éveiller la tentation, ailleurs que dans le monde comestible.

Le crevé murmurait ces mots tout en marchant :
Quelle taille ! quels pieds !! quels cheveux en forêt !!!
Elle tranquillement dit : On en mangerait.
(Alm. des p. crevés, 68.)

MANGEUR : Dissipateur.

MANGEUR DE BLANC : Homme vivant de la prostitution. (Dhautel.) — « Le mangeur de blanc se fait donner des appointements fixes par ses maîtresses. » (Almanach du Débiteur.)

MANGEUR DE BON DIEU, Mangeur de messes : Dévot. Allusion au symbole de l’hostie. — « Quittez vos tanières, antiques comtesses, mangeuses de messes. » (Départ de la Cour, 30.)

MANGEUR DE GALETTE : Délateur vivant de dénonciations. (Colombey.) Galette est ici une variante de morceau. — C’est aussi un fonctionnaire vénal, selon Vidocq.

MANIÈRE (1re, 2e, 3e ) : Se dit de manières de faire en rapport avec l’âge, le talent ou les calculs d’un individu. — « Faustine en était encore au désintéressement, sa première manière, ainsi qu’elle disait elle-même en empruntant le langage des artistes. » (A. Achard.)

MANIÈRES : Airs d’importance. — « Ça fait des manières et ça a dansé dans les chœurs… » (Gavarni.)

MANILLE : Anneau de forçat. V. Guirlande, Martinet.

MANIVAL : Charbonnier. (51, Almanach des Débiteurs.)

MANNEQUIN : Homme ou femme méprisable. — « Va donc, mann’quin d’marchand de vin ; va-t’en donc avec tous tes vieux lapins… » (Catéchisme poissard, 44.)

MANESTRINGUE, MANNEZINGUE, MINZINGUIN : Marchand de vin. — Les trois mots doivent être des formes adoucies de mannetrinque, et mannetrinque paraît la forme intervertie de l’allemand trinckmann : l’homme du boire, chez lequel on boit. « Quel est celui-là ?... Un ami, un vrai marchand de vin… — Un mannezing ? » (G. Bourdin.) — « Le roi est un bon zigue, qui protège les minzinguins. » (Cabassol.)

MANON : Prostituée. (Rabasse.) — Abréviation de Manon Lescaut (?).

MANQUILLER : Faire. (Halbert.) Pour maquiller.

MANQUE (affaire à la) : Mauvaise affaire.

MANQUESSE : Mauvaise note. — « Le quart d’œil de Rochefort nous a rafilé la manquesse. » (Rabasse.)

MAQUE : V. Mac.

MAQUI (mettre du) : Se mettre du rouge. (Grandval.)

MAQUILLAGE : Travail. V. Roulant.

MAQUILLAGE : Action de se farder, mettre du maqui — « Le maquillage est une des nécessités de l’art du comédien. » (J. Duflot)

MAQUILLAGE : « Le maquillage est l’artifice au moyen duquel le grec reconnaît les cartes. Dans le Midi, cette filouterie s’appelle la musique. » (Cavaillé.)

MAQUILLE : Procédé employé pour le maquillage des grecs. « La plupart des maquilles servent à tous les jeux. » (Cavaillé.)

MAQUILLÉE : Femme ridiculement fardée. — « Dans certains théâtres on voit de jeunes aspirantes qui se font des yeux jusqu’aux oreilles et des veines d’azur du corset jusqu’aux tempes ; ce ne sont pas des femmes, ce sont des pastels. Cette première catégorie de grues s’appelle les maquillées. » (J. Duflot, Dict. des Coulisses.)

MAQUILLER : Farder. — « J’espère qu’en voilà une qui se maquille ! murmure Thélénie à une de ses voisines… » (Paul de Kock.)

MAQUILLER : Agir, machiner, travailler. — « C’est par trop longtemps boire ; il est, vous le savez, heure de maquiller. » (Grandval, 1723.) V. Mac, Mentir.

Maquiller un suage : Se charger d’un assassinat.

Maquiller son truc : Faire sa manœuvre.

Maquiller une cambriolle : Dévaliser une chambre.

Maquiller les brèmes : Jouer aux cartes.

MAQUILLER : Chicaner, battre. (Halbert.)

MAQUILLER (se) : Se déguiser. (Rabasse.)

MAQUILLEUR : Joueur de cartes. — « Par cent coups contre toi, les maquilleurs s’amassent, mais, bientôt nettoyés, autour de toi croassent. » (Alyge.)

MAR : Désinence arbitraire, de la même famille que rama dont elle paraît être l’anagramme. V. Aille. — « On se bornait (vers 1840), à retrancher la dernière consonnance pour y substituer la syllabe mar. On disait épicemar pour épicier, boulangemar pour boulanger, cafemar pour café, et ainsi de suite. C’était de l’esprit dans ce temps-là. » (Pr. d’Anglemont.) — « Méfie-toi… Le jeune épicemar est très-fort au billard et au piquet » (Champfleury.)

MARCANDIER : Celui qui dit avoir été volé. (Grandval.)

MARCASSIN : « Le marcassin est le rapin du peintre d’enseignes. » (E. Bourget, 46.)

MARCHAND D’HOMMES : Agent de remplacement militaire. — « D’un marchand d’hommes, je vois l’enseigne. » (Léonard.)

MARCHAND DE LACETS : Gendarme. — Allusion aux menottes qu’il tient en réserve. V. Hussard de la guillotine.

MARCHAND DE SOUPE : Maître de pension spéculant sur la nourriture de ses élèves. — « Style universitaire : Les marchands de soupe doivent être bien fiers. » (L. Reybaud.)

MARCHANDISE : Excrément. — Allusion au commerce de la vidange.

Y s’ roul’ dans la marchandise,
Qué cochon d’enfant !
(Colmance.)

MARCHE À TERRE : Fantassin. — « Quand tu étais dans la cavalerie, tu n’étais pas dans les marche à terre. » (Vidal, 33.)

MARCHER, MARCHER AU PAS (faire) : Contraindre à obéir. — « Empereur Nicolas, les Français et Anglais te feront marcher au pas. » (Layale, 55.)

MARCHER, MARCHER TOUT SEUL : Se dit du fromage et des aliments corrompus. Le mot fait supposer que les vers grouillent assez pour donner à un objet matériel une sorte de vie, au figuré, pour le faire marcher. — Dans le même ordre d’idées, cela danse indique le plus haut degré de la décomposition.

MARCHER DESSUS : Travailler une affaire, préparer un vol. (Rabasse.)

MARCHEUSE : « La marcheuse est un rat d’une grande beauté que sa mère, fausse ou vraie, a vendu le jour où elle n’a pu devenir ni 1er, ni 2e, ni 3e sujet de la danse, et où elle a préféré l’état de coryphée à tout autre par la grande raison qu’après l’emploi de sa jeunesse, elle n’en pouvait pas prendre d’autre. » (Balzac.)

MARCHEUSE : « Un simple bonnet la coiffe ; sa robe est d’une couleur foncée et un tablier blanc complète ce costume. Les fonctions de la marcheuse sont d’appeler les passants à voix basse, de les engager à monter dans la maison qu’elle représente, où, d’après ses annonces banales, ils doivent trouver un choix exquis de jeunes personnes. » (Béraud.)

