Dictionnaire historique d’argot /Édition Dentu/1881/C

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C


C (être un) : Être un imbécile. (Grandval.) Abréviation de c-o-n. — Au moyen âge, on disait conard dans le même sens. V. Lacombe, Dictionnaire du vieux langage. — Connerie (stupidité), et comtois (niais), sont de la même famille.

ÇA (c’est), UN PEU ÇA (c’est) : C’est superlatif. — « Ils sont laids que c’est ça. » (Pecquet.) — « C’était ça, presque aussi bath qu’au café. » (Monselet.) — « On me cognait, mais c’était ça. » (Zompach.) — « Restez, gendarme, mais ne remuez pas trop, car vous avez l’infirmité des pieds que c’est ça. » (Dernier jour d’un condamné.) — « S’il tournait une phrase de manière à lui donner de l’effet, les tricoteuses applaudissaient et s’écriaient : Là, c’est ça ! » (Lady Morgan, 18.)

ÇA (il a de) : Il a de l’originalité, du talent, du génie.

ÇA (Il a de) : Il est riche. — En disant ce mot, on fait ordinairement le geste de compter.

ÇA (elle a de) : Elle est riche d’appas.

CAB : Cabriolet à l’arrière duquel conduit le cocher. — « Là, il déjeuna à la hâte et demanda un cab. » (Ponson du Terrail.) — Anglicanisme.

CAB, CABOT, CABE : Chien. (Grandval.) — Contraction abrégée des deux mots : qui aboie. Les voleurs ont, comme ils le font souvent, donné le nom de l’acte à l’acteur. Au lieu, de dire le chien, ils ont dit : le qui aboie et en abrégeant : le qu’abe, le qu’abo. — Ce procédé est fréquent. Voyez Calvin, Combre.

CABAS : Femme avachie. — On dit : c’est un vieux cabas. Le mot appartenait déjà à l’ancienne langue provençale. En catalan, on dit cabaz ; en espagnol, capazo ; en italien, cabaco.

CABASSER : Tromper. (Colombey.) — Vieux mot.

CABERMONT : Cabaret. (Vidocq.) — Corruption de mot par changement de finales. V. Promont.

CABESTAN : Agent de police (Vidocq.) — Officier de paix. (Delvau.) V. Macaron.

CABILLOT : « L’ennemi naturel du matelot, c’est le soldat passager, plus souvent nommé cabillot, à cause de l’analogie qu’on peut trouver entre une demi-douzaine de cabillots (chevilles) alignés au râtelier et des soldats au port d’armes. » (Physiologie du matelot, 40.)

CAB, CABOT : Mauvais acteur. — Abréviation de cabotin.

CABOTINAGE : C’est le mauvais côté de la vie de comédien. — « La comédie de société, cet élégant cabotinage. » (Villemot.)

CABOTINE : Actrice médiocre ou nomade. — « L’actrice, sage ou non, est pour eux une cabotine. » (Ricard.) V. Cabotiner. — Le Dictionnaire de l’Académie donne Cabotin.

CABOTINER : Faire le métier de cabotin, fréquenter les cabotins, et, par extension, dans n’importe quelle classe, tomber dans les désordres de la vie d’artiste sans en avoir le beau côté. — Un petit roman de l’an VII (les Comédiens Ambulants), nous donne l’étymologie du mot dans ce passage : « Je parle des troupes de comédiens qui sont obligés de courir de ville en ville, et, pour me servir de la véritable expression, de cabotiner. » Ce métier de courir de ville en ville donne la clef du mot. Le cabotin est à l’artiste ce qu’un navire caboteur est à une frégate. — « Il a l’air artiste ; dans sa jeunesse il a tant soit peu cabotiné ; mais il a renoncé à Satan, à ses pompes et à ses œuvres. » (Privat d’Anglemont.)

CABOULOT : « Le caboulot est un petit café où l’on vend plus spécialement des prunes, des chinois et de l’absinthe. » (A. d’Aunay, 61.) Une monographie des Caboulots de Paris a paru en 1862. C’est aussi un cabaret de premier ordre. V. Camphrier.

CABRIOLE : chambrée (Rabasse.) — Forme de cambriole.

CABRIOLET : Hotte de chiffonnier. — Ironie, Le chiffonnier roule (marche) avec son cabriolet comme le fantassin part à cheval sur Azor. V. Cachemire d’osier.

CABRIOLET : Chapeau de femme. — Date du temps où sa forme haute ressemblait assez à la capote d’un cabriolet.

CABRIOLET : Petite corde courte terminée par une double poignée. — « Lorsqu’on ne ligotte pas un malfaiteur, il y a a le cabriolet qui sert à le tenir par le poignet droit. » (Rabasse.)

CACHEMIRE : Torchon. — Ironie. On dit : « Donnez un coup de cachemire, » pour « essuyez la table ! »

CACHEMIRE D’OSIER : Hotte de chiffonnière. — « Lorsque vous voyez un de ces braves philosophes des faubourgs portant crânement son cabriolet sur le dos, ou une pauvre femme pliée sous son cachemire d’osier, vous ne pouvez vous figurer tout ce que renferment ces hottes pleines. » (Privat d’Anglemont.) — Cette ironie devait naître dans le monde des chiffonnières où les femmes déchues ne manquent pas. La hotte se met comme le cachemire sur le dos.

CACHEMITTE : Cachot. (Grandval.) — Les rongeurs n’y manquent pas. C’est un jeu de mots avec changement de finale.

CACIQUE : « C’était le temps où Taine était un cacique, c’est-à-dire le premier de sa section à l’École normale. » (D’Audigier, 66.)

CADAVRE : Preuve d’une action répréhensible. — On dit : il y a un cadavre, en parlant de deux personnes dont les relations ne s’expliquent pas et qu’on suppose liées par leur complicité dans quelque mauvaise action. — Savoir où est le cadavre est posséder la preuve de cette mauvaise action. — « P… n’a plus qu’à se taire. On sait où est le cadavre. Chaque fois qu’il voudra prendre la parole, on s’écriera : « Et le débit de tabac ? » (A. Scholl.)

CADAVRE : Corps vivant. — Nourrir son cadavre, c’est manger. — Ironie à l’adresse des ascètes.

CADELLE : Chaîne de montre. (Rabasse.) — Forme moderne de Cadenne.

CADENNE : Chaîne. (Vidocq.) — Vieux mot où se retrouve le latin Catena.

CADET : Derrière.

Sur un banc elle se met,
C’est trop haut pour son cadet.
(Vadé, 1756.)

CADET : Pince en fer pour forcer les portes (Grandval.) Voir Caroubleur.

CADET : Apprenti maçon.

CADET : Individu. — Pris en mauvaise part. Jadis le cadet n’avait, dans le monde, qu’une considération proportionnée à sa fortune, qui était nulle. — « Le cadet près de ma particulière s’assoit sur l’ banc. » (Le Casse-Gueule, chanson, 14.) — Une caricature de 1830 porte cette légende : « C’est de fameux cadets. Ils ont trouvé moyen de faire de la panade avec du pain. »

CADICHON : Montre. (Vidocq.) Diminutif de Cadran.

CADRAN : Montre. — Partie prise pour le tout.

CADRAN SOLAIRE, CADRAN LUNAIRE : Derrière. — Allusion à la forme ronde du cadran. Voir Lune.

Est-ce l’apothicaire
Qui vient placer l’aiguille à mon cadran lunaire ?
(Parodie de Zaïre, xviiie siècle.)

CAFARDE : Lune. (Vidocq.) — C’est la lune voilée se dissimulant derrière un nuage avant d’être la Moucharde, c’est-à-dire de dévoiler un homme qui fait un mauvais coup.

CAFARDER : Faire l’hypocrite, le cafard. — « En sorte qu’il cafarde avec sa malade. » (Balzac.) — Cafard est un mot déjà ancien, comme le prouve cet exemple : « Un cafard qui eust oublié en son sermon soy recommander. » (Rabelais, Pantagruel, v. 4. ch. XLVI.)

CAFÉ (fort de), FORT DE CHICORÉE, FORT DE MOKA : Excessif, peu supportable. — On sait quelle irritation le café trop fort cause dans le système nerveux. La chicorée jouit des honneurs peu mérités du synonyme. Il semble qu’ici, comme dans le café du pauvre, elle tient à entrer en fraude. En revanche, on sait que le moka tient le haut de l’échelle. — « On dit : c’est un peu fort de café, pour exprimer que quelque chose passe les bornes. » (Dhautel.) — « Oh ! oh ! dirent Schaunard et Marcel, ceci est trop fort de moka. » (Murger.) — « S’unir à un autre ! c’est un peu fort de chicorée. » (Cormon.)

CAFÉ (prendre son) : Rire, se moquer. — Honnorat, dans son Dictionnaire provençal, donne comme méridionale l’expression prendre soun café : S’amuser aux dépens de quelqu’un. — Un dessin de Bertall fait dire à une bonne poursuivie par un troupier galant : — « Ah ! fusilier, vous voulez prendre votre café. »

CAFIOT : Café faible. — « Elle restait là tant que je n’avais pas mangé mon petit cafiot. » (Commentaires de Loriot.)

CAGETON : Hanneton. (Halbert.)

CAGNE : Mauvaise chienne, mauvais cheval et par extension personne lâche. Vieux mot. Voir Rosse.

CAGNE : Gendarme. (Colombey.) — Pour Cogne.

CAGNOTTE : « Espèce de tirelire d’osier recevant les rétributions des joueurs. » (Montépin.) L’Intermédiaire de mars 1866 y voit avec raison une corruption du mot gagnotte. Mot à mot : lieu où se dépose ce qu’on gagne. — « Le lansquenet brille, la cagnotte est dans son plein. » (Lespès.)

Faire une cagnotte : Mettre les gains du jeu en réserve pour une dépense profitable à tous.

CAGOU : Voleur solitaire. (Grandval.)

CAGOU : Maître voleur chargé d’instruire les novices. (Colombey.)

CAILLÉ : Poisson. Mot à mot : couvert d’écailles. Autrefois on disait caille et non écaille.

CAILLOU : Figure. (Rabasse.) — Allusion d’ovale et de blancheur.

CAIMAN : Mendiant. — Vieux mot. La langue usuelle a conservé quémander.

Puisque pauvre et caimande on voit la poésie.
(Régnier, Satire 4.)

CAISSE (battre la grosse) : Louer très bruyamment. — Allusion aux bateleurs qui attirent leur public à coups de grosse caisse. — « Il faut qu’Artémise réussisse… C’est le cas de donner de la grosse caisse à se démancher le bras. » (L. Reybaud.) — On dit simplement battre la caisse pour : faire des annonces.

CAISSE (sauver la) : S’enfuir avec les fonds dont on est dépositaire. — À la mode depuis le fameux mot de Bilboquet dans la pièce des Saltimbanques : Sauvons la caisse ! — « Mais j’entends du bruit dans le bazar ; sauvons la caisse. » (Villars.) — « On a des nouvelles de Miron qui avait sauvé la caisse. » (Claretie.)

CAISSON (faire sauter le) : Faire sauter la cervelle d’un coup de feu, comme un caisson plein de munitions. — « Quelle mort préférez-vous ?… Faites-moi sauter le caisson. » (P. Borel, 33.)

CALABRE : Teigne. (Halbert.) — C’est calot avec changement de finale.

CALAIN : Vigneron. (Halbert.) — Ce doit être une mauvaise lecture pour Calvin.

CALÉ : Riche. — Le terme vient évidemment de la marine. Être calé, c’est avoir assez de biens pour en remplir sa cale ou sa maison. Donné en 1803 par Dhautel. — « Les jours gras ! Dans cette saison, les plus calés sont quelquefois gênés. » (E. Sue.) — « Je crois que nous aurons du joli monde… des calés. » (Jaime.)

CALEBASSE : Tête. — Allusion de forme. — « Faudrait pas gros de sens commun pour remplir une calebasse comme ça. » (Gavarni.)

CALÉGE : Prostituée élégante. — « La calége vend très-cher ce que la ponante et la dossière livrent à des prix modérés. Sa toilette est plus fraîche, ses manières plus polies. Elle a pour amant un faiseur ou un escroc, tandis que les autres sont associées avec un cabriolleur ou à un roulotier. » (Vidocq. ) Calége vient de cale, qui signifiait grisette au xviie siècle. — « Gombault, qui se piquait de n’aimer qu’en bon lieu, cajolait avec une petite cale crasseuse. » (Tallemant des Réaux.)

CALER : Faire. (Colombey.)

CALER : Ne rien faire. — Du vieux mot caler, se cacher. — « La plus grande jouissance du compositeur d’imprimerie est de caler. » (Ladimir.)

CALEUR : Ouvrier fainéant. V. Ogre.

CALEUR : Garçon. (Colombey.)

CALICOT : Commis marchand. Mot à mot : vendeur de calicot. — « Triple escadron ! le calicot s’insurrectionne. » (P. Borel, 33.) — « Dans le commerce même de la nouveauté, Calicot désigne les employés qui ne sont pas sérieux, qui s’amusent bruyamment. » (Naviaux.)

CALICOTE : Femme fréquentant les calicots. — « Clara Fontaine est une étudiante. Pomaré est une calicote. » (Paris dansant, 44.)

CALIFORNIEN : Riche. — Allusion aux découvertes aurifères de la Californie (49). — «La jeune fille regrettait de ne pouvoir garder pour elle-même cette bonne fortune californienne. » (Montépin.)

CALINO : Homme ridiculement naïf. — Une pièce du Vaudeville a vulgarisé vers 1858 le nom et le type. Calino n’est, d’ailleurs, qu’un diminutif du vieux mot calin (niais). On le trouve dans Tallemant des Réaux (t. 4, p. 351). — « L’artiste était fort ennuyé par une espèce de calino. » (Figaro.)

CALINTTES : Culottes. (Petit Dictionnaire d’argot, 44.) — On a modifié les voyelles des deux premières syllabes de culottes.

CALLOT : Teigneux (GrandvaL) Pour Calot.

CALME ET INODORE (être) : Affecter une sévérité extrême de manières. — Ces deux mois ironiques ne vont jamais l’un sans l’autre, et parodient sans doute quelque manuel de civilité puérile et honnête. « Autrement, il restera calme et inodore. » (Monselet.)

CALOQUET : Chapeau. — Ce diminutif du vieux mot Câle : capuchon, désignait n’importe quelle coiffure de femme en 1808. (Dhautel.) Il s’est étendu ensuite aux chapeaux d’hommes. — « V’là Tonnelier ! oh ! c’ chapeau. Oh ! ce caloquet. » (Ourliac). — « Achetez un caloquet plus méchant, le vôtre n’est pas trop rup. » (De Neuville.)

CALOQUET : Couronne. Voir Dab.

CALORGNE : Borgne. Vieux mot.

CALOT : Dé à coudre, coquille de noix (Vidocq . ) — Comparaison de ces objets à la calotte, qui est de même forme.

CALOT, CALOTTE : Teigneux. (Halbert. ) Mot à mot : Ayant une calotte de teigne. — « Voyez donc c’te margot avec sa tête à calot. » (Catéchisme poissard.)

CALOTTÉE : « Le père Salin recueille les asticots dans des boîtes de fer-blanc qu’on nomme calottées, et il les vend jusqu’à quarante sous la calottée. » (Privat d’Anglemont.)

CALOTTER : Frapper de la main sur la tête. Mot à mot : fabriquer des calottes avec la main. — « Calottez-moi, giflez-moi. » (J. Arago, 38.) V. Escoffier.

CALOTTIN : Ecclésiastique. Mot à mot : porteur de la calotte cléricale. — « Ils ont chacun un calottin. » (H. Monnier.)

Le mot est ancien. Dans le Déjeuner de la Râpée (pièce publiée vers 1750) nous voyons une poissarde repousser un abbé en disant : « Adieu, monsieur le calottin ! »

CALVIGNE, CALVINE : Vigne. (Vidocq, Grandval.) Mot à mot : lieu qu’a l’vigne, qui a la vigne, qui est planté de vignes.

CALVIN, CLAVIN : Raisin. (Idem.) Mot à mot : qu’a l’ vin. V. Cabe.

CAMARADE (bon petit) : Se dit des confrères qui vous desservent. Allusion ironique aux fausses amitiés. — « En dépit des bons petits camarades, Pif Paf est un succès. » (Tam Tam, 76.)

CAMARDE : La mort. (Grandval.) — Un squelette n’a pas de nez. (V. Carline.)

Baiser la camarde : Mourir. (Bailly.)

CAMARDER : Mourir. (Rabasse.)

CAMARLUCHE : Camarade. (Rabasse.) C’est la première partie du mot camarade, avec la désinence arbitraire luche.

CAMBOLER : Tomber. — De Caramboler. — « V’là qu’elle cambole sur son Prussien et feint de tomber de son digue-digue. » (Decourcelle, 40.)

CAMBRIOLLE : Chambre. — Diminutif du vieux mot cambre : chambre. V. Pieu, Esquintement, Rincer.

CAMBRIEUX : Chapeau (Halbert.) — Pour Combrieu. V. ce mot. V. Combre.

CAMBRIOLLEURS : Voleurs s’introduisant dans les cambriolles par effraction ou par escalade. — Canler les divise en six classes. Vidocq, sans apporter autant de méthode que Canler dans la classification des cambriolleurs, donne des particularités assez curieuses sur leurs costumes où dominent les bijoux et les cravates de couleurs tranchées, telles que le rouge, le bleu et le jaune ; sur la manie singulière de faire faire leurs chaussures et leurs habits chez les mêmes confectionneurs, ce qui n’était souvent pas un petit indice pour la justice ; sur leur habitude de se faire accompagner d’une fausse blanchisseuse dont le panier cache leur butin. — Les plus dangereux cambriolleurs sont appelés nourrisseurs, parce qu’ils nourrissent une affaire assez longtemps pour en assurer l’exécution, et autant que possible l’impunité. V. ce mot. V. Calége.

CAMBRIOT : Le chapeau. (Rabasse.) C’est une forme de combriot, diminutif de combre. Voir ce mot.

CAMBRONNE (le mot de) : Merde ! — Cette allusion à un mot historique discuté, sert parfois d’équivalent à une injure trop populaire. Que Cambronne l’ait dit ou non, on ne lui en fera pas moins honneur. Consulter à ce sujet, un chapitre des Misérables de M. Victor Hugo ; un article de M. Cuvillier-Fleury, aux Débats, et enfin le journal l’Intermédiaire, 15 février 64.

CAMBRONNE : Scatologique. — Même origine, — « M. Vatout avait l’amabilité un peu Cambronne ; la chanson qu’il préférait était celle écrite sur le maire d’Eu. « (de Bassanville, 66.)

CAMBROUX, CAMBROUSE : Serviteur, servante. (Grandval et Halbert.) — Changement de finale du vieux mot : cambrier ; valet de chambre. Chambrière est resté.

CAMBROUSE : Prostituée. V. Camperoux.

Ce mot se trouve dans le dictionnaire de Caillot (1829), avec cet exemple : « Et que tu ne sois qu’une cambrouse. » (Ancien Théâtre-Italien.)

CAMBROUSE : Campagne. — « La rousse pousse comme des champignons, et même dans la cambrouse, ils viennent vous dénicher. » (Patrie, 2 mars 52.) V. Garçon.)

CAMBROUSIEN : Campagnard. (Rabasse.)

CAMBROUSIER : Voleur de campagne. (Vidocq.)

CAMBROUSIER : « Au marché du Temple, les cambrousiers faisaient indistinctement commerce de linge ou de meubles, d’objets de toilette ou de ferraille. » (Petit Journal, 65.)

CAMBROUSIERS : Gens de campagne. (Halbert.) — « C’est ainsi que les marchands forains nomment les paysans. » (Pr. d’Anglemont.)

CAMBUSE : Cantine. — Terme de marine. — « Dans la cour du bagne, ou au milieu de la longueur de chaque salle ou dortoir, se trouve un espace entouré de grilles, qui contient la cantine ou caverne, autrement dit la cambuse, lieu de la distribution des vivres, du vin, du tabac. » (Moreau, 37.)

CAMBUSE : Petite maison. (Halbert.)

CAMELOT : Voleur. — Acception figurée de camelot : mauvaise étoffe. V. ce qui en est dit à camelotte. C’est ainsi qu’on a fait panné avec panne.

CAMELOT : Marchand de camelotes, vendant dans les villages ou exposant sur le pavé des rues. — « Camelot, c’est-à-dire marchand de bimbeloteries dans les foires. » (Privat d’Anglemont.)

CAMELOTTE : Objet de nulle valeur. — Le camelot était une si mauvaise étoffe, qu’on disait ressembler au camelot pour prendre un mauvais pli. — « Elle portait la peine de toutes les camelottes qui se débitaient à son ombre. » (L. Reybaud.)

CAMELOTTE : Marchandise volée. (Rabasse.) — «  On fait attention qu’il ne refile pas la camelotte à un autre. » (Stamir, 67.)

Camelotte en pogne, camelotte dans le pied : En flagrant délit de vol. _ « J’ai été pris la camelotte dans le pied. » (La Correctionnelle.) Même allusion dans pris sur le tas.

CAMELOTTER : Vendre, marchander. (Halbert.)

CAMERLUCHE : Forme de Camarluche. V. Ponton.

CAMISOLE : Gilet. (Colombey.)

CAMOUFLE : Chandelle. (Vidocq.) — Du vieux mot camouflet, fumée. — « Tu en as menti. La camoufle était éteinte. » (Ladimir, 41.)

CAMOUFLEMENT : Déguisement. (Vidocq.)

CAMOUFLER : Déguiser. — « Je me camouflais et avec de faux faffes, j’allais dans les bureaux de placement. » (Beauvillier.)

CAMOUFLET : Chandelier. (Vi)

CAMP (ficher le) : Se retirer précipitamment. V. Ficher.

CAMPAGNE (aller à la) : Être enfermée à la maison de Saint-Lazare. — Usité parmi les filles qui lui donnent aussi le sens suivant : « Elles ont disparu trois, quatre ou six mois. On les savait malheureuses. Elles ont été passer une saison à la campagne dans une maison de prostitution de province. » (Ces Dames, 60.)

CAMPE : Fuite, action de camper. « Cependant les messiers de cambrouse n’ont pas la même chaleur à pessigner les fagots en campe. » (Rabasse.)

CAMPER : Décamper. (Id.) — Abréviation.

CAMPEROUX : Fille. — Corruption de Cambrouse. V. Connerie.

CAMPHRE : Eau-de-vie. — Allusion à une eau-de-vie composée dont il est question dans l’exemple suivant. Le mot s’est généralisé ensuite : — « Le vinaigrier du coin nous servit, en parlant politique, deux demi-poissons d’eau de-vie assaisonnée de poivre long et de camphre. » (Le Figaro de la Révolution.) — « Aux buveurs émérites et à ceux qui ont depuis bien des années laissé leur raison au fond d’un poisson de camphre. » (Privat d’Anglemont.)

CAMPHRÉ : Alcoolisé. — « Dis donc, avec ton gosier camphré, tu fais bien des embarras. » (Catéchisme poissard, 44.)

CAMPHRIER : Buveur d’eau-de vie. — « Entends-tu, vieux camphrier, avec ta voix enrhumée. » (Catéchisme poissard, 44.)

CAMPHRIER : Le camphrier est un sale débit de liqueurs atroces à un sou le verre et à dix-sept sous le litre. Le caboulot ne diffère du camphrier que par sa moindre importance comme établissement. C’est, du reste, le même breuvage qu’on y débite aux mêmes habitués. » (Castillon.)

