Dictionnaire historique d’argot /Édition Dentu/1881/G

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G


GABEGIE : Fraude. Du vieux mot gaberie : tromperie. — « Assurément, il y a de la gabegie là-dessous. » (Desiys.)

GABELOU : Employé des contributions indirectes. — Du mot gabloux : officier de gabelle. — « Bras-Rouge est contrebandier… il s’en vante au nez des gabelous. » (E. Sue.)

GADIN : Bouchon. ( Rabasse.)

GADOUE : Salope. — Du vieux mot gadoue : ordure. — « File, mon fiston, roule ta gadoue, mon homme, ça pue. » (Catéchisme poissard, 44.)

GAFE, GAFEUR, GAFRE : Soldat en sentinelle, voleur aux aguets pour ses complices, surveillant de prison. Ce terme vient du Midi, où gaffe se dit pour recors, parce qu’il saisit comme la perche à croc appelée gaffe.

GAFER, GAFFER : Guetter. (Vidocq.)

GAFFE (faire le) : Faire le guet. (Rabasse.)

GAFFIER, GAFFRE : Surveillant. — « Les gaffiers sont plus mouchiques que lago. » (Rabasse.) V. Gafe.

GAGAT : « Les gagats, c’étaient primitivement les houilleurs et les forgerons de Saint-Étienne ; puis le mot s’est étendu à tous les habitants de la localité sans distinction. » (Rathery.)

GAI : Excité, égayé par la boisson. — « Avoue-le, l’autre jour j’étais un peu lancé, n’est-ce pas ? — Oh ! gai tout au plus. » (Chavette.)

GAIL : Cheval. (Colombey.) — Abréviation de galier.

GAITTE : Argent. (Rabasse.) Pour Guelte.

GALAPIAT : Galopin. — Modification de finales. — « Il dit aux avocats : Vous êtes un tas de galapiats qui vous fichez du monde. » (Balzac.)

GALBEUX : Bien modelé, séduisant de galbe. — « Il n’est pas très-galbeux, mais je le crois très roublard. » (Du Boisgobey.)

GALE : Personne aussi incommode et insupportable que la gale.

GALETTE : Matelas. (Petit dictionnaire d’argot, 44.) — Le nom dit assez qu’il s’agit d’un matelas mince.

GALETTE : Homme nul et plat ; contre-épaulette portée autrefois par les soldats du centre. — « Pour revêtir l’uniforme et les galettes de pousse-cailloux. » (La Bédollière.)

GALIENNE, GALIÈRE : Jument. (Halbert.) V. ce mot.

GALIER, GALLIER : Cheval. — Vieux mot. Dans la Vie de saint Cristophe (Lyon, 1530), un larron, s’écrie :

Cap de Dio ! tout est despendu :
J’ai mon arbaleste flouée,
Et le galier pieça vendu.

GALIFARD : « Commissionnaire, saute-ruisseaux, qui porte au client les marchandises vendues au Temple. » (Mornand.)

GALIOTTE, GAYE : Partie entamée entre une dupe et deux grecs. — Le second mot est une abréviation.

GALOCHE : Menton. (Halhert.)

GALON D’IMBÉCILE. : Galon de soldat de première classe. Il était donné autrefois, à l’ancienneté et non au mérite. — On rencontre l’équivalent de ce mot dans les autres grades. — « Il passa capitaine à l’ancienneté, à son tour de bête, comme il disait en rechignant. » (E. About.)

GALONS (arroser ses) : Payer à boire lorsqu’on est promu sous-officier. — « Je ne dis pas que… avec les camarades, pour arroser mes galons. » (Cormon.)

GALOP : Réprimande énergique. — « Tu as tant fait, que ma mère va me donner un galop. » (Chanapfleury.)

GALOUSER : Chanter. (Halbert.) — Interversion de goualer.

GALTRON : Poulain. (Halbert.) Diminutif de galier : cheval.

GALUCHE : Galon. (Colombey.) — Changement de finale.

GALUCHER : Galonner. — « J’li ferait porter fontange et souliers galuchés. » (Vidocq.)

GALUCHET : Valet de cartes. — Mot à mot : galonné. Allusion aux galons de sa livrée. — « Cinq atouts, par le monarque, son épouse et le galuchet. » (Montépin)

GALURIN : Chapeau. — Galurin à viskop : Chapeau à larges bords.

GALVAUDAGE : Tripotage. — « Surtout pas de galvaudage ni de chipoteries. » (Balzac.)

GALVAUDER (se) : Compromettre sa réputation par des galvaudages. — « Peut-être aurait-il pu trouver un emploi médiocre, mais Delobelle ne voulait pas se galvauder. » (Alph. Daudet.)

GAMBETTIN, GAMBETTINE : Qui est de Gambetta, qui soutient Gambetta. « Pourquoi qualifiait-il la politique gambettine ? » (F. Magnard, 75.)

GAMBETTISTE : Partisan de Gambetta, fonctionnaire nommé par Gambetta pendant l’organisation de la défense en province. — « Il y a dix journaux qui m’ont appelé gambettiste. » (Saint-Genest, 75.)

GAMBILLE : Jambe. Diminutif du vieux mot : gambe.

GAMBILLER : Danser. — Vieux mot de langue romane. V. Coquer.

GAMBILLEUSE : Coureuse de bals.

GAMBRIADE : Dame bien mise. (Rabasse.)

GAME : Rage, hydrophobie. (Halbert.) C’est un vieux mot.

GAMME : Admonestation sévère. Allusion au crescendo des reproches.

Monter une gamme : Gronder, tancer. — Même allusion.

GANGE : Clique. (Halbert.)

GANDIN : Dandy ridicule. Allusion à l’ex-boulevard de Gand, qui fut leur promenade favorite. — « L’œillet rouge à la boutonnière, les cheveux soigneusement ramenés sur les tempes, le faux-col, les entournures, le regard, les favoris, le menton, les bottes ; tout en lui indiquait le parfait gandin, tout, jusqu’à son mouchoir fortement imprégné d’essence d’idiotisme. » (Figaro, 58.)

GANDIN : Tromperie. — Du vieux mot gandie : tromperie.

Monter un gandin : Dans l’armée d’Afrique, c’est essayer de consommer sans payer le cabaretier ou maltais. — « Au Temple, tromper un client, c’est monter un gandin. » (L. Lespès.)