Autrefois le rôle de la marcheuse était plus nomade. — « Enfin arrivent les marcheuses. Elles marchent pour les filles demeurant en hôtel garni ; celles-ci n’ont qu’une chaussure et un jupon blanc. Faut-il qu’elles exposent dans les boues leur unique habillement, la marcheuse affrontera pour elles les chemins fangeux. » (1783, Mercier.)

MARE (terminaison en) : V. Mar, Aille.

MARÉCAGEUX (œil) : Œil langoureux, à demi noyé, d’où cette humide allusion,

Mais que tu danses bien la galope,
Avec ton œil marécageux !
(Chanson populaire.)

MARGAUDER : Décrier la marchandise. — « Madame trouve moyen de margauder. » (La Correctionnelle.)

MARGOT, MARGOTON : Fille de mauvaise vie. — Diminutif de Marguerite. — « Nom fort injurieux donné à une courtisane, à une femme de mauvaise vie. » (Dhautel, 08.) — « Nous le tenons. Nous savons où demeure sa margot. » (E. Sue.)

MARGOULETTE : Bouche. Pour gargoulette. — « Tu ne sortiras pas d’ici sans avoir la margoulette en compote. » (Vadé, 1756.)

MARGOULIN : Débitant, dans la langue des commis-voyageurs. — « Parfois le margoulin est fin matois. » (Bourget.)

MARGUINCHON : C’est Margot avec changement de finale. Même signification. — « Entends-tu, Marie-Couche-toi-là, la marguinchon de tous les goujats. » (Catéchisme poissard, 40.)

MARIAGE À L’ANGLAISE : Mariage après lequel chacun vit de son côté. — « Après une lune de miel fugitive, M. de L…, reprit ses habitudes de garçon. N’avait-il pas fait ce que l’on appelle un mariage à l’anglaise ? » (E. Villars.)

MARIN DE LA VIERGE MARIE : Marinier d’eau douce. — « Ce sont les carapatas ou marins de la vierge Marie, ainsi nommés parce qu’ils ne courent jamais aucun danger, race amphibie qui ne vit que sur les canaux. » (Privat d’Anglemont.)

MARINGOTTE : Grande voiture de famille de saltimbanques. — « C’était une des deux grandes voitures nommées maringottes servant à la caravane en voyage. » (O. Féré.)

MARIOL : Malin. (Grandval.) — « Si c’est un mariol, on emploie le surin, et on joue des jambes. » (Colombey.)

MARIVAUDER : Se complaire dans les détails ; défaut reproché aux écrits de Marivaux. — « Allons un peu plus vite, tu marivaudes. » (Balzac.) — L’action de marivauder s’appelle du marivaudage.

MARLOU, MARLOUSIER : Souteneur. — C’est le vieux mot marlier (sacristain), avec changement de finale. Les souteneurs étaient autrefois appelés sacristains. — « Un marlou, c’est un beau jeune homme, solide, sachant tirer la savate, se mettant fort bien, dansant le chahu et le cancan avec élégance, aimable auprès des filles dévouées au culte de Vénus, les soutenant dans les dangers imminents. » (50 mille voleurs de plus à Paris, 30.) — L’optimisme ironique de la facétie que nous venons de citer n’est rien à côté de la citation suivante : — « La plus sublime de ces positions c’est celle du marlou. Qu’on me pardonne le mot ; les plus prudes femmes ne craindraient pas de le lire s’il était vieux de deux siècles, s’il chatoyait en style suranné à côté de Ribaudes et de Ribeliers qui ne veulent pas dire autre chose. » (Fr. Soulié, 35.)

MARLOU : « Par extension, on appelle marlou tout homme peu délicat avec les femmes, et même tout homme qui a mauvais genre. » (Cadol.)

MARLOU (c’est un) : C’est un malin. (Rabasse.)

MARLOUSERIE : Malice. (Colombey.)

MARMIER : Berger. (Idem.) Vieux mot.

MARMITE : Fille publique nourrissant un souteneur. — L’allusion se comprend. — « Un souteneur sans sa marmite, est un ouvrier sans ouvrage. » (Canler.)

La Marmite de terre est une prostituée ne gagnant pas d’argent à son souteneur. — La Marmite de fer gagne un peu. — La Marmite de cuivre rapporte beaucoup. (Halbert.)

MARMOT (croquer le) : Être dans la situation d’un homme qui ne voit pas arriver ce qu’il attend. — Croquer le marmot n’est qu’un équivalent de marmotter, comme le prouve cet exemple : « Marmonnant de la langue : mon ! mon ! mon ! comme un marmot. » (Rabelais, Pantagruel, L. IV, ch. XV.)

On a, comme cela se produit souvent, pris l’effet pour la cause. V. Marronner.

MARMOT (Nourrir le) : Préparer un vol. (Rabasse.)

MARMOTTIER : Savoyard. (Colombey.) — Mot à mot : montreur de marmottes.

MARMOUSE : Barbe. (Halbert.)

MARMOUSET : Pot, marmite. (Idem.)

MARNER : Se livrer à un travail pénible. (Vidocq.) Abrév. de marronner : murmurer.

MARNER : Voler. — Du vieux mot marronner : pirater. — « Il y a des cambrioleuses très-habiles, qui, feignant une erreur, s’élancent dans les bras du voyageur qu’elles veulent marner : « C’est toi, mon loulou, s’écrient-elles, viens donc que je t’embrasse ! » On prétend que ces donneuses de bonjour sont rarement mises à la porte. » (A, Monnier.)

MARON : Sel. (Grandval.) V. Muron.

MAROTTIER : Marchand ambulant.

MARQUANT : Ivrogne. (Petit Dictionnaire d’argot, 44.)

MARQUANT : Souteneur. (Halbert.) Mot à mot : homme de la marque. V. ci-dessous.

MARQUE : Prostituée. (Halbert.)

MARQUE (vol à la) : C’est une variété du vol au papillon (blanchisseur). Une voiture de blanchisseur stationne, et un compère s’en approche et tâche de reconnaître la marque des paquets déposés sur le devant de la voiture. Puis son complice vient les demander de la part du patron. (Rabasse.)

MARQUE DE CÉ : Femme légitime de voleur. (Colombey.) Mot à mot : femme d’argent. V. .

MARQUE FRANCHE, MARQUISE : Maîtresse de voleur. (Idem.) V. Marque.

MARQUÉ : Mois. (Rabasse.)

MARQUER MAL : Se faire remarquer sous de mauvais rapports.

MARQUET : Mois. — « Pour une méchante paire de trottines je vais payer sur le pré au Dabe court toujours treize marquets et j’ai déjà fait pas mal de plan de couillé. » (Journal man. d’un prisonnier de Mazas.)

MARQUIN : Couvre-chef. (Halbert.)

MARQUISE : Breuvage composé de vin blanc, d’eau de Seltz, de sucre et de citron.

MARQUISE : V. Marque franche.

MARRON : En flagrant délit de vol ou de crime. — Du vieux mot marronner : faire le métier de pirate, de corsaire.

Paumer marron, servir marron : Prendre sur le fait. — « J’ai été paumé marron. » (La Correctionnelle.) V. Servir, Estourbir, Raille.

MARRON : En contravention. — « Le cocher marron est un cocher mal vêtu, mal chaussé, ayant mauvaise mine, conduisant une mauvaise voiture et un mauvais cheval. » (P. du Terrail.)

