Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BRIÉVETÉ

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 71).
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BRIÉVETÉ. s. f. Le peu de durée d’une chose. Voy. Bref. Brevitas. La briéveté d’un discours. La briéveté de la vie. La briéveté d’un délai. nos meilleurs Ecrivains disent toujours briéveté, à la réserve de Messieurs de Port-Royal, qui écrivent la breveté & l’instabilité de la vie. Ce discours n’a point cette bréveté vive & animée si nécessaire. Je ne suis pas de leur avis : mais à cause de leur autorité, je n’ose dire que breveté & brévement, soit une faute. Ménage. M. l’Abbé Fleury imite les Ecrivains de Port-Royal. La bréveté du Canon, dit-il, en parlant de la Liturgie Gallicane, Hist. Eccl. L. XXXVI, p. 214 ; mais ce n’est pas l’usage. La langue françoise a trouvé le secret de joindre la briéveté, non-seulement avec la clarté, mais encore avec la pureté & la politesse. Il n’y a peut-être rien qui soit moins à son goût que le style asiatique : & rien ne lui est plus naturel qu’une briéveté raisonnable. Ceux qui écrivent le mieux, ont un style également serré & poli. Ils joignent la pureté de César, & la fermeté de Tacite. Leurs paroles tiennent quelque chose de celles des oracles ; sans en avoir l’obscurité, ni l’embarras, elles en ont la briéveté & la force. Bouh. Il y a une briéveté qui vient de la sécheresse de l’esprit, ou du peu d’étendue du génie : on ne loue point celle-là. Il faut une briéveté qui vienne de la réflexion & du jugement. Val. La briéveté contribue à l’obscurité, selon le mot d’Horace ; je veux être court, je deviens obscur. Bouh. La briéveté est bien voisine de l’obscurité. Dac. Il y a pourtant une briéveté louable, qui consiste à employer toutes les paroles qu’il faut, & à n’employer que celles qu’il faut, ou même à se servir quelquefois d’un mot qui vaille plusieurs autres. C’est la briéveté que Quintillien trouve si belle dans Saluste ; mais, comme remarque Quintillien au même endroit, dès qu’on imite mal ses manières de penser & de parler, on devient obscur. Bouh. Si nous l’emportons sur nos ancêtres par le choix des mots, par la clarté, & par la briéveté du discours, c’est une question encore indécise. La Bruy. La briéveté est l’ame d’un conte, puisque sans cela, il faut nécessairement qu’il languisse. La Font.

Dans le grand art on dit par manière de proverbe, l’œuvre ne veut point de briéveté ; pour dire, qu’on ne doit point donner le feu trop violent, qu’il ne faut rien précipiter, qu’il faut seulement aider la nature par un feu ménagé à propos.