Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/641-650


Fascicules du tome 1
pages 631 à 640

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 641 à 650

pages 651 à 660



Livres ; & un parallèle de l’erreur des Marseillois, avec la doctrine de quelques Modernes. C’est de ces différens Traités qu’ont été tirées les cinq fameuses Propositions condamnées par Innocent X, le 31 Mai 1653. Urbain VIII trouva deux raisons pressantes de condamner l’Augustin de Jansénius ; l’une, qu’il y soutenoit les erreurs de Baïus, condamnées par Pie V, & par Grégoire XIII ; l’autre, qu’il choquoit directement l’autorité du S. Siége, Paul V ayant expressément défendu qu’on n’imprimât rien sur ces matières, & Urbain lui-même ayant renouvelé & confirmé ce Décret en 1625. Sa Bulle est du 4 de Mars 1641. Recueil Hist. des Bulles, &c. En 1654, on vit paroître un Décret du 23 Avril, où l’Augustin de Jansénius fut condamné tout de nouveau, avec plus de quarante autres livres, où sa doctrine étoit soutenue. Ibid.

Augustin. s. m. Religieux qui suit la Règle de S. Augustin. Augustinianus. Il y a plusieurs Congrégations différentes d’Augustins, qui se distinguent par différens noms. Les Augustins de la Congrégation des Brittiniens, dont nous parlerons à la lettre B. Les Hermites de S. Augustin, Congrégation qui a commencé par la réunion qu’Aléxandre IV fit de plusieurs Hermites, qui se disoient de l’Ordre de S. Augustin. Ce Pontife travailla à cette réunion dès la première année de son pontificat, l’an 1254, & ils se rassemblèrent deux ans après en 1256. Les Guillelmites ne voulurent point entrer dans cette union, & le Pape y consentit par une Bulle donnée à Anagnie la même année. Les Constitutions de cet Ordre furent examinées & confirmées dans le Chapitre général de Florence en 1287, & dans celui de Ratisbone en 1292 ; on y fit quelques changemens en 1575, dans un Chapitre tenu à Rome ; & en 1580, on en fit de nouvelles qui furent approuvées par Grégoire XIII. L’an 1567, Pie V mit les Hermites de S. Augustin, au nombre des Ordres Mendians. Leur habillement consiste en une robe & un scapulaire blanc, quand ils sont dans la Maison. Au Chœur, & quand ils sortent, ils mettent une espèce de coule noire par-dessus, & un grand capuce noir, rond par-devant, & se terminant en pointe par-derrière, où il descend jusqu’à la ceinture qui est de cuir noir. P. Hélyot, T. III, p. 12 & suiv.

Les Hermites de S. Augustin de la Congrégation de Leceto, ou plutôt Ilicéto. C’est une réforme établie par les soins du P. Ptolémée de Venise, vers l’an 1385, & dont le Couvent d’Iliceto fut le premier & le chef.

Les Augustins de la Congrégation de Carbonnière. Elle fut formée dans le royaume de Naples, vers le même temps par les Peres Simon de Crémone, & Chrétien Franco, & commença au Couvent de Saint Jean de Carbonnière dans Naples. Elle est gouvernée par un Vicaire général, & comprend à présent quatorze Couvens.

La Congrégation de Lombardie comprend 86 couvens. Les Auteurs de cette réforme furent les Pères Jean-Roc Porzii de Pavie, Jean de Navara, & Grégoire de Crémone. Elle commença en 1418.

Les Augustins de la Congrégation de Monte Ortono, formée vers 1430, proche de Venise, par Simon de Camérino, n’ont jamais eu plus de cinq Monastères, qui aujourd’hui sont réduits à deux.

Le P. Jean Alarcon fonda en Espagne, l’an 1430, les Augustins de la Congrégation della Claustra, titre qu’elle ne porta que jusqu’en 1505, parce qu’elle s’introduisit dans tous les Couvens de Castille.

L’an 1470, ou 1475, Baptiste Poggi donna commencement à la Congrégation des Augustins de Notre-Dame de Consolation.

Les Augustins de la Congrégation de l’Apouille sont de 1491, & ceux de la Congrégation de Saxe, de 1492. C’est dans cette Congrégation qu’entra Luther, où il eut pour ami, avant son apostasie, le général Saupitius, & pour Maître, Barthélemi d’Usinghem, qui tous deux l’abandonnèrent après qu’il eut commencé à publier ses erreurs. Cet Hérésiarque corrompit presque toute cette Congrégation, & elle ne subsista pas long-temps.

Les Augustins de la Congrégation de Calabre. Elle fut établie en 1503, par le P. François de Zampana, & ensuite divisée en deux, l’une, de la Calabre ultérieure, & l’autre, de la Calabre Citérieure.

Les Augustins de la Congrégation de Dalmatie, commencée en 1511, n’ont que six Couvens.

Les Augustins Colorites, ou de la Congrégation des Colorites, durent leur origine en 1530, dans la Calabre Citérieure, à un saint Prêtre, nommé Bernard de Rogliano, & se soumirent en 1600, à l’obéissance de tout l’Ordre des Hermites de S. Augustin. Cette Congrégation a pris son nom d’une petite montagne nommée Colorito, située près du village de Morano, au Diocèse de Caffano, au royaume de Naples, dans la Calabre Citérieure.

Les Augustins de la Congrégation de Cantorbi, ou Réformés de Sicile, ont eu pour Fondateur le P. André de Guasto, sicilien, qui obtint du Pape en 1579, les permissions nécessaires à cet effet. Elle fut appelée de Cantorbi, parce qu’il établit son premier Monastère sur une montagne de ce nom ; mais on appelle communément ces Religieux, les Augustins Réformés de Sicile.

Augustins Déchaussés. C’est une réforme fondée par le P. Thomas Jésus, de l’illustre maison d’Andrada, dont une branche s’établit en Portugal, l’an 1302. C’est de cette branche que ce Pere naquit à Lisbonne en 1520. La réforme qu’il avoit commencée, ne se consomma qu’en 1588, après sa mort arrivée le 17e d’Avril 1532. En 1596 : cette réforme fut apportée en France par les Pères François Amer & Matthieu de Sainte Françoise, & fut introduite d’abord par l’Archevêque d’Embrun, Guillaume d’Avanson, Prieur Commandataire de Saint Martin de Méseré, qui voulant rétablir l’observance régulière dans le Prieuré de Villar-Benoît, ruiné par les Hérétiques, obtint un Bref de Clément VIII, pour y mettre des Augustins Déchaussés. A la recommandation de ce Pape, Henri IV leur donna des Lettres-Patentes. Louis XIII les confirma, & elles furent enregistrées au Parlement en 1619. Louis XIII se déclara Fondateur du Couvent de Paris, & lui donna le nom de Notre-Dame de la Victoire, en mémoire de la prise de la Rochelle sur les Hérétiques. On les appelle à Paris Augustins Déchaussés, Petits Peres, Capucins noirs, Capucins d’Ebène.

Les Augustins de la réforme de Bourges, sont une Congrégation établie par le zèle des Peres Étienne Rabâche & Roger Girard, qui vers l’an 1593, résolurent de vivre conformément aux anciennes Constitutions. Le Couvent de Bourges fut le premier où ils menerent cette vie nouvelle, & de-là cette Congrégation fut appelée la Communauté de Bourges ; elle a aussi eu le nom de Province de Saint Guillaume. On les appelle à Paris les Petits Augustins, ou les Augustins de la Reine Marguerite, parce que leur Couvent a été fondé par Marguerite de Valois, première femme de Henri IV. Cette réforme se distingue par un habit plus étroit que celui des Grands Augustins.

Il y a aussi des Chanoines Réguliers de S. Augustin, qui sont vêtus de blanc, avec des rochets de toile, & qui n’ont que la chappe noire. Ils sont connus à Paris sous le nom de Religieux de Sainte Geneviève, à cause que cette Abbaye est le chef de leur Réforme.

En Imprimerie, en appelle S. Augustin, le caractère qui est entre le gros Romain, & le Cicero.

Le Saint Augustin est aussi une espère de poire, qui se mange au mois de Novembre. La Quint. Il y en a qui sont peu grosses, & qui ont la chair dure & sèche. D’autres sont fort belles & très-bonnes : elles sont à peu près de la grosseur & figure d’un virgoulé. L’œil est médiocrement grand & passablement enfoncé ; le coloris est d’un beau jaune de citron, un peu tiqueté, rougissant un peu à l’endroit où le soleil donne ; la chair en est tendre sans être beurrée : quelques-unes ont un petit goût aigret, qui leur sert de relief. La Quint.

AUGUSTINE. s.f. Religieuse de l’Ordre de S. Augustin. Monialis Augustiniana. On prétend qu’elles ont été instituées à Hippone, par S. Augustin lui-même, & que c’est à elles qu’il adresse son Epître 109, de l’édition de Louvain, 211 de celle des Bénédictins. Il y a des Augustines Déchaussées en Espagne, fondées vers l’an 1580. Elles passerent en Portugal en 1663, Les Augustines de la Récollection furent fondées en Espagne, par la V. M. Mariane de S. Joseph, l’an 1603. Les Augustines de Dordrecht, les Augustines d’Eldras en Saxe, de Lémégo, d’Hervord & de Dermold, au rapport de Buschius, de Reform. Monast. L. II, C. 55, disoient au Chœur l’Office de la Sainte Vierge en langue Allemande. Les Augustines de Sainte Marthe à Rome. Les Augustines du Monastère des Vierges à Venise.

Augustine. Terme de Fleuriste. Anémone, dont les grandes feuilles sont blanches, mêlées d’incarnat, & la peluche couleur de feu.

AUGUSTINIEN, ENNE. Augustinianus. s. m. & f. Nom de secte. Les Augustiniens sont des hérétiques du XVIe siècle, ainsi nommés du nom de leur Chef qui fut un Sacramentaire, nommé Augustin, qui enseignoit que les âmes des Saints n’entreront point au Ciel avant le jour du Jugement. Lindanus est presque le seul qui en ait parlé.

Les Jansénistes s’appellent aussi Augustiniens, parce qu’ils prétendent être les disciples de S. Augustin, & enseigner sa Doctrine. Ils ne sont pas les seuls qui se donnent ce nom ; quiconque se flatte d’avoir trouvé le véritable sens de S. Augustin, de suivre sa doctrine, se dit Augustinien. Il y a certains Théologiens fort différens des Jansénistes, à qui l’on donne le nom d’Augustiniens. Les idées qui nous représentent la Grâce & la volonté comme deux adversaires qui le combattent, & qui l’emportent l’un sur l’autre, ne sont rien moins que des idées Augustiniennes. Critiq. du Dict. de Bayle.

Augustinien, enne, est aussi adjectif.