MARRONNER : Bouder, murmurer. — Du vieux mot marmonner. — « Tu pourras marmonner tout bas : Ah ! couyon, tu ne me tiens pas. » (La Berne Mazarine, 1654.) — « J’peuxpas voir ça, moi ! je marronne tout haut. » (Cogniard, 31.) V. Lâcher, Marmot.

MARRONNER UN GRINCHISSAGE : Manquer un vol. (Colombey.)

MARSEILLAISE : Pipe courte et poreuse fabriquée à Marseille. « Et tout en parlant ainsi, il chargeait et allumait sa marseillaise. » (Luchet.)

MARTEAU (avoir un coup de) : V. Toqué.

MARTINET : « Fer de correction au bagne. Cet instrument répressif qui tient captive la jambe du forçat, a une trempe plus forte que celle de l’acier. » (Moreau Christophe, 37.)

MASQUER EN ALEZAN : « Les maquignons dissimulent un vilain cheval sous une couche de peinture qui tombe au premier lavage ; ils nomment ce système de teinture masqué en alezan. » (Rabasse.)

MASSER : Travailler. (Rabasse.)

MASTAR AU GRAS DOUBLE (faire la) : Voler du plomb sur les toitures en se faisant passer pour ouvrier plombier envoyé par l’architecte. (Rabasse.)

MASTAROUFLEUR : Voleur de plomb. (Rabasse.)

MASTIC : Tromperie, mystification. — « De dimanche, nous commencerons à donner la liste de toutes les ignominies que nous offrirons aux crétins qui nous honorent de leur confiance… Quel mastic ! » (Commerson, 75.)

MASTROC : Marchand de vin. (Rabasse.) Abréviation de mastroquet.

MASTROQUET : Marchand de vin. — Mot à mot : l’homme du demi-setier. De demi-stroc : demi-setier. — « Le cocher avale vivement son mêlé-cassis et sort de chez le mastroquet. » (Sauger.) V. Corne.

MATCH : « Pari entre deux chevaux pour une distance convenue. » (Paz.)

MATELOT : « Tous deux amis et se nommant mutuellement mon matelot : ce qui est le plus grand terme d’affection connu sur le grand gaillard d’avant. » (Phys. du Matelot, 43.)

MATHURINS : Dominos. (Halbert.) — Abréviation de mathurins plats. Allusion au costume des moines dit Mathurins qui, avec leur robe blanche et leur manteau noir, paraissaient avoir le revers noir et la face blanche, comme les dominos.

MATIGNON : Messager. (Halbert.)

MÂTIN, MÂTINE : Personne déterminée, brusque, aussi peu commode que le chien de garde dit mâtin. — « Kléber, un grand mâtin qu’a descendu la garde, assassiné par un Égyptien. » (Balzac.) — « Ah ! mâtine de Turquie. » (Remy, Ch., 54.)

MATRIMONIUM : Mariage. — Latinisme.

MATURBES : Dés à jouer. (Grandval.) — C’est mathurin avec changement de finale.

MAUGRÉE : Directeur de prison. (Halbert.) — Il maugrée par état.

MAUVAISE (elle est) : Cette plaisanterie n’est pas bonne : Ce procédé est mauvais. — On dit aussi : Je la trouve mauvaise. — « Avouez, mesdames, que vous ne vous attendiez pas à celle-là, et que vous vous dites peut-être : Je la trouve mauvaise. » (Villars.)

MAUVE : Parapluie rougeâtre. — « Sa forme conserve une certaine ressemblance avec la feuille de mauve, ce qui lui a fait récemment donner le nom de cette plante. La mauve est toujours en coton rouge ou vert. » (Phys. du parapluie, 41.)

MAYEUX : Bossu. — Mayeux est une forme du vieux nom Mahieu (Mathieu). Vers 1830, les caricatures populaires de Travies donnèrent ce nom à un bossu, type d’homme ridiculement contrefait, vaniteux et libertin, mais brave et spirituel à ses heures. De là son nom donné à ceux qu’afflige la même infirmité. — « Ici d’affreux petits mayeux. » (De Banville.)

MAZARO : Prison militaire, à ne pas confondre avec la salle de police (ours). Dans celle-ci, on passe seulement la nuit sur une paillasse ; dans l’autre on reste jour et nuit sur la planche. — « Mon ami, c’est le trou, le clou, le mazaro, la salle de police. » (Commentaires de Loriot.)

MAZAGRAN : Café servi dans un verre.

MEA CULPA (faire son) : Confesser sa faute. — Latinisme. — « Il leur faudra faire leur mea culpa de cette fameuse démarche du 20 juin. » (Moniteur, juillet 72.)

MEC : Maître, chef, patron, souteneur. — De Mège. V. ce mot.

Mec des mecs : Dieu. (Vidocq.) C’est-à-dire chef des chefs. V. Rebâtir.

Mec des mecs : Individu redouté. — (Rabasse.)

MÉCANISER : Vexer, critiquer. — « Canalis regarda fixement Dumay qui se trouva, selon l’expression soldatesque, entièrement mécanisé. » (Balzac.) — « Ne vous avisez pas de mécaniser son ouvrage, car alors, qui que vous soyez, il ne vous resterait plus qu’à numéroter vos os. » (Moisand, 41.)

MÉCHANT (pas) : On dit d’une toilette mesquine, d’un homme inepte, d’un livre sans valeur : Ça n’est pas méchant, ça ne mord pas ! — « Achetez un caloquet plus méchant, votre tuyau de poêle n’est pas trop rup. » (L. de Neuville,)

MÈCHE (il y a) : Il y a moyen d’arriver, il y a possibilité de faire. Mot à mot : on peut allumer l’affaire : — « Lorsque les ouvriers proposent leurs services au prote de l’imprimerie, ils demandent s’il y a mèche, c’est-à-dire si on peut les occuper. » (Dhautel, 1808.) — « Il voudrait en garder un pour la montre, mais il n’y a pas mèche. » (Rienzi.)

Être de mèche : Être de moitié. (Vidocq.)

Six plombes et mèche : Six heures et demie.

MÉCHI : Malheur. (Vidocq.) — Abréviation du vieux mot méchief.

MECQUE : Homme. — Pour meg. — « T’as refroidi au moins un mecque. » (Stamir.)

Mecque à la colle forte : Voleur redoutable. (Idem.) Mot à mot : Voleur dont on se débarrasse difficilement. V. Meg des megs.

MÉDAILLE : Pièce d’or. — « La jolie voix ! dit Schaunard en faisant chanter les pièces d’or. Comme c’est joli, ces médailles ! » (Mürger.)

MÉDAILLON : Derrière. (Vidocq.) Allusion de rondeur.

MÉDECIN : Avocat. (Vidocq.) — Il soigne les malades. V. ce mot.

MÉDECINE : Conseil. Même allusion.

MEDIUM : Homme qui prétend servir d’intermédiaire entre ses semblables et certains esprits invisibles. — Ses évocations sont désignées aussi par un adjectif nouveau : médianimique. — « C’est un sultan qui n’a qu’à jeter un mouchoir, un médium qui fascine les dames. » (P. de Kock, 65.)

MEG : Maître, Dieu. V. Chique. Du vieux mot Mège, chef souverain. « L’abbé : Au nom du Père. — Coutandier : Du ?… Ah ! du meg. » (Dernier jour d’un condamné.)