Gandin d’altèque : Croix, décoration. (Vidocq.) Mot à mot : tromperie aristocratique.

GANDINE : Grisette. (Rabasse.)

GANDINERIE, GANDINISME : Genre du gandin. — « La population du quartier Latin aspira à la gandinerie, elle n’eut plus qu’un but, le luxe. » (Le Passé de ces Dames, 1860.) — « Le gandinisme, c’est le ridicule dans la sottise. » (G. Naquet)

GANTER : Convenir, mot à mot : aller comme un gant. On dit : cela me gante ! comme cela me chausse.

GANTS (donner pour les) : Donner une gratification en sus du prix convenu. — Cette expression était prise au xviie siècle dans l’acception générale de pourboire. Elle venait de l’espagnol paragante. — « Et le luy rendoit moyennant tant de paragante. » (T. des Réaux.)

GANT JAUNE : « Quand on dit d’un homme qu’il porte des gants jaunes, qu’on l’appelle un gant jaune, c’est une manière concise de dire : un homme comme il faut. » (Alph. Karr, 41.) — « Quand on a relevé les cadavres des émeutiers, qu’a-t-on trouvé en majorité ? Des malfaiteurs et des gants jaunes ! » dit M. Granier de Cassagnac dans son apologie du coup d’État de Louis Napoléon.

GARÇON DE CAMBROUSE : Voleur de campagne. — Au moyen âge, garson signifiait souvent vaurien. — « La cognade à gayet servait le trèpe pour laisser abouler une roulotte farguée d’un ratichon, de Charlot et de son larbin et d’un garçon de cambrouse que j’ai reconobré pour le petit Nantais. » (Vidocq.)

GARDANNE : « Si par rognures vous entendez les morceaux de coupons de soie, ou gardannes, vous ne vous êtes pas inquiété d’une branche fort lucrative de l’industrie parisienne. » (Privat d’Anglemont.)

GARDE À CARREAU (avoir une), Se garder à carreau : Se tenir prêt à parer tout accident. Ce doit être un jeu de mots ancien. Carreau signifiait jadis : trait, projectile. — « Je m’aperçus bientôt qu’il avait plus d’une garde à carreau. » (Mémoires de Rovigo, 29.)

GARÉ DES VOITURES : Prudent, rangé. — Allusion aux dangers de la circulation parisienne. — « Je suis honnête homme maintenant… un bourgeois garé des voitures. » (Mme  Ratazzi, 66.)

GARGAMELLE : Gosier. — Vieux mot.

GARGARISER (se) : Boire à pleines rasades. C’est l’équivalent exact de se rincer le gosier. V. Taper sur les vivres.

GARGOT : Gargote. — Abréviation. — « Dans les crémeries borgnes et dans les gargots de la grande truanderie. » (P. Parfait.)

GARGOUENNE, GARGOUINE, GARGOINE, GARGOUILLE, GARGUE : Gosier. — Tous ces mots dérivent du dernier et doivent être aussi anciens que lui. — Nous disons encore gargouille et gargariser. — « La gargouine me démange, il faut l’humecter, c’ gosier, afin d’ pouvoir recommencer. » (Catéchisme poissard, 44.) — « Ouvre la gargouine. Prends le bout de ce foulard dans tes quenottes. » (E. Sue.)

GARIBALDI (coup de) : Coup de tête donné par un malfaiteur à celui qu’il veut dépouiller le soir dans la rue. — « Arrivé près de sa victime, il se précipite sur elle en lui donnant un violent coup de tête dans l’estomac. Ils appellent cela le coup de Garibaldi. » (Notes d’un agent, 69.)

GARIBALDI : Courte chemise rouge, petit chapeau de feutre. — Allusion au costume du fameux patriote italien. — « On peut faire le dandy, le Garibaldi sur le coin de l’oreille. » (Le Gai Compagnon maçon.)

GARNAFIER, GARNAFLE : Fermier.

GARNI : Chambre garnie. — « Un lit en bois peint, une commode en noyer, un secrétaire en acajou, une pendule en cuivre, des vases de porcelaine peinte, cela s’appelle un garni. » (Champfleury.) V. Poussier.

GARNI : Petit hôtel meublé. — « Une maison garnie s’appelle aussi un garni en raison du bas prix des loyers. » (E. Sue.)

GARNISON : Vermine à demeure dans un lit ou sur un individu. V. Grenadier, Négresse.

GARROTAGE (vol au) : C’est le même que le vol du père François. (V. ce mot.) Ici la courroie est assimilée au garrot espagnol qui étrangle les criminels.

GAS : Malin. — « L’employé était un gas. » (Stamir, 67.) — Mot à mot : un garçon.

GÂTEAU (avoir du) : Avoir sa part de vol. (Rabasse.)

GÂTEAU (papa, maman) : Se dit des parents qui gâtent leurs enfants. — Jeux de mots sur le verbe gâter, et sur le gâteau qui le représente d’ordinaire vis-à-vis des enfants. — « Soit que le hasard, — ce papa gâteau des rêveurs, — ait à leur endroit des préférences spéciales. » (Marx.)

GÂTEUSE : Longue capote à la mode en 1875. Allusion aux capotes de la Salpêtrière, hôpital réservé aux gâteux. — « Un petit gommeux complètement crevé dit au cocher d’une voix éteinte, du fond du grand collet de sa gâteuse. » (Figaro, 75.)

GÂTEUX : Imbécile. — Acception figurée d’une infirmité connue. Bien qu’elle soit assez mal-propre, on en use pour remplacer idiot et infect, qui ont fini par sembler fades. — « Puis il faut avouer, me dit M. de B…, que cet Allemand est un joli gâteux. » (Nord, septembre 72.)

GAUCHE (la) : Le parti de l’opposition démocratique. — Ainsi nommé parce qu’il se place d’ordinaire au côté gauche de nos assemblées législatives. — « Des sommets de la gauche, il fit pleuvoir des interpellations. » (E. d’Hervilly.)

GAUCHE (donner à) : Se tromper. Mot à mot, s’écarter de la ligne droite.

GAUCHER : Membre de la gauche de l’Assemblée nationale. — « Y a pas mal de différence entre les gauchers et les droitiers. » (Figaro, 75.)

GAUDILLE : Épée. (Grandval.)

GAUDINEUR : Décorateur. — Du vieux mot gaudiner : s’amuser. La gaieté des peintres en bâtiment est proverbiale.