Non, non, N… sur ma parole
Dans le monde savant n’est rien :
Sur le sens Augustinien
Jamais il n’eut procès à Rome,
Et du dogme de nos aïeux
Il laisse à qui veut, le bon homme,
Vider les points contentieux.

☞ AUGUSTOW. ville de Pologne, dans le Duché & Palatinat de Podlaquie, aux confins du royaume de Prusse & de la Lithuanie. En latin Augustavia.

AU-GUY-LAN-NEUF. Voyez Aguilanneuf. Quelques-uns écrivent Au guy l’an neuf. Les Gaulois nommoient le mois de Décembre, le mois sacré, aussi-bien que les Allemands, parce qu’en ce mois les sages Druides cueilloient le Guy de chêne en grande cérémonie, & le distribuoient au peuple en étrenne, & pour un heureux commencement d’année. D’où est venu ce proverbe ancien, que nous avons retenu jusqu’à présent, Au-Guy-l’an-neuf, ad viscum annus novus. C’étoit donc la coutume parmi les Gaulois, que sur le soir du jour qui précédoit le premier jour de l’an, les Druides crioient d’une voix haute & résonnante. Au guy-Gaulois. A ce cri chacun se mettoit en quête dans les bois & les forêts pour trouver le guy de chêne ; puis ceux qui l’avoient rencontré, en donnoient avis aux Druides, qui le cueilloient avec beaucoup de respect & de cérémonie, &c. Maichin.

AVI.

AVIAUX. s. m. Vieux mot. Borel croit qu’il a signifié les ornières des chemins.

AVICTUAILLEMENT, ou AVITAILLEMENT. s. m. qui est plus usité. Provision de vivres que l’on met sur un vaisseau pour le mettre en état de faire voyage, ou dans une place. Commeatûs importatio.

☞ AVICTUAILLER, ou plutôt AVITAILLER. v. a. Mettre la provision de vivres nécessaire dans un vaisseau, pour le mettre en état de partir, ou dans une place ou dans une ville dont on craint le siége. Commeatum importare.

☞ AVICTUAILLEUR, ou AVITAILLEUR. s. m. Celui qui est chargé de la provision de vivres pour un vaisseau, pour une place. Qui annonam subministrat.

☞ Ces mots viennent de ad & de victualia.

☞ AVIDE. adj. de t. g. Avidus. Dans le sens propre, c’est celui qui a un désir immodéré de boire & de manger. Avide des bons morceaux. Il est si avide qu’il dévore plutôt qu’il ne mange. Le loup est un animal très-avide.

☞ Au figuré, on le dit de même de celui qui désire quelque avantage, les biens, les honneurs, les dignités, &c. avec beaucoup d’ardeur. On n’est que trop avide des biens ; mais on ne l’est point assez de la gloire. On regarde avec des yeux avides une beauté qu’on aime. Catilina étoit avide du bien d’autrui, & prodigue du sien. Bouh. Ceux qui ont de l’esprit sans érudition, indifférens pour toutes les choses qui les ont précédés, sont avides de celles qui se passent à leurs yeux. La Bruy. Les personnes si avides de réputation, la perdent souvent par l’avidité avec laquelle ils la recherchent. Bell.

Que je plains le fort des avares,
A qui l’avide soif des biens
Fournit pour s’enrichir mille nouveaux moyens
Toujours injustes & barbares !

AVIDEMENT. adv. D’une manière avide. Avidè. Il se dit au propre & au figuré. On connoît la bonté d’un cheval à le voir manger avidement son avoine. L’amour avidement croit tout ce qui le flatte. Racin.

AVIDITÉ. s. f. Désir ardent, immodéré, tant au propre qu’au figuré. Aviditas. L’insatiable avidité du bien empêche les avares d’en jouir. Quand on mange avec trop d’avidité, cela cause de l’indigestion. Il avoit une grande avidité de régner. Vaug. L’extrême avidité des hommes pour les honneurs vient de leur vanité. S. Evr. Ronsard s’excuse de s’être servi du mot d’avidité, qui étoit nouveau de son temps. Il vient du verbe avere, souhaiter.

Tout le monde voit que ce mot vient du latin aviditas ; mais on ne savoit pas qu’aviditas fût pris du Celtique avid. Le P. Pezron nous l’apprend.

AVIGNON. Avenio, ou Avennio Cavarum, dans Grégoire de Tours, Liv. III, ch. 32. Avennica, & dans les anciennes Notices, Civitas Avennicorum. Ville de France, en Provence, sur le Rhône & sur une branche de la Sorgue. Avignon est fort ancien. On croit que cette ville de la Gaule Narbonnoise fut bâtie en même temps que Marseille, l’an 147 de Rome.

Grégoire de Tours a cru que ce nom venoit du mot latin vinum, qui signifie du vin ; mais il n’y a pas d’apparence. Avenio est un mot Gaulois, dont nous ne savons ni l’origine, ni la signification.

Avignon, a un Archevêché établi l’an 1475 par Sixte IV, & non pas par Jules II, comme dit Miræus en sa Géographie Ecclésiastique. Autrefois c’étoit un Évêché dépendant de Vienne, & ensuite d’Arles. En 1348, Jeanne première, Reine de Naples & Comtesse de Provence, vendit Avignon & le Comté Venaissin au Pape Clément VI 30 000 écus d’or. Avignon a été la demeure des Papes depuis Clément V, jusqu’à Grégoire X, ou depuis 1305, jusqu’à 1376, c’est-à dire, 70 ou 71 ans que les Romains appellent la captivité de l’Eglise en Babylone, à cause que la captivité des Juifs en Babylone dura 70 ans. Avignon a une Université fondée en 1303 par Charles II, Roi de Jérusalem & de Sicile, & Comte de Provence. Noguier a fait l’Histoire Ecclésiastique d’Avignon, imprimée à Lyon en 1660. Joseph-Marie Suarès a fait une description du Comté Venaissin & d’Avignon, imprimée à Lyon vers le milieu du siècle passé, en 1658, in-4o. Avignon étoit autrefois le pays des Cavares ; c’est pour cela que Méla l’appelle Avenio Cavarum. Cette ville enclavée dans la France, est à la longitude de 22°, 23′, 33″, & à la latitude de 43°, 37′, 36″. Gallet, Beauchamp, Cassini, Bonfac, Feuillée. Et selon M. de la Hire, 22°, 17′, 52″ de longitude, & 43°, 52′, 0″ de latitude.

☞ Depuis 1348, les Souverains Pontifes avoient toujours possédé la ville d’Avignon, dont la France vient de prendre possession en 1769.

☞ AVIGNONET, ou VIGNONET. Petite ville de France, dans le haut Languedoc, au pays de Lauraguais.

AVIGNONOIS, OISE. s. m. & f. Qui est : d’Avignon. Avenionensis.

AVILA. Nom propre de plusieurs lieux différens. Abula. Il y a Avila dans la Vieille Castille, en Espagne. Abula, Albucella, Arbacula. C’est une ville épiscopale, entre Madrid & Salamanque. Une autre Avila est dans l’Asturie d’Oviédo, à l’embouchure du Nalon, près du cap de Guzan. On met l’Argenteola, ou Argenteolum, ville des anciens Asturiens, ou à Avila ou à Médules, dans la même contrée. La Sierra d’Avila, ou les montagnes d’Avila, sont dans la Vieille Castille. Mons Abulensis, Montes Abulenses. Elles bordent le chemin de la Vieille Castille, depuis le royaume de Léon, jusqu’à la Castille Nouvelle. La première Avila, dont nous avons parlé, leur donne son nom, parce qu’elle est dans ces montagnes. Fuentes d’Avila est un bourg de la Castille Vieille, auprès de la Nouvelle, entre les villes de Ségovie & de Miranda de Douro. Fontes Abulenses, Abula Fontana. Il y a aussi dans la province de los Quixos, au Pérou, une Avila située sur le Nap, rivière.

Avila. s. f. Pomme des Indes, plus grosse qu’une orange. Elle croît sur une espèce de liane ou plante rampante qui s’attache aux arbres voisins, dans l’Amérique espagnole. Cette pomme contient dans sa chair huit ou dix noix plates, rondes, de plus d’un pouce de largeur, & épaisses d’un demi doigt, collées les unes aux autres : ce qui les rend concaves d’un côté, & convexes de l’autre. L’amande qu’elles renferment, est blanche & amère. On prétend que c’est un excellent remède contre le poison & la malignité des humeurs. Lémeri dit qu’on en prend une ou deux à la dose.

AVILIR. v. a. Rendre vil, abject, méprisable. In contemptum adducere. Il a laissé avilir sa charge, sa dignité. Ses fonctions l’ont avili. Comment les peuples respecteroient-ils un homme qui avilit son catactère. Bourdal. Ex. I, p. 375.

Avilir, avec le pronom personnel. Devenir vil, abject, méprisable. Il s’est avili lui-même par ses bassesses. Je ne m’avilirai pas jusque-là. La noblesse s’avilit par des alliances indignes.

AVILI, IE. part. In contemptionem adductus.

Mais enfin, par le temps le mérite avili
Vit l’honneur en roture, & le vice anobli. Boil.

AVILISSEMENT. s. m. État d’une chose qui est avilie. Il se dit des personnes, des charges, des dignités, &c. Demissio, submissio, contemptus. La bassesse de la fortune fait tant de peine à l’orgueil, que les hommes entreprennent tout pour se retirer de l'avilissement où elle les met. M. Esprit. L’avilissement d’une charge, d’une dignité.

AVILLONNER. v. a. Se dit en Fauconnerie, quand l’oiseau donne des serres de derrière. Voyez l’article suivant.

AVILLONS. s. m. Terme de Fauconnerie, qui se dit des serres du pouce de l’oiseau de proie, ou du derrière des mains. Accipitris ungues. Et on dit avillonner, quand l’oiseau donne des serres de derrière, ou des avillons. Ce faucon avillonne bien le héron.

AVIM. Ville de la tribu de Benjamin, dans la Palestine.

AVINER. v. a. Abreuver de vin. Vino imbuere. Aviner des cuves, des futailles, les imbiber de vin. Ainsi l’on appelle tonneaux avinés, des tonneaux où il y a déjà eu du vin. Les futailles avinées sont les meilleures. On dit aussi dans le style familier, d’un homme qui est accoutumé de boire beaucoup, qui s’enivre difficilement, que c’est un corps aviné, un tonneau aviné.

AVINÉ, ÉE. part. Vino imbutus.

☞ AVINO. Avinum. Ville de l’Amérique, au Mexique, dans l’audience de Guadalajara.