MÉGO : Boni, excédant de la recette sur la dépense. — « Quand il y a du mégo, je le mets dans un tirelire. » (P. de Kock, 40.)

MÉGOT : Bout de cigare. (Rabasse.) C’est un mégo pour celui qui le ramasse.

MÊLÉ : Mélange d’eau-de-vie et de liqueur. — « Aimez-vous l’eau-de-vie ? Dame ! on vend ytout du mêlé. » (Vadé, 1755.) V. Noir.

MELET, MELETTE : Petit, petite. (Halbert.)

MÉLO : Mélodrame. — Abréviation. — « La soirée d’hier a été mortellement ennuyeuse ; le bon gros mélo a fait son temps. » (Paris-Journal, août 72.)

MELON : Élève de première année à l’École Saint-Cyr. — « Me brimer, moi, malheureux melon. » (Souvenirs de Saint-Cyr.)

MELON : Imbécile. — « Vous êtes si melons, à Châtellerault. » (Labiche.)

MENDIGO (faire au) : Contrefaire le mendiant. C’est mendiant soumis au procédé en go. V. ce mot. — « Cette classe importante compte une foule de types : la fausse veuve avec enfant, le faux martyr politique, le mendiant à domicile, le faux épileptique, le faux ouvrier sans travail, le faux mari dont la femme se meurt faute d’argent pour un remède, etc., etc. » (Rabasse.)

MENÉE : Douzaine. (Grandval.)

MENER PAS LARGE (n’en) : Être mal à son aise. — « Quel rugissement ! Nous n’en menions pas large, je t’assure. » (Loriot.)

MENESSE : Prostituée, maîtresse. (Halbert.)

MENESTRE : Potage. — Vieux mot.

MENTEUSE : Langue. (Vidocq.)

MÉPHISTO : Diabolique. — Abréviation de Méphistophélétique qui a paru trop long.

MÉQUARD : Commandant. (Vidocq.) — Augmentatif de mec : maître.

MÉQUER : Commander. (Idem.)

MERCADET : Faiseur. — De la pièce de Balzac, Mercadet le faiseur. — « À une époque où la fièvre du bibelot sévit, il est bon de connaître les ficelles des Mercadets. » (Frébault.)

MERDE (faire sa) : Faire l’important. V. M…

MERDEUX : « Terme injurieux, qui se dit d’un poltron, d’un fat sans esprit. » (Dhautel, 08.) Se prend plutôt dans le sens de « individu sans valeur. » V. Bâton.

MÈRE : Aubergiste recevant des compagnons. — « Lorsqu’un compagnon va au siège de la société, il dit : Je vais chez la mère. Si l’aubergiste chez lequel se tiennent les réunions n’était pas marié, on dirait de même : Je vais chez la mère. » (Perdiguier.)

MERLAN : « Sobriquet donné à un perruquier à cause de la poudre qui couvre ordinairement ses habits. » (Dhautel.) — « La Peyronie est chef des perruquiers qu’on appelle merlans parce qu’ils sont blancs. » (Journal de Barbier, 1744. )

MERLAN FRIT (œil de) : Œil pâmé. — « Enfin cet homme de brelan a les yeux faits comme un merlan. » (Troisième Suite du Parlement burlesque, 1652.)

MERLANDER : Coiffer.

MERLIN : Jambe. — Allusion à la hache dite merlin. Le fer figure le pied, et le manche est un vrai fumeron.

I veut se r’lever, mais j’ le redouille
A coups d’ passifs dans les merlins.
(Chanson de Fanfan le Bâtonniste.)

MERLOUSSIER, MERLOUSSIÈRE : Rusé, rusée. (Colombey.) — Pour marlou.

MERRIFLAUTÉ : Chaudement vêtu. (Halbert.)

MÉRUCHÉ, MÉRUCHON : Poêle, poêlon.

MERVEILLEUX : Homme à la mode. — Théophile Gautier a laissé ce superbe portrait du merveilleux de 1833 : « À l’avant-scène se prélassait un jeune merveilleux agitant avec nonchalance un binocle d’or émaillé. Un habit de coupe singulière, hardiment débraillé et doublé de velours, laissait voir un gilet d’une couleur éclatante et taillé en manière de pourpoint, un pantalon noir, collant, dessinait exactement ses hanches ; une chaîne d’or pareille à un ordre de chevalerie chatoyait sur sa poitrine ; sa tête sortait immédiatement de sa cravate de satin sans le liséré blanc de rigueur à cette époque : on aurait dit un portrait de François Porbus. Les cheveux rasés à la Henri III, la barbe en éventail, les sourcils troussés vers la tempe, la main longue et blanche, avec une large chevalière ornée à la gothique, rien n’y manquait ; l’illusion était des plus complètes. »

MESIGO : Moi. (Colombey.)

MESS : Cercle d’officiers. — « Les officiers mangent par corps en mess. » (Vie parisienne, août 67.) — Bien que le mot soit d’importation britannique, il est plus français qu’on ne pense, et il en est de lui comme de tunnel, qui n’est pas autre chose que notre mot tonnelle. Ainsi le grand glossaire de Du Cange donne prendre metz avec le sens de manger ensemble. Il cite même une lettre de rémission de l’an 1443, mentionnant des compagnons associés pour prendre metz pendant les travaux de la moisson.

MESSE DU DIABLE : Interrogatoire subi par un accusé. (Rabasse.)

MESSIERS (les) : Les habitants. (Rabasse.) Ce doit être une forme de Mézière.

MESSIÈRE : Une victime. (Rabasse.) Forme de Mézière.

METAL : Argent. — « Et t’as pas de métal. » (Ricard.)

MÉTIER : Habileté d’exécution. — « Vois toutes ces esquisses : il y a de la main, du métier mais où est l’idée ? » (L. Reybaud.)

Faire du métier : Travailler dans le seul but de gagner de l’argent, sans tenir à la gloire.

METTRE À QUELQU’UN (le) : En faire accroire, tromper. — « Du reste, c’est un flanche. Vous voulez me le mettre… Je la connais. » (Le dernier jour d’un condamné.)

METTRE À TABLE (se) : Dénoncer. — On se met à table pour manger. V. Table, manger.

METTRE AVEC (se) : Vivre maritalement. — « En se mettant avec Lise, le général aurait dû nous dire : J’ai ça et ça à payer ; il ne l’a pas dit, et ce n’est pas délicat. » (Ricard.)

METTRE DEDANS : Mettre au violon, à la salle de police. V. Dedans.

METTRE DEDANS : Griser : V. Dedans.

METTRE DEDANS : Tromper. (V. Dedans.)

METTRE LA TÊTE À LA FENÊTRE : Être guillotiné. V. Fenêtre.

MEUBLE : Personne de triste mine. — « Voyez c’vieux crocodile. Ah ! l’beau meuble ! » (Vadé, 1756.) — « Prends garde à toi, vieux meuble, affreuse bohémienne ! » (Les Folles Nuits du Prado, 1854.)

MEULARD : Veau. (Vidocq.) Allusion au mugissement du veau. V. Pavillonner.

MEUNIER : Receleur achetant le plomb volé. (Colombey.)

MEZIÈRE : Homme simple, bon à voler. (Grandval.) V. Regout.

MÉZIÈRE : Acheteur. (Rabasse.)