GAULÉ : Cidre. Mot à mot : Vin gaulé dans les pommiers.

GAULOIS : « Autrefois c’était peut-être un compliment à un écrivain que de dire : Vous êtes Gaulois. L’esprit gaulois, c’est-à-dire la belle humeur triviale, est devenu un anachronisme. » (Aubryet.)

GAUX-PICANTIS : Pou. (Grandval.) — Halbert dit époux, ce qui n’est pas la même chose, mais ce doit être une faute d’impression.

GAVÉ, GAVIOLÉ : Ivre. Mot à mot : gorgé jusqu’au gosier. — Du vieux mot gaviot.

GAVOT : Compagnon. V. Dévorant.

GAVROCHE : Gamin. — Type des Misérables de V. Hugo. — « Augustine Brohan en gavroche. » (Vie parisienne, 67.)

GAY : Laid, drôle. (Vidocq.)

GAYE : Fausse partie. V. Galiotte.

GAYE, GAYET : Cheval — Abréviation de galier. V. Garçon.

GAYERIE : cavalerie.

GAZ (éteindre son) : Mourir. Mot à mot : s’éteindre tout à coup comme un bec de gaz. — « La pauvre vieille éteint son gaz… Une indigestion d’andouillettes. » (About.)

GAZ (lâcher le) : Péter. — Allusion à la nature et au bruit de l’expulsion. — « D’autres dans un coin, mais sans honte, lâchent le gaz et font des renards. » (Chansonnier, 36.)

GAZ (faire son) : Aller à la garde-robe. (Grandval.)

GAZON : Perruque mal peignée, ébouriffée comme une touffe d’herbe.

GAZOUILLER : Parler, chanter. — Vieux mot. — « Laquelle de tous les deux qu’a le plus de choses dans le gazouillage ? » (Vadé, 1788.)

GÊNEUR : Importun, causeur gênant. — « On ne pouvait plus faire un pas dans la rue sans rencontrer un de ces gêneurs. » (P. Véron.)

GENEVIÈVE : Gin. Jeu de mots, sur le genièvre qui est la même chose que le gin.

GENOU : Tête aussi nue qu’un genou. « Il ébauchait une calvitie dont il disait lui-même sans tristesse : Crâne à trente ans, genou à quarante. » (V. Hugo.) « Dire au vieux monsieur : lâchez-moi donc le coude, mon bonhomme, et à Chaillot le genou qui renifle. » (G. Rémi, Tam-Tam, 75.)

GENREUX : Homme qui fait du genre, poseur ridicule.

GENTLEMAN : Gentilhomme, dans la langue des anglomanes. — « Nous sommes certes de parfaits gentlemen. » (Frémy.)

GENTLEMAN RIDER : « Homme du monde qui monte dans les courses. » (Paz.)

GENTRY : Société aristocratique. — « Imposant à la gentry par son nom et sa fortune. » (Aubryet.)

GEORGET : Gilet. — Vieux mot.

GERBE : An de prison. (Rabasse.)

GERBER : Juger. (Vidocq.) Mot à mot : réunir tous les actes de la vie passée, en faire une gerbe, un faisceau pour l’accusation ? V. Manger.

Gerber à la passe : Condamner à mort. — On dit souvent en parlant de la mort : Il faut la passer. — « On va le buter. Il est depuis deux mois gerbé à la passe. » (Balzac.)

GERBERIE : Tribunal. (Vidocq.)

GERBIER : Juge. (Vidocq.)

GERNAFLE : Ferme. — Pour garnafle.

GÉRONTOCRATIE : Puissance de la routine représentée au théâtre par le type de Géronte. M. James Fazy, de Genève, a débuté dans les lettres par un ouvrage intitulé : De la Gérontocratie, ou Abus de la sagesse des vieillards dans le gouvernement de la France, 28.

GI : Oui. (Halbert.) V. Gy.

GIBERNE : Derrière. — Allusion à la place ordinaire de la giberne. — « Il donne en riant une légère tape sur la giberne de Léa. Léa : Insolent. » (L. Leroy.) V. Pinceau.

GILBOCQUE : Billard. (Halbert.) — Onomatopée. C’est le bruit de la bille qui en rencontre une autre.

GIGOLETTE : Grisette, faubourienne courant les bals publics.

GIGOLO : Petit jeune homme fréquentant les lieux où se rencontre la gigolette.

Si tu veux être ma gigolette,
Oui, je serai ton gigolo.
(Chanson populaire, 1850.)

GILET EN CŒUR : Élégant, fashionable. — « Lundi vous trouviez au Théâtre-Français les gilets en cœur les plus brillants de Paris. » (Figaro, 76.) — La description suivante donne l’étymologie du mot : « Cela fait, regagnez votre domicile, glissez les jambes dans un pantalon simulant la vis au cou-de-pied ; encadrez le plastron de votre chemise dans un gilet ouvert jusqu’au nombril, et endossez l’habit noir préalablement orné d’un œillet blanc. » (Marx, 67.)

GILMONT : Gilet. — Changement de finale.

GINGINER : Faire une œillade. — « Elle gingine à mon endroit… » (Gavarni.)

GINGLARD, GINGLET : Piquette. — Du vieux mot ginguet : petit vin aigre. — Le vin nouveau qui est aigre s’appelait jadis jain. V. Lacombe. — « Nous avons arrosé le tout avec un petit ginglard à six qui nous a fait éternuer… oh ! mais, c’était ça ! » (Voizo.)

GINGUER : Envoyer des coups de jambe. — Du vieux mot gigue, jambe.

GIROFLE : Jolie, aimable, bonne. — « Montron drogue à sa largue : bonnis-moi donc girofle. » (Vidocq.) — V. Coquer.

GIROFLÉE À CINQ FEUILLES, À PLUSIEURS FEUILLES : Soufflet. — Les cinq feuilles représentent les cinq doigts de la main. — « Je vous lui donnai une giroflée à cinq feuilles sur le musiau. » (Rétif, 1783.)

GIROFLERIE : Amabilité. (Vidocq.) — De girofle : aimable.

GIROFLETTER : Souffleter. — De giroflée : soufflet. — « Ah ! l’a-t-elle girofletté ! » (Balzac.)

GIROLLE : Oui, soit. (Vidocq.)

GIRONDE : Jolie, bien faite. (Rabasse.)

GIROUETTE : Homme politique dont les opinions changent selon le vent de la fortune. On a publié depuis 1815 quatre ou cinq dictionnaires de Girouettes.