CAMPLOUSE : Campagne. (Halbert.) — Forme adoucie de cambrouse.

CAMUSE : Carpe. (Grandval.) — Elle a le nez camus, si on la compare au brochet.

CAN SUR LE COMP (prendre un) : Prendre un canon sur le comptoir. Double abréviation. V. Canon.

CANAILLE : Rusé, malicieux. — Se dit amicalement. — « Elle m’a dit qu’elle me donnerait son adresse ; mais je ne la lui ai pas demandée. — C’est canaille ! » (T. Delord.)

CANAGE : Agonie. (Colombey.) V. Caner.

CANARD : Fausse nouvelle, récit mensonger inséré dans un journal. — « Nous appelons un canard, répondit Hector, un fait qui a l’air d’être vrai, mais qu’on invente pour relever les Faits-Paris quand ils sont pâles. » (Balzac.) — « Ces sortes de machines de guerre sont d’un emploi journalier à la Bourse, et on les a, par euphémisme, nommées canards. » (Mornand.) — Une anecdote du tome 1er du Dictionnaire de l’Industrie (Paris, Lacombe, 1776), semble nous livrer l’origine de ce mot :

On lit, dans la Gazette d’agriculture, un procédé singulier pour prendre les canards sauvages. On fait bouillir un gland de chêne, gros et long, dans une décoction de séné et de jalap ; on l’attache par le milieu à une ficelle mince, mais forte ; on jette le gland à l’eau. Celui qui tient le bout de la ficelle doit être caché. Le gland avalé purge le canard qui le rend aussitôt : un autre canard survient, avale ce même gland, le rend de même ; un troisième, un quatrième, un cinquième s’enfilent de la même manière.

On rapporte à ce sujet l’histoire d’un huissier, dans le Perche, près l’étang du Gué-de-Chaussée, qui laissa enfiler vingt canards ; ces canards, en s’envolant enlevèrent l’huissier. La corde se rompit, et le chasseur eut la cuisse cassée.

Ceux qui ont inventé cette histoire auraient pu la terminer par une heureuse apothéose, au lieu de la terminer par un dénoûment aussi tragique.

La grossièreté de cette histoire, comme dit notre citation, — l’aura fait prendre comme type des contes de gazette, et canard sera resté pour qualifier le genre entier. On trouve « donner des canards : tromper » dans le dictionnaire d’Hautel (1808).

CANARD : Imprimé banal crié dans la rue comme nouvelle importante. V. Canardier.

CANARD, COUAC : « Ces explosions criardes des instruments à vent si connues sous le nom de canards. » (A. Luchet.) — Le second mot est une onomatopée (couac) ; la comparaison d’une fausse note au cri du canard a fait former le premier.

CANARD : Sobriquet amical donné aux maris fidèles. Le canard aime à marcher de compagnie. — « Voici, mon canard, dit-elle… Or, le canard de madame Pochard, c’était son mari ! Il avait reçu de sa douce moitié ce sobriquet d’amour. » (Ricard.)

CANARD sans plumes : Nerf de bœuf servant à la correction des forçats. (Colombey.) — Jeu de mots signifiant grosse canne qui n’a pas la douceur des plumes.

CANARDER : Tromper. — « On a trop canardé les paroissiens… avec la philanthropie. » (Gavarni.)

CANARDIER : Crieur, confectionneur de fausses nouvelles. — « Place au célèbre Edouard, le canardier par excellence, le roi des crieurs publics ! » (Privat d’Anglemont.)

CANASSON : « Nom familier donné à leurs chevaux par les cochers de Paris. » (Lem. de Neuville.) — « Traitez de canassons les chevaux de M. de Lagrange. » (Marx.) — On dit en abrégeant can’son.

CANCAN : Se dit d’une certaine manière de danser le quadrille, avec des mouvements de bras, de jambes, de tête et de croupe, non prévus par la chorégraphie régulière. Cette danse paraît être née dans le quartier Latin, sous la monarchie de Juillet ; mais son nom existait déjà. Le Dictionnaire du vieux langage de Lacombe (1766) explique ainsi le mot cancan : — « Grand tumulte ou bruit dans une compagnie d’hommes et de femmes. » Cela répond assez exactement, on le voit, à la signification actuelle.

Messieurs les étudiants,
Montez à la Chaumière,
Pour y danser l’ cancan.
Et la Robert-Macaire.
(Letellier, 1836.)

« Nous ne nous sentons pas la force de blâmer le pays Latin, car, après tout, le cancan est une danse fort amusante. » (L. Huart, 1840.) — M. Littré n’est pas aussi indulgent. Il dit : Cancan, sorte de danse inconvenante des bals publics, avec des sauts exagérés et des gestes impudents, moqueurs et de mauvais ton. Mot très-familier et même de mauvais ton. (Littré, 1864.) V. Chahut : — « Nous avons le cancan gracieux, la saint-simonienne, le demi-cancan, le cancan, le cancan et demi et le chahut. Cette dernière danse est la seule prohibée. » (Alphonse Karr.) — « On va pincer un léger cancan, mais bien en douceur. » (Gavarni.)

Voici, pour les archéologues, une description exacte du cancan d’il y a trente-cinq ans. Elle est extraite des Nouvelles à la main de 1841 :

« L’étudiant se met en place, les quadrilles sont formés. Dès la première figure se manifestent chez tous une frénésie de plaisir, une sorte de bonheur gymnastique. Le danseur se balance la tête sur l’épaule ; ses pieds frétillent sur le terrain salpêtré : à l’avant deux, il déploie tous ses moyens : ce sont de petits pas serrés et marqués par le choc des talons de bottes, puis deux écarts terminés par une lançade de côté. Pendant ce temps, la tête penchée en avant se reporte d’une épaule à l’autre, à mesure que les bras s’élèvent en sens contraire de la jambe. Le sexe ne reste pas en arrière de toutes ces gentillesses ; les épaules arrondies et dessinées par un châle très-serré par le haut et traînant fort bas ; les mains rapprochées et tenant le devant de sa robe, il tricotte gracieusement sous les volans de sa jupe que soulèvent des petits coups de pied réitérés ; tourne fréquemment sur lui-même ; et exécute des reculades saccadées qui détachent sa cambrure. Toutes les figures sont modifiées par les professeurs du lieu, de manière à multiplier le nombre des : En avant quatre. À tous ces signes, il n’est pas possible de méconnaître que ce qu’on danse à la Chaumière. C’est le… cancan. » (Roqueplan.)

CANCANER : Danser le cancan. — « J’ai cancané que j’en ai pus de jambes. » (Gavarni.)

CANCRE. : Mauvais élève. — Allusion au cancre de mer qui recule au lieu d’avancer. V. Piocheur.

CANE : Mort. V. Canage. — C’est l’heure où l’on a peur, où on cane.

CANELLE : Caen. — C’est un diminutif avec transposition de la seconde voyelle.

CANER : Avoir peur, reculer, plonger, comme fait une cane. — Vieux mot. — « Par Dieu ! qui fera la cane de vous aultres, je me donne au diable si je ne le fais moyne’ » (Rabelais.) — « Laurent de Médicis… voyant mettre le feu à une pièce qui le regardait, bien luy servit de faire la cane, car aultrement le coup qui ne lui rasa que le dessus de la teste luy donnait dans l’estomach. » (Montaigne.) — « Oui, vous êtes vraiment français ; vous n’avez cané ni l’un ni l’autre. » (Marco de Saint-Hilaire.)

… Madame prend son criard,
Monsieur cane comme une victime,
(Festeau.)

CANER la pégrenne : Mourir de faim. (Colombey.)

CANER : Agoniser, mourir. (Vidocq.) — Les approches de la mort vous font peur, vous font caner. V. Rengracier.

CANER : Aller à la selle. (Moreau C.)

CANESON (mon vieux) : Terme d’amitié. Mot à mot : mon vieux cheval. V. Canasson.

CANEUR : Poltron.

CANICHE : Ballot carré. (Vidocq.) — Sa couverture de toile se prend par les coins qui forment des oreilles semblables à celles d’un petit chien.

CANIF dans le contrat (donner un coup de) : Commettre une infidélité conjugale. — « Et puis ces messieurs, comme ils se gênent pour donner des coups de canif dans le contrat ! La Gazette des Tribunaux est pleine de leurs noirceurs, aussi nous sommes trop bonnes. » (Festeau.) — « Elle avait tellement trépigné dans le coup de canif, que c’est à peine s’il restait quelque chose du contrat. » (Vie parisienne, 55.) — « La poste restante agrandie, c’est la multiplication des coups de canif. » (Presse illustrée, 66.)

CANNE : Surveillance de la haute police. — Il y a la canne majeure et la canne mineure. — Être en canne : Habiter après avoir subi sa peine, une localité déterminée par l’autorité. — Se dit aussi abusivement pour casser sa canne.

Casser sa canne : Quitter sans autorisation la ville désignée, rompre son ban. — « Malheur à lui s’il a cassé sa canne. » (Stamir, 1867.)

CANON : Mesure de liquide en usage chez les marchands de vins de Paris. — Vient de canon qui signifie verre dans le vocabulaire des francs-maçons. — « Oscar : Prenons-nous un canon ? — Le marquis (hésitant) : Heu… heu… — Oscar : C’est moi qui paye. — Le marquis : Oh ! alors. » (Marquet.)

Les canons que l’on traîne à la guerre
Ne valent pas ceux du marchand de vin.
(Branin, 26 )

CANONNIER DE LA PIÈCE HUMIDE : Infirmier militaire. — La pièce humide est, comme on s’en doute, la seringue.

CANONNIÈRE : Derrière. Même allusion que dans pétard.

CANTALOUP : Niais. — Synonyme de Melon. — « Ah çà ! d’où sort-il donc, ce cantaloup ? Sur quelle couche M. son papa l’a-t-il récolté, ce jeune légume ? » (Ricard.)

CANTER : Galop d’essai précédant la course. — « On dit d’un cheval qu’il prend son canter. » (Paz.) Angl.

CANTON : Prison. (Grandval.) — Du vieux mot canton : coin. C’est dans les coins qu’on est à l’ombre. On a de même appelé cognard le gendarme qui vous met dans le coin, qui vous y rencogne.

CANTONNIER : Prisonnier. (Grandval.) — De canton : prison.

CANULANT : Ennuyeux. — Mot inventé par les ennemis du clystère. — « Le colonel fait des siennes. En v’là un qui peut se vanter d’être canulant. » (Commentaires de Loriot.)

CANULE : Homme canulant.

CANULER : Importuner. — « C’est canulant. » (H. Monnier.)

CANUT : « Ouvrier en soie de Lyon, pauvre animal expiatoire du Rhône, à la face jaune et misérable. » (Ricard.)

CAP : Surveillant du bagne. — Du vieux mot cap : chef (caput.) — « Le commissaire du bagne a sous ses ordres, pour la surveillance des forçats, un grand nombre d’agents. Ces divers agents sont divisés en agents de police et de surveillance intérieure et en gardes. Les premiers sont les comes ou comites, au nombre de trois ou quatre, les argousins trois, les sous-comes dix-huit, sous-argousins dix-huit, et les caps, espèces de piqueurs, pour diriger les travaux. » (Moreau Christophe, 37.)

CAPAHUTER : Assassiner son complice pour s’approprier sa part. — Du nom de Capahut, malfaiteur coutumier de ce procédé. (Vidocq.)

CAPE : Écriture. (Halbert.)

CAPET : Chapeau. — Vieux mot. Capel (chapeau), se prononçait capé au moyen âge.

CAPINE : Écritoire. (Halbert.)

CAPIR : Écrire. (Id.)

CAPITAINAGE : Agiotage. (Vidocq.)

CAPITAINER : Agioter. Mot à mot manœuvrer son capital.

CAPITULARD : Homme qui capitule. — Cette sotte injure fut d’abord adressée en 1871 à une armée irresponsable qu’on ne pouvait accuser de nos malheurs. — « Lâche, capitulard, soldat à Badinguet, et autres aménités, allèrent leur train. » (Éclair, 72.)

Le terme s’est ensuite généralisé. « Tous ces trembleurs, ces capitulards, qui ne peuvent se passer du cadenas de l’état de siège. » (Saint-Genest, 75.)

CAPON : Filou. (Idem.)

CAPONS : Écrivains. (Grandval.) Il s’agit ici de ceux qui écrivent des lettres pour les autres. On trouve capous dans Halbert.

CAPORAL : Tabac à fumer. — Il est plus fin que celui dit de soldat, ou de cantine, vendu à un prix moindre. — « Un fumeur très-ordinaire brûle à lui seul son kilogramme de tabac par mois. » (A. Luchet.)

CAPRICE : Vive et subite affection. — « Tu es mon caprice, et puisque qu’il faut sauter le pas, que du moins j’y trouve du plaisir. » (Rétif, 1776.) — Le caprice ne dure pas longtemps, mais il est désintéressé. — « Plus capable de caprice que la femme entretenue, moins capable d’amour que la grisette, la lorette a compris son temps, et l’amuse comme il veut l’être. » (Th. Gautier.)

Faire des caprices : Séduire à première vue, inspirer des caprices. — « J’en fais t’y des caprices ! Aussi, avec une balle comme ça, on peut tout se permettre. » (Lamiral, 1838.) V. Boule.

CAPSULE : Chapeau d’homme affectant les petits bords et la forme cylindrique d’une capsule de fusil. V. Carreau.

CAPUCINE (jusqu’à la troisième ) : Complètement ivre, c’est-à-dire en ayant jusqu’au menton. La troisième capucine est près de la bouche du fusil. — « Veuillez excuser notre ami, il est gris jusqu’à la troisième capucine. » (Murger.)

CARABINE : Maîtresse d’un carabin ou étudiant en médecine. Carabin signifiait garçon barbier au temps où les barbiers pratiquaient la chirurgie et s’armaient de la seringue, comparée dérisoirement à une carabine. « Sois tant que tu pourras étudiante en droit, Carabine. » (Almanach du Diable amoureux, 49.)

Son petit air mutin
Plaît fort au quartier Latin,
C’est Flora la Carabine. (J. Choux.)

CARABINE : Fouet du conducteur du train. — Comparaison ironique de son claquement à la détonation d’une carabine.

CARABINÉ : De première force. — Terme de marine. On sait qu’un vent carabiné est très-fort. — « On s’attend à une baisse carabinée à la Bourse. » (Vie parisienne, 68.) — « Le cordonnier poëte Bochart vient de le lui reprocher en vers carabinés. » (Leguillois.)

Redoutez les veinards et leur chance obstinée ;
Fuyez au loin leur veine : elle est carabinée.
(Alyge )

CARAMBOLAGE : Chute, succession de chocs. — Ce terme du jeu de billard est passé dans le domaine des accidents et des voies de fait. — « Fixe ! À ce mot survint un coup de roulis suivi de carambolages sur toute la ligne. » (Paris comique, août 70.)

CARAMBOLER : Tomber, faire tomber en ricochant. — « Leur père qui carambole, en ruinant son fils et sa fille. » Balzac.

CARANT : Planche. (Halbert.)

CARANTE : Table. (Id.)

CARAPATA : Marinier d’eau douce. — « Les carapatas sont les marins du canal de l’Ourcq, passant leur vie sur l’eau tout comme leurs confrères de l’Océan. » — (A. Scholl, 66.) — « Les mœurs des carapatas sont des mœurs à part. Ce sont les hommes de l’eau. » (Privat d’Anglemont, 50.)

CARAPATER (se) : Se sauver. (Rabasse.)

CARBELUCHE GALICÉ : Chapeau de soie. (Halbert.) — Allusion à la peluche de soie qui le couvre.

CARCAGNO : Usurier (Vidocq.)

CARCAN : Cheval étique, femme maigre, revêche. — « C’est pas un de ces carcans à quernoline qui balayait le macadam. » (Monselet.)

CARDINALE : Lune. — Allusion à la couleur des menstrues (appelées jadis le cardinal), qui reviennent avec la lune nouvelle. C’est comme si on disait la rouge ; on sait que c’est la couleur des cardinaux. — M. Francisque Michel cite à ce propos une poésie manuscrite de son cabinet.

Mon cardinal est paresseux
Et ne suit pas sa piste.
S’il ne vient, j’en suis aux abois,
J’en tremble, j’en soupire.
Quand on l’a perdu pour neuf mois,
A-t-on sujet de rire ?

CARDINALISER : Rougir. — « Exceptez les escrevisses que l’on cardinalise à la cuicte. » (Rabelais.) — « Il buvait… de manière à se cardinaliser la figure. » (Balzac.)

CARE (Voler à la), carer, caribener. — Voler un marchand en proposant un échange avantageux de monnaies anciennes contre des nouvelles. (Vidocq.) — Care et carrer sont des formes anciennes de charriage et de charrier (Voir ces mots) ; Caribener est un diminutif.

CAREUR : Voleur à la care. V. Carreur.

CARGE : Balle. (Halbert.) Mot à mot : charge. La balle de colporteur est une charge.

CARGOT : Cantinier. — Corruption de gargoter. V. Aide.

CARIBENER : V. Care.

CARLE : Argent. (Vidocq.) Forme française de Carolus, monnaie qu’on commença de frapper sous le roi Charles VIII. — « Le cidre ne vaut plus qu’un carolus. » (Ol. Basselin.) — « J’ay une verge d’or, accompagnée de beaux et joyeux carolus. » (Rabelais, Pantagruel, l. III, ch. XVII) V.Bayafe. — On dit par corruption Carme.

CARLINE : La mort. (Vidocq.) — Allusion au nez camus de Carlin. Jadis on appelait la mort camarde, parce qu’une tête de mort n’a pour nez qu’un os de très-faible saillie. On l’appelle aussi camuse pour la même raison.

CARLISTE : Dévoué à la monarchie de Charles X. On appelle de même Henri quinquistes les partisans du comte de Chambord (Henri V). — « Ah ! ben oui ! carliste ! M. Péguchet ? Ben du contraire, il méprise ben trop les prêtres pour ça. » (H. Monnier.) — « Il y avait alors à Sainte-Pélagie deux catégories, les carlistes et les républicains. » (Chenu.)

CARME : Miche. (Halbert.)

CARME : Argent. Forme altérée de Carle.

CARNE : Abréviation de charogne. — « Un morceau d’ carne dur comme un cuir. » (Wado.)

CARNE : Mauvaise femme. — Même étymologie. — « Je la renfoncerais dedans à coups de soulier… la carne. » (E. Sue.)

CAROTTE : De couleur aussi rousse que la carotte. — On dit des cheveux carotte.

CAROTTE : Demande d’argent sous un faux prétexte. — « Des carottes ! combien qu’y en a des bourgeois, et des huppés, qui ne vivent que de ça ! » (Gavarni.)

CAROTTE (tirer une) : Demander de l’argent sous un faux prétexte. — « Nul teneur de livres ne pourrait supputer le chiffre des sommes restées verrouillées au fond des cœurs généreux par cette ignoble phrase : Tirer une carotte. » (Balzac.) — Génin et Littré y voient une allusion à la facilité avec laquelle on tire les carottes d’un terrain suffisamment préparé. Dans certaines acceptions, ce mot est ancien. Voir Carotter le service.

CAROTTE (tirer une) : Faire un mensonge pour connaître la vérité. (Grandval.)

CAROTTE de longueur, d’épaisseur (tirer une) : C’est la préparer de longue main, ou la tenter sur une grande échelle.

Vivre de carottes : Vivre en faisant des dupes.

CAROTTÉ : Dupé. — « M. de Rochegude, comme tous les petits esprits, avait toujours peur d’être carotté. » (Balzac.)

CAROTTER : Risquer peu. Carotter, dans le sens de jouer mesquinement se trouve déjà dans le Dictionnaire de Trévoux, 1771. — « Un homme qui allait à la Bourse et qui carottait sur les rentes après s’y être ruiné. » Balzac.)

CAROTTER : Obtenir de l’argent en tirant une carotte : « Allons, va au marché, maman, et ne me carotte pas.» (Gavarni.) — « Cela ne vaut-il pas mieux pour un garçon que de passer sa vie à carotter ? » (E. Augier.)

CAROTTER, Carotter l’existence : Ne vivre que de carottes, c’est-à-dire vivre mesquinement. — « Il se dépouillait de tout… Il sera très-heureux de vivre avec Dumay en carottant au Havre. » (Balzac)

CAROTTER le service : Éluder sous de faux prétextes les obligations du service militaire. Pris dans ce dernier sens, le mot paraît dater du moyen-âge. Dans le dictionnaire Roman Wallon de 1777, j’ai été surpris de rencontrer son ancienne forme : « Karotter : aller et venir dans une maison sans y rien faire. » — Ici karotter est certainement un péjoratif du vieux verbe karoler : sauter, gambader.

CAROTTEUR, CAROTTIER : Tireur de carottes. — « Allons, adieu, carotteur ! » (Balzac.) — « Joyeux vivant, mais point grugeur et carottier. » (Vidal, 33.) — « Les pratiques et les carottiers excellent dans ces honteux subterfuges. » (La Bédollière.) V. Repincer.

CAROUBLE : Fausse clef. (Grandval.) V. Esquintement.

CAROUBLEUR, caroubleur refilé : Voleur employant des caroubles fabriquées sur des empreintes livrées par des domestiques, des frotteurs, des peintres ou des amants de servantes. Il ne fait point d’effractions ; il ne vole que l’argent et les bijoux. — « Le caroubleur qui va reconnaître les lieux pour les dévaliser ensuite. » (Ph. Chasles.)

Caroubleur à la flan, — à l’esbrouffe : Il vole aussi avec de fausses clefs, mais au hasard, dans la première maison venue.

Caroubleur au fric frac : Voleur avec effraction. Il emploie au lieu de clefs un pied de biche en fer appelé cadet, monseigneur, ou plume. (Vidocq.)

CARQUOIS : Hotte de chiffonnier. (Colombey.) Ironie mythologique, car le chiffonnier est appelé aussi Cupidon. V. ce mot.

CARRÉ : Portion d’étage sur laquelle ouvrent les portes des divers logements. Sa forme est le plus souvent carrée.

CARRÉ (faire un) : Voler avec effraction dans les divers logements ouvrant sur un carré.

CARREAU, carreau de vitre : Lorgnon monocle. — « M. Toupard, cinquante-deux ans, petite veste anglaise, chapeau capsule, un carreau dans l’œil. » (Mémoires d’une Dame du monde, 60.)

CARRÉMENT : Franchement, sans formes obliques. — « Oh ! tu es rouge, et carrément, mon bonhomme. » (G. Droz.)

CARRER (se) : Se cacher. (Halbert.) Mot à mot : se mettre dans un coin. V. Carruche.

CARREUR : Forme ancienne du mot charrieur. Il a la même signification. — « Le carreur qui escamote des pièces d’or ou d’argent. » (Ph. Chasles.)

CARROUBLE : V. Carouble.

CARRUCHE : Prison. (Grandval.) — Diminutif du vieux mot car : coin. (Roquefort.) Il est ancien lui-même, car on le retrouve dans le patois flamand. V. Canton.

CARRUCHE (comte de la) : Geôlier. (Id.)

CARTAUD : Imprimerie. (Halbert.)

CARTAUDER : Imprimer. (Id.)

CARTAUDIER : Imprimeur. (Id.)

CARTE (femme en) : Femme à qui la police délivre une carte de fille soumise. — « La fille en carte est libre, pourvu qu’elle se présente exactement aux visites des médecins. » (A. Béraud.)