AUJOURD’HUI. adv. de temps, qui marque le jour où l’on est. Hodiè. C’étoit votre tour hier, c’est aujourd’hui le mien. Si vous écoutez aujourd’hui sa voix, n’endurcissez point vos cœurs. Port-R. On a remis l’affaire à aujourd’hui. Vaug.

On dit cejourd’hui en la même signification ; mais il n’est en usage que dans les exemples suivans, & quelques autres semblables. Cejourd’hui, les Chambres assemblées, il a été ordonné, &c. Cejourd’hui, date des présentes, sont comparus, &c.

Aujourd’hui, se dit aussi d’un temps incertain, mais proche. Aujourd’hui l’un meurt, & demain l’autre. Aujourd’hui sur le trône, & demain dans les fers.

L’homme tourne à tous vents, il tombe au moindre choc ;
Aujourd’hui dans un casque, & demain dans un froc. Boil.

Aujourd’hui, signifie aussi le siècle présent, le temps où l’on vit. Le monde n’est plus aujourd’hui comme autrefois. C’est l’usage d’aujourd’hui. La nature a été toujours de même qu’elle est aujourd’hui. Pour bien juger des pièces anciennes, il faut perdre notre siècle de vue, & ne point juger par le goût d’aujourd’hui. Le Fevre.

Un Poëte à la Cour fut jadis à la mode,
Mais des fous aujourd’hui c’est le plus incommode. Boil.

☞ Il est aussi employé substantivement. Aujourd’hui passé, il n’y a plus rien à espérer.

AVIRCE. s. m. Nom propre. Voyez Aberce.

AVIRON. s. m. Longue pièce de bois plate par un bout, & ronde par l’autre, qui sert à faire avancer les bateaux sur les rivières. Remus. Quand c’est sur la mer, ces pièces de bois s’appellent rames, & sont plus longues. On dit que les nageoires servent de rames aux poissons, & que leur queue leur sert d’aviron. Ce mot vient de ce qu’il sert à virer & tourner les bateaux. On s’en sert dans le style figuré, & en comparant l’incertitude des choses humaines à l’inconstance de la mer.

Pour moi, sur cette mer qu’ici-bas nous courons,
Je songe à me pourvoir d’esquifs & d’avirons. Boil.

Un jour qu’Edgar, Roi d’Angleterre, étoit à Chester avec huit autres Rois, il prit envie à ce Monarque de se promener dans sa gondole, ou dans la barque sur la Dée. Il s’assit à la pouppe sur de magnifiques carreaux ; & prit le gouvernail, pendant que les huit Rois, prenant les avirons, se mirent à la place des rameurs. Larrey.

AVIRONNER. v. a. & n. Terme de navigation. Pousser avec l’aviron, faire avancer un canot ou une barque à coups d’aviron. Remo impellere. Les Bateliers le disent sur les rivières ; mais il est plus d’usage parmi les Matelots, pour signifier un certain mouvement continuel de droit à gauche pour faire avancer leurs canots.

☞ AVIS. s. m. La décision qui a suivi en nous un jugement de l’esprit. Sententia. Voilà mon avis ; ouvrir un avis ; autant de têtes, autant d’avis. Les avis sont partagés. Voyez Opinion, Sentiment.

☞ On appelle avis de parens, un acte judiciaire, par lequel le Magistrat ordonne ce qui doit être exécuté sur les affaires d’un mineur, suivant la délibération de ses parens. Il a été résolu par avis de parens. Ac. Fr. C’est dans ce sens que Boileau a dit en parlant d’Aléxandre.

Et qu’un sage Tuteur l’eût, dans cette demeure,
Par avis de parens, enfermé de bonne heure.

☞ On appelle avis doctrinal, le sentiment des Docteurs en Théologie consultés sur quelque point de doctrine.

☞ Les anciens Avocats, au bas des écritures qui contenoient leur avis, mettoient, si quid mihi est judicii. De Roch.

Avis, signifie aussi instruction qu’on donne à quelqu’un, & qui est plus relative aux mœurs & à la conduite qu’avertissement ; mais qui ne renferme pas une idée de supériorité, soit d’état, soit de génie, aussi distincte que le mot conseil ; quelquefois même cette idée de supériorité est tout-à-fait étrangère à avis.

☞ Les avis sont vrais ou faux. Admonido, monitum, cansilium. M. l’Abbé Girard. Syn. Un homme d’étude qui ne prend avis que de ses livres, en entrant dans le monde, fait bien des faux pas.S. Evr. Je vous remercie de tous vos bons avis.

Avis, en termes de commerce, de guerre & de marine, signifie avertissement, instruction qu’on donne à quelqu’un de quelque chose qu’il ignore, nouvelle. Nuntium. Donner avis d’un envoi de marchandise, d’une banqueroute, &c. Ce Gouverneur a reçu avis qu’on venoit assiéger sa place. Une barque d’avis, est une barque destinée pour porter les nouvelles & les ordres à une flotte.

☞ Une Lettre d’avis, est une lettre missive, par laquelle un Marchand ou un Banquier mande à son Correspondant qu’il a tiré sur lui une lettre de change, ou quelqu’autre affaire relative à leur commerce. Encycl.

Avis, sentiment, opinion, considérés dans une signification synonyme. Il y a un sens général, dit M. l’Abbé Girard, qui rend ces mots synonymes, lorsqu’il est question de conseiller ou de juger : mais le sentiment a plus de rapport à la délibération ; on dit son sentiment. L’avis en a davantage à la décision : on donne son avis ; & l’opinion en a un particulier à la formalité de judicature, on va aux opinions.

☞ Le sentiment emporte toujours dans son idée celle de sincérité, c’est-à-dire, une conformité avec ce qu’on croit intérieurement. L’avis ne suppose pas rigoureusement cette sincérité, il n’est précisément qu’un témoignage en faveur d’un parti. L’opinion renferme l’idée d’un suffrage donné en concours de pluralité de voix.

☞ Il peut y avoir des occasions où un Juge soit obligé de donner son avis contre son sentiment, & de se conformer aux opinions de sa compagnie.

Avis, avertissement, conseil, considérés dans une signification synonyme. Le but de l’avertissement est précisément d’instruire & de réveiller l’attention, Voyez ce mot. L’avis & le conseil ont aussi pour but l’instruction, mais avec un rapport plus marqué à une conséquence de conduite, se donnant dans la vue de faire agir ou parler, avec cette différence entr’eux que l’avis ne renferme dans sa signification aucune idée accessoire de supériorité, soit d’état, soit de génie ; au lieu que le conseil emporte une de ces idées de supériorité, & quelquefois toutes les deux ensemble. Les auteurs mettent des avertissemens à la tête de leurs livres. Les Espions donnent avis de ce qui se passe dans les lieux où ils sont. Les pères & mères ont soin de donner des conseils à leurs enfans, avant que de les produire dans le monde.

☞ Le Chanoine écoute l’avertissement de la cloche, pour savoir quand il doit se rendre au Chœur. Le Banquier attend l’avis de son Correspondant pour payer les lettres de change tirées sur lui. Le plaideur prend conseil d’un Avocat pour se défendre ou pour agir contre sa Partie.

☞ Le cours des fonctions de la nature est un avertissement de l’état de notre santé, plus sûr que le raisonnement des Médecins. Tel manque d’avis qui est en état d’en profiter, & tel en reçoit qui n’est pas en état de s’en prévaloir. Autant que la vieillesse aime à donner des conseils, autant la jeunesse a de l’aversion pour en prendre.

☞ Il faut que l’avertissement soit donné avec attention, l’avis avec diligence, & le conseil avec art & modestie, sans air de supériorité. Car on ne fait point usage des avertissemens donnés mal-à-propos ; l’on ne tire aucun avantage des avis qui ne viennent pas à temps ; & la vanité toujours choquée du ton de maître, empêche de faire aucune distinction entre la sagesse du conseil, & l’impertinence de la manière dont il est donné ; en sorte que tout n’aboutit qu’à faire mépriser le conseil, & rendre le conseiller odieux.

Avis au Lecteur. C’est une espèce de petite Préface qu’on met à la tête d’un Livre, pour avertir le Lecteur de quelque chose. En ce sens, on dit proverbialement d’un accident qui peut servir d’instruction à quelqu’un : c’est un Avis au Lecteur.

Avis, en termes de Finances, signifie l’invention, & les moyens d’établir quelque imposition nouvelle, ou de faire la recherche des deniers divertis qui appartiennent au Roi. Les donneurs d’avis sont des gens fort odieux. Il a eu tant pour son droit d’avis. On le dit aussi de ces gens d’intrigue qui donnent avis des Offices ou Bénéfices vacans, qui négocient des affaires, ou des mariages.

☞ On dit proverbialement & figurément, il y a jour d’Avis ; pour dire, temps de délibérer : & prendre lettres d’Avis ; pour dire, prendre du temps pour faire ses réflexions.

Avis. Nom de ville & de rivière. La ville d’Avis, Avisium, est dans l’Alentéjo, province de Portugal, sur la rivière d’Avis. Avisius.

Avis (ordre d’). Ordre militaire de Portugal. Il fut institué par Alphonse I Roi de Portugal, en mémoire de la prise d’Evora sur les Maures, en 1147. Il se peut faire que l’Ordre d’Avis ait commencé l’an 1147 ; mais il ne fut établi en forme de Religion militaire que l’an 1162, & le premier Grand-Maître n’a point été Ferdinand Rodrigue de Montorio, comme quelques-uns l’ont avancé ; ce fut un Prince François, parent du Roi, proles Regis, qui se nommoit Pierre, & qui prenoit la qualité de Pair de France, comme il paroit par l’Acte primordial de l’Institution de cet Ordre, dont l’original, au rapport de Bernard Britto dans ses Chroniques de l’Ordre de Cîteaux, est conservé dans les Archives du Couvent d’Alcobara du même Ordre, lequel acte est daté des Ides de l’ère 1200. P. Hélyot. T. VI, p. 66. Ces Chevaliers s’appeloient d’abord les Chevaliers de la nouvelle milice ; mais le Roi de Portugal leur ayant donné la ville d’Evora, ils quittèrent leur premier nom, pour prendre celui de Chevaliers de sainte Marie d’Evora, qu’ils quittèrent encore quelques années après, pour prendre celui d’Avis, après que le Roi leur eut donné l’an 1181 des terres sur les frontières du Royaume, à condition qu’ils y bâtiroient une forteresse pour résister aux courses des Maures. Quelques-uns prétendent qu’ils la bâtirent dans un lieu qui s’appeloit Avis, & d’autres disent que ce nom lui fut donné par les Chevaliers, parce que voulant tracer le plan de la forteresse, ils virent deux aigles qui s’éleverent en l’air au même endroit. Cette forteresse ayant été achevée en 1187, ils y établirent leur demeure, & en prirent le nom cette même année. Ils sont de l’Ordre de Cîteaux. Innocent III confirma leur Insttitut en 1204. Id.