GITRE : J’ai. (Grandval.) Mot à mot : j’itre. (V. Itrer.) Vidocq donne à tort, croyons-nous, le verbe gitrer.

GIVERNEUR : Vagabond couchant dans la rue. (Vidocq.)

GLACE : Verre à boire. (Grandval.) De l’anglais glass qui a le même sens.

GLACI : Verre de vin. (Rabasse.) — Terme maçonnique.

GLACIÈRE PENDUE : Réverbère. (Halbert.) V. Pendu.

GLACIS : Vitres, carreaux. (Rabasse.)

GLAVIOT : Crachat. — Dhautel dit Claviot.

GLIER, GLINET : Diable. (Grandval.)

GLISSANT : Savon. (Vidocq.) — Se fait glisser.

GLISSER (se laisser glisser) : Mourir. — On dit plus souvent : il s’est laissé glisser. Quand on glisse, on tombe, et c’est de la grande chute qu’il s’agit ici. — « C’est là (à un restaurant de la chaussée du Maine), que j’ai appris, entre autres bizarreries, les dix ou douze manières d’annoncer la mort de quelqu’un : Il a cassé sa pipe, — il a claqué, — il a perdu le goût du pain, — il a avalé sa langue, — il s’est habillé de sapin, — il a glissé, — il a décollé le billard, — il a craché son âme, » etc., etc. (Delvau, 65.)

GLORIA : Petit verre d’eau-de-vie versé dans une demi-tasse. — De même que le gloria patri se dit à la fin des psaumes, ce gloria d’un autre genre est la fin obligée d’un régal populaire. — « À la chaleur d’une demi-tasse de café bénie par un gloria quelconque. » (Balzac.)

Gloria : Petite demi-tasse. — « Ne fût-ce qu’une absinthe ou un gloria. » (About.)

GLORIEUSES (les) : Les trois journées de la révolution de 1830, qualifiées ordinairement de glorieuses dans le langage officiel d’alors. — « Les trois journées de février qui répondirent aux glorieuses de 1830 avec une si fatale symétrie. » (Aubryet.)

GLOU-GLOU : Action de verser du vin à la ronde. — Harmonie imitative du bruit du liquide en s’échappant du goulot, V. Absorption.

GLUTOUSE (la) : La figure. (Rabasse.)

GNAN-GNAN : Niais, niaise. — Redoublement du vieux mot niant : rien. Talma écrit à madame Bourgoin, le 19 septembre 25 : « Vous avez prouvé au public et à vos camarades que vous êtes en état de jouer autre chose que des gnans-gnans. »

GNIAF, GNIAFFE : Savetier, et par extension : homme grossier, mal élevé. — « C’est le cordonnier gniaffe que nous nous sommes proposé surtout de peindre. » (P. Borel.) — « Je dis, monsieur le baron, que vous êtes un gniaf, et que vous me prenez pour un autre. » (E. Villars.)

GNIOL, GNIOLLE, GNOLLE : Sans valeur intellectuelle, niais. — Vient de gnan-gnan avec changement de finale. On a écrit ce mot de toutes les façons. La plus ancienne, celle de 1805, doit être préférée. — « Des journalistes très-ignorants se servent du mot césarisme dans une très-mauvaise acception. Il faut avoir été de l’hôtel de ville pour être aussi gniol que cela. » (J. Richard.) — « Mais il est si gniolle, ce gouvernement ! il est si feignant ! si propre à rien. » (Montépin.) — « Pas si gnolle, c’est des gosses, ça. » (Rousseliana, 95.)

GNOGNOTE : Chose sans valeur. — Même étymologie que gnan-gnan. — « Josepha… c’est de la gnognote. » (Balzac)

GNOLE : Tape. — Abréviation de Torgnole. — « Quoi ! tu n’ peux ly fiche une gnole dessus la tronche. » (Dialogues poissards, xviiie siècle.)

GOBANTE (femme) : Femme très-séduisante. Mot à mot : vous gobant, vous prenant tout entier à première vue.

GOBBE : Calice. (Vidocq.) — Abréviation de Goblet.

GOBE-MOUCHE : Espion. (Halbert.) Mot à mot : mouche, faisant métier de gober (avaler) les gens. V. Mouche.

GOBÉ (Être) : Être bien accueilli. (Rabasse.) Mot à mot : être fort goûté par les gens.

GOBELET (sous le) : Sous les verrous, en prison. (Rabasse.) — Comparaison du prisonnier à la muscade couverte par le gobelet d’un escamoteur en plein vent.

GOBER (la) : Mourir, être victime d’un accident. — « Ce poltron-là, c’est lui qui la gobe le premier. » (L. Desnoyers.) V. Billet (donner son).

GOBER : Être fort épris.

GOBER (se) : Se croire une supériorité. — « À la fenêtre d’un restaurant, deux cocottes dégustent des huîtres… — Moi, dit Gavroche, j’aime pas les femmes qui se gobent. » (Brévannes, 67.)

GOBESON : Verre. (Vidocq.) — Diminutif de Gobbe.

GOBETTE : Verre. (Halbert.) — « Je n’ai pas le sou. Il faut tout de même gagner de quoi payer la gobette (verre de vin) à la cantine. » (P. de Grandpré.)

GOBEUR, GOBEUSE : Homme crédule, femme crédule. — « Venu au monde avec toute la naïveté d’esprit qui constitue le gobeur, je rencontre à chaque instant des sceptiques. » (A. Marx.)

GOBICHONNADE : Régal, festin. — De gobichonner. — « En avant la gobichonnade ! » (Labiche.)

GOBICHONNER : Se régaler. — Diminutif du vieux mot Gobiner. — « Il se sentit capable des plus grandes lâchetés pour continuer à gobichonner de bons petits plats soignée. » (Balzac.)

GOBICHONNEUR : Gourmand. — « Le roi, le triomphateur des gobichonneurs. » (La Bédollière.)

GOBILLEUR : Juge d’instruction (Halbert.) — Il avale (gobille) les réponses du prévenu.

GOBSECK : Usurier. — Nom d’un type de la Comédie humaine, de Balzac.

Avec son cortège damné
De Gobseks à la mine blette,
Qui vous disent d’un ton peiné :
« Ça fa tonc bas vort, la roulede ? •>
(G. Jollivet.)