CARTE (être en carte) : Être inscrite parmi les filles soumises.

CARTES (prendre des) : Chercher mieux. Mot à mot chercher des cartes plus belles, comme au jeu d’écarté. Se prend au figuré et en mauvaise part. — « Tu me disais : bon ! bon ! s’il n’est pas content, qu’il prenne des cartes ! » (Vadé, 1744.)

CARTE (revoir la) : Vomir. — On comprend l’ironie en se rappelant que la carte est la liste des mets choisis pour un repas.

CARTON (de) : Sans valeur réelle. V. Miché, Occasion (d’). — Il y a longtemps que le carton symbolise une apparence trompeuse. Saint-Simon appelait déjà le duc du Maine, roi de carton, c’est-à-dire roi de cartes.

Céladon
De carton,
Me prends-tu pour un’ lorette ?
(H. Durand.)

CARTON : Carte à jouer. — « Lorsqu’on a dîné entre amis, il faut bien remuer des cartons peints pour se dégriser. » (About.)

CARTON (donner le) : Faire jouer. — « Je n’ai point parlé des tables d’hôte où on donne le carton, c’est-à-dire où l’on fait jouer. » (Lespès.)

CARTON (graisser, manier, remuer, travailler, tripoter le) : Jouer aux cartes. — Il y a, comme on voit, des expressions pour toutes les mains, sales ou non. — « Ces quatre messiers qui tripotent le carton avec une grande habileté. » (Villemessant, 60.)

CARTON (maquiller le) : Faire sauter la coupe.

CARTON SAVONNÉ : Pain blanc. (Rabasse.) Forme altérée de « larton savonné. »

CARTONNER : Jouer aux cartes. — « Eh ! eh ! vous avez un coup de pouce… Oui, je ne cartonne pas mal. » (E. Villars.)

CARTONNEUR : Joueur passionné. — « Ensuite la ravissante cartonneuse eut un instant de veine. » (Vie paris. 66.)

CARTONNIER : Joueur de cartes. — « Pingaud sut le premier débrouiller l’art confus de nos vieux cartonniers. » (Alyge.)

CARVEL : Bateau. (Colombey.)

CASAQUIN (grimper, tanner, travailler le) : Rouer de coups. — L’habit est pris ici pour le corps. — « Je te tombe sur la bosse, je te tanne le casaquin. » (Paillet.) — « Le premier ami de Pitt et Cobourg qui me tombe sous la patte, je lui grimpe le casaquin. et lui travaille les côtelettes. » (Lombard de Langres, 1783.) V. Bosse, Sabouler.

CASCADER : Trébucher, faillir.

Dis-moi, Vénus, pourquoi t’obstines-tu
A faire ainsi cascader ma vertu ?
(La belle Hélène, 65.)

CASCADER : Faire des cascades. — « Mlle  Leprevost a-t-elle appris seulement à cascader ? » (J. Janin) — « Je vais au couvent… Je suis fatiguée de cascader sur les planches. » (Villemot.)

CASCADES : Vicissitudes, folies. — « Sur la terre, j’ai fait mes cascades. » (Robert Macaire, ch., 36.)

CASCADES : « Au théâtre ce mot dépeint les fantaisies bouffonnes, les inégalités grotesques, les lazzis hors de propos, les improvisations les plus fantasques. » (J. Duflot.) « La pièce a paru insuffisante à un public habituellement moins exigeant en fait de cascades dramatiques. » (Monselet.)

CASCADEUR : Farceur, faiseur de cascades. — « Je puis dire que je suis chaque matin environné d’une douzaine de cascadeurs. » (E. Villars.)

CASCADEUSE : Femme galante, farceuse. — « La correspondance entre le prince et la cascadeuse n’a rien de compromettant pour l’amant. » (A. Wolff.)

CASCARET : Écu de trois livres. (Fr. Michel.)

CASIMIR : Gilet. (Delvau.) Nom d’étoffe donné au vêtement.

CASQUE : Chapeau d’homme ou de femme, casquette. Ironie.

CASQUE À AUVENT : Casquette. (Petit dict. d’argot, 44.) — L’auvent est ici la visière.

CASQUE À MÈCHE : Bonnet de coton. — Allusion à la mèche qui le termine. — « Il dévoilera les mensonges cotonneux de madame et apportera dans le salon le casque à mèche de monsieur. » (Th. Gautier.)

CASQUE (avoir son) : Être ivre, Mot à mot : avoir du vin plein la tête ou le casque, comme le prouvent les exemples suivants : « Il me demande si je veux m’humecter, je lui dis que j’ai mon casque. » (Monselet.) — « Ils furent ensemble dans un cabaret boire quelques pots de bon vin… si bien que ce malheureux Jean s’en donna dans le casque. » (L’art de plumer la poule sans crier, xviiie siècle.)

CASQUER : Donner de l’argent bon gré mal gré. — De cascaret, écu, V. Cavé, Pognon. — « Le petit Polonais casquera. Vive la Russie ! » (Claretie.)

CASQUETTE : Chapeau de femme. — « Cré chien ! Loïse, t’as là une casquette un peu chouette. » (Gavarni.)

CASQUETTE : Ivre. Mot à mot, ayant son casque.

Ai-je manqué, soit à jeun, soit casquette,
De t’apporter ma soif et ma chanson ?
(Festeau.)

CASQUETTE : « Être casquette a un autre sens : c’est manquer de distinction, c’est d’avoir dans les manières quelque chose de rude, d’un peu brutal, comme les gens dont la casquette est la coiffure ordinaire. » (Mané, 62.)

CASQUETTE : Argent perdu au café. — De casquer, payer : — « Le café Voltaire, créancier du réaliste pour des casquettes pyramidales. » (Michu.)

CASSANTE : Noix, noisette. (Grandval, Vidocq.)

CASSANTE : Dent. (Halbert.) Dans ces deux acceptions, l’effet est pris pour la cause. La noisette se casse et la dent casse.

CASSE : Bris accidentel de verres ou de porcelaine dans un café ou un restaurant. — « Dans beaucoup de villes, le maître d’hôtel marié prend des pourboires, une part pour sa femme, une part pour ses enfants, une part pour la casse, etc. » (A. Luchet.)

CASSE : Rognures et raclures de pâtisseries vendues à deux sous le cornet par des pâtissiers.

CASSE (je t’en) : Ce n’est pas pour toi. (Halbert.) Mot à mot et ironiquement : je casse pour toi un morceau de ce que tu convoites.

CASSE-GUEULE : Bal public de dernier ordre, où on se bat souvent :

CASSE-NOISETTES : Tête dont le nez et le menton se rapprochent comme les pinces d’un casse-noisettes. La perte des dents donne souvent cet aspect aux figures de vieillards. — « Les flâneurs du quartier les avaient surnommés les deux Casse-Noisettes. » (Balzac.)

CASSE-POITRINE : « Cette boutique est meublée de deux comptoirs en étain où se débitent du vin, de l’eau-de-vie et toute cette innombrable famille d’abrutissants que le peuple a nommés, dans son énergique langage, du Casse-Poitrine. » (Pr. d’Anglemont.) — « Ces demoiselles n’ont plus la faculté de se faire régaler du petit coup d’étrier, consistant en casse-poitrine, vespetro, camphre et autres ingrédients. » (Pétition des filles publiques de Paris, 30.) — Se disait autrefois du vin très-acide. V. Briolet.

CASSE-POITRINE : Pédéraste. V. le dr Tardieu (Attentats aux mœurs.)

CASSEMENT DE PORTE : Vol avec effraction. (Rabasse.)

CASSER : Manger. Mot à mot : casser avec les dents. — « J’avions déjà cassé trois ou quatre gigots, cinq ou six cochons de lait, et une pièce de bœuf à la mode. » (Vadé, 1744.) V. Casser le cou.

CASSER : Dénoncer. — Abrév. de casser du sucre. — « Part à deux, ou je casse sur toi. » (Du Camp.)

CASSER (se la) : S’enfuir. — « Vous vous esbignez. Ils se la cassent. » (A. Second.) — « C’est assommant ici. Je me la casse. Cassons-nous-la. » (E. Villars.)

CASSER (à tout) : Avec emportement. — S’est appliqué dans l’origine aux voitures qu’on menait grand train, au risque de tout casser. Se dit maintenant de tout. V. Ringuer. — « Que tu es belle ! splendide ! à tout casser. » (E. Villars.)

CASSER DU BEC : Sentir mauvais. — Casser a ici le sens de couper, ce qui donne, mot à mot : couper de son bec… celui des autres. V. Couper la Gueule.

CASSER DU GRAIN : Ne pas faire ce qui est commandé. (Delvau.)

CASSER DU SUCRE : Dénoncer. (Rabasse), — médire (Delvau.) — « Il en est qui, pour amoindrir leurs peines, cassent du sucre sur leurs camarades. » (Stamir, 67.)

CASSER LA GUEULE : Frapper au visage.

CASSER LA HANE : Couper la bourse. (Malbert.) — Vieux mot.

CASSER LE COU : Manger. — « Chère belle, ne viendrez-vous pas casser le cou à un fricandeau ce soir ? » (Lespès, 1866.) — « Viens-tu casser le cou à une gibelotte ? » (Nadar.)

CASSER LE NEZ (se). — Trouver porte close. Mot à mot : se casser le nez contre une porte qu’on croyait ouverte.

CASSER SA CANNE, CASSER SON PIF : Dormir. — Allusion à la position d’un dormeur dont la tête perd son point d’appui et s’incline brusquement en avant. — « Ils cassent leur canne… ils cassent leur pif. » (Villars.) V. Orgue (jouer de l’.)

CASSER SA CANNE : Être bien malade. (Rabasse.)

CASSER SA CANNE : Rompre son ban, quand on est sous la surveillance de la justice. Voir Canne.

CASSER SA PIPE : Mourir. (Rabasse.)

CASSER SON ŒUF : Faire une fausse couche.

CASSER SON PIF : Dormir. V. Casser sa canne.

CASSER SON SABOT, SA CRUCHE : Perdre sa virginité. — Souvenir des chansons d’autrefois où ces à-peu-près galants dominaient.

CASSER UNE PORTE : Voler avec effraction.

CASSEROLE (passer par la) : Être en traitement pour la syphilis. On disait autrefois passer sur les réchauds de saint Côme.

Comme le vieux jeu de mots aller en Suède, l’une et l’autre expression font allusion à la chaleur requise par les sudorifiques qui jouent un grand rôle dans la cure.

CASSEROLE : Dénonciateur, femme dénonçant à la police. (Halbert.) — Vient de casser. V. ce mot. Il est à noter que le dénonciateur s’appelle aussi cuisinier, que dénoncer c’est manger le morceau ou se mettre à table. — « Tout le monde a peur des coqueuses qu’on appelle encore des casseroles ou des moutons. » (P. de Grandpré.)

CASSEUR : Tapageur, prêt à tout casser. (Dhautel, 08.) — « La manière oblique dont ils se coiffent leur donne un air casseur. » (De La Barre.)

CASSEUR : Dénonciateur. V. Casser du sucre.

CASSEUR DE PORTES : Voleur avec effraction. (Halbert.) — Vêtus de toile bleue comme des ouvriers, ils marchent par trois le soir dans les rues, entrent dans les maisons mal gardées, frappent aux portes des logis non éclairés, et les forcent, si on ne répond pas. Un fait le guet, les deux autres opèrent. (Rabasse.)

CASSINE : « Ce mot signifiait autrefois une petite maison de campagne ; maintenant, il n’est plus d’usage que pour dire un logement triste et misérable. » (Dhautel, 08.) — Diminutif de Case : « Ah ! ben, vous n’êtes pas dégoûté !… voilà une cassine. Je sors de la cuisine, c’est à faire lever le cœur, un vrai fumier, quoi !!! » (Marquet.)

CASSOLETTE (ouvrir sa) : Vesser. Mot à mot : répandre des parfums trop connus.

CASSURE : Débit accentué. — « Le brio et la cassure (encore un mot commandé par la situation) avec lesquels elle (mademoiselle Silly) enlève à gosier déployé son rôle de Béatrix. » (Vie parisienne, 65.)

CASTE DE CHARRUE : Quart d’écu. (Halbert.)

CASTOR : Officier de marine évitant les embarquements et les expéditions de terre ferme. — Le castor bâtit volontiers sur le rivage.

CASTORIN : Chapelier. (Almanach des Débiteurs, 51.) Mot à mot : marchand de castors.

CASTORISER : Dans la marine, c’est éviter les embarquements. Dans l’armée de terre, c’est voyager peu ou point, et se perpétuer dans des garnisons agréables. — « Pélissier (le maréchal) disait : la garde impériale castorise. » (Cluseret, 68.)

CASTROZ : Chapon. (Grandval.) C’est castrat, avec changement de finale.

CASTU : Hôpital. (Grandval.) — Forme abrégée de castuc, à moins que ce ne soit une équivoque sur la grande phrase de l’hôpital : Qu’as-tu ? (que ressentez-vous ?) C’est ainsi qu’on appelle les douaniers qu’as-tu là.

CASTUC : Prison. (Vidocq.) Du mot castel, château. V. Ravignolé.

CATÉGORIE (1re, 2e, 3e) : Ces divisions, qu’une ordonnance (vers 1800) avait rendues officielles pour la vente de la viande de boucherie, ont été adoptées par les gouailleurs pour coter le degré de distinction de celui-ci ou de celle-là. On a dit une femme de troisième catégorie, comme une femme du quart de monde : « Docteur, je t’abandonne Bacchante. Je la dépècerais bien, mais les morceaux seraient de troisième catégorie, et le veau est en baisse. » (Michu.)

Le terme a fini par s’étendre à tout, en multipliant à l’infini le nombre des catégories. — « Les amateurs se disputent des croûtes de sixième catégorie, auxquelles on a mis un faux nez. » (E. Frebault.)

CATOGAN : Chignon de femme volumineux noué au niveau de la nuque par un paquet de faveurs. (Modes de 66.)

Quand j’aperçois le catogan
De cette charmante personne,
Accompagné de son ruban
Dont le long bout dépasse une aune.
(E. Villars.)

CAUCHEMAR : Homme ennuyeux à l’excès. (Dhautel.) Mot à mot : vous oppressant comme un cauchemar.

CAUCHEMARDANT : Insupportable. — « C’est cauchemardant. » (Jaime fils.) — « Pour en finir avec cette profession si affreusement cauchemardante. » (Paris-Étudiant, 54.)

CAUCHEMARDER- : Être cauchemardant. — « Pour abriter sa conscience contre certains hommes noirs qui pourraient venir le cauchemarder. » (Physiologie du parapluie, 41.)

CAVALCADES : Vicissitudes galantes. « Ça fait des manières, un porte-maillot comme ça. — Et qui en avait vu, des cavalcades. » (Gavarni.)

CAVALE : Fuite, action de se cavaler. « La cavale est plus difficile que lago. » (Rabasse.)

CAVALER (se) : Fuir avec la vitesse d’un caval ou cheval (vieux mot). — « Il faut se cavaler et vivement. » (Chenu.) V. Feston. — « Nous nous cavalons, moi et Todore, du côté du Temple. » (Monselet.) — « Ces promesses avaient cavalé mon esprit et mon courage. » (Lettre mystique touchant la conspiration dernière. Leyde, 1702.)

CAVALLE : Évasion. (Petit dictionnaire d’argot, 44.) Mot à mot : action de se cavaler.

CAVÉ : Dupe. Mot à mot : tombé dans un trou, une cave. — Même image dans enfoncé, casqué.

CAVÉE : Église. (Halbert.) — Elle est voûtée comme la cave.

CÉ : Argent. (Rabasse.) Voir Chêne.

Tout de cé : Très-bien. (Vidocq.)

CELUI DE (avoir) : Avoir l’honneur de. — Usité par moquerie des politesses exagérées de la petite bourgeoisie, où l’on avait à cœur de répondre : J’ai celui de, etc., à l’interlocuteur qui vous avait dit : j’ai eu l’honneur de, etc. — « Mam’selle, aurai-je celui d’aller avec vous ? » (J. Ladimir, 41.)

CENT COUPS (faire les) : Commettre des actes de folie, de désespoir. — « Tu peux faire les quatre cents coups dans la cité. » (E. Sue.)

CENTRALE : Prison centrale. — « Les centrales, comme disent les voleurs, sont les prisons dont ils craignent le plus le régime sévère. » (Figaro, 76.)

CENTRE : Nom. (Vidocq), état civil. (Rabasse.)

Faux centre, Centre à l’estorgue : Faux nom : V. Estorgue.

Coquer son centre : Donner son nom. V. Ravignolé.

CENTRE DE GRAVITÉ : Derrière. — « Il se risque… Ne frémissez pas, belle lectrice ; les don Juan sont très-forts sur la gymnastique. Dès leur plus tendre enfance ils se sont exercés à tomber sur leur centre de gravité. C’est là-dessus que don Juan est tombé. » (E. Lemoine.)

CENTRIER : Député du centre conservateur sous Louis-Philippe. V. Ventru : « Moreau ! Mais il est député de l’Oise. — Ah ! c’est le fameux centrier. » (Balzac.)

CENTRIER, CENTRIPÈTE : Soldat du centre, fantassin.

CERBÈRE : Portier malhonnête et grondeur comme le Cerbère de la fable : — « Misérable, disait-elle au cerbère, si mon mari le savait. — Bah ! répondait-il… un terme de payé, ça aide. » (Ricard.)

CERCLE : Pièce d’argent. — Allusion de forme.

CERCLE (pincer, rattraper, repincer au demi-) : Prendre à l’improviste. — Terme d’escrime. — « Filons… je connais l’escalier de service… Aie ! pincés au demi-cercle. » (Villars.)

CERCLE : Tonneau. (Vidocq.) Allusion aux cercles retenant les douves.

CERCUEIL : Bière, boisson. Jeu de mots. V. Cogne.

CERF : Mari trompé. — Allusion de cornes.

L’amant quitte alors sa conquête
Et le cerf entre à la maison.
(Béranger.)

CERF(se déguiser en) : Courir. Allusion à la vitesse du cerf. V. Ballon (se lâcher du).

CERF-VOLANT : Femme dépouillant les enfants mal surveillés par leurs bonnes. — Jeu de mots. Elle vole dans les jardins publics où vole aussi le jouet dit cerf-volant.

CÉRISIER : Cheval aussi mauvais que les bidets qui portent des cerises au marché. — On dit d’un mauvais cavalier qu’il monte en marchand de cerises. (Dhautel.)

CES : Ce pronom a parfois une valeur ironique particulière lorsqu’il est placé devant les substantifs. — « On a donné à ces dames que voici le nom de musardines. » (Alb. Second.) — Béranger a chansonné ces demoiselles.

CÉSARIEN : partisan du pouvoir absolu et surtout du pouvoir Napoléonien. — « L’abus du parlementarisme favorise ce que nous appelons les Césariens. » (P. Moniteur, 5 août 75.)

CHABANNAIS, CHABANAIS : Bruit. — « Il m’embête, votre public. En font-ils du chabanais. » (Décembre-Alonnier.)

Ah ! ça prend dans les rues ?
Le chabanais, ça mousse. (Sardou.)

CHACAL : Zouave. (Dans l’argot militaire d’Afrique.)

CHAFRIOLER : Se complaire. « L’atmosphère de plaisirs où il se chafriolait. » (Balzac.)

CHAHUT : Dispute. — « Je n’ai jamais de chahut avec Joséphine comme toi avec Millie. » (Monselet.)

CHAHUT : Cancan populaire. — « La chahut comme on la dansait alors était quelque chose de hideux, de monstrueux ; mais c’était la mode avant d’arriver au cancan parisien, c’est-à-dire à cette danse élégante, décemment lascive lorsqu’elle est bien dansée. Aujourd’hui le cancan en l’école moderne triomphe, la chahut n’est plus guère connue que des titis des Funambules. » (Pr. d’Anglemont, 51.) — « Un caractère d’immoralité et d’indécence comparable au chahut que dansent les faubouriens français dans les salons de Dénoyers. » (Mansion, 33.)

. . . . Et pour se mettre en rut
Apprennent là du peuple à danser le chahut.
(A. Barbier.)

CHAHUT : Mêlée, remue-ménage. — « La cavalerie monte à cheval. C’était un chahut, un boucan général. » (Commentaires de Loriot.)

CHAHUTER : Faire tapage, danser le chahut. — « Ça mettra le vieux Charlot en gaîté… il chahutera sur sa boutique. » E. Sue.

CHAHUTER : Renverser, culbuter.

Sur les bords du noir Cocyte,
Chahutant le vieux Caron,
Nous l’ fich’rons dans sa marmite, etc.
(Chanson de canotiers.)

CHAHUTEUR : Tapageur, danseur de chahut.

CHAILLOT ! (À) : Allez vous promener ! Mot à mot : Allez à Chaillot ! Cette injure, fort usitée, daterait, selon M. Louis Ulbach, qui s’en est occupé dans le Figaro, de l’année 1784, où la construction du mur d’enceinte consterna tellement les habitants de Chaillot que le nom d’ahuris leur est resté.

Pour notre part, nous avons constaté qu’en 1826 ce terme d’ahuri de Chaillot était encore populaire, car le Dictionnaire proverbial de Caillot lui donne une place : « Ahuri, surpris, étonné. On dit à Paris : les ahuris de Chaillot. »

Il convient d’ajouter que le village de Chaillot était autrefois le point de mire des mauvais plaisants. — Quand on parlait d’une Agnès de Chaillot c’était pour désigner une fille suspecte. — « Ah ! ciel ! disais-je en moi-même, cette Agnès de Chaillot serait-elle de ce pays-ci ? » (Voyage de Paris à Saint-Cloud, 1754.) « À Chaillot les gêneurs ! veut dire tout simplement : Au diable les ennuyeux ! » (Mané, Paris effronté, 63.)

J’ crois la proposition honnête
En t’offrant mon cœur et ma main.
Quoi ! tu m’ réponds, rêv’ de mon âme :
« À Chaillot ! ton cœur et ton nom ! »
(Aug. Hardy.)

CHAIR À CANON : Soldat. — « L’homme ne fut plus, comme on disait sous l’Empire, de la chair à canon. » (Dr</sup Véron.)

CHAIR HUMAINE (vendeur ou marchand de) : Proxénète : Agent de remplacement militaire. — Au xviiie siècle, on donnait déjà ce nom aux sergents recruteurs.

CHALOUPE : Femme au jupon gonflé comme une voile de chaloupe. — « C’te chaloupe ! » crie un gamin de Gavarni derrière une élégante.

CHALOUPE ORAGEUSE : Cancan échevelé. — Comparaison de la danse au roulis d’une chaloupe. — « Ils chaloupaient à la Chaumière.» (Étudiants, 64.) — « Ohé ! les danseurs ! qui est-ce qui veut du cancan et de la chaloupe à mort ? » — (E. Bourget, 1845.) — V. Tulipe.

CHALOUPER : Danser la chaloupe, faire débauche.

Et je chaloup’rai
Tant qu’ j’aurai
De la vaisselle de poche.
(Poinchoud.)

CHAMBARDER : Bousculer. — Terme de marine.

CHAMBERTER : Être indiscret (Rabasse.)

CHAMBRE DE SÛRETÉ : Prison de la Conciergerie. (Stamir.)

CHAMBRE DES PAIRS : Bagne. — Côté des condamnés à vie. Les autres sont les députés.