Quelques-uns disent que cet Ordre militaire de Portugal porta d’abord le nom de saint Benoit, &c que celui d’Avis lui fut donné, à cause de certains oiseaux qui se trouvent dans une montagne voisine d’Evora, où cet Ordre fut quelque temps fixé. Ce qui favorise cette étymologie, c’est que cet Ordre porte d’or à la croix fleurdelisée de sinople, accompagnée en pointe de deux oiseaux affrontés de sable : à moins qu’on ne dise que le nom de cet Ordre lui vient de ces mêmes oiseaux qu’il prit pour armoiries.

AVISEMENT. s. m. Vieux mot qui signifie Avis, pensée, réflexion. Avises-toi là-dessus… Vous n’y songez pas avec votre avisement. Marivaux, dans le Paysan parvenu.

☞ AVISER. v. a. Avertir, donner avis. Admonere. Il n’est guère d’usage que dans quelques provinces. Un fou avise bien un sage. Il vous trompera, je vous en avise. Un verre de vin avise bien un homme.

Aviser, signifie encore à l’actif, appercevoir d’assez loin. Prospicere. Je vous ai avisé de cent pas. Il le cherchoit des yeux, & l’avisa dans la foule. Il est populaire.

Aviser. v. n. Consulter, délibérer, penser, pourvoir à une chose. Consultare, deliberare, considerare, perpendere, providere. Nous aviserons à ce que nous aurons à faire. Vous avez du loisir pour aviser à ce que vous avez à dire pour votre défense. On y avisera. Il est du style familier.

Aviser. C’est aussi prendre une résolution après quelques délibération. Statuere, decernere. Les Etats assemblés pour la réformation du royaume, aviserent qu’il falloit que, &c. Après avoir bien consulté, bien raisonné, on avisa que, &c. Il fut avisé que, &c.

Aviser, signifie aussi croire, juger. La Cour a renvoyé les parties pour se pourvoir comme elles aviseront bon être ; pour dire, comme elle le jugeront à propos. Style de Palais.

Aviser. Terme que les Chasseurs ont adopté, pour signifier appercevoir : ils disent, javise le gibier. J’avise un lièvre au gite.

Aviser, quand on y ajoute le pronom personnel, signifie faire attention, s’appercevoir. Occurrere, venire in mentem. Je ne m’en suis pas avisé. Personne presque ne s’avise de lui-même du mérite d’un autre. La Bruy.

☞ Il signifie aussi s’imaginer quelque chose, trouver ou s’appliquer à trouver quelque chose. Il s’avisa d’un bon expédient pour réussir. Il n’a sottise dont il ne s’avise. Adinvenire, excogitare. S’aviser d’une ruse, d’un stratagème. Les hommes ne pouvant éviter la mort, se sont avisés de n’y point penser, afin de se rendre moins malheureux. Pasc. Fabius ayant trouvé l’armée rebutée de combattre sans succès, s’avisa de consumer Annibal par la lenteur. S. Evr. On dit aussi, c’est bien avisé à vous ; pour dire, vous avez raison. Expression familière.

Ce mot vient de la préposition ad, & du mot des langues septentrionnales Wisan, en vieux saxon, visan, visa, dans la langue des Cimbres. Ce mot dans toutes ces langues qui ont une même origine, signifie {{lang|la|monstrare, docere, instruere ; Montrer, enseigner, instruire. Icquez.

AVISÉ, ÉE. part & adj. Il a la signification de son verbe, en latin comme en françois. Il se dit d’un homme sage, prudent, circonspect, éclairé dans la conduite de ses affaires, & qui ne fait rien sans bien considérer toutes choses. Prudens, cautus, consideratus. On n’est jamais si avisé en son propre fait qu’en celui d’autrui. Vaug. Plusieurs personnes très-judicieuses & très-avisées, on préféré l’exil aux douceurs de la patrie. Balz. On peut lui confier cette négociation, il est fort avisé. Il a fait cette faute comme un imprudent, & un mal-avisé.

Ménage dérive ces mots de advisavre, qui se trouve pour deliberare dans les Auteurs de la basse latinité.

AVIT. Voyez Avy

AVITAILLEMENT. s. m. Voyez Avictuaillement.

AVITAILLER. v. a. Voyez Avictuailler.

AVITAILLÉ, ÉE, part. & adj. Voyez Avictuaillé.

☞ AVITAILLEUR. s. m. Voyez Avictuailleur. L’Acad. dit avitaillement, avitailler, & avitailleur qui sont plus en usage.

AVITH. Ville de l’Idumée. Avith. Elle fut le chef-lieu d’un Royaume, & le siége du Roi Arad, qui regna en Edem, c’est-à-dire, dans l’Idumée, au midi de la Terre-Sainte.

AVITIN. adj. m. Qui vient des ancêtres, qu’on a hérité de ses aïeux. Avitus, a, um. Des biens avitins, un héritage avitin.

Ce mot qui se trouve dans quelques anciens livres de Palais, est maintenant suranné. Il vient du latin avitus, qui signifie la même chose, & est dérivé d’avus, aïeul. Il est encore en usage dans le Béarn.

AVIVAGE. s. m. Terme de Miroitier. C’est la première façon que l’on donne à la feuille d’étain pour recevoir le vif-argent.

AVIVER. v. a. Rendre plus vif. Excitare suscitare. Un Maréchal avive sa forge, en jetant des gouttes d’eau sur le feu. Ce mot n’est point en usage en ce sens.

Aviver. Terme de Sculpteur. Il signifie, nettoyer, gratter & polir des figures de métal pour les rendre plus propre à être dorées, soudées, &c. Polire, expolire.

Aviver l’étain. C’est le frotter légérement de vif-argent, avant que de l’en charger tout-à-fait.

Aviver l’or. Terme de Doreur sur métal. C’est l’étendre avec l’avivoir, après qu’il a été amalgamé avec le vif-argent.

Aviver une couleur. Terme de Teinturier. C’est la rendre plus vive, plus éclatante, plus brillante, en la passant lorsqu’elle est teinte & bien lavée, sur de l’eau tiède, mêlée de quelques ingrédiens.

Aviver. Termes de Charpentier qui se dit du bois de charpente, quand on le coupe à vive arète.

AVIVES. s. f. pl. Enflure qui se fait quelquefois en de certaines glandes qui sont à côté de la gorge du cheval, qui l’empêchent de respirer, & le font mourir, si on n’y met ordre promptement. Vivulæ. Il faut promener un cheval qui a les avives. Quand on fait boire un cheval échauffé, cela lui donne les avives.

Scaliger dérive ce mot ab aquis vivis, comme qui diroit eaux vives, parce que les eaux vives, comme étant plus fraîches, donnent plutôt les avives.

On dit proverbialement & figurément d’un homme qu’on fait bien courir & promener pour faire quelque affaire, qu’il n’aura pas les avives.

AVIVOIR. s. m. Les Doreurs sur métal nomment ainsi un instrument de cuivre, en forme de lame de couteau, arrondi par un bout, & emmanché de bois par l’autre, avec lequel, au lieu de gratte-boîte, ils étendent l’or amalgamé sur leur ouvrage.

AUK

☞ AUKLAND. Ville d’Angleterre, dans la province de Durham, sur la Ware.

AUL

AULAF, ou AULOF, à la risée. C’est un commandement de mer que l’on fait au timonier de gouverner vers le vent, quand il vient des risées.

AULAIRE. s. f. Nom de femme. Eulaliæ. Sainte Eulalie, appelée communément sainte Ouille, sainte Olave, sainte Aulaire, & sainte Aulaye, étoit de Barcelone, & fut martirisée sous Dioclétien.

AULAYE, Voyez Aulaire.

AULERCE, ou AULERQUE. s. m. & f. Anciens peuples des Gaules. Aulercus, a. Ils habitoient le Mans, le Perche, & la partie de la Normandie qui fait aujourd’hui le diocèse d’Evreux. De-là vient qu’on les distinguoit en trois parties. Aulerci Cenomani, Aulerci Diablentes, Aulerci Iburovicenses.

AULIDE. s. f. Aulis, au gén. Aulidis & Aulis, Voyez Virgile, Enéide, Liv. IV, v. 426, & Lucain, Liv. V, v. 235. On ne convient point de ce que c’étoit autrefois que l’Aulide, ce lieu si fameux par l’embarquement des Grecs pour la guerre de Troie, & le sacrifice vrai ou prétendu d’Iphigénie. Quelques-uns disent que c’étoit une ville de Béotie en Grèce. Servius assure que c’étoit une Île qui avoit une ville de même nom, avec un port capable de tenir cinquante vaisseaux. Eschyle dans Agamemnon, Sophocle dans Electre, & après eux Lucrèce, Horace, & beaucoup d’autres, veulent qu’on ait en effet répandu le sang d’Iphigénie, & qu’elle soit morte en Aulide. Racin. Homère, le pere des poëtes, a si peu prétendu qu’Iphigénie eût été sacrifiée en Aulide, ou transportée en Scythie, que dans le neuvième Liv. de l’Iliade, Agamemnon fait offrir en mariage à Achille sa fille Iphigénie, qu’il a, dit-il, laissée à Micène dans sa maison.

Quoiqu’il en soit, il est probable qu’Aulide est le nom propre d’une ville de Béotie, en Grèce, & d’un pays dont elle étoit capitale. Aulis. Le rendez-vous des Grecs pour s’embarquer pour le siége de Troye, fut l’Aulide. L’Iphigénie en Aulide est une Tragédie d’Euripide, dont le sujet est le sacrifice qu’Agamemnon eut ordre de faire d’Iphigénie sa fille, pour obtenir des vents propres à passer en Asie, & dont Racine a bien profité.

Tu te souviens du jour qu’en Aulide assemblés
Nos vaisseaux par les vents sembloient être appelés.

Racine.

L’usage de dire en notre langue en Aulide, & non par à Aulide, montre que nos Auteurs ont pris l’Aulide pour une contrée, & non pas pour une ville ou pour un bourg.