GODAN : Conte fait à plaisir. — Du vieux verbe Goder, se réjouir, s’amuser (gaudere.) — « Quand on parle de doctrines nouvelles aux gens qu’on croit susceptibles de donner dans ces godans-là. » (Balzac)

GODARD : Mari d’une femme qui accouche.

Bientôt ma femme accouche ;
J’ suis d’abord Godard,
(Chansons, Toulon, 30.)


Molé leur a dit : ergo glu !
Servez Godard, sa femme accouche !
Ce ne sera pas par ma bouche

Que l’édit sera lu, s’il l’est ;
Il ne me plaist pas.
(Le Courrier burlesque, 1650, 2e partie.)

GODDEM : Anglais. — Allusion au juron favori des Anglais.

Un gros Auvergnat, piqué jusqu’au vif,
Au Goddem mettant le poing sous le pif.
(Festeau.)

GODICHE, GODICHON : Ridicule. — « Que tu es donc godiche, Toinon, de venir tous les matins comme ça ! » (Gavarni.)

GODILLER : Être allumé par le désir, convoiter charnellement. Pour l’origine de ce mot, il faut se reporter au mot gaudille qui a été pris au figuré.

GODILLEUR : Convoiteur.

GODILLOT : Soulier de soldat, et par extension : mauvais soulier. C’est le nom d’un fournisseur, appliqué au produit fabriqué sans doute par beaucoup d’autres.

GOFFEUR : Serrurier. (Colombey.)

GOGO : Dupe, homme trop crédule, facile à tromper. — Abréviation du mot gogoyé : raillé, plaisanté. Villon paraît déjà connaître gogo dans la ballade où il chante les charmes de la grosse Margot qui…

Riant, m’assit le poing sur le sommet,
Gogo me dit, et me lâche un gros pet.

— « C’est encore ces gogos-là qui seront les dindons de la farce. » (E. Sue.) — « Avec le monde des agioteurs, il allèche le gogo par l’espoir du dividende. » (Deriége.)

GOGUENAUX : Lieux d’aisance. — « Il fumera dans les goguenaux aux jours de pluie. » (La Cassagne.)

GOGUENOT : Grand quart, vase de fer blanc de la contenance d’un litre dont se munissent les troupiers d’Afrique. Il va au feu, sert à prendre le café, s’utilise comme casserole et comme gobelet.

GOGUENOT, GOGUENEAU : Pot de nuit, baquet servant de latrines portatives. — « La meilleure place, la plus éloignée de la porte, des vents coulis et du goguenot ou thomas. » (La Bédollière.)

GOGUETIER : Membre d’une goguette. — « Le goguetier est Parisien, il est chansonnier ; il aime la musique, les refrains bruyants. C’est d’ailleurs un ouvrier laborieux et honnête. » (Berthaud.)

GOGUETTE : Société chantante. — Au moyen âge, ce mot signifiait : Amusement, réjouissance. — « Il y a environ trois cents goguettes à Paris, ayant chacune ses affiliés connus et ses visiteurs. » (Berthaud.)

GOINFRE : Chantre. — Allusion à sa bouche toujours ouverte pour chanter aux offices.

GOÎTREUX : Niais. — Cette injure est une variante de crétin ; on sait que les crétins sont généralement goîtreux. — « Il vient à Bullier deux sortes de gens, l’une composée de jeunes goîtreux de l’autre côté de l’eau, de ramollis aux ongles roses. » (A, Brun, 67.)

GOMME (haute) : Fashion ridicule de l’un ou l’autre sexe. Allusion à ce que certaines toilettes ont de trop empesé et de trop brillant. « Quelques renseignements sur les bas de la haute gomme féminine… Il y en a de toutes les nuances… » (F. Magnard, 75.) — « Anna est très-connue dans toute la haute et demi-gomme. » (Vassy, 1875.)

GOMMEUX : C’est le petit crevé de 1875. « La haute et basse bicherie, les purs gommeux et même des journalistes. » (A. d’Aunay, 75.) — « Dans notre ignorance parisienne, nous appelons boyard ce qu’à Saint-Pétersbourg on désigne sous le nom générique de gommeux. » (A, Wollf, 75.)

GONCE, GONCESSE : homme, femme. (Rabasse.)

GONZE, GONZESSE : Niais, niaise. — « Mais votre orange est fichée. Elle n’a point de queue ? — Allez donc, gonze. » (Vadé, 1788.) V.Aplomb, Regout, Râleur.

GOSSE : Jeune enfant. (Rabasse.) Abr. de gosselin.

Gosse : mensonge. — On disait autrefois gausse. — « Conter des gausses, faire des mensonges badins. » (Dhautel, 8.) V. Gnolle.

GOSSELIN, GOSSELINE : Jeune homme, jeune fille. (Rabasse.)

GOSSELIN : V. Être (en).

GOTEUR : Paillard. (Halbert.)

GOTON : Fille de mauvaise vie. — Abréviation de Margoton. — « Est-ce que tu nous prends pour ta goton, avec ta familiarité ? » (Catéchisme poissard, 40.)

GOUALANTE : Chanson. (Halbert.) Mot à mot : chantante.

GOUALER : Chanter. (Halbert.) Mot à mot : faire sortir du gosier. Du vieux mot goule : gosier.

GOUALEUR, GOUALEUSE : Chanteur, chanteuse. (Halbert.) — Eugène Sue a donné ce nom à l’un des types de son roman : les Mystères de Paris.

GOUAPE : Vie de gouapeur, — « J’aime mieux jouer la poule… Parce que t’es un gouapeur, mais ceux qui préfèrent le sentiment à la gouape, c’est pas ça. » (Monselet ) — « Mes amis, unissons nos voix pour le triomphe de la gouape. » (C. Reybaud.)

GOUAPE, GOUAPEUR, GOUAPEUSE, GOUÊPEUR : Vagabond, fainéant, débauché.

Sans paffes, sans lime, plein de crotte,
Aussi rupin qu’un plongeur,
Un soir, un gouêpeur en ribote
Tombe en frime avec un voleur.
(Vidocq.)

Le Dictionnaire d’argot publié à la suite du Cartouche de Grandval (édition non datée, 27 ?) ne donne que la forme gouapeur avec la signification « homme sans asile». On trouve une physiologie complète du type dans une chanson de J.-E. Aubry, qui a paru en 1836 : le Gouapeur. « Pauvre Dupuis, marchand de vin malheureux, que de gouapeurs trompèrent ta confiance ! » (Monselet.) — « Quant aux vagabonds adultes qu’on désigne en style d’argot des gouêpeurs. » (M. Christophe.)