CHAMEAU : Femme de mauvaise vie. — On dit aussi : Chameau d’Égypte, chameau à deux bosses, ce qui paraît une allusion à la mise en évidence de certains appas. Cette épithète passe aussi pour dater de la campagne d’Égypte, pendant laquelle nos soldats, profonds analogistes, auraient été frappés de la docilité avec laquelle le chameau se couchait pour recevoir son fardeau. Tel est du moins l’avis de l’Encyclopediana. — « Qu’est-ce que tu dis là, concubinage ? coquine, c’est bon pour toi. A-t-on vu ce chameau d’Égypte ! » (Vidal, 33.) — « Cette vie n’est qu’un désert, avec un chameau pour faire le voyage et du vin de Champagne pour se désaltérer. » (F. Deriège. 42.) — « Il n’y a pas d’affront pour une femme appelée chameau ! Cet animal est sobre et laborieux. Quelle citoyenne du quartier Bréda peut en dire autant ? » (Commerson.)

CHAMP DE NAVETS ; « Un convoi remontait l’avenue d’Italie se rendant à ce triste cimetière connu sous le nom de Champ de Navets. » (A. d’Aunay, 75.)

CHAMP : Champagne. — « Maria. Oh !… du champ ! — Éole. … agne. — Maria. Qu’est-ce que vous avez donc ? — Éole. On dit du Champagne. — Maria. Ah bah ! où avez-vous vu ça ? » (Th. Barrière.)

CHAMPAGNE, fine champagne : Eau-de-vie fine. — Du nom d’un village de la Charente-Inférieure. — « Nous lui ferons prendre un bain de fine Champagne. » (Cochinat.) — On dit également : un petit verre de fine, ou de champagne.

CHAMPOREAU : Boisson très-goûtée en Algérie. Tous les cabarets portent sur leur enseigne ce nom, qui est celui de l’inventeur. Le champoreau se fait en ajoutant une liqueur quelconque à du café au lait très-étendu d’eau ; il y a le champoreau au rhum, le champoreau au kirsch, etc. — « On y boit des champoreaux (du lait, du café et du rhum), ce qui n’est pas mauvais. » (Comm. de Loriot.)

CHANÇARD : Favorisé par la chance. — « Chacun se sauve comme il peut. Je parle des chançards. » (Commentaires de Loriot.)

CHANDELLE : Mucosité coulant du nez, comme le suif coule de la chandelle, — quand on ne la mouche pas.

CHANDELLE : Fusil de munition. — Il est comme la chandelle, long, rond, et il en sort une flamme quand on y met le feu.

Être conduit en quatre chandelles. — Être conduit par quatre soldats.

CHANDELLE : Bouteille. « Nous allons chez le marchand de vin et je demande une chandelle à 12 sous. » (La Correctionnelle.)

CHANOINE, CHANOINESSE : Rentier, rentière. (Colombey.)Assimilation de la rente à la prébende du canonicat.

CHANTAGE : Extorsion d’argent sous menace de révélations scandaleuses. — « Le chantage, c’est la bourse ou l’honneur. » (Balzac.) — « Le chantage existe partout. Et celui que l’on punit n’est pas toujours le plus dangereux. Il y a le chantage en gants paille, qui s’exerce dans un salon, qui prend des airs de vertu, qui, du haut de son équipage, éclabousse le passant ; celui-là, on ne l’atteint pas ! Mais le tribunal est la terreur de ces exploiteurs de bas étage qui proposent aux gens craintifs et aux pusillanimes une terrible alternative : la bourse ou le déshonneur !

« Nous avons vu autrefois au Palais un vieux professeur, fort connu, savant éminent. Ce malheureux, depuis un demi-siècle, était exploité par une bande de misérables qui lui demandaient de l’argent sous peine de lui imputer un vice ignoble. Le professeur avait craint le scandale ; il avait payé. Ce qu’il y avait de singulier, c’est que les premiers exploiteurs étaient morts ou retirés avec leurs rentes, et avaient cédé à des successeurs leur part dans l’exploitation de M. X… À chaque trimestre, un coup de sonnette se faisait régulièrement entendre dans la maison habituellement si tranquille du savant ; ce coup de sonnette faisait tressaillir le pauvre homme : c’était la diffamation qui venait réclamer le prix de son silence. Et M. X… a payé comme cela environ 300,000 francs. Enfin la justice a mis la main sur ces corsaires de la vie privée. Les douze coquins qui vivaient sur la fortune de M. X… ne vivront dorénavant qu’aux frais de l’État. » (Figaro.)

CHANTER : Être victime d’un chantage. — « Tout homme est susceptible de chanter, ceci est dit en thèse générale. Tout homme a quelques défauts de cuirasse qu’il n’est pas soucieux de révéler. » (Lespès.)

CHANTER (faire) : Rendre quelqu’un victime d’un chantage. Mot à mot : faire chanter (résonner) ses écus. Chanter plus haut voulait dire jadis donner une plus forte somme. Le Dictionnaire de l’Académie le donne avec ce sens. — « Puisque l’argot court aujourd’hui les boudoirs, nous dirons que faire chanter signifie obtenir de l’argent de quelqu’un en lui faisant peur, en le menaçant de publier des choses qui pourraient nuire à sa considération, ou qu’il a pour d’autres raisons un grand intérêt à tenir ignorées. » (Roqueplan, 41.) — « Faire chanter, c’est faire payer une chose qu’on ne doit pas. » (Dhautel, 08.) — Ce dernier exemple, qui est le plus ancien, ne semble pas donner au mot sa signification précise d’aujourd’hui.

CHANTERELLE (appuyer sur la) : Toucher à un endroit sensible, ou serrer la gorge de quelqu’un à le faire crier. — Assimilation de la voix à la corde aiguë du violon.

CHANTEUR : « Le chanteur s’est procuré un document important ; il demande un rendez-vous à l’homme enrichi. Si l’homme compromis ne donne pas une somme quelconque, le chanteur lui montre la presse prête à l’entamer, à dévoiler ses secrets. L’homme riche a peur, il finance. Le tour est fait. Vous vous livrez à quelque opération périlleuse, elle peut succomber à une suite d’articles : on vous détache un chanteur qui vous propose le rachat des articles. » (Balzac.) — Vidocq déclare chanteurs : 1° les journalistes qui exploitent les artistes dramatiques ; 2° les faiseurs de notices biographiques qui les offrent à tant la ligne ; 3° ceux qui proposent à des prix énormes des autographes ayant trait à des secrets de famille. — « Sans compter, ajoute-t-il, mille autres fripons dont les ruses défraieraient un recueil plus volumineux que la Biographie Michaud. »

On nomma enfin chanteurs les hommes exploitant la crainte qu’ont certains individus de voir divulguer des passions contre nature. Ils dressent à cette fin des jeunes gens dits Jésus qui leur fournissent l’occasion de constater des flagrants délits sous les faux insignes de sergents de ville et de commissaires de police. La dupe transige pour des sommes considérables. » (Canler.) — Lacenaire était chanteur de cette classe, et a consacré à ce métier quelques pages de ses Mémoires, 36.

CHANTILLY : Dentelle de Chantilly. — « J’ai là une confection de velours avec des Chantilly. » (Alm. du Hanneton.)

CHAPARDER : Marauder. — De chat-pard : chat tigre. — « La veille, il avait chapardé dans le village une grosse bûche. » (Alm. du Hanneton, 67.)

CHAPARDEUR : Maraudeur, voleur. — « Si le sergent-major et le fourrier n’étaient pas aussi chapardeurs, nos rations nous suffiraient, » (Commentaires de Loriot.)

CHAPELET DE St FRANÇOIS : Chaîne attachant un condamné. (Rabasse.)

CHAPELLE (faire) : Relever sa jupe pour se chauffer à un feu de cheminée.

CHAPON : Moine. (Colombey.) — Allusion à la chasteté obligatoire.

CHARABIA : « Toutes ces affaires se traitent en patois d’Auvergne dit charabia » (Balzac.)

CHARABIA : Auvergnat. — « Que penseriez-vous d’un homme qui n’est ni Auverpin ni Charabia. » (Pr. d’Anglemont.)

CHARGÉ : Ivre. Mot à mot, qui a sa charge de boisson.

CHARGER : Pour les cochers de fiacre, c’est prendre des voyageurs. Mot à mot : charger leurs voitures.

CHARIER : Chercher à savoir. (Rabasse.)

CHARIEUR : Celui qui cherche à savoir. (Id.)

CHARLEMAGNE (faire) : Se retirer du jeu lorsqu’on est en gain, sans plus de façon qu’un roi. — Il paraît que les rois avaient ce privilège sans manquer aux usages.

Ce terme contient en même temps un jeu de mots sur le roi de carreau, le seul dont le nom soit français. — « Le lansquenet fait fureur… Ah ! c’est qu’il est commode de pouvoir faire Charlemagne sans rougir, et Charlemagne est le roi du lansquenet. On se trouve en gain, on quitte la table et tout est dit. » (E. Arago.) — « Le jeu est agréable parce qu’on n’est point poli. On s’emporte et l’on fait Charlemagne. » (Stendhal, 1826.) — « Si je gagne par impossible, je ferai Charlemagne sans pudeur. » (About.)

CHARLEMAGNE : Poignard d’infanterie. — Allusion à l’épée du grand monarque.

CHARLOT : Malin. (Rabasse.)

CHARLOT : « Le peuple et le monde des prisons appellent ainsi l’exécuteur des hautes œuvres de Paris. » (Balzac.)

Le mot est ancien : « J’t’avons vu faire la procession dans la ville, derrière le confessionnal à Charlot casse-bras, qui t’a marqué à l’épaule au poinçon de Paris. » (Vadé, 1744.) — « Que Charlot vous endorme ! Tirez d’ici, meuble du Châtelet. » (Idem.) V. Garçon.

On disait Charlot casse-bras, par allusion à la roue sur laquelle il cassait les bras des condamnés.

CHARMANT, CHARMANTE : Galeux, galeuse. (Halbert.)

CHARMANTE : Gale. — « La charmante y fait gratter bien des mains, aussi la visite était-elle rigoureuse. » (Vidal, 33.)

CHARON : Voleur. (Vidocq.) — Diminutif de Charrieur.

Dessus le pont au Change
Certain agent de change
Se criblait au charon. (Vidocq.)

CHARPENTER : Tracer la charpente, le scénario d’une pièce. — « As-tu vu la pièce d’hier ? — — Oui, c’est assez gentil. — Est-ce bien charpenté ? — Peuh ! couci-couci. » (La Fizelière.) — « Dans l’art dramatique, les gens de lettres ont bien voulu me reconnaître une importante qualité, celle de charpenter une pièce. » (Alex, Duval, 33.)

CHARPENTIER : Collaborateur chargé de charpenter une pièce. — « Il n’est pas si facile de se montrer un habile charpentier. » (A. Second.)

CHARRIAGE : Escroquerie. — Action de charrier. V. Charrier.

CHARRIAGE À L’AMÉRICAINE : « Il exige deux compères : celui qui fait l’Américain, un faux étranger qui se dit Américain, Brésilien et depuis quelque temps Mexicain, 2° celui qui lui sert de leveur ou de jardinier. Le leveur lie conversation avec tous les naïfs qui paraissent porter quelque argent. Puis on rencontre l’Américain qui leur propose d’échanger une forte somme en or contre une moindre somme d’argent. La dupe accepte et voit bientôt les charrieurs s’éloigner, en lui laissant contre la somme qu’il débourse des rouleaux qui contiennent du plomb au lieu d’or. » (Canler.) — On l’appelle aussi vol à l’américaine et vol au change. — Avec le temps l’Américain s’est démodé. Il est devenu successivement un Brésilien et un Mexicain.

CHARRIAGE AU POT : Il débute de la même façon que le précédent. Seulement l’Américain offre à ses deux compagnons d’entrer à ses frais dans une maison de débauche. Par crainte d’un vol, il cache devant eux dans un pot une somme considérable. Plus loin, il se ravise et envoie la dupe reprendre le trésor après lui avoir fait déposer une caution avec laquelle il disparaît, tandis que le malheureux va déterrer un trésor imaginaire.

Charriage au coffret. — Variété moderne du précèdent. L’Américain confie à une dame de comptoir un coffret fermé à clé dans lequel il a fait voir préalablement des rouleaux de pièces d’or. Il revient de la journée, il a besoin d’argent et il a perdu la clé du coffret. On lui fait une avance et il ne reparaît plus. Le coffret ne contenait que des centimes.

CHARRIAGE À LA MÉCANIQUE : Un voleur jette son mouchoir au cou d’un passant et le porte à demi étranglé sur ses épaules pendant qu’un complice le dévalise. — Ce genre de charriage s’appelle maintenant vol au père François.

CHARRIER : Voler quelqu’un en le mystifiant, dit Vidocq. — Du vieux mot charier : mystifier, qui est encore usité dans le dialecte flamand. Mot à mot : mener en chariot. Il est à noter que rouler a conservé un sens analogue.

CHARRIEUR, CHARRON, CAREUR : Voleur pratiquant le charriage. — Même observation que ci-dessus pour le mot rouleur.

CHARIEUR, CAMBROUSIER : Charlatan nomade. (Halbert.)

CHASSE : Mercuriale. (Dhautel, 08.) — « C’est pas l’embarras, faut croire qu’il aura reçu une fameuse chasse pour être remonté si en colère. » (H. Monnier.)

CHÂSSE, CHÂSSIS : Œil. — C’est un vrai châssis pour la tête. — « Je m’arc-boute et lui crève un châssis. » (Vidocq.) V. Coquer, Balancer, Estorgue.

CHASSE-COQUIN, CHASSE-NOBLE : Gendarme. (Halbert.)

CHASSEPOT : Fusil de munition se chargeant par la culasse. — Du nom de son inventeur. — « Dumanet, lorsqu’il ne fait pas merveille avec son chassepot, a de l’esprit comme quatre. » (V. Noir.)

CHASSER : partir. (Rabasse.)

CHASSER DES RELUITS : Pleurer. Mot à mot : chasser les larmes des yeux.

CHASSER LE BROUILLARD : Boire la goutte. V. Brouillard.

CHÂSSES D’OCCASE : Yeux louches. Mot à mot : yeux mal assortis, achetés d’occasion. Voir Estorgue (Halbert.)

CHÂSSIS : Paupières. (Rabasse.)

CHASSUE : Aiguille. (Halbert.) — Son trou s’appelle chas dans la langue régulière.

CHASSURE : Urine. (Halbert.)

CHAT : Guichetier. (Vidocq.) — Allusion au guichet, vraie chatière derrière laquelle on voit briller ses yeux.

CHAT, CHATTE : Sobriquet d’amitié. — « Alfred, mon gros chat ! — Qu’est-ce que tu veux, Minette ? » (Montépin.) — « Tu vas te trouver mal à présent, Fanny ! pauvre chatte chérie. » (H. Monnier.)

CHÂTAIGNE : Soufflet. — Son bruit sec peut à la rigueur être comparé à celui de la châtaigne qui éclate au feu.

CHÂTEAU DE L’OMBRE : Bagne. (Stamir.)

CHATTEMENT : Avec la câlinerie d’une chatte. — « Elle alla chattement à lui. » (Balzac.)

CHATTERIE : Friandise, câlinerie.

CHAUD : Coureur de belles, homme ardent et résolu. — Autrefois on disait chaud lancier. — « Le chaud lancier a repris Son Altesse Royale. » (Courrier burlesque, 2e p., 1650.)

CHAUD : Artificieux, avide. — Forme du vieux mot caut : rusé, qui a fait cauteleux. — On dit souvent dans ce sens : c’est un chaud, ou vous êtes chaud, vous.

CHAUD (être) : Avoir l’œil au guet. (Colombey.)

CHAUD (il y faisait) : Allusion aux feux de l’artillerie et de la mousqueterie. — La bataille était rude. — « Ah ! vous étiez à Wagram ? — Un peu. — Il y faisait chaud, hein ? » (H. Monnier.)

CHAUD (il fera) : Jamais. Mot à mot : il fera un temps chaud comme il n’y en aura jamais. — « C’est bien. Quand tu me reverras, il fera chaud. » (Méry.)

CHAUDE-LANCE : Gonorrhée. (Vidocq.) Allusion à sa cuisson et à ses élancements.

CHAUDRON : Mauvais piano, résonnant comme un chaudron.

CHAUFFE LA COUCHE : Mari trompé et content. Mot à mot : chauffant pour un autre la couche conjugale. — « Les maris qui obtiennent le nom déshonorant de chauffe la couche. » Balzac.)

CHAUFFER : Montrer beaucoup d’ardeur pour faire marcher une affaire. — « La vente des collections léguées par feu le baron Bruel, était chauffée à faire éclater les soupapes de la fantaisie et de la vanité. » (De Pontmartin, 66.)

CHAUFFER : Presser le crédit. (51, Almanach des Débiteurs.)

CHAUFFER : S’animer, devenir très-ardent en parlant d’une bataille ou d’une entreprise quelconque. — « Il paraît que ça chauffe en Afrique. » (Balzac.) — « Oh ! tonnerre ! ça va chauffer ! » (E. Sue.)

CHAUFFER LE FOUR : Boire avec excès. — « Il me restait encore 4 francs. J’avais chauffé le four depuis samedi. » (Monselet.)

CHAUFFER UNE FEMME : Courtiser avec ardeur. — « Toutes ses lettres disent : je vous aime ! aimez-moi !! sinon je me tue !!! Répéter cela pendant trois mois, cela s’appelle dans la langue don juanique, chauffer une femme. » (E. Lemoine.)

CHAUFFER UN ARTISTE : Applaudir chaleureusement. — « Elle recueillait les plaintes de son petit troupeau d’artistes… on ne les chauffait pas suffisamment. » (L. Reybaud.) V. Empoigner.

CHAUFFEUR : Homme d’entrain. — « C’était un bon enfant… un vrai chauffeur. » (H. Monnier.)

CHAUFFEUR : Amoureux. — « C’est l’officier, le chauffeur de la petite. » (H. Monnier.)

CHAUMIR : Perdre. (Vidocq.) — C’est le verbe « chômer » avec changement de finale.

CHAUSSER : Convenir. (Dhautel.) — « Les diamants ! ça me chausse, ça me botte. » (Mélesviile.) — « Cela rentre dans vos études… cela vous chausserait. » (L. Reybaud.) V. Brosse.

CHAUSSETTES (essence de) : Mauvaise odeur provenant des pieds. Les raffinés disent : extrait de chaussettes.

CHAUSSETTE : « La chaussette est un simple anneau de fer que porte à la jambe, comme signe de reconnaissance seulement, le forçat qui n’est plus accouplé. » (Moreau Christophe, 37.)

CHAUSSON (vieux) : Prostituée, avachie comme un vieux chausson, une vieille pantoufle. — On dit, en abrégeant, chausson. (J. Choux.)

CHAUSSON : Science de se battre à coups de pied. De là le mot « chausson. » Dans le peuple, on dit savate. « La savate que l’on appelle aujourd’hui chausson. » (Th. Gautier, 45.) V. Savate.

CHAUVIN, CHAUVINISTE : Patriote ardent jusqu’à l’exagération. — « Je suis Français ! Je suis Chauvin ! » (Cogniard, 31.) — « Un spécimen du type Chauvin dans toute sa pureté. » (Montépin.) — Allusion au nom d’un type de caricatures populaires, comme le prouve cet exemple : « 1825, époque où un libéralisme plus large commença à se moquer de ces éloges donnés aux Français par les Français, de ces railleries lancées par les Français contre les étrangers. Charlet, en créant le conscrit Chauvin, fit justice de ces niaiseries de l’opinion. » (A. Jal, Paris moderne, 34.)

CHAUVINISME : Patriotisme trop ardent. Le chauvinisme a son côté ridicule, mais il a aussi sa grandeur. On s’en est trop moqué, et cette réaction a été mille fois pire, mais la science du juste milieu n’est pas une qualité française. — « Le chauvinisme a fait faire de plus grandes choses que l’amour de la patrie dont il est la charge. » (Noriac.) — « Le chauvinisme est peut-être la dernière vertu que nous ayons possédée. » (Berthaud.)

« Chauvinisme » : Se dit par extension de toute exagération banale. — « L’honneur et l’argent, magnifique écho du chauvinisme bourgeois. » (Mirecourt, 55.)

CHAUVINISTE : Patriote ardent.

Se prend aussi adjectivement : « Nous n’avons vécu qu’avec peu de gouvernements français dans des rapports aussi corrects qu’avec le sien, en décomptant quelques intermezzos chauvinistes. » (D’Arnim, 73.)

CHEF : Cuisinier, chef de cuisine.

CHEF : Maréchal des logis chef.

CHEF DE CUISINE : Contremaître dirigeant la fabrication d’une brasserie. (Vinçard.)

CHELINGUER : Puer.

Chelinguer des arpions ou de l’orteil : Sentir mauvais des pieds.

Chelinguer du bec : Sentir mauvais de la bouche,

CHEMINÉE : « Il est de bon ton de porter un chapeau de soie, vulgo cheminée. » (La Lune, 67.) — Cheminée doit être pris ici dans le sens de tuyau de poêle.

CHEMISES (compter ses) : Vomir. — Allusion à la posture penchée de l’homme qui vomit.

CHEMISE (être dans la) : Ne pas quitter, être au mieux.

CHEMISE DE CONSEILLER : Linge volé. (Colombey.)

CHENATRE : Très-bon. (Grandval.) — Augmentatif de chenu.

CHÊNE : Homme bon à voler, riche, abréviation de chenu. — « Qu’as-tu donc morfillé ? — J’ai fait suer un chêne, son auber j’ai enganté et ses attaches de cé. » (Vidocq.)

CHENIQUE, CHNIC : Eau-de-vie. — Diminutif de chenu : bon. — « Le perruquier de régiment rase sans rétribution, mais en avant le chnic. » (Bataille, 43.)

CHENIQUEUR : Buveur de chenique.

CHENOC : Mauvais, avarié, et par extension « vieil infirme. » — C’est l’antithèse de chenu. — « Vous êtes un vieux birbe… Comment ? un birbe… Oui ! vous êtes un vieux ch’noc. » (Dernier jour d’un condamné.)

CHENU : Excellent. — Dès 1718, le Dictionnaire comique de Leroux dit dans ce sens : Voilà du vin chenu. Selon (08), chenu, signifiant au propre blanc de vieillesse, est appliqué au vin que la vieillesse améliore, et par extension à toute chose de première qualité. — « Ce doit être du chenu et du ficelé. » (Phys. du matelot, 43.) — « Il met sur son nez une chenue paire de lunettes. » (La Bédollière.) — « Goujeon, une prise de tabac ? — Oui-da, t’nez en v’là qu’est ben chenu. »(Vadé, 1755.) — « As-tu fréquenté les marchandes de modes ? c’est là du chenu ! » (P. Lacroix, 32.)

Chenu sorgue : Bonsoir. — « Chenu sorgue, roupille sans taffe. » (Vidocq.)

Chenu reluit : Bonjour. Voir Fourgat.

CHENUMENT : Très-bien. — « Une ville a beau feindre de se défendre ch’nument. » (Vadé, 1755.) V. Artie.

CHER : Rude, élevé. (Colombey.) — La cherté est prise ici au figuré.

CHÉRANCE : Ivresse. (Idem.)

CHEVAL : Homme brutal, grossier.

Je voudrais être un grand cheval,
Un ours, pour laisser une fille.
A la merci de son cheval.
(Boufflers, 05)

CHEVAL DE RETOUR : Condamné conduit au bagne pour la seconde fois. (Rabasse.) — « C’est un cheval de retour, vois comme il tire la droite. » (Balzac.)