Du Loir, dans son voyage du Levant, p. 302, dit Aulis, & non pas Aulide, & ne dit point en Aulis, mais à Aulis. Nous passâmes un jour de bon matin à Aulis, où nous montâmes à cheval. Bien qu’il n’y ait aucune ruine qui puisse faire connoître à présent qu’il y eût jamais une ville à l’endroit de la Béotie qui est vis-à-vis de Chalcis, je ne laisse pas de la nommer encore Aulis, puisqu’il y en avoit une autrefois de ce nom. Il est vrai qu’elle n’étoit pas bien grande, puisque les habitans n’étoient que des Potiers de terre. Ub. Em. L. III. De Vet. Gr. & qu’il se trouve des Auteurs qui doutent s’ils lui donneront la qualité de ville ou de bourg : je crois pour moi qu’on n’en eût jamais parlé, sans l’Euripe & sans Agamemnon, qui fit voile dans son port pour aller contre Troye avec toute la flotte des Grecs, après y avoir sacrifié sa fille Iphigénie dans le Temple de Diane. Je ne rechercherai point à présent si cette flotte pouvoit être de tant de voiles, je m’en rapporte à ce que chante Homère. Mais enfin le port est petit. Du Loir. Aulide est mieux qu’Aulis : car 1°. C’est l’usage. 2°. L’analogie le demande. Communément nous donnons la terminaison ide aux noms qui viennent des noms grecs terminés en is au nominatif, & en idis au génitif.

AULIQUE. s. f. C’est un acte qu’un jeune Théologien soutient dans l’Université, lorsqu’il s’agit de recevoir un Docteur en Théologie. Aulica. Cet acte est ainsi nommé du mot latin aula, qui signifie salle ; parce qu’il se fait dans la grande salle de l’Archevêché de Paris. Celui qui y préside est le même qui doit prendre le bonnet de Docteur. La matière n’est point déterminée, puisque c’est toujours celle que le Soutenant posséde le mieux. L’aulique commence par une harangue du Chancelier de Notre-Dame, à celui qui doit être reçu Docteur ; à la fin de laquelle il lui donne le bonnet. Le jeune Docteur lui fait aussi-tôt son compliment, & préside à l’aulique. Il y dispute seul. L’aulique étant finie, le Chancelier & les Docteurs, accompagnés des Bédeaux, menent le nouveau Docteur à Notre-Dame, où il fait le serment de la Faculté devant l’Autel de saint Sébastien, à présent saint Denys. Ensuite, si le nouveau Docteur est de Sorbonne, ou de Navarre, on le reconduit dans l’une ou dans l’autre de ces maisons, où il donne à dîner à tous ceux qui sont de sa société. Ce dîné s’appelle à Navarre & en Sorbonne Doctorerie. On donne aux Docteurs assistans ou non assistans à la dite Thèse la somme de trente-deux sous six deniers, & aux Religieux mendians Docteurs celle de vingt sous. Cette Thèse ne se soutient pas seulement dans l’Université de Paris, mais aussi dans d’autres Universités, & l’on y observe les mêmes formalités qu’à Paris.

Aulique. adj. m. & f. Qui regarde & concerne la Cour. Aulicus, a. Je ne pourrois jamais m’assujétir à la vie aulique des Courtisans. M. le Duc de Montausier avoit pris plaisir à la lecture des Anciens, autant que sa vie militaire & aulique le lui avoient pu permettre. Huet. Dans ce sens il n’est plus en usage.

Aulique, est aussi un nom qui s’applique à quelques Officiers de l’Empire, qui composent une Cour supérieure, laquelle a une Juridiction universelle & en dernier ressort, sur tous les sujets de l’Empire, pour tous les procès qui y sont intentés. Aulicus. On dit Conseil aulique, Cour ou Chambre aulique, Conseiller aulique. Le Conseil aulique est établi par l’Empereur, qui nomme les Officiers, mais l’Electeur de Maycnce a droit de visite. Ce Conseil est composé d’un Président Catholique, d’un Vice-Chancelier que l’Electeur de Mayence présente, & de dix huit Assesseurs ou Conseillers, neuf Catholiques, & neuf Protestans. Ils sont divisés en deux Bancs, dont l’un est occupé par des Nobles, & l’autre par des Jurisconsultes. Ils tiennent leur Assemblée auprès de la personne de l’Empereur ; c’est pourquoi on l’appelle Justice de l’Empereur ; & Conseil aulique, parce qu’il suit la Cour, & fait sa résidence dans l’endroit où elle est. Ce Conseil a concurrence avec la Chambre Impériale de Spire, en ce que la prévention y a lieu, & que lorsqu’une cause y est retenue, elle ne peut être portée à la Chambre Impériale, & vice versa. L’Empereur même ne peut pas empêcher, ni suspendre la décision, & encore moins évoquer à foi les causes dont l’une ou l’autre Cour est une fois saisie, si ce n’est du consentement commun des Etats de l’Empire. Dans beaucoup d’affaires pourtant ce même Conseil n’arrête rien sans la participation de l’Empereur, & décrète ainsi, fiat votum ad Cæsarem. C’est qu’on en fait le rapport à l’Empereur dans son Conseil d’Etat. Cette Cour aulique cesse aussi-tôt que l’Empereur meurt. La Chambre Impériale de Spire au contraire est perpétuelle, représentant non-seulement le Chef mort, mais encore tout le corps de l’Empire ensemble, qui est toujours réputé vivant. Heiss. Lymnæus, Liv.IX, ch. 4.

AU LIT, Au lit, chiens. C’est un des termes dont on use pour faire quêter les chiens lorsqu’on veut faire lancer le gibier qui est au gîte.

AULMULCIER. s. m. Les marchands bonnetiers de la ville & fauxbourgs de Paris, prennent cette qualité dans leurs Statuts.

AULNAY. Bourg de Poitou, en France. Alnia. Il est aux confins de la Saintonge, & il a saint Jean d’Angeli à l’orient, & Niort au midi. Aulnay est l’Aunedonacum des Anciens.

AULNAYE. Voyez Aunaie.

AULNE. Voyez Aune.

AULNE NOIR. Voyez Aune noir.

AULNÉE. Voyez Aunée.

☞ AULOF. Voyez Aulaf.

AULOT. Ville autrefois épiscopale de Catalogne, en Espagne. Aulotum, Auleota. Ce n’est plus qu’un bourg situé dans la Viguerie de Campredon, sur la rivière de Fluvia, au nord de Vic.

☞ AULPS. Voyez Aups.

AULU-GELLE. s. m. Nom propre d’homme. C’est ainsi qu’on appelle en françois Aullus Gellius, l’Auteur des Noctes Atticæ, & non pas Aule-Gelle, ou Aulus-Gelle. Les savans ont douté s’il falloit l’appeler Aulus-Gellius. Quelques-uns le nomment Agellius, d’autres Augellius. Lipse est le premier qui a remué cette dispute ; mais c’est la coutume de n’exprimer le prenom que par une seule lettre. De plus, les manuscrits du Vatican, ceux qu’avoit consulté Alde Manuce, & Lupus Ferrariensis, qui écrivoit il y a plus de 800 ans, mettent tout au long Aulus, ou séparent l’A de GelLius. Quelques-uns en François écrivent tout en un mot Aulugelle. Les Noctes Atticæ d’Aulugelle sont un ramas de choses curieuses & agréables, & une critique de plusieurs Auteurs qui l’avoient précédé. Il écrivit à Athènes au IIe siècle de l’Eglise. Aulus-Gellius, ou Agellius que nous avons accoutumé de nommer Aulu-Gelle, doit avoir vécu du temps de Marc-Aurèle, puisqu’il a été disciple de Favorin & de Titus Castritius, tous deux connus par Adrien. Il semble avoir écrit ses nuits attiques avant 165. Tillem.

AULULAIRE. s. f. Aulularia. Titre de la troisième Comédie de Plaute. Ce nom est dérivé d’aulula, petit pot où étoit renfermé le trésor que trouva l’avare Euclion, le Héros de la pièce. L’Aululaire ne va que jusqu’au commencement du cinquième acte : le reste a été perdu. Antonius Codrus Urceus, Professeur en Humanités à Boulogne la Grasse, y a fait un supplément, imprimé dans plusieurs éditions de Plaute.

AUM.

AUMAILLES. adj. f. pl. C’est un nom qu’on donne à des bêtes à cornes, ou autres bêtes domestiques. Ce métayer a un troupeau de cent bêtes aumailles. Du Cange dérive ce mot de manualia pecora, seu animalia mansueta, quæ, ad manus accedere consueverunt, comme dit Varron. Il en est parlé dans les Coutumes de Bretagne, de Sens, de Loudun, &c.

AUMAIRE. s. f. Vieux mot. Armoire.

AUMALE. Albamata. Petite ville de Normandie, dans le pays de Caux, sur la rivière de Brêle. Elle a titre de duché. Quelques-uns croient qu’Aumale est un mot f corrompu d’Albe-Marle, c’est-à-dire, Marne-blanche, parce que cette espèce de terre abonde dans son territoire. Dom du Plessis, croit au contraire que ce mot est composé d’Au, qui est le nom Franc ou Teutonique de la rivière de Brêle, & de male, ou malle, qui signifioit sous la première race de nos Rois, une espèce d’assise, ou de Cour ambulante pour l’administration de la Justice. Voyez Descript. Géogr. & Hist. de la Haute-Norm. Tom. I, pag. 57.

AUMÉ. s. m. C’est ; un terme dont se servent ceux qui font des filets propres à la pêche ou à la chasse ; & cet aumé n’est autre chose que les grandes mailles des filets qui sont triples, telles que sont celles qui sont des deux côtés d’un tramail ou d’un ballier.

AUMELETTE. Voyez Omelette.

AUMIGNON. Rivière du Vermandois, en Picardie. Dalmania. Elle passe à Vermand, & se mêle à la Somme, à une lieue environ au-dessus de Pérone.

AUMÔNE. s. f. Libéralité, don qu’on fait aux pauvres par charité, ou par compassion. Inopiæ, egestatis, paupertatis subsidium, levamentum. Il faut racheter ses péchés par des aumônes. C’est le plus grand des malheurs d’être réduit à l’aumône. C’est une belle aumône que de nourrir les vieilles gens. C’est un faisiéant qui travailleroit bien, il dérobe l’aumône aux pauvres. Acad. Fr. La Reine faisoit couler ses aumônes jusque dans ces retraites sombres où la honte renferme la pauvreté. Fléch. Combien de gens font des aumônes que la vanité leur inspire, ou que l’importunité des pauvres arrache de leur main, & non pas de leur cœur ? Id.

On appelle quelquefois aumône, une œuvre spirituelle de miséricorde exercée envers le prochain ; mais en ce sens on ne le dit jamais seul, on ajoute l’épithète spirituelle, une aumône spirituelle ; aumône tout seul signifie toujours l’aumône manuelle.

Les Rois ont donné en aumône plusieurs terres à l’Eglise. Les biens que l’Eglise posséde de cette manière s’appelent tenures par aumônes ; car, selon Rastal, aumônes, ou tenure en almoigne, est tenure par divin service. En parlant des terres ou des rentes qui ont été données à l’Eglise par le Roi, ou par quelque Seigneur, sans aucune autre obligation que de reconnoitre qu’on les tient de celui qui les a données, on dit qu’elles sont tenues en franche aumône, qu’elles relèvent en franche aumône.