MEZIÈRE, MEZIGUE : Moi. (Idem.)

MEZZO TERMINE : Terme moyen, compromis. — Italianisme. — « Elle ne s’y refusa pas, et trouva même ce mezzo termine fort commode. » (De Villemessant.)

MICHÉ : Niais. Du nom propre Michel, qui avait jadis ce sens proverbial. V. Mikel. — « Loupat : Le sergent, j’imagine, m’en voudra. La Ramée à part : Le bon miché ! » (Vadé, les Racoleurs.) — « Miché se dit d’un sot qui s’est laissé duper. On le montre au doigt en disant : voilà le miché. C’est un terme bas. Dans Cotgrave, il est défiguré sous le nom de Michon. » (Dict. de Trévoux, 1771.)

MICHÉ : Homme fréquentant et payant les filles. Même étymologîe que ci-dessus :

D’où vient qu’on appelle miché
Quiconque va de nuit et se glisse en cachette
Chez des filles d’amour, Barbe, Rose ou Fanchette ?
(Mérard de Saint-Just, 1764.)

Dans une liste de fausses Protestations des filles de Paris contre la guerre (1790), on lit : « Ce pourfendeur de Mars avait bien affaire aussi de se présenter pour nous enlever nos michés. » — « Les jeunes gens dont ces dames font leurs amants de cœur, et que certaines susceptibilités des michés empêchent d’avoir un facile accès. » (Vermorel, Ces dames.)

MICHÉ DE CARTON : Amant peu généreux ou peu fortuné. — V. Carton

MICHÉ SÉRIEUX : Amant riche et généreux. — « Le miché sérieux équivaut à l’entreteneur… Les jeunes gens se disent souvent, comme un mot d’ordre : Messieurs, ne parle pas à la petite une telle, elle est ici avec son miché sérieux. Le même individu se désigne aussi par ce mot : Ponteur. Ce dernier mot, pris dans le vocabulaire des jeux, vient du verbe ponter. » (Cadol.) — « Les avant-scènes sont réservées aux michés sérieux. » (Petits mystères de l’École lyrique.) — « Et toute cette succession de michets sérieux défile sous les yeux de Claridon. » (Droits de l’homme, 3 avril 76.) V. Persiller.

MICHETON : Petit miché. — « All’ me dit : « Mon fiston, étrenne ma tirelire. » Je lui réponds : « Ma poule, tu m’ prends pour un mich’ton. » (Le Bâtonniste à la Halle, 13.)

MICHON : Argent. (Halbert.)

MIDI (il est) : Il n’est plus temps. Date du temps où midi était l’heure du repas, celle où cessait toute affaire.

MIE DE PAIN : Vermine. (Vidocq.) — Allusion à la démangeaison causée par une mie de pain égarée.

MIETTE (une) : Un peu. — « Minute ! je me chauffe les pattes une miette. » (Gavarni.)

MIGNON : Maîtresse. « Un commencement de jalousie me prend et je fais sortir mon mignon de la maison. » (Beauvillier.)

MIKEL : Miché, dupe. (Vidocq.) — C’est le nom de Michel. V. Miché.

MILIEU : Derrière. — « L’arme de Pourceaugnac convient à nos grands hommes. Elle atteint ce milieu, leur amour et leur but. » (Nugent, Étrennes à Lobau, 33.)

MILLIARD : Gueux porte-bissac. (Grandval.)

MILLERIE : Loterie. (Halbert.)

MILORD : On donne moins ce nom aux Anglais qu’à ceux dont les largesses rappellent l’opulence britannique. — « Le gros tailleur se dit négociant. À sa tournure, il n’est pas milord russe. » (Sénéchal, 52.) — « Être sur le boulevard de Gand, se donner un air milord. » (Éd. Lemoine.) — « Je ne suis pas précisément un milord, je n’ai pas des millions. » (Semaine, 47.)

MILORD : Entreteneur. — « Le notaire est son milord. » (Balzac.)

MILORD : « La lorette professe un enthousiasme fébrile pour le cabriolet à quatre roues, dit cabriolet milord. » (Alhoy, 41.)

MINCE : Locution fréquemment employée à Paris et dont il est difficile de rendre un compte exact. Elle semble équivaloir à oui, certes.

Il fait nuit, l’ ciel est opaque
Minc’ que j’ vas poisser d’ l’auber.
(Richepin.)

MINCE : Très-médiocre en n’importe quoi. Mot à mot : de mince valeur. — Abréviation.

MINCE : Papier à lettres. (Vidocq.) — Allusion à son peu d’épaisseur.

MINET, MINETTE : Mot d’amitié. — Synonyme de mon chat, ma chatte. — « Oui, minette, je me calme. » (De Courcy.)

MINEUR : Manceau. (Halbert.)

MINOTAURE, MINOTAURISÉ : Trompé, conjugalement parlant. « Quand une femme est inconséquente, le mari serait, selon moi, minotaurisé. » (Balzac.) V. Dernier de M. de Kock.

MINUIT : Nègre. (Vidocq.) — Allusion de couleur. — Il est noir comme la nuit.

MINZINGUIN : Diminutif de Mannezingue. V. ce mot.

MIOCHE : Bambin. V. Mion.

MION : Bambin. Mion est un vieux mot que mioche reproduit avec changement de finale. — « C’est à moi que reviendra le droit d’être le parrain de tous les mioches. » (Bourget.) V. Dardant.

MION DE BOULE : Filou. (Grandval.)

MIRADOU : Miroir. (Vidocq.)

MIRETTE : Œil (Idem.) — L’œil est un petit miroir.

MIREUR : Observateur. ( Rabasse.) Nous disons encore en ce sens point de mire.

MIRLIFLOR : Élégant à la mode de 1820. V. Œil de verre.

MIROBOLAMMENT : Merveilleusement. — « À meubler mirobolamment sa maison. » (Balzac.)

MIROBOLANT : Merveilleux. — « La cravate mirobolante. » (E. Lemoine.) — « Je me sens d’une incapacité mirobolante. » (Balzac.)

MIROIR À PUTAINS : Garçon d’une beauté vulgaire.

MIRZALE : Boucle d’oreilles. (Vidocq.)

MISELOQUIER, MISELOQUIÈRE : Acteur, actrice. (Vidocq.) Mot à mot : metteur de loques (costumes). V. Misloque.

MISÉRABLE : Petit verre. Il possède moins de liquide que le Monsieur. V. ce mot.

MISERERE : Supplication. Mot à mot : ayez pitié — Latinisme. — « La marchande à la toilette épie le moment où l’entreteneur se trouve là pour recommencer son miserere. » (Almanach du Débiteur, 51.)

MISLOQUE : Comédie. (Vidocq.) V. Miseloquier. — « Je joue la mislocq pour un fanandel en fine pégrenne. » (Balzac.)

Jouer les misloques : Jouer la comédie. (Rabasse.)

MISLOQUEUR : Acteur. (Rabasse.)

MISTON : V. Allumer.

MISTOUFLES (faire des) : Tracasser, peiner quelqu’un. (Rabasse.)

MITAINES (prendre des) : Prendre des précautions. (Rabasse.) — C’est une variante de prendre des gants qui a le même sens.

MITRAILLE : Monnaie de cuivre. Altération du mot mitaille : bronze (M. Âge.)

Si celui-là fait danser ta mitraille,
Tâch’ d’amasser quelques sous en secret.
(Debraux.)