CHEVALIER DE L’AUNE : Commis en nouveautés. — « Il n’y a que ces chevaliers de l’aune pour aimer la boue au bas d’une robe. » (Balzac.)

Chevalier du crochet : Chiffonnier.

Chevalier du lustre : Claqueur.

Chevalier du printemps : Niais portant un œillet rouge à la boutonnière pour singer une décoration. Mot à mot : chevalier de l’ordre du printemps.

Chevalier grimpant : V. Bonjour (voleur au.)

CHEVAU-LÉGER : Député de l’extrême droite. Ainsi nommé du lieu de réunion particulier à Versailles. — « Le groupe monarchique jetant les chevaux-légers par dessus bord, reprend sa place de combat. » (Saint-Genest, 75.)

CHEVAUX À DOUBLE SEMELLE : Jambes. — « Tiens, apprête tes chevaux à double semelle, prends ce paquet et valse jusqu’aux Invalides. » (Balzac.)

CHEVELU : Romantique. — Les longs cheveux étaient de mode dans l’école romantique de 30. — « Il peuplait mon salon de jeunes célébrités de l’école chevelue. » (L. Reybaud.) — « L’art chevelu a fait une révolution pour abolir les tirades de l’art bien peigné. » (Idem). — « On connaît peu le restaurateur Dinochau. C’est un homme que le commerce des littérateurs chevelus a rendu spirituel. » (Marx, 65.)

CHEVEU : Inquiétude, souci aussi tourmentant qu’un cheveu dans le gosier. — « Veux-tu que je te dise, t’as un cheveu. — Eh bien ! oui, j’ai un cheveu. » (Monselet.)

CHEVEUX (il a de beaux) : Il a mauvaise mine. Se dit de n’importe quoi et de n’importe qui.

CHEVEUX (Avoir mal aux) : Avoir la tête lourde un lendemain d’ivresse.

CHEVILLES : Pommes de terre frites. (Rabasse.) Allusion de forme, ou jeu de mots. (Elles bouchent un trou à l’estomac.)

CHEVISTE : Partisan de la réforme musicale de Chevé. — « Avant trois mois, les chevistes seront sur les dents. » (S. Loudier, 72.)

CHÈVRE : (Gober ou prendre sa) : Mettre en colère. — La chèvre est peu endurante de sa nature. — Mot ancien. « Prenez que la raison lui eût mis de l’eau dans son vin ou que son amitié d’autrefois fût fâchée d’avoir pris la chèvre. » (Vadé, 1744.)

CHEVRON : Récidive. (Vidocq.)

CHEVRONNÉ : Récidiviste. — Allusion aux chevrons qui marquent l’ancienneté du service militaire.

CHIC : Mot d’acceptions fort diverses et fort répandues dans toutes les classes. C’est le vieux mot de langue romane chic (finesse, subtilité), qui a fait notre mot chicane. — « J’espère avec le temps que j’entendrai le chic, » dit du Lorens, un poëte satirique du xvie siècle qui était en même temps magistrat. Dans la Henriade travestie, Fougeret de Monbron écrit plus tard :

La Discorde qui sait le chic
En fait faire un décret public.

Le chic était donc jadis la science du fin. Il s’emploie aujourd’hui dans les cinq acceptions suivantes :

Chic : Distinction. — Le mot serait ancien dans ce sens. À propos de Reine Audu, la reine des halles, une des héroïnes de nos fastes révolutionnaires, le père Duchesne dit : « Quel chic la liberté donne aux femmes ! » (Intermédiaire du 10 octobre 65.) — « Le port des ordres veut de l’élégance sans afféterie, de la tenue sans pose et une aisance qui ne soit pas du sans-gêne ; enfin ce qu’on appelait la race au siècle dernier ; le bon ton il y a cinquante ans ; c’était moins et c’était plus que le chic d’aujourd’hui. » (Vie paris., 66.) — « Petite friponne ! auraient dit nos grands-pères… Elle a du chic, ou mieux encore elle a du chien, ou elle a du zing, s’écrient les gentlemen, leurs petits-fils. » (E. Villars, 66.)

Chic : Élégance de toilette ou d’ameublement. — « Vous serez ficelé dans le chic. » (Montépin.) — « L’officier qui a du chic est celui qui serre son ceinturon de manière à ressembler à une gourde. » (Noriac.) — « Lambert fut enchanté de son gîte. C’est le dernier mot du vrai chic, dit-il. » (About.) — À l’école de St-Cyr, sous le premier empire, chic était déjà synonyme d’élégance militaire. V. Tic.

Être au chic : Être bien vêtu. (Rabasse.)

Chic : Cachet artistique, originalité. — « Il lui révéla le sens intime de l’argot en usage cette semaine-là, il lui dit ce que c’était que chic, galbe, etc. » (Th. Gautier, 38.) — « Une première série du Carnaval de Gavarni est loin d’avoir le chic étourdissant de la seconde. » (E. de Mirecourt.)

Chic : Facilité banale, n’ayant rien de sérieusement étudié. — C’est le contraire de la signification précédente. Il y a eu sans doute réaction contre l’abus inconsidéré du mot. De là cette divergence ironique. — « C’étaient là de fameux peintres. Comme ils soignaient la ligne et les contours ! comme ils calculaient les proportions ! ils ne faisaient rien de chic ou d’après le mannequin.» (La Bédollière.) — « Un paysage d’une délicieuse naïveté. Il n’y a là dedans ni chic ni ficelles. » (Alph. Karr.)

Le mot chic pris dans ce dernier sens, a fini par s’appliquer à la littérature, à l’art oratoire. — « Parleur de chic, comme disent les artistes, il fait de l’amplification. » (P. Vérone.)

Chic : Mauvais genre, genre trop accusé. — « Ce chic que le tripot colle à l’épiderme des gens et qui résiste à toute lessive comme le masque des ramoneurs. » (P. Féval.)

CHIC, CHIQUÉ : Distingué, opulent, qui a du chic. — « Ça un homme chic ! C’est pas vrai, c’est un calicot. » (Les Cocottes, 64) — « C’est chique et bon genre. » (Ricard.) — « Ah ! voilà ma femme chic ! Madame, j’ai l’honneur d’être. » (De Goncourt.) — « Ceux qui dansent ce sont des gueux. Les gens chic font cercle autour d’eux. » (Blavet.)

CHICAN : Marteau. (Halbert.)

CHICANDARD : V. Chicard, Chicarder.

CHICANDER : Danser le pas chicard. — « Chicard est français de cœur, sinon de grammaire, bien qu’il ne soit pas encore du Dictionnaire de l’Académie… L’homme de génie qui s’est fait appeler Chicard a modifié complètement la chorégraphie française… Chicard existe, c’est un primitif, c’est une racine, c’est un règne. Chicard a créé chicandard, chicarder, chicandarder ; l’étymologie est complète. » (Taxile Delord.) V. Chicarder.

CHICANE (grinchir à la), CHERCHER CHICANE : Prendre la bourse ou la montre d’une personne en lui tournant le dos. Ce genre de vol exige une grande dextérité. (Vidocq.)

CHICARD : Personnage de carnaval (à la mode de 1830 à 50). Son costume, bizarre assemblage d’objets hétéroclites, se composait le plus souvent d’un casque à plumet colossal, d’une blouse de flanelle et de bottes fortes. Ses bras à moitié nus s’enfonçaient dans des gants de grosse cavalerie. Le premier qui mit ce costume à la mode était un marchand de cuirs ; son chic le fit nommer Chicard. Il inventa un pas nouveau, dit pas chicard. — « Et puis après est venu Chicard, espèce de Masaniello qui a détrôné l’aristocratie pailletée des marquis, des sultans et a montré le premier un manteau royal en haillons. » (M. Alhoy.) — « La sage partie du peuple français a su bon gré à maître Chicard d’avoir institué son règne de mardi-gras. » (J. Janin.)

CHICARD, CHICANDARD, CHICOCANDARD, CHICANCARDO : Très-chic, remarquable. — « On y boit du vin qu’est chicandard, chicancardo. » (Vacherot, Chanson, 51.) — « Une dame très-belle, très-coquette, très élégante, en un mot très-chicandarde. » (Éd. Lemoine.) — « Un auteur plus chicocandard. » (Th. Gautier.) — « Un déjeuner chicocandard. » (Labiche.) V. Chocnoso.

CHICARD (pas) : Manière de danser imitant celle de M. Chicard. Le pas chicard s’est conservé jusqu’à nous sous le nom de chicorée. — « Mais qu’aperçois-je au bal du Vieux-Chêne ? Paméla dansant le pas chicard. » (Chauvelot aîné.)

CHICARDER : Danser le pas chicard. — « Quand un bal de grisettes est annoncé, le vaurien va chicarder avec les couturières. » (Deriège.) — « Le nom de Chicard est devenu célèbre… Enfin on a fait un adjectif de ce nom-là et même on en a fait un verbe : Homme chiquart, habit-chiquart, chiquarder, chiquander. » (Jules Janin.)

CHICARDOT : Poli. (Halbert.)

CHICMANN : Tailleur. (Almanach des Débiteurs, 51.) — Allusion aux noms germaniques qui abondent chez les tailleurs.

CHICORÉE (fort de) : V. Café.

CHIEN : Chien. — Compagnon. « Tu passeras renard ou aspirant, après ça tu deviendras chien ou compagnon. » (Biéville.)

CHIEN : Tracassier. — « Le chef est chien ou bon enfant. Le chien est dur, exigeant, tracassier méticuleux. » (Balzac.)

CHIEN : Avare. — Horace (l. II, sat. 2) emploie le mot canis pour signifier avare.

CHIEN : Flamme artistique, feu sacré, — Abréviation de sacré chien (eau-de-vie, pris dans une acception figurée.) — «X… disait de Mlle  Honorine qu’elle a du chien dans la voix. — Du chien, fit Z…, c’est trop peu dire… C’est une meute !!! » (Marcx.) — « Le style avait du flou, l’alinéa du chien. » (Michu.)

CHIEN : Eau-de-vie. V. sacré chien.

CHIEN : Originalité, cachet.

Qu’a donc, disait Chose à Machin,
Ce laideron qui passe et repasse ?
Du chien…
C’est donc pour cela qu’elle chasse
Si bien… (E. Villars.)

« Quel chien ! Tourne-moi un peu. Et il sifflottait : c’est un Rubens. » (Vie parisienne, 66.) — « Elle a réellement du chien, cette femme-là. » (Droz.) V. Sacré chien.

CHIEN (de) : Excessif. — On dit : une faim de chien, un mal de chien, une soif de chien.

CHIEN (n’être pas) : Être bon, de qualité supérieure. — « Voilà du pomard qui n’est pas chien. Il y en a six bouteilles. Je ne verse qu’une tournée. Nous boirons le reste à l’office. » (Bertall.)

N’être pas chien en affaires : Aller grandement, sans chicane.

CHIEN, CHIENCHIEN : Mot d’amitié. Le chien symbolise la fidélité. — « Mon petit chien ! C’est aujourd’hui la manière de commencer une lettre d’amour dans tous les mondes. » (Paris Caprice, 75.)

CHIEN DE RÉGIMENT : Caporal ou brigadier. — Sa mission est un peu celle du chien de berger.

CHIEN DU COMMISSAIRE : Secrétaire de commissaire de police. — « Une table couverte d’un vieux tapis vert où écrivait le chien du commissaire. » (Alph. Daudet.)

CHIEN DE COUR, CHIEN DE COLLÈGE : Maître d’études. — « Il y a un sous-principal que les écoliers appellent chien de cour, parce que, semblable aux chiens de bergers, son emploi est de contenir la gent scolastique dans une grande cour, jusqu’au moment de l’ouverture des classes. » (Mercier, 1783.)

CHIEN DE FAÏENCE (en) : Aussi raide et immobile que ces chiens de faïence employés jadis pour la décoration des édifices. — « Je fus ébloui et je restai comme un chien de faïence à la contempler. » (Villemessant.)

CHIEN NOYÉ : Morceau de sucre trempé dans du café noir. — Plus petit et moins trempé, c’est un canard.

CHIEN DANS LE VENTRE (avoir du) : Être de force à tout supporter.

CHIEN (piquer un) : Dormir pendant la journée. Allusion à la facilité avec laquelle le chien s’endort dès qu’il est au repos. On trouve dans Rabelais un exemple de dormir en chien.

Sur l’étude passons. Il n’est qu’un seul moyen
De la bien employer, c’est de piquer son chien.
(Souvenirs de Saint-Cyr.)

CHIENDENT (voilà le) : Là est la difficulté. — On sait qu’il est difficile d’arracher le chiendent, dont les racines longues et noueuses sont fort entrelacées. Usité en 1808. — « Et c’est là le chiendent. » (Désaugiers.)

CHIENLIT (gueuler à la) : Appeler au secours, à la garde. « La porte s’ouvre, une femme paraît et elle gueule à la chienlit. » (Beauvillier.)

CHIENNERIE : Avarice, ladrerie.

CHIENNERIE : Luxure, passion bestiale. On dit dans le même sens vacherie. — « Oh ! la belle chiennerie ! Il ravale toutes les femmes au niveau des prostituées. » (Mismer.)

CHIER DANS LA MALLE : Faire affront à quelqu’un. Mot à mot : chier dans sa poche. Autrefois malle signifiait poche.

Car aussi bien le monde a chié dans ma malle.
(Dulorens, Satires, 1645.)

CHIER DU POIVRE : S’en aller au moment où l’on a besoin de services.

CHIFFARDE : Assignation. (Halbert.) Mot à mot : vieille chiffe, vieux chiffon.

CHIFFARDE : Pipe. (Vidocq.)

CHIFFE : Commerce des chiffonniers. — « Aussi y a-t-il une espèce d’aristocratie dans la chiffe, ils comptent leur noblesse par génération ; il y a des chiffonniers de naissance et des parvenus. » (Pr. d’Anglemont.)

CHIFFERTON : Chiffonnier. (Vidocq.) Changement de finale.

CHIFFON : Mouchoir. (Id.)

CHIFFON ROUGE : Langue. (Halbert.) — Allusion de couleur et souplesse. V. Balancer.

CHIFFONNIER : Voleur de mouchoirs. V. Pègre.

CHIFFORNION : Foulard. Dimin. de Chiffon.

CHIGNER : Pleurer. — « Ça lui fera du bien de chigner. » (Balzac.) Abréviation de rechigner.

CHIMIQUE : Allumette chimique. — Abréviation. — « Ouvre la blague, prends une chimique, allume ta pipe. » (La Maison du Lapin-Blanc, typ. Appert.)

CHINER : Aller en quête de bons marchés. — « Rémonencq allait chiner dans la banlieue de Paris. » (Balzac.)

CHINAGE (vol au) : Il consiste à vendre du doublé pour de l’or et à escroquer sur des échanges de bijoux.

CHINEUR : voleur au chinage. — « Ce sont généralement des méridionaux appelés chineurs ou charieurs qui exercent ce genre de vol. » (Rabasse.)

CHINEUR : « Les roulants ou chineurs sont des marchands d’habits ambulants qui, après leur ronde, viennent dégorger leur marchandise portative dans le grand réservoir du Temple. » (Mornand.) — « Les chineurs sont ceux qui viennent à domicile offrir des étoffes à bas prix. » (Du Camp.)

CHINOIS : Cafetier. (Almanach des Débiteurs, 51.)

CHINOIS : Mot d’amitié. — « En mourant à Sainte-Hélène Napoléon disait en parlant de ses serviteurs : « Mes pauvres Chinois ! je ne les oublierai pas. » (Dr Antommarchi, Mémoires.)

CHINOIS : Homme singulier, bizarre d’aspect ou de caractère. — Allusion aux Chinois de paravent et à leur aspect étrange. — « Parmi les badauds attirés à Paris pour le sacre de Napoléon Ier, on distinguait les présidents de cantons, bonnes gens pour la plupart, avec un air d’importance qui amusait les Parisiens ; on les appelait des Chinois, en leur qualité de présidents de cantons. Cette mauvaise plaisanterie eut du succès. » (Lamothe-Langon, Souvenirs d’une femme de qualité, 30.) — « Chinois, amène les liquides. » (Balzac, Père Goriot.) — « V’ là mon Chinois qui se fâche. » (Monselet.)

CHIPER : Dérober de petites choses. — Forme de choper, prendre. — « En chipant les sept cent cinquante mille francs. » (Balzac.)

CHIPETTE. V. Être (en).

CHIPEUR, CHIPEUSE : Homme ou femme qui chipe. — « Chipeur comme un gamin de Paris. » (Balzac.)

CHIPIE : Femme revêche, querelleuse.

CHIQUANDÀRT, CHIQUART, V. Chicandard, chicard, chicarder.

CHIQUE : Supérieur, distingué. V. Chic.

CHIQUE : Église (Vidocq.) V. Momir, Rebâtir.

CHIQUE (couper la) : Dérouter. — « De la réjouissance comme ça ! le peuple s’en passera. C’est c’ qui coupe la chique aux bouchers. » (Gaucher.)

Couper la chique à quinze pas : Se faire sentir de loin.

Poser sa chique : Mourir. — À l’usage de ceux qui ont chiqué du tabac toute leur vie.

Poser sa chique et faire le mort : Rester muet et immobile. — Acception figurée du terme précédent.

CHIQUÉ : Ayant bonne tournure. — « Dis donc, Troutrou, nous ne sommes pas trop bien ficelés. — Zut ! y en a de moins chiqués. » (Ladimir, 41.) — « Je leur en ferai des discours, et des chiqués. » (Chenu.)

CHIQUEMENT : Avec chic.

CHIQUER : Faire avec chic, supérieurement.

Auprès d’elle Eugénie
Nu-bras,
Nous chique avec génie,
Son pas.
(1846, P. d’Anglemont).

CHIQUER : Manger. — Vieux mot. — « Je me dispose à chiquer les vivres. » (B. Carême, 29.) — « Ne pourrions-nous pas chiquer un légume quelconque ? mon estomac abhorre le vide. » (Balzac.)

CHIQUER : Dépenser. — « Il m’a fallu tout mettre en plan. J’ons chiqué jusqu’aux reconnaissances. » (Dialogue entre Suzon et Eustache, 36.)

CHIQUER (se) : Se battre. (Grandval.) Mot à mot : s’avaler. Même racine que la précédente.

CHIQUEUR : Glouton — « On dit d’un homme qui mange beaucoup que c’est un bon chiqueur. » (Dhautel, 08.)

CHIQUEUR : Artiste dessinant de chic, sans étudier la nature.

CHNIC : Eau-de-vie. V. Chenique.

CHOCNOSO, CHOCNOSOF, CHOCNOSOPHE, CHOCNOSOGUE, KOXNOFF : Brillant, remarquable. — « Dans cette situation, comment dire ?… — Chocnoso… » (Balzac.) — Dans Pierre Grassou, Balzac écrit Chocnosoff. — « Je m’en vais chez le restaurateur commander un dîner koxnoff. » (Champfleury.) — « C’est koksnoff, chocnosogue, chicardo, snoboye. » (Bourget, Chansons.) — « Sa plume était chocnosophe, et ses goûts ceux d’un pacha. » (Commerson.) — « Ce jeune provincial dont vous riez aujourd’hui aura une tenue moderne, chicarde, chocnosogue. » (L. Huart.)

CHOLETTE : Demi-litre. — Double-cholette : litre. (Vidocq.)

CHOPER : Voler. (Vidocq.) — Du vieux mot choper : toucher quelque chose pour le faire tomber. Pierre d’achoppement est resté dans la langue régulière.

CHOPER : Prendre. — Se laisser choper. Se faire arrêter.

CHOPIN : Vol. (Grandval.) De choper. — « Quand un voleur fait de la dépense, c’est qu’il a fait un chopin. » (Canler.)

CHOSE, MACHIN : On appelle, ainsi celui dont on ne se rappelle pas le nom. (Dhautel.) — « Chose est malade… Qui ça, Chose ? » (H. Monnier.) — « Figurez-vous que le petit Chose écrivait un journal. » (Balzac.) — La coutume est ancienne. Tallement des Réaux conte que « M. le Mage, conseiller à la Cour des aides, dit toujours Chose au lieu du nom. »

CHOSE (monsieur) : Le chemisier, dans l’argot des débiteurs. (Almanach des Débiteurs, 51.)

CHOSE : Dignité. — « Tu me feras peut-être accroire que tu n’as rien eu avec Henriette ? Vois-tu, Fortuné, si tu avais la moindre chose, tu ne ferais pas ce que tu fais… » (Gavarni.)

CHOSE : Indignité. — « C’est ce gueusard d’Italien qui a eu la chose de tenir des propos sur Jacques. » (Ricard.)

CHOSE : Embarrassé, contristé. — Du vieux mot choser : gronder. — « Ma sainte te ressemble, n’est-ce pas, Nini ?… Plus souvent que j’ai un air chose comme ça ! » (Gavarni.) — « Ce pauvre Alfred a sa crampe au pylore, ça le rend tout chose. » (E. Sue.) — « Mam’selle, v’là qu’ vous m’ rendez tout chose, je vois bien que vous êtes un esprit fort. » (Rétif, 1783.) — « M. le prêtre, qui était tout chose de cette affaire, se scandalisa. » (Vadé, 1744.)

CHOU : Bête. On dit : bête comme chou.

CHOU (mon), MON CHOUCHOU : Mot d’amitié. — « On dit : mon chou, comme on dirait : mon ange. » (E. Carré.) Se dit surtout aux enfants, par allusion au chou sous lequel on prétend les avoir trouvés, quand on ne sait que répondre à certaines de leurs demandes.

CHOU COLOSSAL : Entreprise destinée à tromper le public par des promesses ridiculement alléchantes. « Il y a deux ou trois ans, on vit à la quatrième page de tous les journaux un éloge pompeux d’un nouveau chou… Ce chou était le chou colossal de la Nouvelle-Zélande, servant à la fois à la nourriture des hommes et des bestiaux et donnant un ombrage agréable pendant l’été. C’était un peu moins grand qu’un chêne, mais un peu plus grand qu’un prunier. On vendait chaque graine un franc… On en achetait de tous les coins de la France. — Au bout de quelques mois, les graines du chou colossal avaient produit deux ou trois variétés de choux connues et dédaignées depuis longtemps. La justice s’en mêla. » (A. Karr, 41.)

CHOUAN : Légitimiste. — Allusion aux insurgés de nos provinces de l’Ouest. C’était une guerre de bois et de haies qui fit donner à ses acteurs le nom de Chouans, employé pour chats-huants dès le moyen âge.

CHOUCHOUTER : Choyer tendrement. — « Tu seras chouchouté comme un chouchou, comme un dieu. » (Balzac.) V. Chou.

CHOUCROUTE (tête ou mangeur de) : Allemand.

CHOUETTE, CHOUETTARD, CHOUETTAUD : Bon, beau. — « Not’ homme m’attend à la barrière pour faire une noce un peu chouette. » (M. Perrin.) — « C’est chouette, ça. » (J. Arago, 30.) — « Elle est bonne, votre eau-devie. Oui, elle est chouette. » (H. Monnier.) — « Ah ! vous avez là une chouette femme. » (Gavarni.)

Voici peut-être un des premiers exemples du mot. Il nous en donne en même temps l’explication : « Ma femme sera coincte et jolye comme une belle petite chouette. » (Rabelais.) V. Biblot, Danse, Toc, Casquette.