Aumônes fieffées, sont des fondations que les Rois ont faites aux Eglises.

Il y a chez le Roi des Trésoriers des aumônes. Autretois les aumônes faites par les fidèles à l’église, se divisoient en trois parties, dont l’une appartenoit aux Evêques, la seconde aux Prêtres, la troisième aux Diacres & Soudiacres. Quelquefois on les divisoit en quatre, dont la dernière partie étoit pour les pauvres, & les réparations de l’Eglise, comme on voit dans les Conciles de Tolède, de Tarragone, d’Orléans, & de celui de Rome tenu sous Sylvestre I. Chrodegang, Evêque de Metz, du huitième siècle, au ch. 42 de sa règle, ordonne qu’un Prêtre à qui l’on offre quelque chose pour la messe, ou pour la confession, ou un Clerc à qui l’on offre quelque chose pour chanter des pseaumes ou des hymnes, le reçoive en aumône. M. de Tillemont remarque, dans Théodose pag. 257, que dès le quatrième siècle il y avoit des Dames occupées à recueillir les aumônes pour les prisonniers. C’étoit sans doute, ajoute-t-il, des veuves & des Diaconnesses de l’Eglise.

Aumône. En termes d’Eglise on appelle aumône, l’argent que l’on donne aux Prêtres pour les messes qu’on leur fait dire. L’aumône pour les messes est plus considérable à Paris que dans les Provinces.

S. Paul, dans son Epitre II aux Corinthiens, ch. 9, explique la manière dont on recueilloit les aumônes dans les assemblées des Chrétiens. Cet usage qui est si saint, avoit passé des Synagogues dans nos Eglises ; les Juifs exercent encore cette charité envers leurs pauvres. Voici ce que dit là-dessus Léon de Modène, au liv. I, ch. 14 des Cérémonies & Coutumes de ceux de sa nation : dans les grandes villes les pauvres vont la veille du sabat & des autres fêtes considérables chez les riches, & chez ceux qui sont un peu à leur aise ; là chacun leur donne à proportion de ses forces. De plus, les Parnassins ou Mémunins, qui sont préposés pour cela, ont soin de leur envoyer toutes les semaines quelque argent, & sur-tout aux pauvres honteux, aux veuves & aux infirmes. Les Juifs appellent l’aumône, tsedaka, Justice. Les Evangelistes & les Apôtres lui ont aussi donné ce nom dans le Nouveau Testament. Voyez le mot de Justice.

Aumône, est quelquefois un payement forcé qu’en fait par autorité de justice, quand elle condamne quelqu’un à payer une somme qu’on applique d’ordinaire au pain des prisonniers. ☞ Cette peine pécuniaire n’est point infamante en matière criminelle, parce qu’elle n’est qu’une charité forcée ; mais elle est infamante en matière civile, parce qu’alors on la regarde comme une véritable peine, pour tenir lieu de réparation pour quelque dol ou malversation. Quand on fait au Conseil quelques adjudications des droits du Roi, il y a toujours une aumône, ou une somme qu’on destine à des œuvres pies.

On dit proverbialement que c’est une belle aumône, quand on donne à ceux qui en ont grand besoin.

On dit aussi hyperboliquement, qu’un Seigneur est réduit à l’aumône, quand il est ruiné, ou fort incommodé en ses biens, quoiqu’il ne mandie pas effecivement. On dit d’un mauvais payeur, que quand on va lui demander ce qu’il doit, il semble qu’on lui demande l’aumône.

AUMONÉE. s. f. Les distributions de pain aux pauvres après les obsèques, s’appellent aumônées, & il y en a qui sont fondées. J’en ai vu une fort ancienne à Courtenay, petite ville de l’Hurepoix. Elle s’exécute fidellement, & tous les pauvres qui s’y trouvent, y ont part. Le P. Poupart.

AUMÔNER. v. a. Qui ne se dit guère qu’en style de Palais. Il a été condamné à aumôner vingt écus au pain des prisonniers. Il faut aumôner de son bien, & non pas de celui d’autrui. Egenorum, inopum miseriam levare ; pauperes adjuvare. Le peuple le dit quelquefois en raillant, en mauvaise part, des coups que l’on donne à un autre. Il lui a aumôné un grand soufflet ; pour dire, il lui a donné. Expression triviale.

AUMONÉ, ÉE. part. è miseri levatus.

AUMÔNERIE. s. f. Office claustral qui est dans la plûpart des anciennes Abbayes & des Prieurés Conventuels, dont le titulaire doit avoir soin de faire les aumônes aux pauvres du revenu affecté à cet effet. Largitionum præfectura. Les Aumôneries sont des titres de bénéfice. Dans les Congrégations réformées, on a supprimé ces titres d’Aumôneries, & on a réuni leur revenu à la Manse Conventuelle.

☞ La grande Aumônerie de France est la charge de Grand Aumônier. Voyez ce mot.

AUMÔNIER, ÈRE. adj. Qui donne souvent l’aumône. In pauperes benignus, largus, liberalis, effusus. Cette femme est fort dévote, & grande aumonière. Le Cardinal de Lorraine étoit si grand aumônier, qu’il portoit une gibecière pleine d’argent, & distribuoit cet argent à poignée aux pauvres qu’il rencontroit par les rues. Brantôme.

Aumônier. s. m. Est un Officier ecclésiastique, qui sert le Roi, les Princes, & les Prélats, dans les fonctions qui regardent le service de Dieu. Eleemosynarius, Largitionum præfectus. L’Aumônier de quartier aide au Roi à faire ses prières, & fait la bénédiction de la table. Les Aumôniers des Prélats les servent à l’Autel dans les jours qu’ils officient. Il en est parlé dans le Concile d’Oxfort en 1222, Can. 2. Et des Aumôniers des Papes dans le Gesta Innocentii III, p. 150, &c.

Il y a chez le Roi un Grand-Aumônier, un premier Aumônier, & des Aumôniers ordinaires. Sébastien Rouillard fit imprimer en 1607 un Ouvrage qui a pour titre, le Grand-Aumônier. Il prétend que cette Charge a été à la Cour de nos Rois dès le commencement de la Monarchie ; que sous la première race il s’appeloir Apocrisiaire, sous la seconde Arhichapelain, & sous la troisième Grand-Aumônier. Ils furent nommés, dit-il, Apocrisiaires, parce que leur charge étoit de répondre à tous ceux qui les consultoient sur les affaires du royaume, principalement sur celles de l’Eglise, ou plutôt, parce que c’étoit un Prélat résident à la Cour, de même que l’Apocrisiaire du Pape résidoit à celle de Constantinople. Ils furent nommés Archichapelains ; parce qu’ils se chargerent du soin de la chapelle de nos Rois : & parce que sous la troisième race, & principalement depuis S. Louis, les maladreries, léproseries, & autres hôpitaux royaux s’étoient beaucoup accrus, on leur en donna l’administration ; ils furent appelés Grands-Aumôniers. Il prouve ensuite par Hincmar, & Adelard, Abbé de Corbie, que l’Apocrisiaire & l’Archichapelain étoient ce qu’est aujourd’hui le Grand-Aumônier ; que sous la première race c’étoient des Evêques qui venoient tour à tour faire cet office au Palais ; que sous la seconde race ce ne furent que de simples Prêtres, pour ne point empêcher les Evêques de résider ; que quelquefois cependant il y eut des Evêques & des Archevêques, témoin Drogon, Evêque de Metz, qui le fut sous Louis le Débonnaire, & Gonthier, Archevêque de Cologne, sous Lothaire, &c. qu’il avoit juridiction sur tout le Clergé du Palais : qu’il avoit pour collègue & associé le Chancelier, qui s’appeloit alors Secrétaire ; qu’il décidoit toutes les affaires ecclésiastiques, ou monastiques, comme le Comte du Palais jugeoit les affaires séculières ; qu’il étoit toujours appelé aux Parlemens, ou États qu’il étoit Évêque du Roi, ou Prélat de sa Cour ; que sous la seconde race il avoit toute l’Intendance de la Chapelle du Roi ; qu’il avoit soin de la conscience du Roi, & de l’avertir des devoirs du Christianisme ; qu’il bénissoit sa table, & disoit les grâces ; que l’Apocrisiaire, Archichapelain, ou Grand-Aumônier sont la même chose que le Protopapas de la Cour de Constantinople que l’Archichapelain est nommé Garde du Sacré Palais, Custos Sacri Palatii, Évêque du Sacré Palais, Antistes Sacri Palatii, Prêtre du Palais, Presbyter de Palatio, terme qui selon lui, signifie Évêque, Pontife, domestique de l’Empereur, familiarissimus Pontifex Domini Imperatoris ; que sous la troisième race le Grand-Aumônier avoit appartement chez le Roi, ce qui n’étoit point nouveau, puisque l’Apocrisiaire & l’Archichambellan étoient Gardes du Palais ; que le Grand-Aumônier & le Confesseur seuls peuvent parler au Roi pendant la Messe ; que souvent les Princes & Princesses l’ont fait Exécuteur Testamentaire ; qu’aux obsèques des Rois le Grand-Aumônier, comme Evêque ou Curé du Roi, marche immédiatement devant l’Effigie ; qu’aux obsèques de Henri II, l’Évêque de Paris accompagna le Grand-Aumônier, disant qu’il étoit aussi Evêque du Roi ; mais qu’aux funérailles de François I, cette place lui avoit été refusée, parce qu’il lui remontra que la Cour du Roi ne reconnoît point d’Evêque de Sa Majesté que le Grand-Aumônier ; que l’Archichapelain avoit été de même reconnu pour Evêque du Roi ; qu’en cette qualité l’Archichapelain de Louis le Débonnaire lui donna le S. Viatique à la mort. ; qu’autrefois le Grand-Aumônier devoit être Prêtre ; qu’il semble que dans la suite il ne le fut pas toujours, puisque Jean XXIII, dans la Bulle par laquelle il soustrait l’Hôtel des Quinze-Vingts à la juridiction de l’Archidiacre, & le soumet à celle du Grand-Aumônier, ajoute cette clause ; pourvu qu’il soit Prêtre ; ou sinon à celle du premier Chapelain du Roi ; que c’est au Grand-Aumônier à donner les buletins des lépreux pour les mettre aux Léproseries ; que ses Ordonnances s’exécutent par provision, pourvu qu’elles soient signées de quatre Conseillers de Cour souveraine ; qu’il dispose à sa discrétion des offrandes du Roi, &c. Quoique cet ouvrage de Rouillard pût être écrit avec plus de goût, & qu’on y trouve bien de l’antiquaille & des digressions hors de propos, il ne laisse pas d’y avoir des recherches assez curieuses.