GOUAPER, GOUÊPER : Vagabonder. — « J’ai comme un brouillard d’avoir gouêpé dans mon enfance avec un vieux chiffonnier. » (E. Sue.)

GOUAPEUR : « Les prisonniers occupés aux travaux des ateliers sont désignés sous le nom de gouapeur par ceux qui ne font rien. » (Rabasse.) — Ironie. V. Gouape.

GOUÉPEUR : V. Gouape.

GOUGNOTTE : V. être (en).

GOUJON (avaler le) : Mourir. — « Quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, il faut avaler le goujon. » (Francis, 15.)

GOULOT : Bouche. — Allusion au goulot de la bouteille.

Plomber du goulot, sentir mauvais de la bouche. — Jouer du goulot, absorber des petits verres. (Almanach des Débiteurs.)

GOULU : Poêle. (Vidocq.) — Il est goulu de bûches.

GOULU : Puits. (Idem.) — Il ouvre une grande gueule comme un goulu.

GOUPINE : Mise étrange. (Halbert.)

GOUPINÉ (mal) : Mal vêtu. (Rabasse.)

GOUPINER : Voler. — « Voilà donc une classe d’individus réduite à la dure extrémité de travailler sur le grand trimar, de goupiner. » (Cinquante mille voleurs de plus à Paris, Paris, 30, in-8.) — « J’ai roulé de vergne en vergne pour apprendre à goupiner. » (Vidocq.)

GOUPLIN, GOUPLINE : Pot, pinte. (Halbert.)

GOURBI : Hutte de branchages. — Mot importé d’Afrique. — « On fait des gourbis et des gabions. » (Commentaires de Loriot.)

GOURDEMENT : Bien, beaucoup. V. Papillonner, Artie.

GOURER : Tromper. (Halbert.) Vieux mot.

GOUREURS : « Les goureurs sont de faux marchands qui vendent de mauvaises marchandises sous prétexte de bon marché. Le faux marin qui vend dix francs des rasoirs anglais de quinze sous… goureur. L’ouvrier qui a trouvé une montre d’or et qui veut la vendre aux passants… goureur. » (Paillet.)

GOURPLINE : Pinte. (Halbert.) Ce doit être une altération du mot goupline, qu’un éditeur négligent aura défiguré.

GOUSPIN : Mauvais gamin. Diminutif du vieux mot gous, chien. — « Quarante ou cinquante jeunes gouspins bruyants et rageurs. » (Commerson.)

GOUSSE : V. Être (en).

GOUSSET PERCÉ (avoir le) : N’avoir pas un sou en poche. — « Comment faire quand on a le gousset percé ? » (Letellier, 30.)

GOUTTE : Portion d’eau-de-vie (un décilitre en général.) — « J’appelai ma mère qui buvait sa goutte au petit trou. » (Rétif, 1783.) V. Pégossier.

GOYE : Dupe, niais. Signifie aussi chrétien chez les juifs. — « Le goye te mire, le pante te regarde. » (Monselet.)

GRAILLON : Femme sale. Mot à mot : sentant le graillon de la cuisine.

GRAILLONNER : Parler. (Vidocq.) Du vieux mot grailler : croasser.

GRAILLONNER : Écrire. (Petit dictionnaire d’argot, 44.) Mot à mot : cracher de l’encre sur le papier.

GRAILLONNEUR : Homme qui expectore souvent. — « Comme c’est ragoûtant d’avoir affaire avant son déjeuner à un graillonneur pareil ! » (H. Monnier.)

GRAIN : Écu. (Grandval.) C’est un vieux mot qu’on rencontre souvent. Dans la Vie de saint Christophe (Grenoble, 1530), deux brigands méditent une attaque contre le premier passant. « S’il avoit des grains, dit l’un d’eux, on lui raseroit le mynois. »

AVOIR UN GRAIN : Déraisonner. Mot à mot : avoir un grain de folie dans le cerveau.

Avoir un grain : Être ivre. (Rabasse.) Même allusion.

GRAISSAGE : Don d’argent fait de la main à la main. On dit graisser la patte pour donner de l’argent. — « De là, un graissage de patte à celui qu’on veut gagner qui constitue le plus clair des revenus du pipelet. » (J. Prevel.)

GRAISSE : Argent. — Il y a de la graisse, il y a un bon butin à faire.

Voler à la graisse : Voler au jeu. (Rabasse.) Altération de Grèce. V. ce mot.

Voler à la graisse : Se faire prêter sur des lingots d’or et sur des diamants, qui ne sont que du cuivre et du strass. (Vidocq.)

GRAISSER : Gratter (Halbert.) Poster, battre. (Rabasse.)

Graisser la marmite : Payer sa bienvenue dans un régiment.

Graisser ses bottes : Se préparer au départ, et, au figuré : être près de mourir, recevoir les saintes huiles.

GRAND BONNET : Évêque. (Halbert.) — Allusion à sa mitre.

GRAND TURC : Formule négative. — « Ma chère, il pense à toi comme au Grand Turc. » (Balzac.)

GRANDE : Poche. (Colombey.) Celle des voleurs doit être grande.

GRANDE BOUTIQUE : Préfecture de police. (Halbert.)

GRANITIQUE : Grandiose, impérissable. — Allusion à la dureté du granit — « Ce drame pyramidal, obéliscal et granitique qui m’a fait frémir. » (Alm. du Hanneton, 66.)

GRAS (il y a) : Il y a de l’argent. — « Faire tant d’embarras quand dans le gousset il n’y a pas gras. » (Metay.) V. Train, Vole, Graisse.

GRAS-DOUBLE : Feuille de plomb. (Grandval.) Il s’agit ici de la feuille employée pour la toiture et enlevée par des voleurs qui, la roulant autour du corps, sous les vêtements, se donnent un second gras-double, c’est-à-dire un embonpoint factice.

GRASDOUBLIER : Voleur de plomb. V. Limousineur.

GRATOUSE : Dentelle. (Grandval.) Elle gratte légèrement la peau.

GRATTE : Abus de confiance.. — « Il y a de la gratte là-dessous. » (La Correctionnelle.)

GRATTE : Gale. (Colombey.) — Effet pris pour la cause.