MITRE : Cachot. (Vidocq.) — Au moyen âge, le mitre était le bourreau.

MOBILE : Garde mobile, soldat de la garde mobile (1830, 1848). — Une caricature de Traviès, datée de 1830, représente Mayeux s’échappant du domicile conjugal en criant : « Lâchez-moi, madame Mayeux, je suis de la mobile, n… de D… ! » — « Qui sait comment cela eût fini si la mobile ne s’en fût mêlée ? Brave mobile ! » (L. Reybaud, 1848.)

MOBLOT : Garde mobile (1870-71). — Diminutif de mobile. — « J’ai vu passer un jeune sous-lieutenant de la garde mobile, et derrière lui un simple moblot. » (P. Véron.)

MODERNE : Fashionable. — « J’t’en vas donner du goujat, moderne ! » (Gavarni.)

MOELLE : Énergie. — « On a de la moelle ou on n’en a pas. T’as jamais eu de la moelle pour un décime. » (Monselet)

MOITIÉ (la plus belle) : Le sexe féminin. Mot à mot : la plus belle moitié du genre humain. On abrège aussi en disant la belle moitié. — « Je ne vois pas pourquoi on obligerait la belle moitié à vivre avec l’autre. » (E. Villemot.)

MOINEAU : Homme de mince valeur. — Le moineau n’est pas un aigle. Si ce terme était ancien, l’allusion ne serait plus ornithologique mais monacale. Au moyen âge, le moineau était un petit moine. — « Voilà un beau moigneau pour se f…… des airs de qualité. » (Catéchisme poissard, 40.)

MOKA : Café. — Ce nom de provenance est généralement ironique. — « Il s’achemine ensuite vers son café, y savoure le moka (chicorée pur-sang). » (Phys. du Parapluie, 41.) V. Café.

MOLANCHE : Laine. (Halbert.) Elle est molle au toucher.

MOLLARD : Graillon, expectoration laborieuse. Du vieux mot moller : s’efforcer.

MOLLASSE : Mou. — « Ils sont mollasses. » (J. Arago, 38.)

MOMAQUE, MÔME : Petit enfant. — Du vieux mot momme : grimace, qui a fait momerie ; les petits enfants en font beaucoup. — « Les rats dont nous voulons parler sont des mômes. »(Paillet.)

Taper un môme : Commettre un infanticide. — « Car elle est en prison pour un môme qu’elle a tapé. » (Lettre de Minder. Introduction.)

MOMIÈRE, TIRE-MOMES : Sage-femme.

MOMIGNARD : Petit enfant. Diminutif de môme. — « Elle entre avec un enfant dans un magasin et en faisant semblant de poser son momignard à terre. » (Paillet.) V. Inférieur.

MOMIR : Accoucher. — « Ma largue aboule de momir un momignard d’altèque qu’on trimbalera à la chique à six plombes et mèche, pour que le ratichon maquille son truc de la morgane et de la lance. » (Vidocq.)

MONAC : Sou. — Abréviation de monaco. — « C’est là ce qui estouffe les monacs, aux poches les attache. » (Alyge, 54.)

MONACO : Sou. — Appellation ironique dont il faut chercher la cause dans l’exemple suivant : — « Honoré V ; mort de dépit en 1841, de n’avoir pu faire passer pour deux sous en Europe ses monacos, qui ne valaient qu’un sou. » (Villemot.) V. Coller.

MONANT, MONANTE : Ami, amie. (Vidocq.)

MONARQUE : Roi de cartes. — « Ou si c’est un roi qu’elle relève, elle s’écrie : « Je pince le monarque. » (Alhoy.)

MONARQUE : Pièce de cinq francs. (Grandval.) Allusion à l’effigie royale. — « Il va nous donner quéqu’vieux monarque pour y boire à la santé… » (Gavarni.)

MONNAIE DE SINGE : Grimace. — « Il la payait, comme dit le peuple, en monnaie de singe. » (Balzac.)

MONOCLE : Lorgnon à un œil. — « Adapte donc un monocle à l’arcade de ton œil gauche ! » (Montépin.)

MONSEIGNEUR : Au xviiie siècle, ce mot désigne déjà une petite pince à forcer les portes. V. le Cartouche de Grandval. — Jeu de mots. Quelle est la porte ne s’ouvrant pas devant Monseigneur ? Si, comme l’affirme M. Fr. Michel, on dit aussi Monseigneur le Dauphin, et par abréviation Dauffe, nous voyons encore là un calembour sur le dos fin de la pince qui permet son introduction. — « Le monseigneur est une barre de fer ayant la forme d’une pince à dépaver, mais plus petite (45 de haut, 25 de circonférence). Elle sert au malfaiteur à forcer une porte. On l’introduit près de la serrure, et, avec une pesée, on ouvre sans trop de bruit. » (Rabasse.) V. Caroubleur, Bibi,

MONSIEUR : Entreteneur. V. Amant de cœur. — « En argot de galanterie, le mot d’époux désigne l’entreteneur ; mais il n’est pas le seul. Suivant le degré de distinction d’une femme, elle dit : mon époux, mon homme, mon monsieur, mon vieux, monsieur chose, mon amant, monsieur, ou enfin monsieur un tel. — Sauf dans la haute aristocratie, où l’on dit : Monsieur un tel, ce mot mon époux est général, il se dit dans toutes les classes. » (Cadol.)

MONSIEUR : Mesure de capacité. — « Il existe de plus une certaine eau-de-vie dont le prix varie suivant la grandeur des petits verres. Voici ce que nous lûmes sur une pancarte : Le monsieur, quatre sous ; la demoiselle, deux sous ; le misérable, un sou. » (G. de Nerval.)

MONSIEUR (faire le) : Trancher du maître, du fashionable. — « Sa suffisance le fait haïr, il fait le monsieur. » (Hilpert.)

MONSTRE : Monstrueux. — « J’en ai assez de vos monstres de concerts. » (P. de Kock.) V. Crapaud. — N’est pas toujours pris en mauvaise part. Une femme peut appeler monstre d’homme celui qu’elle adore.

MONSTRE : Colossal, monstrueux de grandeur. — « Elle lui apporte un bouquet monstre. » (Alhoy.)

MONSTRICO : Petit monstre. — « Ce petit monstrico ! » (Balzac.)

MONT : Mont-de-piété. — Abréviation. — « Elle tient comme qui dirait un petit mont bourgeois… elle prête sur gages et moins cher qu’au grand mont. » (E. Sue.)

MONTAGE DE COUP : Action de monter le coup. V. Couper.

Mon vieux, entre nous,
Je n’ coup’ pas du tout
Dans c’ montag’ de coup ;
Faut pas m’ monter l’ coup.
(Aug. Hardy.)

MONTANT, MONTANTE : Pantalon. — Il monte le long des jambes. V. Tirant, Grimpant, Frusques.

MONTANT : Qui excite les désirs. — « La robe la plus montante…, c’est une robe décolletée. » (Decourcelle.)

MONTANTE : Échelle. (Colombey.) — Elle sert à monter.

MONTER : Enflammer, surexciter, enivrer de vin, de colère ou d’amour. — « Vrinette (apercevant Florestan qui la regarde par-dessus le paravent) : Qu’est-ce que vous faites ? Vous montez sur une chaise pour me voir ? Florestan : Oui ! ça me monte !… » (L. de Neuville.)