M. Du Cange croit que la Charge d’Aumônier est différente de celle de Chapelain. Avant Charles VIII, il n’avoir que le titre d’Aumônier : ce Prince augmenta cette charge, & donna à celui qui en est pourvu, la qualité de Grand-Aumônier. Son office, dit Galland, est de se trouver des premiers au lever du Roi, de savoir de lui où & à quelle heure il veut entendre la Messe. Il est le seul Evêque de toute la Cour. En quelque lieu que soit le Roi c’est de lui qu’il reçoit les Sacremens. Il a l’intendance sur la Chapelle du Roi, sur les Pauvres, les Hôpitaux, & Maladreries de France. Autrefois il conféroit les bénéfices qui étoient à la nomination du Roi. Il officie devant le Roi aux grandes cérémonies. C’est lui qui à l’arrivée du Roi dans une ville délivre les prisonniers, quand le Roi a accordé leur grâce, &c. Voyez Galland, dans la vie de Pierre Chastelain.

☞ Outre le Grand-Aumônier, il y a chez le Roi le premier Aumônier & les Aumôniers de quartier, au nombre de huit, qui font par quartier les fonctions du Grand-Aumônier.

On appelle aussi Aumônier dans un Couvent, un Officier claustral qui est pourvu d’une Aumônerie.

Aumônier de vaisseau, Aumônier d’un régiment. C’est un Prêtre entretenu dans un vaisseau ou dans un régiment pour y dire la messe, administrer les Sacremens à l’équipage ou aux soldats, & y faire les autres fonctions ecclésiastiques.

Aumônier, en vieux style de Coutumes, a signifié Légataire. On ne peut être aumônier, & parsonnier tout ensemble, c’est-à-dire, légataire & héritier.

Tous ces mots, Aumôner, Aumônerie, Aumônier, viennent d’Aumône, qui est dérivé du grec ἐλεημοσύνη, qui signifie proprement miséricorde, & le sentiment intérieur de la miséricorde ; & parce que le nom de la cause passe souvent à l’effet qu’elle produit, de-là vient que le nom d’Aumône ἐλεημοσύνη est donné aux gratifications que l’on fait à ceux que l’on connoît en avoir besoin, comme l’a remarqué Naudé dans son Mascurat, p. 263 quand la vertu & le sentiment de la Miséricorde ou de la piété est la cause de ces gratifications ; car hors de-là ce n’est plus aumône ; c’est gratification, c’est présent, c’est libéralité, &c.

AUMONIÈRE. s. f. Eleemosynaria. Dans le Chapitre de Remiremont, l’Aumônière tient le cinquième rang. Elle jouit de plusieurs revenus qui sont affectés à sa dignité ; mais qui lui imposent aussi de grandes charges. P. Hélyot, T. VI, p. 413. Il y a outre cela deux petites Aumônières, qui sont à la disposition & nomination de l’Abbesse ou de la Doyenne en son absence. Id.

Aumonière. On a ainsi appelé en vieux langage une petite bourse ou gibecière, almonaria, & eleemosynaria dans la basse latinité, à cause de l’argent qu’on y mettoit pour faire des aumônes. Comme son premier Trésorier lui bailla en garde son aumônière. Sarasin, Pompe funèbre de Voiture. C’étoit aussi pour les Dames un ornement pareil à celui qu’elles empruntent aujourd’hui d’une montre attachée à leur ceinture. Les hommes en portoient aussi, & l’on en voit dans plusieurs anciens mausolées. Ce terme est pris allégoriquement dans le Roman de la Rose, v. 20572, &c signifie le scrotum des Latins, seu pellis quæ testiculos continet. Supplem. au gloss. du Rom. de la Rose.

AUMUCE, plus communément AUMUSSE. s. f. Fourrure que les Chanoines & Chanoinesses portent sur le bras en été, & dont ils se servoient autrefois en hiver pour couvrir leur tête. Pelliceum ac villosum amiculum. Une aumusse de petit gris. L’aumusse a été autrefois non-seulement un habit de Moines, mais encore celui des laïques, tant pour les hommes que pour les femmes.

Pendant plus de mille ans on ne s’est couvert la tête en France que d’aumusses & de chaperons. Le chaperon étoit à la mode dès le temps des Mérovingiens ; on le fourra d’Hermines sous Charlemagne. Le siècle d’après on en fit tout-à-fait de peaux : ces derniers s’appeloient Aumusses : ceux qui étoient d’étoffe retinrent le nom de chaperons. Les Aumusses étoient moins communes ; on commença sous Charles V à abattre sur les épaules l’aumusse & le chaperon, & à se couvrir d’un bonnet. Le Gendre. Dans un Registre de la Chambre des Comptes, on trouve un article de trente six tous employés pour fourrer l’aumusse du Roi. La Couronne se mettois sur l’aumusse, comme dit Du Cange, qui dérive ce mot de amicula. C’étoit, selon Festus & Isidore, une coiffure, ou chaperon de femme faite de peau, ou de fourrure. Il ajoute qu’on dit aussi Almucia, & almucium.

L’aumusse que portent les Chanoines n’étoit d’abord qu’un bonnet de peau d’agneau avec le poil, & la chape se portoit par-dessus. On fit descendre ensuite ce bonnet sur les épaules, & enfin jusque sur les reins ; mais comme la chape & cette peau, qui envelopposent encore tout le corps, étoient très-incommodes pendant les chaleurs de l’été, on quitta premièrement la chape, & on ne laissa que cette peau, à laquelle on donna le nom d’aumusse. Comme cette aumusse qui couvroit la tête & les épaules, &d escendoit jusqu’aux reins, étoit encore un habillement peu propre pour l’été, il y eut des Chanoines qui la mirent en travers sur les deux épaules, comme la portent en été les Chanoines Réguliers de S. Victor, ceux de Sainte Croix de Conimbre, & quelques autres. Ceux de Marbac la portent aussi sur les épaules, mais elle descend en pointe par derrière, un peu plus bas que la ceinture, & est attachée par-devant avec un ruban bleu. D’autres l’ont portée sur l’épaule gauche, en forme de chaperon de Docteur, comme les Chanoines Réguliers de sa Cathédrale d’Uzès ; & plusieurs Cathédrales ont retenu l’ancienne coutume de la porter sur les épaules en forme de manteau, principalement les Chanoines de l’Eglise de Lyon. Enfin il y en a grand nombre qui ont trouvé trop incommode encore de la porter sur les épaules, ils l’ont fait descendre sur le bras gauche, où elle est restée plus communément. P. Hélyot, T. II, p. 23.

Sévert, dans son Histoire des Archevêques de Lyon, p. 252, prétend que ce mot est fait par corruption de ceux-ci, hautement mise, parce que l’aumusse se portoit sur la tête & les épaules. D’autres tirent ce mot du nom latin, amicium, dérivé du verbe amicire, vêtir, parce que l’aumusse couvroit la tête & les épaules. Quelques-uns enfin disent qu’il vient du vieux allemand, Hoost mutsen, qui veut dire un bonnet. La seconde étymologie paroît la plus vraie ; car c’est ainsi que du verbe amicire vient amictus, l’amict que les Prêtres mettent sur la tête & sur les épaules, comme autrefois l’aumusse.

☞ AUMUSSETTE. s. f. Vieux mot. Petite aumusse.

AUN.

AUNAGE. s. m. Mesurage des étoffes, qui se fait avec une mesure certaine, réglée, qu’on appelle à Paris une Aune. Telæ, panni ad ulnam mensio. On a mesuré cette pièce d’étoffe, l’aunage en est bon. Plusieurs Manufacturiers donnent des excédans d’aunage pour s’attirer de la chalandise, comme à Laval vingt-quatre aunes pour vingt, & quelquefois vingt-huit ; mais cet excédant d’aunage est réglé à une aune un quart par les derniers statuts, que les Façonniers donnent aux Marchands pour bonne mesure.

AUNAIE. s. f. Lieu planté d’aunes. Locus alnis consitus. Alnetum. Les aunaies se font en terres humides & marécageuses. Quelques-uns disent Aunette. Mais ce diminutif paroît désigner une petite aunaie. Pour planter les aunaies, on fait des alignemens à deux pieds l’un de l’autre, le long desquels on creuse des rigoles de la profondeur d’un pied seulement, où l’on pose le plant à un pied & demi de distance ; on le recouvre aussi-tôt en dos d’âne, observant de lui couper l’extrémité à deux doigts de terre, pour l’obliger à jeter plusieurs tiges. Chom. Les aunaies s’appellent aussi Vernaies, parce qu’on appelle les aunes, Vernes.

AUNAIRE. s. m. Nom d’homme. Aunarius, Aunacharius. Aunhar, communément S. Aunaire, Evêque d’Auxerre, étoit d’une famille riche & noble, & fort considérée dans la ville d’Orléans.

AUNAIS. s. m. Nom d’homme. Honestus. S. Honest, que l’on prononce comme s’il y avoir Aunais, est patron de la Paroisse d’Hières, au diocèse de Paris. Chast.

AUNE. s. m. Alnus. Arbre d’une grosseur & grandeur considérable, & qui croît le long des ruisseaux & aux bords des rivières. Son tronc qui est plus ou moins gros suivant son âge, est recouvert d’une écorce raboteuse & brune ; & le bois en est tendre & un peu roussâtre. Il donne plusieurs branches, qui sont fort cassantes, couvertes d’écorce d’un brun cendré, tâchée, & jaunâtre en dedans. Elle est très-désagréable au goût, amère & astringente. Le bois des jeunes branches est blanc. Ses feuilles sont alternes, assez semblables à celles du Coudrier, mais un peu plus arondies, crénelées sur leurs bords, relevées par des nervures qui parcourent toute leur surface, vertes, luisantes, & gluantes au toucher. Ses fleurs, qui naissent aux extrémités des branches, sont des chatons grêles, long d’un pouce, verts d’abord, qui s’alongent ensuite, & deviennent de couleur de la rouille de fer, sur-tout lorsque les fleurs sont épanouies. Chaque chaton est un composé de plusieurs petits pelotons de fleurs attachées à un filet commun. Chaque fleur est taillée en quatre quartiers, & garnie de beaucoup d’étamines. Les fruits qui naissent sur le même pied, mais dans des endroits séparés, paroissent en même temps que les chatons. Chaque fruit n’est d’abord guère plus gros qu’un pois, conique, écailleux, & rempli entre ses écailles d’embryons terminés par deux cornes. Le fruit grossit peu à peu, s’arrondit, devient noir & gros comme une olive, & s’ouvre de la même manière que les pommes de pin. Entre chaque écaille on trouve une petite semence aplatie, rougeâtre, presqu’insipide ; au lieu que les chatons & les feuilles des fruits sont fort astringens, & un peu amers.