CHOUETTE : amitié. « La Fouine, Escarpe et Crèvecœur te refilent leurs bécots de chouette. » (Rabasse.)

CHOUETTE (être) : Être pris.

CHOUETTEMENT : Parfaitement.

Suis-je près d’un objet charmant,
Pour rallumer chouettement,
Mon cœur est comme une fournaise.
(Festeau.)

CHOUFFLIQUER : Saveter l’ouvrage. — Germanisme.

CHOUFFLIQUEUR : Mauvais ouvrier. (Delvau.)

CHOURIN : Couteau.

CHOURINER : Donner des coups de couteau. — Formé des mots surin et suriner, usités dans le même sens.

CHOURINEUR : Tueur de chevaux (Halbert.) — Le type du Chourineur créé par E. Sue dans les Mystères de Paris est resté célèbre.

CHRÉTIEN : Étendu d’eau. — Allusion à l’eau du baptême chrétien. — « Une douzaine de drôlesses déguisées en laitières vendent du lait trois fois chrétien. » (Privat d’Anglemont.)

CHTIBBES : Bottes. (Delvau.)

CHUTER : Faire une chute. — Pris au figuré. — « Si elle est bonne enfant, je la soutiendrai à son début au Gymnase… Ah ! je puis faire chuter qui je veux. » (Balzac.)

CI-DEVANT : Aristocrate dans la langue révolutionnaire. Mot à mot : ci-devant comte, duc ou baron. — Date de la suppression des titres de noblesse.

CI-DEVANT : Homme âgé. Mot à mot : ci-devant jeune. — « Le ci-devant de province n’abandonne jamais son rifflard. » (Phys. du parapluie, 41.)

CIERGE : Sergent de ville. — « On me conduisit entre deux cierges (non, pardon ! je veux dire sergents de ville). » (Journ. man. pris. Mazas.)

CIERGE : « Pour un cierge qu’on lui mettrait dans la main, elle se battrait avec le diable. — Un cierge, c’est une pièce de cent sous. » (P. de Granpré, 1169.)

CIGALE : Pièce d’or. (Vidocq.) Allusion au cri métallique de l’insecte.

CIGOGNE : Préfecture de police, tribunal, palais de justice. — « Railles, griviers et cognes nous ont pour la cigogne en partie tous paumés. » (Vidocq.)

CIGOGNE : Palais de justice. (Moreau C.)

CIGUE : Pièce de vingt francs. (Rabasse.) Abrév. de cigale.

CINQUÈME : Mesure de liquide, cinquième de litre. — « Et quand, par hasard, il boit un cinquième sur le comptoir. » (Léo Lespès.)

CINTRER : Tenir. (Colombey.)

CIPAL : Soldat de la garde municipale. — Abréviation. — « Les danses ont été légèrement échevelées, mais,

Le cipal n’a rien à dire
Aux entrechats de la vertu.
(Naquet.)

CIRE (voleur à la) : « Dans les cabinets de restaurant où l’argenterie n’a pas fait place au ruolz, il la plaque avec de la cire sous la table sur laquelle il mange. On crie au voleur ; il demande à être fouillé et sort après avoir reçu les excuses du patron. Un compère vient ensuite se placer à la même table et décolle les objets. » (Rabasse.)

CITRON : Note aigre. — « Trois citrons à la clef. » (Nadar.)

CLAIR : Œil. — Allusion à l’éclat du regard. — « Allumez vos clairs et remouchez. » (Balzac.)

CLAQUE : Réunion de claqueurs, de compères. — Oublié par le Dictionnaire de l’Académie, qui admet cependant Claquer et Claqueur.

CLAQUEDENT : Maison de tolérance. (Rabasse.) — Allusion aux maladies qu’on y gagne. Aller au pays de Suède et au royaume de Claquedent, c’était autrefois passer par les remèdes antivénériens.

CLAQUES (figure à) : Figure qu’on souffletterait volontiers. — « Oui, ces figures à claques, nous les caresserons. » (Cogniard.)

CLAQUER : Mourir. — « Malheur du diable ! mon pauvre adjudant s’est laissé claquer. » (Noriac.)

CLAQUER : Manger. — Allusion au claquement des mâchoires.

CLAQUER : Dissiper. C’est manger pris au figuré. « Quand on s’est permis cette gourmandise, plus rien à claquer. » (Commentaires de Loriot.)

CLARINETTE : Fusil d’infanterie. Du moment qu’on appelait le fantassin troubadour. (V. Troubade), on devait appeler son instrument clarinette. Les deux termes s’expliquent l’un l’autre. — « Quant au fantassin, il est obligé de porter un fusil de quatorze livres, aimable clarinette de cinq pieds. » (Vidal, 33.) — « Tout à l’heure les feux de deux rangs déchireront la toile, et nous verrons si vos clarinettes ont de la voix. » (Richard.) V. Agrafer, Toile.

CLAVIN : Clou. (Halbert.) Vieux mot.

CLAVIN, CLAVINE, CLAVINEUR, CLAVINIER : Raisin, vigne, vendangeur, vignoble. (Halbert.) Formes transposées de Calvin et Calvigne. V. ces mots.

CLÉ (à la), CLEF (à la) : Formule ironiquement confirmative qui s’emploie à propos de tout, pour caractériser l’emploi dominant de telle ou telle chose. Acception figurée de clé : marque réglant l’intonation de notes musicales. — « C’est bien cette grande queue de vache mal peignée. Trop de chignon à la clé. » (Villars.) — « Sa ville natale lui élève une statue ; c’est fort naturel. Je trouve même, qu’elle aurait pu le traiter avec plus de respect, et l’inaugurer tout seul, sans agriculture ni archéologie à la clef. » (Éclair, 72.)

CLICHÉ : Banal, connu. — Synonyme de Stéréotypé, et emprunté comme lui à la typographie. — « Tel est le discours cliché que le vénérable baron a en réserve pour toutes les circonstances. » (Figaro.)

On dit : c’est cliché, pour c’est immuable, c’est connu. — Cliché se prend souvent comme substantif. V. Guitare.

Bientôt de la prison pour dettes
On sera, dit-on, affranchi.
Gare aux histoires toutes faites !
Ah ! que de clichés sur Clichy.
(Al. Flan, 67.)

CLIQUOT : Vin de Champagne portant la marque de feue madame Cliquot.

Elle boit beaucoup de cliquot
Et bat volontiers la campagne.
(E. Villars.)

CLODOCHE : danseur de bal habile dans l’art de se désarticuler. Nom d’un ancien émule de Brididi à la mode dans les bals de Paris vers 1844. — « Les domestiques assurent avoir vu, au milieu d’une douzaine d’individus, un clodoche exécuter un cavalier seul dans le costume le plus primitif. » (A. d’Aunay, 75.)

CLOPORTE : Portier. — Calembour : clôt-porte. — « Je connais le truc pour apprivoiser les cloportes les plus farouches. » (Montépin.) — « Qu’a dit le vil cloporte ?… Le cloporte a dit : C’est huit sous. » (Champfleury.)

CLOU : Prison. On ne peut pas en bouger plus que si l’on y était cloué. — « Je vous colle au clou pour vingt-quatre heures. » (Noriac.) — « Comme de juste, on ne vient pas se mettre au clou soi-même. » (E. Sue.)

CLOU : Mont-de-Piété. Mot à mot : prison d’objets engagés. — « Il avait mis le linge en gage ; on ne disait pas encore mettre au clou. » (Luchet.)

CLOU (mettre au) : Vendre un objet, mettre au mont-de-piété. (Almanach des Débiteurs, 51.)

CLOU DE GIROFLE : Dent cariée, dent brune et amincie comme un clou de girofle. — « Madame Cramoisi demanda à Santeuil combien ils étaient de moines à Saint-Victor. — Autant que vous avez de clous de girofle dans la bouche, dit Santeuil, voulant parler de ses dents noires et gâtées. » (Santoliana, 1764.)

CLOUER : Mettre en gage. — De clou d’où dérivent aussi accrocher, clouer, déclouer et surclouer. (Engager, dégager et renouveler au Mont-de-Piété.) — « Jeune insensé, oublies-tu que nous avons passé le 20 du mois, et qu’à cette époque les habits de ces messieurs sont cloués et surcloués ? » (Murger.)

COCANGE : Coquille de noix. — Le jeu de cocange ou de robignolle est un jeu tenu par les filous qui courent les foires.

COCANTIN : Homme d’affaires, intermédiaire entre le débiteur et le créancier. (Almanach des Débiteurs, 51.)

COCARDE : Tête. — En prenant la coiffure pour la tête, on dit taper sur la cocarde, sur le pompon.

COCARDE (avoir sa) : Être ivre, avoir le visage teinté comme une cocarde par un excès de boisson. — « J’y voyais en dedans. Todore ne parlait pas. Robert nous dit : « Vous avez votre cocarde. » (Monselet.)

COCARDIER : Homme zélé jusqu’à l’exagération de ses devoirs. Dénomination spéciale à l’armée. Le cocardier croit toujours avoir l’honneur de sa cocarde à soutenir. — « Cette vie de camp reposée est quelquefois troublée par des généraux nerveux ou cocardiers. » (Vie parisienne, 65.)

COCASSE : Rusé. (Colombey.)

COCASSERIE : Drôlerie comique.

COCHON : Ladre, avare.

COCHON : Libertin, polisson.

COCHONNERIE : Charcuterie. — « La viande de porc que lady Morgan, cette virago britannique, nomme de la cochonnerie. » (Ricard.)

COCHONNERIE : Acte indélicat. — « Le seul texte de ma lettre vous suffira pour répondre à toutes les cochonneries possibles ; je vous constitue donc pour mon défenseur officieux. » (Lettre de Beurnonville, ambassadeur de France en Prusse, à M. Besta, 1er germinal an VIII.) — « Oscar, s’approchant avec dignité : Marquis, vous me faites là une cochonnerie qui ternira à jamais votre blason. » (Marquet.)

COCHONNERIE : Salauderie, aliment dégoûtant, préparé par des gens malpropres comme des cochons. — « Vous ne mangerez pas de ça, c’est de la cochonnerie. » (Chenu.)

COCKNEY : Badaud. — Anglicanisme. V. Philistin.

COCO : Cheval. — « Ce grossier animal qu’on nomme vulgairement coco. » (Aubryet.) — « On entend la sonnerie de la botte, de la botte à coco, tu sais. » (Vie parisienne, 66.)

COCO : Œuf de poule.

COCO : Homme digne de peu de considération. — « Joli coco, pour vouloir me faire aller. » (Balzac.)

COCO : Nom d’amitié.

J’ vais te donner un p’tit becquau.
Viens, mon coco.
(Dialogue entre Suzon et Eustache, chanson, 36.)
Si l’ grand emp’reur d’vant vous défile
Vous crîrez tous : Eh ! v’là le coco.
(Les Violettes et les Œillets, chanson, août 15.)

COCO : Tête. — Allusion à la forme ovale de la noix de coco.

Mais, de ce franc picton de table,
Qui rend spirituel, aimable,
Sans vous alourdir le coco,
Je m’en fourre à gogo.
(H. Valère.)

COCO (dévisser le) : Étrangler.

COCO (se passer par le) : Manger. — Comparaison de l’estomac humain à celui du cheval. Le refrain populaire de la Botte à Coco en a donné l’idée à l’armée et au peuple.

COCODÈS : Jeune dandy ridicule. — Diminutif de coco pris en mauvaise part. — « Ohé ! ce cocodès a-t-il l’air daim ! » (L. de Neuville.) — « Les cocodès qui ne sont pas chevaleresques ne paraissent pas montrer beaucoup de goût pour les fusils à aiguille. » (Mérimée, 67.) — Une Physiologie du Cocodès a paru en 64.

COCODÈTE : Femme d’un dandysme ridicule. C’est la femelle du cocodès. — « On s’y moque des cocodès et des cocodètes. » (Yriarte, 67.)

COCODETTISME : Dandysme ridicule. — « Le cocodettisme n’incarne pas plus le grand monde que le journal l’Univers la religion catholique. » (Figaro, 76.)

COCONS : Camarade de première année à l’École polytechnique. Mot à mot : co-conscrit.

Ton ancien tu tutoîras.
Et ton co-cons pareillement.
(La Bédollière.)

COCOTTE : Jument. — C’est la femelle de Coco (Cheval) — « Les Garibaldiens tiraient, le commandant saluait au niveau des oreilles de son cheval. Mieux vaut que Cocotte l’attrape que lui. » (Vie parisienne, 67.)

COCOTTE : Mal vénérien. — On lui a sans doute donné le nom de celle qui en est souvent la cause. V. plus bas. — « L’ai-je eue assez de fois, la cocotte, à ce point qu’on m’appelait le roi des cocottiers. » (L. Je Neuville.)

COCOTTE : Mal d’yeux. — Sans doute parce qu’on a les yeux à la coque, c’est-à-dire couverte d’une taie blanchâtre.

COCOTTE (ma) : Mot d’amitié. — C’est un synonyme de ma poule. V. ce mot.

COCOTTE : Femme galante. Mot à mot : courant au coq. — On disait jadis poulette. — L’Intermédiaire fait remonter cette expression à Plaute qui appelle les courtisanes gallinæ, quia (ajoute Savaron son commentateur) ut gallinæ, spargunt et perdunt omnia : parce que comme les poules elles détruisent et perdent toutes choses. — « Mme  Lacaille disait à toutes les cocottes du quartier que j’étais trop faible pour faire un bon coq. » (Sabbat des Lurons, 17.) — « Les cocottes peuvent se définir ainsi : Les bohèmes du sentiment… Les misérables de la galanterie… Les prolétaires de l’amour. » (Les Cocottes, 64.) Cocotte s’est dit ensuite pour lorette. V. Machin.

COCOTTERIE : Monde des cocottes. « Les courses ont fait de l’argent. J’y ai remarqué la plupart des bettings’men mêlés à la fleur de la haute cocotterie parisienne. » (Figaro, 67.)

COENNE DE LARD : Brosse. (Vidocq.) — Allusion aux soies qui garnissent la coenne. Voir Couenne.

CŒUR SUR LE CARREAU (jeter du) : Vomir. — Ce calembour se trouve déjà dans Le Roux (1718). — « La tête me tourne et j’étends mon cœur sur le carreau. » (La Correctionnelle, 40.)

COFFIER : Tuer. (Halbert.) Abréviation d’Escoffier.

COGNAC : Petit verre d’eau-de-vie, dite de Cognac. — La dénomination est généralement fausse et ne trompe personne, mais on ne l’a conservée qu’avec plus d’amour.

COGNAC, COGNARD, COGNE : Gendarme. — V. Cigogne, Raille. — Il est à remarquer que carruche et canton (prisons) ont le sens de coins. V. ces mots. Le cognard serait donc, à proprement parler, celui qui vous jette dans le coin, mot à mot qui vous cogne. Notre langue a conservé rencogner avec ce sens. Cogne est une abréviation. Cognac est un jeu de mots.

COGNADE : Gendarmerie. V. Garçon.

COGNARD, COGNE. — Gendarmerie. V. Cognac.

COGNE : Eau-de-vie. Abréviation de Cognac. — Le Figaro fait connaître les noms que portent les consommations diverses dans les cafés du quartier Latin : Absinthe, Purée de pois ; Café avec cognac, Un grand-deuil ; Sans cognac, Un demi-deuil ; Un verre de cognac, Un pétrole ; Une fine Champagne, Un cogne ; Un bock, Un cercueil. Quand on veut du gin, on crie au garçon : « Geneviève ! » s’il ne répond pas assez vite, on ajoute « de Brabant !»

COIFFER SAINTE CATHERINE : Rester fille, ne pas se marier. — Allusion à la coutume qui permettait aux filles seules d’orner, aux jours de fête, la statue de sainte Catherine, patronne des vierges. — « Il y a un préjugé généralement accrédité contre les célibataires qui souvent coiffent sainte Catherine par égoïsme. » (La Cloche, août 72.)

COIN DU FEU : Robe de chambre ne dépassant pas le bas des reins. « Leurs corps sont enveloppés dans de confortables coins du feu en molleton. » (Figaro, 75.)

COIRE : Ferme, métairie. (Halbert.)

COL (se pousser du) : Se faire valoir, passer la main sous le menton, près du col, en renversant la tête, est un geste présomptueux.

Toi qui te poussais tant de col,
Nous t’avons pris Sébastopol.
(Remy, Chanson, 1856.)

COL CASSÉ : Dandy ridicule. — Allusion au col droit cassé aux angles qui est à la mode en ce moment. — « Il y a là-bas une jolie provision de cols cassés escortés de toute une cohorte demi-mondaine. » (P. Véron.)

COLABRE, COLAS, COLIN : Cou, col. (Vidocq.) — Diminutifs et jeux de mots.

COLBACK : Conscrit. — Comparaison de sa chevelure, qui n’est pas encore taillée militairement, au bonnet à poil, dit colback, porté autrefois dans une partie de la cavalerie.

COLLABO : Collaborateur. Abréviation. « Nous avons l’honneur de dire à vos collabos que je les aime à en avaler le jus de ma pipe. » (Commerson, 75.)

COLLAGE : Liaison difficile à rompre.

COLLANT : Dont on ne peut se débarrasser. — « Nous sommes rabibochés. C’est une femme collante. » (L. de Neuville.)

COLLE : Simulacre d’examen, examen préparatoire à un examen véritable, il est appelé ainsi parce qu’on cherche à y coller (embarrasser) l’étudiant. — Il n’y a pas à Paris d’institution sérieuse qui n’ait son colleur. — « On est toujours tangent à une colle, soit que le professeur vous interroge à l’amphithéâtre, soit que le sort vous ait désigné pour être examiné sur les travaux des huit jours précédents. » (La Bédollière.) — « La veille des épreuves, il leur poussait des colles. » (A. Marx.)

COLLÈGE : Prison. (Vidocq ) — Le contact des prévenus en fait souvent une maison d’éducation pour le crime.

COLLÉGIEN : Prisonnier. (Idem.)

COLLER : Examiner, faire subir une colle.

COLLER : Prendre en défaut — « Voilà une conclusion qui vous démonte. — Me prêtes-tu 500 francs si je te colle ? » (E. Augier.)

Abréviation de coller sous bande : acculer dans une situation mauvaise. — Terme de billard. — « C’est fini, ils sont collés sous bande. » (Robquin.) V. Bande.

COLLER : Jeter, mettre. — « On l’a collé au dépôt, envoyé à la Préfecture de police. » (Monselet.) V. Clou.

COLLER : Donner.

Pas un zigue, mêm’ un gogo,
Qui lui colle un monaco.
(Léonard, Parodie, 63.)

COLLER : Contracter un collage. — « Julia : Qu’est-ce que va devenir Anatole ? — Amandine : Le monstre ! il est déjà collé avec Rachel. » (Les Cocottes, 64.)

COLLETIN : Force. (Vidocq.)

COLLETIN : Collet protecteur de cuir ou de tapisserie que mettent les forts de la halle pour porter leurs fardeaux sans se blesser.

COLLETINER : Porter des fardeaux à la halle. V. Colletin. On abrège en disant coltiner.

COLLETINER : Arrêter. (Grandval.) — Diminutif de colleter, prendre au collet.

COLLEUR : Répétiteur chargé d’examiner. « Un colleur à parler m’engage. » (Souvenirs de Saint-Cyr.)

COLLIER, COULANT : Cravate. — Mots expressifs dans la bouche du voleur qui voit dans la cravate un moyen d’étrangler.

COLONNE (chapeau en) : Voir Bataille.

COLOQUINTE : Tête de forte dimension. — Allusion de forme. — « Je crois que vous avez la coloquinte tant soit peu dérangée. » (L. Desnoyers.)

Donne vite un fauteuil : je perds la coloquinte.
(Rienzi, 26.)

COLTIGER : Arrêter. — Diminutif de Colleter. — « J’ai été coltigé et trois coquins de railles sur mesigue ont foncé, ils m’ont mis la tortouse. » (Vidocq.)

COMBERGEANTE : Confession. — On y compte (comberge) ses péchés.

COMBERGER : compter. (Vidocq.)

COMBERGO : Confessionnal. (Halbert.)

COMBLANCE (par) : Par surcroît, par complaisance. (Rabasse.)

COMBRE, COMBRIAU, COMBRIEU : Chapeau. Dans le patois de la Flandre française, on dit cambre, ce qui paraît une forme du même mot. — Même observation pour ce mot que pour cabe et calvin. Le chapeau est ce qui ombrage la tête et, par contraction, ce qu’ombre. — Combrieu et Combriau sont des diminutifs. V. Tirant.

COMBRIE : Pièce d’un franc. (Halbert.)

COMBRIER : Chapelier.

COMBROUSIERS : « C’est ainsi que les marchands forains nomment les paysans. » (Priv. d’Anglemont.) — Pour cambrousier.

COME : Surveillant de bagne. V. Cap.

COMÉDIE (être à la) : Sans un centime. (Rabasse.)

COMFORT : Bien-être, aisance parfaite de la vie matérielle. Anglicanisme. — « Il y avait introduit le comfort, la seule bonne chose qu’il y avait en Angleterre. » (Balzac.)

COMFORTABLE : Qui a du comfort.

COMFORTBILISME : Pratique du comfortable. — « Leur philosophie est sans doute soutenue par le comfortabilisme. » (Balzac.)

COMM : Commerce. (Vidocq.) — Abréviation.

COMME IL FAUT : De bonne compagnie. — « Elles hantent les endroits comme il faut. » (Lynol.) — « Écoutez, je me connais en hommes comme il faut, celui-là en est un. » (Dumas fils, Le Demi-Monde.)

COMMISSAIRE : « Depuis l’Ambigu jusqu’au théâtre Beaumarchais et dans les quartiers voisins, un broc de vin ou une pinte s’appelle un commissaire. » (J. Duflot.) — Allusion à l’ancienne robe noire des commissaires. Le broc s’appelle aussi petit homme noir, parce qu’il est noirci par le gros vin.

COMMODE : Cheminée. (Halbert.)

COMMUNARD, COMMUNEUX : Partisan de l’insurrection dite de la Commune de Paris, 1871. — « Presque tous nos communards réfugiés à Genève y occupent des fonctions en rapport avec leurs goûts. » (Éclair, 72.) — Communard se prend adjectivement. — « Les Enfants du désespoir, tel est le titre d’une société secrète archi-démoc-soc-communarde qui vient de se créer à Genève. » (Éclair, 17 mai 72.)

COMMUNIQUÉ : Communication officielle à un journal. Le mot date du second empire. — « La note suivante a une couleur semi-officielle de communiqué qui n’échappera à personne. » (Éclair, août 72.)

COMPAS (ouvrir, fermer le) : Activer, ralentir sa marche. — Comparaison des jambes aux branches d’un compas.

COMPER (de la) : S’évader de prison. (Rabasse.) Forme de camper.

COMPLET : Complètement ivre.

COMPTE (avoir son) : Être ivre, avoir son compte de liquide.

COMPTE (avoir son) : Mourir. Mot à mot : finir le compte de ses jours. — « J’ai mon compte pour ce monde-ci. C’est soldé. » (L. Reybaud.)

Son compte est bon, dit-on d’un coupable à punir, duquel on compte les méfaits.

COMTE DE CARUCHE, COMTE DE CANTON : Geôlier. (Vidocq.) V. ces mots.

COMTE DE CASTU : Infirmier. (Id.)

COMTE, COMTOIS : Niais. (Id.)