GRATTE : Pièce grattée, retenue en cachette par la couturière sur les étoffes confiées par la pratique.

GRATTE-COUENNE : Barbier. (Halbert.) Mot à mot : gratte-peau.

GRATTE-PAPIER : Fourrier. — Allusion à ses fonctions de scribe. V. Rogneur.

GRATTER : Arrêter. (Vidocq.)

GRATTER : Voler. Mot à mot : faire la gratte. — « Au diable la gloire, il n’y a plus rien à gratter. » (M. Saint-Hilaire.)

GRATTOIR, GRATTON : Rasoir. — Il gratte la peau.

GREAT ATTRACTION : Grande attraction. — Anglicanisme. — « Le great attraction de la soirée, c’est le début d’Albert Glatigny. » (La Lune, 67.)

GREC : Homme faisant métier de filouter au jeu. — Il faut reconnaître que jamais le peuple grec n’a été renommé pour sa bonne foi. Saint Jérôme l’a dit nettement : Impostor et Græcus est (épître X ad Furiam). Cicéron appelait la Grèce Græcia mendax. Toutefois, M. Francisque Michel parait n’avoir trouvé un exemple de la signification actuelle que dans un livre de 1768 : L’histoire des Grecs ou de ceux qui corrigent la fortune au jeu.

GRECE : Monde des grecs. « La télégraphie joue un grand rôle dans la Grèce de la bouillotte. » (Cavaillé.)

Voler à la Grèce : Voler au jeu.

GRÈCES : Filous s’entendant pour offrir à leur dupe un bénéfice considérable sur le change des pièces d’or étrangères auxquelles ils substituent, au dernier moment, des pièces fausses. « Les grèces sont perpétuellement en voyage, soit à pied, soit en voiture, pour chercher des victimes. » (Le Paravoleur, 26.)

GREFFER : Manquer de nourriture. (Rabasse.)

GREFFIER, GRIFFON : Chat. — Allusion à ses griffes.

C’est la dabuche Michelon
Qu’a pomaqué son greffier,
Qui jacte par la venterne
Qui le lui refilera.
 
Le dab Lustucru
Lui dit : « Dabuch’ Mich’lon,
Allez ! votre greffier n’est pas pomaqué ;
Il est dans le roulon,
Qui fait la chasse aux tretons.
Avec un bagaffre de fertange
Et un fauchon de satou.
(Chanson argotique de la Mère
Michel, citée par M. Fr. Michel.)

GREFFIR : Dérober finement, comme le chat. (Grandval.)

GRÊLE : Patron ou maître tailleur.

GRÊLE : Tapage. (Halbert.) — Allusion au bruit de la grêle.

GRENADIER : Gros pou. Mot à mot : pou d’élite. Il faut se rappeler ici le sens de Garnison. V. ce mot.

GRENASSE : Grange. (Grandval.) — Vient de grain, comme grenier.

GRENOUILLE : Caisse, grosse somme. Mot à mot : réunion de grains (écus). V. Grain. On a joué sur les mots en écrivant grenouille au lieu de grainouille. — « Il tenait la grenouille. » (Vidal, 33.) — « Les soldats s’imaginent toujours que les sergents-majors mangent audacieusement la grenouille. » (La Bédollière,) — « Il a fait sauter la grenouille de la société. » (L. Reybaud.)

GRENU, GRENUCHE : Blé, avoine. (Grandval.) V. Grenasse.

GRENUE, GRENUSE : Farine. (Idem.)

GRÈS : Cheval. (Colombey.)

GRÉSILLONNER : Demander du crédit. (Almanach des Débiteurs.)

GREVIER : Soldat. (Rabasse.) Forme de grivier. V. ce mot.

GRÉVISTE : Ouvrier en grève. — « La réunion des grévistes a l’honneur de vous faire part de ses conclusions. La journée de travail sera réduite de dix heures à huit, dont trois consacrées au repos. » (Sardou.)

GRIFFARD : Chat. (Grandval.) — Il griffe.

GRIFFLEUR : Brigadier de prison. (Halbert.) — Il fouille et griffle ce qu’ont les prisonniers.

GRIFFONNER : Jurer. (Halbert.)

GRIFLER : Prendre. (Grandval.)

GRILLER UNE (en) : Fumer. — « Passe-moi du tabac que j’en grille une. » (L. de Neuville.)

GRIMÉ : Arrêté. (Halbert.)

GRIMPANT : Pantalon. (Rabasse.) Il grimpe le long des jambes. Même allusion que dans haut de tire.

GRINCHE : Voleur. — « Après avoir choisi l’écrin, le grinche paye le joaillier. » (Paillet.)

Grinche de cambrouse : « Les voleurs de campagnes, autrement dits grinches de cambrouse, lessiveurs de croyant, voleurs au croquant, exploitent uniquement la province et les foires. » (Rabasse.)

GRINCHER : Voler. V. Turbinement, Plan, Douille.

GRINCHEUX : Grognon.

Es-tu grincheux, es-tu maussade ?
Digères-tu mal tes repas ?
(G. Jollivet.)

GRINCHIR : Voler. (Rabasse.)

GRINCHISSAGE : Vol. V. Parrain.

GRINCHISSEUR : Voleur. (Rabasse.)

GRIPIS : Meunier. (Grandval.) V Grispis.

GRIPPE-JÉSUS : Gendarme. (Vidocq.) Inventée par des voleurs, l’épithète prouve à quel point on tient à passer pour être honnête dans tous les métiers.

GRIS : Vent. (Grandval.) — Vieux mot de langue romane. La bise est la sœur du gris. On dit encore : un froid noir.

GRISES (en faire voir de) : Faire endurer des souffrances à quelqu’un, qui ne peut voir en rose. — « Ma tante Aurélie qui disait l’autre jour à maman qu’elle t’en ferait voir des grises… » (Gavarni.)

GRISPIN, GRISPIS : Meunier. (Halbert.) — La farine lui donne une couleur grise.

GRIVE : Guerre. (Grandval.) — Vieux mot signifiant fâcheux, méchant. Griever voulait dire jadis faire du mal. On dit encore : grièvement blessé : dangereusement blessé. — « Les drilles ou les narquois, en revenant de la grive, en trimardant, quelquefois basourdissent les ornies. » (Vidocq.)

GRIVE : Garde, patrouille. (Halbert.) — Mot à mot : réunion de griviers.