MONTER À L’ÉCHELLE : Être guillotiné. Mot à mot : monter à l’échelle de l’échafaud. — « Galetto ne veut pas monter à l’échelle seul. « Il faut, aurait-il dit, que Ribetto, qui m’a dénoncé, m’y accompagne. » (Petit Moniteur.)

MONTER LE COUP (se) : Se tromper.

MONTER LE VERRE EN FLEURS (se) : S’illusionner. Mot à mot : mettre sous globe les fleurs de son imagination.

MONTER SUR LA TABLE : Avouer ses crimes et ceux de ses complices. (Vidocq.) — Augmentatif de se mettre à table. V. Table.

MONTER UN ARCAT : Escroquer. V. Arcat.

MONTER UN COUP : Inventer un prétexte, tendre un piège. — « C’est des daims huppés qui veulent monter un coup à un ennemi. » (E. Sue.) — « Je monte plus d’un coup pour vanter l’auteur Dorville. » (Brazier, 17.)

MONTER UN GANDIN : Tromper. V. Gandin.

MONTER UNE GAMME : Gronder. V. Gamme.

MONTER UNE SCIE : Mystifier. V. Scie.

MONTER UNE PARTIE : Réunir quelques artistes pour aller donner hors de Paris une ou deux représentations dramatiques dites d’amateurs.

MONTEUR DE COUPS : Menteur, mystificateur, escroc. — « Je serai le seul monteur de coups à qui tu r’passeras en arrière tes gros sous. » (Festeau.)

MONTEUR DE PARTIE : Artiste dramatique ayant pour spécialité de monter des parties. — « Une femme qui fait beaucoup de frais, voilà le rêve des monteurs de parties. » (P. Mystères de l’école lyrique, 67.)

MONTMORENCY : Cerise. — Du nom de l’endroit où elles sont réputées. — On dit de même Montreuil pour pêche, Fontainebleau pour raisin et Valence pour orange.

MONTRE-TOUT : Veston ne descendant pas plus bas que la taille. Mot à mot : montrant le derrière.

MOQUER COMME DE L’AN 40 (s’en) : Sous-entendu de l’an 40 de la république, c’est-à-dire d’un an qui n’arrivera point. Expression due sans doute aux royalistes de la première Révolution. — « Je m’en moque comme de l’an 40. » (Jaime.)

MORASSE : Ennui, inquiétude. — Avoir la morasse : Être tourmenté. (Rabasse.)

MORASSE (battre) : Crier à l’assassin. (Vidocq.) Mot à mot : à la mort, à l’assassinat.

MORCEAU : Fille sale.

MORCEAU (enlever le) : Être plus mordant que dans ses propos.

MORCEAU (faire le) : Briller dans le détail, artistiquement parlant. — « Bien que Léopold Robert n’eût pas de grandes vues, il faisait très bien le morceau. » (Th. Silvestre.)

MORCEAU (manger le) : Dénoncer. V. Manger.

MORDANTE : Scie, lime. (Rabasse.) — Toutes deux mordent sur le bois et sur le fer.

MORDRE (ne pas) : Être sans force, sans esprit, sans talent. On dit aussi : Ça ne mord pas pour exprimer l’impossibilité de faire croire ce qu’on dit ou d’emmancher une affaire. Expression empruntée aux pêcheurs à la ligne.

MORFE : Repas, mangeaille. (Halbert.)

MORFIANTE : Assiette. (Grandval.) — De morfier.

MORFIER, MORFIGNER, MORFILER : Faire, manger. — Morfier est un vieux mot d’où les deux autres dérivent. — « Calvi morfile sa dernière bouchée. » (Balzac.) V. Chêne.

MORGANE : Sel. (Vidocq.) — De Morganer. Le sel est un mordant. V. Momir.

MORGANER : Mordre. (Idem.) — Vieux mot.

MORICAUD : Broc de vin. (Vidocq.) — Allusion à sa couleur sombre.

MORILLO : Chapeau à petits bords. — « C’était le temps de la lutte de l’Amérique méridionale contre le roi d’Espagne, de Bolivar contre Morillo. Les chapeaux à petits bords étaient royalistes et se nommaient des morillos ; les libéraux portaient des chapeaux à larges bords qui s’appelaient des bolivars. » (Victor Hugo.)

MORNANTE : Bergerie. (Halbert.)

MORNE : Mouton. (Vidocq.) — Du vieux mot moraine : laine.

MORNÉE : Bouchée. (Halbert.) — Ce doit être une abréviation de morganée. V. Morganer.

MORNIER : Berger. (Idem.) — De morne.

MORNIFLE : Monnaie. (Colombey.)

MORNIFLEUR TARTE : Faux-monnayeur.

MORNOS : Bouche. (Grandval.)

MORT, MORTE : Condamné, condamnée. (Colombey.) V. Malade.

MORT : Enjeu augmenté après coup par le procédé de la poucette, (V. ce mot.) « Et surtout, s’écrient les banquiers : pas de morts ! Traduction : Pas d’enjeux intempestifs. » (Cavaillé.)

MORT (faire un) : Jouer le whist à trois personnes, en découvrant le jeu d’un quatrième partenaire qui n’existe pas. — « M. d’Ajuda proposa d’aller faire un mort avec le duc de Grandlieu » (Balzac.)

MORUE : Femme abjecte. — « Vous voyez, Françoise, ce panier de Fraises qu’on vous fait 3 francs ; j’en offre 1 franc, moi, et la marchande m’appelle… — Oui, madame, elle vous appelle… morue ! » (Gavarni.)

MOTS (avoir des) : Échanger des reproches. — « En rentrant du bal avec ton amant, vous avez eu des mots, et il t’a flanquée à la porte. » (Montépin.)

MOTTE : Maison centrale. — « On vient de tirer mon portrait et on va l’envoyer dans toutes les mottes et dans tous les loirs. » (Lettre de Minder. Introd.)

MOUCHAILLER : Regarder. (Grandval.)

MOUCHARDE : Lune. Elle moucharde les voleurs. V. Cafarde. — « Mais bientôt la patraque, au clair de la moucharde, nous reluque de loin. » (Vidocq.)

MOUCHE : Mauvais, vilain. Abréviation de mouchique. — « Mouche, pour ceux qui ne comprendraient pas le langage parisien, signifie mauvais. » (Troubat.) « — Avez-vous été hier soir aux Variétés ? — Toc. — Et Ambroise ? — Mouche. » (Lemercier de Neuville.)

MOUCHE : Bouquet de barbe placé sous la lèvre inférieure. Allusion à sa petitesse. — « Le ministre de la guerre vient de trancher la question du port de la mouche. » (Du Casse.)

MOUCHE (faire) : Tirer assez juste pour aplatir la balle sur un point noir (mouche), au centre de la cible. — « Elles font mouche à tout coup et tuent les hirondelles au vol. » (A. Second.)

MOUCHES (tuer les) : Infecter. Mot à mot : avoir une haleine assez infecte pour empoisonner les mouches au vol. — On dit aussi tuer les mouches à quinze pas.

Tiens, Paul s’est lâché du col ;
Est-y fier depuis qu’il promène
Clara, dont la douce haleine
Fait tomber les mouches au vol.
(Colmance.)