On se sert du tan d’aune pour préparer les cuirs. Son écorce est aussi employée par les Teinturiers pour faire le noir. On prétend que son bois ne pourrit point dans l’eau : on croit au contraire qu’il y durcit de telle manière qu’il s’y pétrifie. Les feuilles d’aune appliquées sur les vieux ulcères les desséchent : ces mêmes feuilles ramassées dans un sac s’échauffent, & font beaucoup transpirer les parties du corps qui en sont ensuite enveloppées. C’est un remède dont on se sert quelquefois pour des rhumatismes opiniâtres.

L’aune devient extrêmement haut, pourvu que la plupart de ses racines baignent dans l’eau. Il a la feuille comme le coudrier, & comme lui il jette de souche. Chom. On nomme Verne cet arbre dans quelques Provinces.

Ce mot aune pourroit bien venir de l’hébreu אלון : c’est la conjecture du P. Thomassin, qui rapporte à la langue hébraïque l’origine de tous les mots dont il parle.

Aune noir. Alnus nigra, ou Frangula, est un arbre qui donne dès sa racine plusieurs jets gros comme le doigt, branchus, & garnis de feuilles assez semblables à celles du cerisier, mais plus petites, opposées. D’entre leurs aisselles naissent des fleurs à cinq pétales blanchâtres, qui sortent des échancrures de leur calice, au fond duquel s’élève un pistil qui devient une baie verte d’abord, ensuite rougeâtre, molle, qui renferme deux semences arrondies ; qui devient enfin noire, & qui est d’un goût désagréable. L’écorce moyenne de ses branches purge les sérofités, & fait vomir lorsqu’elle est fraîche. On trouve l’aune noir dans plusieurs bois à la campagne.

Aune. s. f. Bâton d’une certaine longueur qui sert à mesurer les étoffes, toiles, rubans, &c. Ulna. Il se dit aussi de la chose mesurée. Une aune de drap, de toile. Aune courante, c’est une mesure d’étoffe ou de tapisserie qui s’étend sur les longueurs, sans considérer la largeur, ou la hauteur. Tous les Marchands doivent avoir une aune marquée & étalonnée, & ferrée par les deux bouts. Les aunes sont différentes selon les lieux.

L’aune d’Amsterdam a deux pieds un pouce, & deux lignes du pied de France, appelé Pied de Roi.

L’aune d’Anvers est longue de deux pieds, un pouce, & six signes du pied de France.

L’aune de Bergue & de Dronthem, en Norwége, est un peu plus courte que celle d’Amsterdam, de sorte que dix aunes d’Amsterdam en font onze de Bergue & de Dronthem.

L’aune de Berne & de Bâle en Suisse est comptée égale à celle de Hambourg.

L’aune de Breslau est tenue égale à celle de Hambourg, & l’aune d’Osnabruk à celle de Paris.

L’aune de Cologne est égale à celle de Hambourg, Léipsic, &c.

L’aune de Dantzick a de longueur un pied, dix pouces, quatre lignes & demie du pied de France.

L’aune de France, ou de Paris, contient trois pieds sept pouces, c’est du pied de Roi dont il s’agit.

L’aune de Francfort sur le Mein est égale à celle de Hambourg.

Il y a deux aunes en usage à Saint-Gel, l’une pour les toiles, l’autre pour les étoffes ; elles sont toutes deux plus courtes que l’aune d’Amsterdam. L’aune de Saint-Gal qui sert à mesurer les toiles, faut une aune moins un sixième d’Amsterdam : celle qui sert à mesurer les draps est encore plus courte que l’autre, & elle est plus courte que celle d’Amsterdam d’un peu plus d’un dixième.

L’aune de Hambourg a de longueur un pied, neuf pouces du pied de France.

L’aune de Londres passe pour égale à celle de Paris.

L’aune de Lubeck est plus courte d’un seizième que celle de Hambourg.

L’aune de Lyon est un peu plus courte que celle de Paris, il y a sur cent aune une aune de différence.

L’aune de Nuremberg est tenue égale à celle d’Amsterdam, & l’aune de Léipsic, de Naumbourg & de Hall, est égale à celle de Francfort & de Hambourg.

Les aunes de Riga, de Konigsberg, & de Revel, sont un peu plus longues que celle de Dantzick.

L’aune de Rouen, de Bourdeaux, de la Rochelle, de Nantes, se rapporte à celle de Paris.

L’aune de Suède, ou de Stockolm est plus courte que celle d’Amsterdam, & sept aunes de Suède en font six d’Amsterdam.

Il y a une dix-septième de différence entre l’aune de Paris & celle de Genève, desorte que dix-sept aunes de Paris n’en font que seize de Genève.

Samuël Ricard a ainsi réduit les aunes dans son Traité du Commerce. Cent aunes d’Amsterdam en font quatre-vingt-dix-huit & trois quarts de Brabant, Anvers, Bruxelles ; cent vingt de Hambourg, Francfort, Léipsic, Cologne ; cent vingt cinq de Breslau, en Silésie ; cent douze & demie de Dantzick ; cent dix de Bergue & de Dronthem ; cent dix-sept de Sockolm ; de Saint-Gal pour les toiles quatre-vingt-six, & cent douze pour les draps.

Matthis Dogen, & Casimir, Polonois, ont fait des réductions de toutes les aunes des plus fameuses villes de l’Europe au pied Rhenan ; & le Pere Mersene au pied du Capitole. Servius dit que l’aune est l’espace qui est contenu entre les deux mains étendues ; mais Suétone veut que ce ne soit qu’une coudée. Chez les étrangers, au lieu de ce nom l’on se sert de celui de Cannes, Varres, Verges, Brasses, Palmes, &c.

Aune, s’emploie populairement & dans la conversation, pour marquer une grandeur démésurée par rapport à la chose dont on parle. Ôtez-moi ce fuseau, il est long d’une aune : j’en veux un plus petit.

Suis-moi donc. Mais je vois sur ce début de prône,
Que ta bouche déjà s’ouvre large d’une aune.

Boil
.

Aune, se dit proverbialement en ces phrases : cet homme mesure tout le monde à son aune ; pour dire, qu’il croit que tous les autres sont faits comme lui. On dit, qu’il ne faut par mesurer les hommes à l’aune ; pour dire, qu’il y a de petits hommes qui ont autant de cœur & d’esprit que les grands : qu’un homme sait ce qu’en vaut l’aune ; pour dire, qu’il a déjà eu de pareilles affaires : qu’il en aura tout le long de l’aune ; pour dire, qu’on lui fera tout le mal qu’on pourra. Tout le long de l’aune, signifie aussi beaucoup, tout-à-fait, avec excès.

Et c’est justement la tour de Babylone ;
Car chacun y babille, & tout le long de l’aune.

Mol

On dit aussi, au bout de l’aune faut le drap ; pour dire, qu’on verra avec le temps la fin d’une affaire. On dit d’un grand mangeur, qu’il a toujours dix aunes de boyaux vides pour festoyer ses bon amis. Ce mot vient, selon Icquez, du vieux mot saxon eln ou elne.

☞ AUNEAU. Bourg de France, au pays Chartrain, à quatre lieues de Chartres, connu par la défaite des Reitres, en 1587.

AUNE. s. f. Enula campana, ou Helenium. Plante qui est du genre des aster. Ses racines sont branchues, longues, & assez grosses, aromatiques, d’un goût douceâtre, mêlé d’un peut d’amertume. Elles donnent de leurs collets plusieurs œilletons, d’où naissent de grandes feuilles longues, larges, pointues par leurs deux extrémités, molles, vert pâle en dessus, blanches en dessous, crénelées sur leurs bords. D’entre ses feuilles s’élevent une ou deux tiges droites, velues, creuses, hautes de cinq à six pieds, garnies de quelques feuilles plus petites que celles du bas, & semblables à celles du bouillon blanc : les tiges sont enfin terminées par quelques petites branches qui soutiennent des fleurs radiées jaune doré, d’un pouce & demi environ de diamètre. Leur calice est écailleux, & leurs semences sont oblongues, grêles, & chargées d’une aigrette. Les racines d’aunée sont pectorales ; on en fait une conserve qui est bonne pour les asthmatiques, & qui convient encore pour les maux d’estomac. L’onguent d’aunée est estimé pour la galle, & pour dissiper les douleurs de rhumatismes. L’aunée croît communément en Normandie, dans le Bourbonnois ; & on la trouve dans beaucoup de jardins. Elle est très-aisée à élever, d’ailleurs elle est vivace. La superstitieuse antiquité lui avoit donné le nom d’Helenium, à cause qu’elle croyoit que venant dans l’île d’Hélène, elle avoit été produite des larmes de cette belle Princesse.

AUNER. v. a. Mesurer avec une aune. Pannum, telam ulnâ metiri. Les Marchands ont une adresse particulière pour auner, ils trompent en aunant.

Auner bois à bois, ou auner pince à pince. C’est-à-dire, auner juste, sans donner ou faire aucune bonne mesure.

AUNÉ, ÉE. Part.

AUNEUR. s. m. Officier commis pour marquer & visiter les aunes des Marchands. Mensor. Il y a à Paris un corps de vingt-quatre Jurés Auneurs. L’Ordonnance veut que les Auneurs mesurent les étoffes bord à bois justement, & sans évent. Cet évent étoit autrefois d’un pouce au-delà de l’aune, qu’on donnoit en mesurant. Les Auneurs ne peuvent être Courtiers, Commissionnaires, ni Facteurs, ni acheter aucune draperie pour leur compte.

AUNHAR. Nom propre. Voyez Aunaire.

AUNIS, ou le pays d’Aunis. Alnisium, Alnensis, ou Alnetensis tractus. Petit pays de la Saintonge en France. L’Aunis est borné au couchant par la mer de Gascogne, séparé du Poitou au Nord par la Sevre, & environné de la Saintonge au Midi & au Levant. La Rochelle en est la capitale. On ne dit guère Aunis tout seul, mais toujours le pays d’Aunis.

AVO.

AVOCASSER. v. n. Faire la profession d’Avocat. Causas agere. On ne le dit point des Avocats célébres, mais de ceux qui sont peu employés. Il y a long-temps qu’il avocasse, & meurt de faim. Ce mot est familier, & ne se dit qu’en mauvaise part.

AVOCASSERIE. s. f. Profession d’Avocat. Advocatio. On ne voit guère de gens s’enrichir aujourd’hui par l’Avocasserie. Il y a déjà plusieurs années que cet homme s’adonne à l’Avocasserie. Ce mot est bas.

AVOCASSIE. s. f. Vieux mot. Art de plaider.

AVOCAT. s. m. Homme savant en Jurisprudence, qui en vertu de ses licences & de sa matricule, plaide &