Battre comtois : Mentir. Mot à mot : faire le naïf. On a voulu voir dans ce mot une allusion à la Franche-Comté, mais cette province n’y est pour rien. C’est un simple jeu de mots sur les trois premières lettres de comtois. — « Sans doute qu’elle bat comtois. » (Decourcelle.)

C-O-N : Lâche, niais. Mot à mot : homme qui n’a rien de son sexe. Se prononce soit comme un seul mot, soit en articulant séparément chaque lettre. Un ancien exemple de ce dernier genre de prononciation se trouve dans les Adages de Solon de Vosge (1576.)

CONDÉ : Maire. — Demi-condé : Adjoint. — Grand-condé : Préfet de police.

CONDÉ : Permission. — Du nom du maire qui la donne. — « On leur donne le condé de stationner sur certaines places. » (Stamir, 67.)

CONDÉ FRANC : Magistrat corrompu. (Vidocq.) Mot à mot : condé affranchi. V. Affranchir.

CONDITION : Vol avec effraction. — « J’aurais besoin d’outil, j’ai une condition à faire. » (Beauvillier.)

CONDUITE (faire la) : Chasser avec voies de fait. Mot à mot : reconduire.

Les Français-Anglais vont te faire la conduite.
(Layale, Chansons, 55.)

CONDUITE DE GRENOBLE (faire la) : Mettre quelqu’un à la porte. — « Sa grande visite au roi pour l’engager à faire la conduite de Grenoble à Montmorin et à Duportail et à nommer d’honnêtes gens à leur place. » (1793, Hébert.) — « Le populaire l’a attendu à la sortie et lui a fait ce qu’en style d’atelier on appelle la conduite de Grenoble. » (Liberté, 16 mai 72.)

CONE, CONNE : Mort. (Grandval.) — De Connir, tuer.

CONFECTION : Vêtement sortant d’un magasin de confections. « — Un homme bien couvert, tout ce qu’il y a de mieux en confection. » (Marquet.)

CONFÉRENCIER : Personnage se faisant entendre dans les conférences publiques.

CONIR : Tuer. V. Connir.

CONJUNGO : Mariage. — Latinisme auquel nous devons déjà le mot conjoints. — « Un produit de son premier conjungo. » (Ricard.) — « Vous vous lancez dans le conjungo avec la fille d’une cabotine. » (Charles Hugo.) — « Car faut toujours que le prêtre boute son conjungo à tout ce tracas et que l’amitié finisse par là. » (Vadé, 1744.)

CONNAIS (je la) : Expression usitée pour dire : l’histoire que vous me contez n’est pas neuve, le tour que vous voulez me jouer m’est connu. — « La marquise : Oh ! mon Dieu ! que je suis malheureuse. — Le marquis : Ah ! vous savez ! à la fin… Pas d’attaque de nerfs. Je la connais celle là. » (L. de Neuville,). V. Mettre (le).

CONNAISSANCE : Maîtresse. — « Ah ! vous avez une connaissance, monsieur ! » (Leuven.)

CONNASSE : Femme honnête. (Halbert.) — Les femmes inscrites à la police donnent aussi ce nom à toutes celles qui ne le sont pas.

CONNERIE : Sottise.

Si je gémis sous les verrous,
C’est pour la conn’ri’ d’un’ camproux (cambrouse)
Qui n’a pas su retenir son bagout.
(Chanson de Mouchabœuf, 65, manuscrit.)

CONNIR : tuer. V. Sciage, Refaite, Trimballeur. — Du vieux mot caunir : trépasser.

CONOBLER, CONNOBRER, CONOMBRER : Reconnaître. (Vidocq.) — C’est connaître avec changement de finale. — Être conoblé : être reconnu. (Rabasse.)

CONSCRIT : Élève de première classe aux écoles Saint-Cyr et Polytechnique. — « Lorsque le taupin a été admis, il devient conscrit, et comme tel, tangent à l’absorption. » (La Bédollière.)

CONSCRIT : Homme naïf, inexpérimenté. — Allusion à la gaucherie des conscrits.

CONSERVATOIRE : Mont-de-piété. (Vidocq.) — On y conserve les objets mis en gage.

CONSOLATION : Eau-de-vie. — Ce mot dit avec une éloquence navrante ce que le pauvre cherche souvent dans un petit verre : — l’oubli momentané de ses maux. — « Bon, il entre dans le débit de consolation. » (E. Sue.) — Selon le général Trochu (l’Armée française en 67), « la consolation est une liqueur douce destinée à consoler les entrailles du buveur des violences du tord-boyaux. »

CONSOMM. : Consommation. Rafraîchissement. — Abréviation de consommation. — « Ces dames doivent être altérées par la danse, ce dont elles ne disconviennent pas. Partant de là, il les supplie d’accepter une consomm. » (Mornand.) — « Ces messieurs ne jouent guère que la consomm en cinq secs, presque jamais en cinq liés (cinq points liés). » (Boué de Villiers.)

CONTE BLEU : « Conte sans vraisemblance, comme ceux de la Bibliothèque bleue, ainsi appelée parce que les petits livres qui la composent ont des couvertures de papier bleu, et sont même quelquefois imprimés sur papier bleu. Cette bibliothèque, très-connue dans les campagnes, sortit des presses de Jean Oudot, imprimeur à Troyes en Champagne, vers la fin du xvie siècle. » (Quitard.)

CONTREFICHER (se) : Se moquer d’une chose autant que celui qui a déclaré s’en moquer avant vous. — « Tant qu’à moi, je m’en contrefiche. » (H. Monnier.)

CONVALESCENCE : surveillance de la haute police. On comprendra l’allusion en voyant le mot malade.

CONVERSATION CRIMINELLE : Flagrant délit amoureux. — Anglicanisme — « Je l’ai répudiée de mon cœur après l’avoir surprise en conversation criminelle. » (Blondelet.)

COPAIN : Compagnon. Du vieux mot compain. — « Être copain, c’est se joindre par une union fraternelle avec un camarade, c’est une amitié naïve et vraie qu’on ne trouve qu’au collège. » (H. Rolland.) — « Il me disait bonjour de loin, comme s’il avait eu honte de s’avouer mon copain. » (About.)

COPE : La cope était un des abus du petit commerce d’autrefois. Elle consistait à renchérir sur le prix marqué. — « La cope tomba quand l’habitude de marquer les prix en chiffres connus fut adoptée. » (Naviaux.)

COPEAU : Ouvrier en bois. Mot à mot : faiseur de copeaux.

COPEAU : Crachat. — Expectoration chassée de la poitrine comme le copeau est chassé du rabot.

COPEAUX : Effraction. — Allusion aux traces d’un bris de porte ou de serrure. — « Je suis sapé à dix ans pour un coup de vague avec copeaux. » (Stamir, 67.)

COPIE (Pisseur de) : Journaliste par trop prolixe. On appelle copie le manuscrit à composer dans une typographie.

COQUAGE : Dénonciation. V. Coqueur.

COQUER : Embrasser. (Halbert.)

COQUER : Donner, mettre. V. Ravignolé, Boucanade.

COQUER : Dénoncer. Mot à mot : cuisiner, apporter tout préparé. — Du vieux mot coc ; cuisinier. V. Cuisiner. — « En province, il avait coqué quelqu’un de leur bande. » (E. Sue.)

COQUER LE POIVRE : Empoisonner.

COQUER LE RIFLE : Mettre le feu. — « Girofle largue, depuis le reluit où j’ai gambillé avec tezigue et remouché tes chasses et ta frime d’altèque, le dardant a coqué le rifle dans mon palpitant qui n’aquige plus que pour tezigue. » (Vidocq.)

COQUER LE TAFFE : Faire peur. (Rabasse.)

COQUEUR : « Le coqueur vient dénoncer les projets de vol à la police de sûreté. Le coqueur est libre ou détenu. Ce dernier est coqueur mouton ou musicien. Le mouton est en prison et capte ses codétenus. Le musicien ne révèle que ses complices. — Ce métier de dénonciateur s’appelle coquage. La musique est une réunion de coqueurs (musiciens). (Canler.)

COQUEUR DE BILLE : Bailleur de fonds.

COQUEUSE : Dénonciatrice. V. Casserole.

COQUILLE DE NOIX : « Napoléon met le pied sur une coquille de noix, un petit navire de rien de tout. » (Balzac.)

COQUILLON : Pou. (Vidocq.)

COQUIN : Dénonciateur. (Halbert.) Jeu de mots sur coqueur et coquin.

Coquine : V. Être (en).

CORAM POPULO : En public. Mot à mot : devant le peuple. — Latinisme. — « Je grisais cinquante danaïdes chez Deffieux coram populo. » (Ricard.)

CORBEAU : Frère de la doctrine chrétienne. — Allusion aux longues robes noires du clergé. — « Venez, vous que décore la robe du corbeau. » (A. Montémont.)

CORBEAU : Croque-mort. — Double allusion à son costume noir et à son voisinage habituel des cadavres.

CORBUCHE : Ulcère. (Halbert.)

CORDE AU COU : Croix de commandeur. Son ruban se porte au cou. Mettre la corde au cou d’un colonel veut dire le faire commandeur à l’instant de le mettre à la retraite, c’est-à-dire de le retrancher du monde ou de l’activité.

CORDE (tenir la) : Avoir la vogue. — Terme de courses. — Le côté de la corde est un avantage pour le jockey qui s’en trouve rapproché. — « Qui est-ce qui tient la corde en ce moment dans le monde dramatique ? » (Figaro.)

CORDES (faire des) : Être constipé.

CORDER : S’accorder. — Abréviation.

CORNANT, CORNANTE : Bœuf, vache. (Halbert.) — Allusion à leurs cornes. — On écrit aussi cornaud et cornaude.

CORNARD : À l’École de Saint-Cyr on ne mange que du pain sec au premier déjeuner et au goûter, et les élèves prennent sur leur dîner de quoi faire un cornard. — « Faire hommage de votre viande à l’ancien pour son cornard. » (De La Barre.)

Faire cornard : C’est aussi tenir conciliabule dans un coin.

CORNE : Estomac. — « Si je me rince la corne quelquefois chez le mastroquet, c’est pour me consoler. » (Monselet.)

CORNER : Puer. (Vidocq.)

CORNET : Gosier. — Allusion de forme. — « Je n’suis pas fâché de m’mettre quelque chose dans le cornet. » (H. Monnier.)

CORNETTE : Femme dont le mari est infidèle. Féminin de cornard.

CORNICHON : Veau. (Vidocq.) — Mot à mot : fils de cornante.

CORNICHON : Niais. (Dhautel, 08.) — « Jour de Dieu ! Constantin, fallait-il être cornichonne. » (Gavarni.) — « Malvina se contentait de me qualifier de cornichon. » (L. Reybaud.) — « Allons, pas de bêtises ! t’as l’air d’un cornichon. » (Rienzi, 26.)

CORNICHON : Aspirant à l’École militaire. — « Une fois en élémentaires, il se bifurque en élève de Saint-Cyr ou cornichon, et en bachot ou bachelier ès-sciences. » (Institutions de Paris, 58.) V. Volaille, Potasser.

CORNIÈRE : Étable à bœufs. V. Cornant.

CORRIDOR : Gosier. « Vous lui proposez de venir avec vous pour écraser quelques mollusques et se rincer le corridor d’une fiole de Moët au café Anglais. » (Vie parisienne, 65.)

CORSET (pas de) : V. Quinze ans.

CORVET : V. Être (en).

COSAQUE : Brutal, sauvage, maladroit.

COSNE : Auberge. (Halbert.)

COSTE : La mort. (Idem.)

COSTEL : Souteneur. (Idem.)

CÔTE (être à la) : Être à sec d’argent — On est à flot quand la fortune sourit. — « Si vous êtes vous-même à la côte, — quelles singulières expressions on a dans les coulisses pour exprimer qu’on manque d’argent » (A. Achard.)

COTE (G) : objets volés. Argot des notaires. « Un lourd commissaire-priseur qui avec la cote G jeta les fondements d’une grande fortune. » (Fournier-Verneuil, 1826.)

CÔTÉ (À) : Ne répondant pas à son sujet. — « M. Barbey d’Aurevilly a consacré le succès dans un article à côté très flamboyant. » (E. Blondet, 1867.)

CÔTE DE BŒUF : Sabre. (Vidocq.) — Allusion de forme.

CÔTELETTES : Favoris s’élargissant au bas des joues, de façon à simuler la coupe d’une côtelette.

CÔTELETTES : Applaudissements. (J. Duflot.) — Se dit dans le monde dramatique.

COTERIE : « Les tailleurs de pierres s’interpellent du nom de coterie. Tous les compagnons des autres états se disent pays. » (G. Sand.)

CÔTES EN LONG (avoir les) : Être fainéant, refuser le travail. — Mot à mot : avoir un corps incapable de se plier à la tâche (puisqu’il a les côtes en long et non en travers comme tout le monde). — Ironie populaire. — « Ces demoiselles aussi inaptes au travail que si elles avaient les côtes articulées en long et non pas en travers. » (Th. Silvestre.)

COTON (Filer un mauvais) : Se mal porter. — « Il file un mauvais coton. » (E. Jourdain.) — On disait autrefois jeter un triste coton, comme le prouve cet extrait des Mémoires secrets de Bachaumont : « 24 février 1781. Madame Bulté vient de partir pour Londres où vraisemblablement elle jettera un triste coton. Il est à craindre qu’elle n’y meure de faim. » — Cette dernière expression est dans le Dictionnaire de l’Académie.

COTON : Rixe, dommage. (Halbert.) — « Il y aura du coton : on se battra. — Abréviation de tricoter. — « Le chef de service leur recommande toujours d’éviter le coton, c’est-à-dire d’empêcher qu’il y ait des rixes. » (M. du Camp.)

COTTERET : Forçat libéré. (Dictionnaire d’argot, 44.) — Jeu de mots : le cotteret est un petit fagot. V. Fagot.

COUAC : Fausse note. — Harmonie imitative. V. Canard. — « Il lui échappa un couac épouvantable au milieu d’un couplet. » (A. Signol.)

COUCHE (nouvelle) : Classe inférieure, élément démocratique. Abréviation ironique de nouvelle couche sociale. — « Le dictateur avait promis aux nouvelles couches gloire et honneurs. » (Saint-Genest, 75.)

COUCOU : Montre. (Colombey.) — Du nom des horloges de bois dites coucous, à cause du cri de coucou qu’elles simulent en sonnant les heures.

COUCOU : Cocu. — Redoublement du vieux mot cous : mari trompé. Coucou est du xviiie siècle

Une simple amourette
Rend un mari coucou.
(Chansons, impr. Chassaignon 51.)

COUCOU (faire) : Jouer à la cachette, jeu où l’on crie coucou en guise d’avertissement. — « Je vais me placer dans ce coin, la figure contre le muret la main devant les yeux, comme si je faisais coucou. » (P. de Kock.)

COUDE (lâcher le) : Quitter. — « Vous n’pourriez pas nous lâcher l’ coude bientôt ? » (Léonard, parodie, 63.) — Allusion à la recommandation militaire de sentir les coudes à gauche, en marche.

COUDE (lever le) : Boire à longues rasades. — « Ça n’a pas d’ordre, ça aime trop à lever le coude. » (P. d’Anglemont.)

COUDES À GAUCHE (sentir les) : Marcher avec ensemble, avec régularité, comme à l’école d’infanterie.

COUENNE : Peau. — Se ratisser la couenne, se faire la barbe. V. Gratte-Couenne.

COUENNE : « On dit d’un nigaud, d’un maladroit, d’un sot, qu’il est couenne. » (Dhautel). — « Viens-tu ? — Ah ben ! non. — Ah ! que t’es couenne. » (Ourliac.)

COUENNE DE LARD : brosse. (Vidocq ) — Allusion aux crins de la couenne du porc.

COUILLÉ : Niais. — De couillon — « Un couillé j’ai remouché. » (Vidocq.) V. Plan.

COUILLON : Pour ce mot et ses dérivés, voyez Couyon.

COULAGE : Gaspillage, détournement commis par des subordonnés. — « Quel est le négociant habile qui ne jetterait pas joyeusement dans le gouffre d’une assurance quelconque cinq pour cent de toute sa production pour ne pas avoir de coulage. Eh bien ! la France ne paye que soixante millions, deux et demi pourcent, pour avoir la certitude qu’il n’existe pas de coulage. Le gaspillage ne peut plus être que moral et législatif. » (Balzac.) — « Le coulage est une mauvaise gestion des affaires du pays ; il consiste à faire faire des travaux qui ne sont pas urgents ou nécessaires, etc. » (Balzac, 1841.)

COULAGE : petits détournements commis par la domesticité d’une grande maison ou d’un magasin. — Allusion au liquide coulant par les fentes d’un tonneau au détriment de son possesseur. — « On ne se figure pas le coulage qui désolait notre caissier. » (Almanach du Hanneton.) — « Il y a ce qu’on appelle le coulage, c’est-à-dire les objets dérobés par les employés eux-mêmes. » (G. Vassy, 75.)

COULANT : Lait. (Halbert.)

COULE (être à la) : Être insinuant, sachant se couler entre les obstacles.

COULE (être à la) : Agir de complicité. — « Y a-t-il de la place dans votre boîte ? — Oui ! répond celui-ci qui est à la coule. » (Cavallié.)

COULER (se la) : Aller doucement (Rabasse.)

COULEUR : Mensonge. — Il colore ou farde la vérité. — « Oh ! les peintres ! il n’y a pas à leur monter d’coups, ça connaît les couleurs. » (Lamiral, 1838.)

COULEUR : Soufflet. — Il colore la joue.

Je bouscule l’usurpateur
Qui m’appliqua sur la face,
Comm’ on dit, une couleur.
(Le Gamin de Paris.)

COULÉ : Perdu sans ressources. Mot à mot : coulé à fond. — Terme de marine. — « Non, les étudiants de seizième année n’existent plus ; c’est une génération coulée. » (Privat d’Anglemont, 1855.)

COULER (en) : Conter des mensonges. — « Tu nous en coules, ma mignonne. Va ! j’te connaissons. » (Catéchisme poissard.)

COULER DOUCE (la) : Vivre confortablement. — « Ah ! je ne sais pas quand il se passera, mais j’ai un fier béguin pour toi. Tu la couleras douce avec moi, je t’en réponds. » (L. de Neuville.)

COULEUR LOCALE : Procédé littéraire fort à la mode depuis 1830. — « La couleur locale consistait surtout à faire dire au personnage le nom de toutes les fabriques d’où sortaient les objets dont il parlait et à faire connaître de quelle matière étaient faits ces objets. On dirait : Ma bonne dague d’acier, mon pourpoint de brocart, mon justaucorps de Venise, absolument comme si aujourd’hui on faisait dire à un acteur : Donnez-moi mes bottes de cuir, ma canne de bois. » (Privat d’Anglemont )

COULIANT : Lait. (Grand val.)

COULIANTE : Laitue. (Halbert.)

COULISSIER : Spéculateur jouant à la coulisse de la Bourse, c’est-à-dire en dehors du parquet des agents de change. — Privilège supprimé depuis 1860.

COULISSIER : De coulisses, théâtral. — « De là un besoin insatiable d’intrigues amoureuses et coulissières. » (Ricard.)

COULOIR : Bouche, gosier. — Synonyme de corridor. Même allusion. V. Plomber.

COUP : Secret, procédé particulier. — On dit il a le coup pour il a le dernier mot du savoir faire, et il a un coup, pour il a son procédé à lui.

COUP À MONTER : Grosse entreprise à tenter, piège à tendre. — « Un coup à monter, ce qui, dans l’argot des marchands, veut dire une fortune à voler. » (Balzac) V. Monter.

COUP DE BAS : Coup dangereux. — « Ces fats nous donnent un rude coup de bas. » (Chansons, Clermont, 1835.)

COUP DE PIED (donner un) : Aller jusqu’à un endroit déterminé.

Ne pas se donner de coups de pied : Se louer soi-même. — Mot à mot : ne pas se nuire.

COUP DE PIED DE VÉNUS : Mal vénérien.

COUP DE PISTOLET : « Alléché par l’exemple et la perspective de quelques bénéfices énormes, un novice vient de tirer un coup de pistolet à la Bourse (c’est l’expression pour désigner une opération isolée.) » (Mornand.)

COUP DE POUCE (donner le) : Étrangler.

COUP DE POUCE : Ne pas donner le poids. Mot à mot : donner le coup de pouce à la balance.

COUP DE SIFFLET : Couteau. (Halbert). Pour coupe-sifflet (coupe-gorge).

COUP DE SOLEIL (avoir un) : « Être à demi gris, avoir une pointe de vin. » (Dhautel, 1808.) — On sait que le vin et le soleil ont également la vertu d’empourprer le visage. — « Ma foi, ça n’ s’era qu’à la brune qu’finira c’gueuleton sans pareil. En parlant d’ça j’pourrais bien attraper un p’tit coup de soleil… Mais voyons si j’ai encore de la braise. » (Lamiral, le Savetier en goguette, 38.) V. Soleil.

COUP DE TEMPS : Accident subit, surprise. — Terme d’escrime. — « Je mettrai le trouble là-dedans par un coup de temps qui ne sera pas trop bête. » (Le Solitaire, pot pourri, 1821.) Voir le coup de temps, c’est le prévoir.

COUP DU LAPIN : Coup mortel, comme celui qu’on donne au lapin sacrifié à la cuisine.

COUPE : Misère. (Halbert.) — Mot à mot : dans la coupe des vivres.

COUPE (être sous la) : Être subordonné à quelqu’un.

COUPE (tirer sa) : Nager. — « Rodolphe, qui nageait comme une truite… se prit à tirer sa coupe avec toute la pureté imaginable. » (T. Gautier.)

COUPE-CHOUX : Sabre d’infanterie. — Avant de servir comme baïonnette, cette arme était, même en campagne, des plus pacifiques. — « Leur voit-on traîner d’une façon guerrière le coupe-choux du caporal ? » (A. Rolland.)

COUPE-FICELLE : Artificier d’artillerie. — Allusion à la grande quantité de ficelle réclamée par ses fonctions.

COUPE-SIFFLET : Couteau. Mot à mot : coupe-gorge. V. Sifflet.

COUPE (ça te la) : Cela te déconcerte. — Abréviation de ça te coupe la chique, cela te contrarie, te déroute. (Dhautel, 08.) — « Sous le premier Empire, M. de Beaumont annonça au cercle des Tuileries : « Madame la maréchale Lefebvre ! » L’empereur s’avance et lui dit : « Bonjour, madame la duchesse de Dantzick ! » Celle-ci se retourne et dit au chambellan trop laconique : « Ah ! ça te la coupe, cadet ! » (Encyclopediana.) V. Sifflet.

COUPER : Donner dans un panneau, accepter un mensonge. Abréviation de couper dans le pont. — « Ah ! dit Marlot en faisant sauter l’or dans sa main, elle a donc coupé dans le mariage ? » (Champfleury.)

COUPER DANS LE PONT : Se laisser filouter en coupant des cartes préparées par un grec qui vient de faire le pont : (plier légèrement les cartes à un endroit déterminé, de façon à guider la main de l’adversaire dans la portion du jeu où elle doit couper innocemment). — « Laisse-la couper dans le pont. » (Balzac.)

COUPER LA CHIQUE : Interdire. V. Chique.

COUPER LA GUEULE, COUPER LA GUEULE À QUINZE PAS. — Exhaler une si mauvaise odeur qu’on la sent à quinze pas. — Cette expression ne manque pas de justesse, car la bouche semble souffrir autant que le nez en pareil cas.