MOUCHER : Remettre les gens à leur place, éteindre leur insolence. — « Nous allons donc les moucher ces lanternes (journaux) qui peuvent faire croire à l’abrutissement général de la nation. » (La Mouchette, 68.)

MOUCHER : Frapper, battre. — « Allons, mouche-lui le quinquet, ça l’esbrouffera. » (Th. Gautier.)

MOUCHER : Tuer. Mot à mot : éteindre la flamme de la vie. — « Aussi ne se passait-il guères d’heures sans qu’il n’y eût quelqu’un de mouché. » (Mém. de Sully, xvie siècle.) — « Je l’enfile par un coup droit. Encore un de mouché. » (Randon.)

MOUCHER : Non, c’est que je me mouche, non, c’est que je tousse : Négation ironique équivalant à une affirmation pour n’importe quel sujet.

MOUCHER (se) : « Les garçons de jeu se mouchent fréquemment au tapis vert, ce qui leur permet d’escamoter un ou deux louis dans leurs mouchoirs. L’expression est devenue proverbiale. On dit d’un garçon qui escamote un louis de quelque manière que ce soit : Il s’est mouché d’un louis. » (Cavaillé.)

MOUCHER DU PIED (ne pas se) : Agir en homme bien élevé, et non comme celui qui, après s’être mouché avec les doigts, efface du pied sa morve. — « Mais c’est des artistes, qui ne se mouchent pas du pied. » (Désaugiers.)

Pris ensuite au figuré pour signifier une supériorité quelconque, comme le prouve cet exemple : — « Ce petit vin colorié ne se mouche pas du pied. » (Moinaux.)

Le besoin de varier a fait dire dans le même sens : Ne pas se moucher du talon. — « C’est un gaillard qui ne se mouche pas du talon. » (P. de Kock.)

MOUCHERON : Enfant — « La portière et son moucheron. » (Léonard, parodie, 63.)

MOUCHERON : Garçon de marchand de vins. (Il voltige autour des tables des consommateurs.) « Une deuxième tournée est commandée au moucheron. » (Ladimir, 42.)

MOUCHETTES (des) : Non. « — Tu m’as volé ? tu vas rendre ! — Des mouchettes ! » (Léonard, parodie, 63.)

MOUCHIQUE : Vilain, mauvais. — Forme de moustique. V. ce mot. « On s’en dégoise de mouchiques, quand les uns s’appellent feignants, les autr’s leurz’y répond’nt : muffs. » (Cabassol.) V. Gaffier.

MOUILLANTE : Soupe, morue. (Halbert.)

MOUILLÉ (être) : Être apprécié à sa valeur. (Colombey.) — Allusion aux tissus qu’on mouille pour voir s’ils se rétrécissent.

MOULE : Visage irrégulier. Ironie.

MOULE À GAUFRE : Visage fort grêlé. — On sait qu’un moule à gaufre est criblé de trous. — « Le moule à gaufre qui tient en chef les destinées de l’Univers. » (Tam-Tam, 76.)

MOULE DE GANT : Soufflet. — La main est un moule de gant. — « Te goberges-tu de nous ? Je te bâillerai d’une paire de moules de gant. » (Vadé, 1744.)

MOULE EST CASSÉ, ON N’EN FAIT PLUS (le) : Se dit d’un personnage exceptionnel, inimitable.

MOULIN : Magasin de recéleur. (Colombey.) V. Meunier.

Aller au moulin : Vendre du plomb volé. (Rabasse.) Mot à mot : allez chez le recéleur.

MOULINER : Bavarder. (Idem.) — Allusion au tic tac perpétuel du moulin. — On appelle de même moulin à paroles un bavard.

MOULOIR : Bouche. (Halbert.) — Elle moule les aliments.

MOURIR (tu t’en ferais) ! Tu t’en ferais crever ! — Ces formules négatives s’emploient surtout contre ceux qui sont trop avides ou qui manifestent des prétentions excessives. — « Un joueur propose, à quoi l’on répond, si l’on refuse : « Tu t’en ferais mourir. » (Boué de Villiers.) V. Cylindre.

MOUSCAILLER : Faire ses besoins. V. Mousse.

MOUSSANTE : Bière. (Colombey.) — Effet pris pour la cause.

MOUSSE : Excrément — Se trouve déjà dans le Dictionnaire blesquin de 1618. Dans le peuple, on s’injurie encore par ces mots : Vent et mousse pour toi !

MOUSSELINE : Pain blanc. (Halbert.) — Allusion de douceur et de blancheur.

MOUSSELINE : Pièce d’argent. (Petit Dictionnaire d’Argot, 44.) — Même allusion.

MOUSSELINE : Fers de prisonnier. (Rabasse.) Ironie.

MOUSSER : S’impatienter, s’irriter. Mot à mot : écumer de colère. — « Ne moussez pas comme ça. » (Labiche.)

MOUSSER : Faire sa mousse. V. ce mot.

MOUSSER (se faire) : Se faire valoir. (Rabasse.) — Mot à mot : Se faire monter plus haut.

MOUSSERIE : Latrine. (Halbert.)

MOUSSEUX : Redondant. — « J’estime celui qui est un peu mousseux dans sa façon de parler. » (La Bédollière.)

MOUSSUE : Châtaigne. (Halbert.)

MOUSTIQUE : Mauvais. Mot à mot : malfaisant, irritant comme un moustique. — « Je bonnirai qu’ils nous ont embroqués d’une chasse moustique. » (Rabasse.)

MOUZU : Mamelle. (Halbert.)

MUETTE : Conscience. (Rabasse.) — Le mot nous paraît trop ingénieux. Ce doit être (comme pour arche de Noé) une invention de Saint-Edme qui a rédigé l’œuvre de Vidocq, où muette a paru pour la première fois.

MUETTE : Exercice dans lequel, par espièglerie ou par antipathie pour un chef, les élèves de Saint-Cyr ne font pas résonner leurs fusils. — « Lorsque vient le tour de commandement d’un gradé ou d’un chef détesté, on convient de lui donner une muette. » (De la Barre.) — Muette se faufile en ce moment dans la langue politique. — « Dès qu’on a vu M. G. établir autour de M. N. une sorte de muette… » (Ignotus, 75.)

MUFFETON, MUFFLE : Homme bête et grossier. — « Eh ! dis donc, la belle blonde, tu vas quitter ces deux muffles et t’en venir avec moi. » (E. Sue.) — « Vois-tu, muffeton, lui disait la dame. » (G. de Nerval.)

MUFLE : Maçon. (Rabasse.)

MURON, MURONNER, MURONNIÈRE : Sel, saler, salière. (Halbert.) Vieux mots.

MUSARDINE : Habitué femelle des Concerts-Musards, de 1858 à 1860. — « On dit une musardine, comme jadis on disait une lorette. » (A. Second.) — C’était du temps de l’hôtel d’Osmond ; le Concert-Musard d’aujourd’hui est infiniment plus chaste.

MUSETTE : Figure. — C’est museau avec changement de finale. V. Couper.

MUSICIEN : Dénonciateur. Jeu de mots sur haricot et péter. (V. ci-dessous.) V. Péter, Coqueur.

MUSICIENS : Haricots. (Colombey.) — Allusion au bruit des vents qu’ils forment.

MUSIQUE : Filouterie de jeu. V. Maquillage.

MUSIQUE (passer la) : Être confronté avec les dénonciateurs ou musiciens.