GRIVIER : Soldat. (Halbert.) De grive (guerre).

GROGNARD : Vieux soldat. — Allusion à l’humeur grognonne des vétérans. Voici le plus ancien exemple du mot : « On appelle grognard, à l’armée, les soldats qui ont déjà beaucoup de service et qui portent des moustaches. » (Cadet-Gassicourt.)

GROOM : Petit valet. — « Savez-vous ce que c’est qu’un petit groom ? Eh bien ! c’est un petit bas des reins qu’est pas plus haut que ma botte. » (Festeau.)

GROS FRÈRES, GROS TALONS, GROS LOLOS : Cavaliers de réserve. — « Ces solides et imposants cavaliers que nous appelons des gros frères. » (Trochu, 67.) — « Gros lolo, gros talon, c’est le sobriquet donné aux carabiniers et aux cuirassiers. » (La Bédollière.)

GROSSE CAVALERIE : Cureurs d’égout. — Allusion à leurs grandes bottes.

GROTTE (être à la) : Être aux galères, au bagne. (Rabasse.)

GROUCHY (Petit) : « Article arrivé en retard à l’imprimerie. » (Balzac.) — Allusion à la tradition contestée qui impute à Grouchy la lenteur de sa marche sur Waterloo.

GROUIN : Visage. — Animalisme. — « Allons, venez, z’amoureux des vingt mille Vierges, que j’ vous applique mon visage sus l’ grouin. » (Catéchisme poissard, 40.)

GRUE : Sot, sotte. — « Les regnards ne perchent plus au poulailler ; le monde n’est plus grue. » (Paraboles de Cicquot, 1593.)

GRUE : « C’est ordinairement une grande belle fille qui, ne sachant que faire, un beau matin s’improvise actrice et s’en va solliciter un engagement dans un théâtre de vaudeville. » (Duflot.)

GRUTOUSE (la) : La gale. (Rabasse.) — On a dû dire d’abord gratouse. Effet pris pour la cause.

GUEDOUZE : Mort. (Colombey.)

GUELTE : « La guelte était une prime accordée aux commis qui réussissent à vendre des marchandises défectueuses… Mais bientôt on s’aperçut que les employés ne s’occupaient que des articles gueltés. Alors on mit de la guelte sur toutes tes marchandises. » (Naviaux.) — Germanisme. De geld qui veut dire argent en allemand.

GUENAUD, GUENAUDE : Sorcier, sorcière. (Halbert.)

GUEULARD : Gourmand. Mot à mot : à grande gueule. — « V’là du résiné pour Zidore ; toi, t’auras rien, t’es trop gueulard. » (Ourliac.)

GUEULARD : Braillard.

GUEULARD : Poêle, sac. (Vidocq.) — L’un et l’autre avalent ce qu’on leur présente.

GUEULARDISE : Friandise.

GUEULE : Grosse voix. La cause est prise pour l’effet — « Molière était l’ami de l’avocat Fourcroi qui avait une voix de tonnerre. Une discussion s’éleva entre eux à table. Molière finit par dire : « Qu’est-ce que la raison avec un filet de voix contre une gueule comme celle-là ? » (Abbé Raynal, Anecdotes littéraires.)

Casser, crever la gueule : Frapper à la tête. — « Tu me fais aller, je te vas crever la gueule. » (A. Karr.)

Faire sa gueule : Faire le dédaigneux. Mot à mot : Faire sa tête.

Taire sa gueule : Cesser de parler. — Une caricature de 1840 porte cette légende : « Tu vas taire la gueule, ou j’te repasse un coup de savate par les fumerons. »

GUEULETON : Repas plantureux. Mot à mot : dont on a plein la gueule. — « Je ne vous parle pas des bons gueuletons qu’elle se permet, car elle n’est pas grasse à lécher les murs. » (Vidal, 33.) — « Chacun d’eux suivi de sa femme, à l’image de Notre-Dame, firent un ample gueuleton. » (Vadé, 1788.)

GUEULETONNER : Faire des gueuletons.

GUEUSARD : Terme amical. V. Gueux-gueux. « Appelle-moi gueusard, scélérat, lui dis-je. » (Amours de Mathieu, 32.) — « Et vous flânez souvent, gueusard ! » (E. Sue.)

GUEUSE : Prostituée. — « Il se ruina avec des gueuses, » écrit, en 1712, Saint-Simon, parlant du duc de Sully. V. Courailler.

GUEUX, GUEUSE : « Que j’en ai gagné de c’te gueuse d’argent ! » (H. Monnier.) — Pris en bonne part.

GUEUX : Chaufferette. — « Les dames des halles se servent de ces horribles petits pots en grès qu’on nomme des gueux. Elles les posent sur leurs genoux pour se réchauffer les doigts. » (P. d’Anglemont.)

GUEUX-GUEUX : Mot d’amitié.

Puis quand c’est fini, le gueux-gueux
Se bichonne avec élégance.
(Marquet.)

GUIBE, GUIBOLLE, GUIBON : Jambe. — Vieux mot, car on disait jadis guiber pour se débattre des pieds. — « Si nous prenions place. Ça me botte, vu que j’ai les guibolles affaiblies. » (J. Ladimir, 42.)

GUICHEMAR : Guichetier. (Vidocq.)

GUIGNOLANT : Malheureux. De guignon.

GUIMBARDE : Vieille voiture. — « Monsieur, pourquoi votre guimbarde n’est-elle pas prête ? » (Cormon.)

GUINAL : Juif. (Vidocq.) Mot à mot : circoncis. De guinaliser : circoncire.

GUIRLANDE : Chaîne d’accouplement des forçats. — « Le poids de la manille et de la chaîne est de douze livres à peu près. — On appelle cette chaîne guirlande, parce que, remontant du pied à la ceinture, où elle est fixée, elle retombe en décrivant un demi-cercle, dont l’autre extrémité est rattachée à la ceinture du camarade de chaîne. » (M. Christophe, 37.)

GUITARE : Rengaine. — Allusion ironique à l’école des troubadours classiques de 1820. Chaque volume de vers avait alors son portrait d’auteur drapé dans un manteau à grand collet et faisant vibrer son luth (guitare classique) au milieu de ruines éclairées par la lune. — « On désigne au théâtre sous le nom de guitare une sorte de plainte incessante, revenant comme un son monotone. » (Duflot.)

GY, GIROLLE : Oui, bien, très-bien. (Grandval.)