Quand elle a mangé du cerv’las,
Ça vous coup la gueule à quinze’ pas.
(Colmance.)

COUPER LA MUSETTE : Couper la parole. — « Ta remontrance me coupe la musette. » (Chansons, Châteauroux, 26.)

COUPER LA MUSETTE : Couper la gorge. — « De Palzo j’ai coupé la musette, il ne peut plus te faire de mal. » (Le Solitaire, pot pourri, 21.) V. Sifflet.

COUPLARD : Couteau. (Halbert.) Mot à mot : coupe-lard.

COUPLETS DE FACTURE : « C’est un morceau de poésie long d’un mètre, sur l’air des Comédiens ou de Vive la Lithographie. Feu Brazier et M. Clairville sont les maîtres ès couplets de facture. » (J. Duflot.)

COURAILLER : Courir les filles. — « Vous l’auriez empêché de courailler. » (Balzac.)

COURBE : Épaule. (Vîdocq). — Elle se courbe souvent.

COURIR : Courir les filles. — « Monsieur n’est pas heureux quand il court. » (H. Monnier.) — On dit aussi Courir la gueuse.

COURIR, FAIRE COURIR : Être propriétaire de chevaux de course. — « Oscar : Tenez, cher ! je viens du club… j’ai beaucoup parié… j’ai perdu vingt-cinq louis et deux saladiers de vin sucré. — Vous savez, je fais courir. — Le marquis : La jeunesse ne saurait avoir de divertissement plus comme il faut. » (Marquet.)

COURIR (se la) : S’enfuir.

COURIR (se) : Se méfier. (Vidocq.) — De l’ancien verbe se covrir : se couvrir, se protéger.

COURTAUD DE BOUTANCHE : Commis de magasin, voleur. (Grandval.)

COUSIN : Grec. V. Poucette.

COUYON, COUILLON : Lâche, poltron. — Du vieux mot coion qui a le même sens. (V. Roquefort), et qui est un diminutif de coy : tranquille, indolent. Il s’écrivait aussi quoyon. — Mazarin est souvent appelé coyon dans les pamphlets de la Fronde.

Beaulieu, Cobourg en furent touchés
De voir leur troupe à l’abandon
Qui fuyoient comme des couillpns
Devant les patriotes.
(Mauricault, Chanson, 1794.)

COUYONNADE : Affaire ridicule, action lâche.

COUYONNER : Reculer au moment d’agir.

COUYONNERIE : Lâcheté. Du vieux mot coionnerie. V. Roquefort.

CRACHER : Parler, Mot à mot : cracher des paroles.

Faire cracher : Faire parler. (Rabasse.)

CRACHER : Décharger. — Le canon crache la mitraille.

CRACHER, CRACHER AU BASSINET : Donner de l’argent de mauvaise grâce. — Vieux mot argotique. Une ancienne gravure représente le grand Coësre ou roi des Truands ayant à ses pieds un bassin où chacun des gueux ses sujets vient déposer son tribut, c’est-à-dire cracher au bassin. — « Tu dois faire cracher encore 150,000 francs au baron. » (Balzac.)

CRACHER DANS LE SAC : V. Raccourcir.

CRACHOIR : Bavardage, bavard. — Quel crachoir ! Quel bavard !

CRACHOIR : Réquisitoire. V. Bêcheur.

CRACHOIR (tenir le) : Tenir le dé de la conversation et ne pas le céder à d’autres, mot à mot : ne pas lâcher le réquisitoire ; accaparer le bavardage. (V. plus haut.) Quand il tient te crachoir, il en a pour longtemps, dit-on d’un bavard. Ce terme est ironique. — « N’étudiant aucune question à fond, mais se contentant de prendre de chaque chose une teinture superficielle qui permet de tenir convenablement un crachoir, — terme vulgaire, mais juste, — d’une heure ou deux. » (Paris-Journal, 72.)

CRACK (à) : « Cheval extraordinaire sur lequel on compte beaucoup. On dit le crack de l’écurie pour dire le meilleur cheval. » (Parent.) Angl. argot de courses.

CRAMPE (tirer sa) : Fuir. — « Elle a pris ses grands airs et j’ai tiré ma crampe. » ( Montépin.) — A aussi un autre sens qui n’est pas de notre ressort.

CRAMPER (se) : Se sauver. Mot à mot : tirer sa crampe. V. Pré, Abouler.

CRAMPON : Importun aussi tenace qu’un crampon. — « Elle est assez jolie, cette femme. — Charmante ! mais quel crampon ! » (L. Leroy.) V. Lâcher. « Je vous fais mes adieux. — Je n’en suis pas fâché, vieux crampon, vieux gâteux ! » (Tam Tam.) De là, sans doute, l’origine de ce péjoratif.

CRAN (lâcher d’un) : Abandonner subitement. — « Nous vous lâcherons d’un cran. » — (Vidal, 33.)

CRAN (faire un) : Tenir bonne note.

CRÂNE : Hardi. — « Est-il crâne, cet enragé-là. » (P. Lacroix, 32.)

CRÂNE : Beau. — « C’est ça qui donne une crâne idée de l’homme ! » (Gavarni.)

Mettre son chapeau en crâne : Le mettre sens devant derrière, à la façon des tapageurs.

CRÂNE : Bon. — « Quand j’étais sur la route de Valenciennes, c’est là que j’en avais du crâne du tabac ! » (H. Monnier.)

CRÂNEMENT : Supérieurement. — « J’ai été maître d’armes… et je puis dire que je tirais crânement. » (Méry.) — « Elle prenait la brosse chez un peintre, et faisait une tête assez crânement. » (Balzac.) — « Je suis crânement contente de vous voir. » (E. Sue.)

CRAPAUD : Homme petit, chétif. (Dhautel.) — Gamin. — Pris souvent en bonne part. — « Tiens ! Potier, je l’ai vu du temps qu’il était à la Porte-Saint-Martin. Dieux ! que c’crapaud-là m’a fait rire ! » (H. Monnier.)

CRAPAUD : Bourse de soldat. — Elle est inférieure à la bourse de la masse dite aussi grenouille, comme le crapaud l’est à la grenouille.

CRAPAUD : Cadenas. (Vidocq.)

CRAPAUD : Fauteuil bas. — « Une bergère… Avancez plutôt un crapaud ! » (E. Jourdain.)

CRAPULOS, CRAPULADOS : Cigare d’un sou. Mot à mot : le havane de la crapule. — Ironie à l’adresse des noms pompeux qui distinguent les cigares de la Havane. V. Infectados.

CRAQUELIN : Menteur. (Grandval.) — De craque, mensonge.

CRASSE : Indélicatesse. — « Elle m’a fait des crasses. Toi, tu m’inspires de la confiance. » (Almanach du Hanneton, 67.)

CRÉATEUR : Peintre. (Vidocq.) — Il crée sur la toile.

CRÉATURE : Prostituée. « Pour la grande dame qui se voit enlever ses adorateurs par une grisette, cette grisette est une créature. » (L. Huart.) — « Mon mari a eu l’infamie de faire venir cette créature dans ma maison. » (Gavarni.)

CREBLEU, CRELOTTE : Jurons. — Abréviations de sacrebleu, sacrelotte. V. ces mots.

CRÉ CHIEN : Abréviation de sacré chien, juron. — « Cré chien ! Loïse t’as là une casquette un peu chouette. » (Gavarni.)

CREDO : Profession de foi. — Latinisme. — « La meilleure réponse, c’est de publier le credo politique du vieux Cordelier. » (C. Desmoulins, 1790.)

CRÈME : Superlatif, le meilleur ou la meilleure. — « Excellent !… Dis donc que c’est la crème des oncles » (Beauvallet.)

CRÉ NOM : Juron. — Abréviation de sacré nom. V. ce mot.

CRÊPAGE : rixe. V. Crêper. — « Un effrayant crêpage de chignons s’en suivit. La police intervint. » (G. Vassy, 75.)

CRÊPER LE TOUPET, LE CHIGNON : Prendre aux cheveux, battre. — « Nous v’la tous deux à nous crêper le toupet. » (Letellier, 30.) — Les femmes se crêpent le chignon.

CRÉPIN : Cordonnier. Mot à mot : enfant de saint Crépin, patron des bottiers et des cordonniers. — « Je défie bien le Crépin de me faire des bottes plus justes. » (La Correctionnelle.)

CRÉPINE : Bourse. (Vidocq ) — De crépin. — C’est, comme le crapaud, une bourse de cuir.

CRÉPON : « Des crépons, c’est-à-dire de ces petits paquets de crin que le beau sexe place sous ses cheveux pour les faire « bouffer. » (Éclair, 10 mai 72.)

CRÈS : Vite. (Halbert.)

CRESPINIÈRE : Beaucoup. (Idem.)

CRÉTINISER : Abrutir. — « Un Chazelle a vécu à vingt-deux sous par tête et s’est crétinisé. » (Balzac.) — « Tout le monde joue en France, dit-il ; qu’est-ce que cela prouve ? une seule chose : c’est que la France se crétinise au milieu de cette frénésie de spéculation. » (Boursicotiérisme.)

CREUSE : Gorge. (Idem.) — Voyez Creux.

CREUSER : Approfondir, en parlant de l’exécution d’une œuvre artistique ou littéraire. — C’est creusé se dit d’une chose fort étudiée. — Creuser son sujet, c’est le préparer avec soin.

CREUX : Logis, maison. (Grandval.)

CREUX : Voix retentissante comme l’écho d’une caverne.

CREVAISON : Mort, chute. — « Cette rengaine du fiasco n’en dissimulait pas moins une crevaison spontanée. » (Michu.)

CREVANT : Ennuyeux à périr, à crever.

CREVÉ, PETIT CREVÉ : Jeune élégant poussant à un degré tout féminin la recherche de sa toilette. Un Almanach des petits crevés a paru en 1867.

Elle ajouta : Bébé, je suis chez mes parents.
Le crevé s’écria : Cela m’est bien égal.
Alm. des p. Crevés, 67.

— « Petit crevé se décollette avec grâce, épile son menton et cire sa moustache. Son teint délicat connaît les douceurs de la poudre de riz et du blanc de perle. » (Yriarte.) — C’est de ce visage blême qu’est venue selon nous l’expression de crevé.

CREVER, CREVER LA PAILLASSE : Battre, blesser, tuer.

CREVER (tu t’en ferais) : Formule négative. V. Cylindre, Mourir.

CREVETTE : Lorette. Mot à mot : fille hantant les crevés. V. ce mot. « Tous les essaims de vierges folles, biches dorées, cocottes, crevettes. » (Michu.) — « Les nuits de cancan carabinées des grandes crevettes et des petits crevés. » (Blondelet, 1867.)

CRIBLAGE : Cri. — « On peut les pésiguer et les tourtouser en leur bonnissant qu’ils seront escarpés s’il y a du criblage. » (Vidocq.)

CRIBLEMENT : Cri. (Colombey.)

CRIBLER : Crier. — C’est crier avec changement de finale.

CRIC : Eau-de-vie. V. Crique.

CRIC-CROC : À ta santé. (Grandval.) — Harmonie imitative.

CRI-CRI : Grillon. — Harmonie imitative de son cri. — « Un cri-cri que l’habitude de me voir avait apprivoisé. » (G. Sand.) — « Je sens quet’chose qui trifouille dans mon estomac. Je crois que c’est un cri-cri. » (H. Monnier.)

CRIE, CRIGNE : Viande (Rabasse.) V. Criolle.

CRIMÉENNE : « Large et longue capote à collet et à capuchon envoyée de France pour le soldat en Crimée. » (Cler, 1856.)

CRIN (être comme un) : Être d’abord difficile. Le crin est raide et piquant.

CRINS : Cheveux. — Animalisme.

CRINS (à tous) : Très-chevelu, et au figuré : extrême dans ses opinions. — Allusion à la chevelure dont on ne veut rien retrancher, qu’on laisse pousser à tous crins. — « Les démocrates à tous crins, qui sont dans cette voie anti-catholique. » (Moniteur, septembre, 1872.)

CRIOLLE, CRIE : Viande. V. Artie.

CRIOLLIER, CRINOLIER : Boucher. — « Nous allons barbotter demain la cambriolle d’un garçon crinolier. » (Canler.)

CRIQUE, CRIK : Eau-de-vie. (Vidocq.) — « Un verre de criq’ ne fait pas de mal. » (J. Choux.) — « Si on a donné une gratification de crik (eau-de-vie), il y a un changement complet. » (Vie parisienne, 1865.)

CRISTALLISATION : Condensation intellectuelle. — On sait que la cristallisation unit et solidifie les parties d’une substance dissoute dans un liquide. — « Un homme d’esprit, Stendhal, a eu la bizarre idée de nommer cristallisation le travail que la pensée de la marquise fit avant, pendant et après cette soirée. » (Balzac.)

CRISTALLISER : Paresser au soleil. — Terme de chimie : La cristallisation est un effet de la chaleur. — « Permis à tous de se promener dans les cours, de fumer leur pipe, de cristalliser au soleil. » (La Bédollière.)

CRISTI : Juron. — Abréviation de sacristi. V. ce mot. — « Cristi ! que mon panaris m’élance. » (Marquet.)

CROC : Escroc. — Abréviation.

CROCHER : Sonner. (Halbert.) — Pour crosser. V. ce mot.

CROCHER (se) : Se battre. — Abréviation de s’accrocher. — « Je grille de vous voir crocher avec le Maître-d’École, lui qui m’a toujours rincé. » (E. Sue.)

CROCS : Dents. (Grandval.)

CROIRE QUE C’EST ARRIVÉ : Se prendre trop au sérieux. « Elle se disait regardant les vagues en courroux : Ce bon Neptune, il croit que c’est arrivé. » (Aubryet, 1870.) — « Au premier rang sont les gens qui croient que c’est arrivé. » (P. Mahalin, 1867.)

CROISANT, CROISSANT. — Gilet. (Vidocq.) — Il croise sur la poitrine.

CROIX : Six francs. — Vieux mot qui faisait allusion à la croix empreinte sur certaines monnaies d’argent. — « Le carreau du Temple avait son argot ; il parlait par pistoles, croix, point, demi-point et rond. La pistole valait dix francs ; la croix, six francs ; la demi-croix, trois francs ; le point, un franc ; le demi-point, cinquante centimes, et le rond, un sou. » (E. Sue.)

CROLLE : Écuelle. (Fr. Michel.)

CROME : Crédit. (Halbert.)

CROMPER : Sauver. (Idem.) Pour cramper.

CROMPIR : Pomme de terre. (Fr. Michel.) — Germanisme. De Grundbirne : poire de terre.

CROMPER SA TANTE : Sauver un prisonnier. (Rabasse.)

CRONÉE : Écuelle. (Idem.)

CROQUE-MORT : Porteur employé par les pompes funèbres. — « Le croque-mort est d’un naturel grivois ; il aime le vin, le jeu, les belles. » (Privat d’Anglemont.)

CROQUER : Esquisser, dessiner. — « C’est un charbonnier de la grève que ce peintre a voulu croquer. » (Santoliana, 1764 ) — « Si je croquais ce chêne avant de déjeuner ! » (Marcellin.)

CROSSE, CROSSEUR : Receleur, ministère public. (Vidocq.) — Son réquisitoire frappe ou crosse les accusés. — On sait que crosser est pris ordinairement dans ce sens.

CROSSER : Recéler.

CROSSER : Sonner. Mot à mot : frapper, crosser l’airain. — « Quand douze plombes crossent, les pègres s’en retournent au tapis de Montron. » (Vidocq.)

CROSSIN, CROSSE : Recéleur. (Fr. Michel.)

CROTTE D’ERMITE : Poire cuite. (Grandval.) Allusion de forme et de couleur.

CROUPIONNER : Remuer du croupion, faire bouffer la jupe.

CROÛTE : Homme arriéré.

CROÛTE DE PAIN DERRIÈRE UNE MALLE (s’embêter comme une) : Mot à mot : dessécher d’ennui.

CROÛTÉUM : Collection de croûtes ou de mauvais tableaux. « Bientôt la boutique, un moment changée en croûtéum, passe au muséum. » (Balzac.)

CROÛTON : Mauvais peintre. Mot à mot : faiseur de croûtes.

CROÛTON : Vieil encroûté. — « Vous m’appelez vieux croûton, quand je vous nomme ma mie. » (Cabassol.) — « Les maîtres d’armes de régiments étaient, en ces temps reculés, de vieux croûtons. » (Villemessant.)

CROÛTONNER : Peindre des croûtes.

CROYEZ ÇA ET BUVEZ DE L’EAU : Terme en usage pour se moquer des gens crédules. — Par allusion aux malades qui cherchent aux eaux la santé, et aux éloges exagérés de la vertu de chaque eau minérale. — « Croyez ça, puis buvez de l’eau » (Rienzi, 26.)

CRUCIFIER : Décorer de la Légion d’honneur. Jeu de mots. Crucifier c’est mettre l’homme à la croix. — « On t’a crucifié ! Et qu’as-tu donc fait pour cela. — Mais, mon bon, j’ai fait… les démarches nécessaires, répond le nouveau chevalier. » (Gazette anecdotique.)

CRUCIFIX À RESSORT, CRUCIFIX : Pistolet. — Comme le crucifix, il se montre à l’heure suprême. — « Godet, le limonadier, a abandonné ses bavaroises pour jouer du crucifix à ressorts dans le bois de Vincennes. » (Calendrier du père Duchêne, 1791.)

CUIR : Peau, — « C’était aux nègres qu’il en voulait, à cause du coloris de leur cuir. » (L. Desnoyers.) V. Cuirasser.

CUIR (tanner le) : Battre.

CUIR DE BROUETTE : Bois. — Ironie. — Des sabots sont des escarpins en cuir de brouette.

CUIRASSER : Parler en faisant des fautes de liaisons appelées cuirs. V. Velours. — « Frater au régiment, il en a conservé l’habitude du discours et cuirasse proprement. » (Bataille, 43.)

CUIRASSIER : Homme fréquemment coupable des fautes de liaison appelées cuirs.

CUISINE (la) : La préfecture de police. — C’est le rendez-vous des cuisiniers.

CUISINE DE JOURNAL : Tout ce qui regarde les petits détails et l’ordonnance matérielle d’un journal. — « C’est lui qui fait la cuisine du journal. » (L. de Neuville.)

CUISINER : Travailler d’une façon quelconque, au figuré. — « C’est ainsi que M. Jules Breton s’est ingénié à cuisiner le genre rustique, sans rusticité. » (Th. Silvestre.)

CUISINIER : Espion, agent de police secrète. (Vidocq.) — « Lui qui avait servi plusieurs fois de cuisinier à la police. » (Canler.) — « Mauvais signe ! un sanglier ! comment s’en trouve-t-il un ici ? — C’est un de leurs trucs, un cuisinier d’un nouveau genre. » (Balzac.) V. Coqueur.

CUISINIER : Avocat. (Halbert.)

CUISINIER : Secrétaire de rédaction. Mot à mot : rédacteur chargé de la cuisine du journal.

CUISSE (ça me fait une belle) : C’est un avantage illusoire pour moi. — Équivalent de : ça me rend la jambe bien faite. V. Jambe.

CUIT : Perdu, condamné. — « Cuits, cuits ! les carlistes, ils seront toujours cuits. » (Métay, 1831.)

CUIT : Condamné. (Moreau C.)

CUITE : Correction. — Il en cuit à celui qui la reçoit.

CUIVRE : Monnaie de billon. — « T’as vu que ton cuivre déménageait. » (Ricard.)

CUL : Homme bête et grossier.

CULBUTE : Culotte. (Grandval.) Changement de finale, V. Affure.

CULOTTAGE : Action de culotter une pipe. — « Il va paraître… un traité théorique et pratique du culottage des pipes. » (Lespès, 1866.)

CULOTTE : Partie de dominos qui procure au gagnant un grand nombre de points. — « Le joueur de dominos préfère le double-six culotte avec six blancs dans son jeu. » (Luchet.)

CULOTTE : Perte qui englobe toutes les autres. — « Un étudiant poursuivi par le guignon s’est vu mettre sur son compte toutes les demi-tasses consommées dans la soirée par tous les habitués du café. Cela s’appelle empoigner une culotte » (L. Huart.) — « Vous vous asseyez à la table de baccarat, et vous vous flanquez une culotte de 500 louis. » (Vie parisienne, 1866.)

CULOTTE (se donner une) : Faire excès de boire ou de manger. — Donné déjà par le Dictionnaire de Leroux, 1718. — Synonyme d’un terme fréquemment employé : S’en donner plein la ceinture. — « Un ivrogne ferait bien mieux de s’acheter un pantalon que de se donner une culotte. » (Commerson.)

CULOTTE se prend au figuré pour un excès de paroles. — « Nous nous sommes donné une fameuse culotte monarchique et religieuse. » (Balzac.)

CULOTTE DE PEAU : Vieux soldat. — « N’appelle-t-on pas un vieux soldat culotte de peau ? » (Gangam, 1861.) — « Habit boutonné militairement. Culotte de peau, au physique et au moral. » (Almanach du Hanneton, 1867.)

CULOTTÉ : Aguerri, teinté. — « Oh ! ma chère, je suis culottée, vois-tu. » (Gavarni.) — Allusion au culottage de la pipe. On dit un nez culotté pour un nez rougi par l’ivrognerie, des yeux culottés pour des yeux cernés de bistre.

CULOTTER : « Culotter une pipe, c’est imprimer, grâce à l’action du tabac brûlé dans son foyer, une couleur foncée à sa terre blanche. » (Lespès.) — C’est le culot du fourneau de la pipe qui brunit le plus. De là le mot.

CULOTTER (se) : Se former, prendre une tournure décidée. — Même allusion. — « Voici un pied d’Andalouse, se dit-il, ceci est d’une bonne couleur, et ma passion se culotte tout à fait. » (T. Gautier, 1838).

CULOTTER (se) : Faire excès de boire ou de manger. — « Nous pouvons donc enfin nous culotter avec du vin du tyran. » (Chenu.)

CULOTTEUR : Homme qui culotte des pipes par goût ou par métier. — « Tout culotteur un peu versé dans la partie métamorphose le petit fourneau où brûle son tabac en alambic pour cette production équivoque, la nicotine. » (A. Luchet.)

CUMULARD : « Fonctionnaire qui cumule les émoluments de plusieurs places. » (Lubize.) — « Le cumulard se recommande par son industrie. Employé de ministère, il est musicien le soir, et le matin il est teneur de livres. » (Balzac) — Malgré l’autorité de cet exemple, je dois dire qu’on appelle surtout cumulards ceux qui ont plusieurs sinécures grassement rétribuées par l’État. On a fait jadis un Almanach des cumulards.

CUPIDON : Chiffonnier (Vidocq.) — Comparaison ironique du carquois et du trait de l’Amour à la hotte et au crochet.

CURIEUX : Président, juge d’instruction. — Il est curieux par métier. — « Le curieux a servi ma bille (mon argent.) » (Vidocq.)

Grand curieux : Président. (Halbert.)

CYLINDRE (tu t’en ferais éclater le) : Tu en mourrais. — Formule ironique de refus.

Une biche dit : « Mon p’tit homme,
Je mangerais bien des fraises, des p’tits pois,
Paye-m’en !… » La scène était à peindre.
Le cocodès dit en baissant la voix :
« Tu t’en ferais éclater le cylindre. »
(A. Duchenne.)