Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ARBRE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 461-465).
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ARBRE. s. m. Plante vivace d’une grandeur considérable ; dont l’intérieur du tronc, des branches & des racines est ligneux. Arbor. Le tronc se divise par le haut en plusieurs branches, & par le bas en racines. Les arbres sont les plus élevés & les plus gros de tous les végétaux. Guichard dérive ce mot de l’hébreu אבד, abad, d’où vient אב, arbor, arbustum. Les parties des arbres sont les racines, le tronc ou la tige, les branches, les feuilles, les fleurs, les fruits, les semences. L’assemblage de toutes les branches, s’appelle la touffe. M. Dodard a remarqué que dans plusieurs arbres fruitiers, comme les pommiers, les poiriers, les châtaigniers, & généralement dans ceux qui imitent le port, tels que sont les noyers, les chênes, les hêtres, la base de la touffe affecte presque toujours d’être parallèle au plan d’où sortent les tiges, soit que ce plan soit horizontal, ou qu’il ne le soit pas, soit que les tiges elles-mêmes soient perpendiculaires, ou inclinées sur ce plan ; & cette affectation est si constante, que si un arbre sort d’un endroit où le plan soit d’un côté horizontal, & de l’autre incliné à l’horizon, la base de la touffe se tient d’un côté horizontal, & de l’autre s’incline à l’horizon autant que le plan. M. Dodard croit que la raison est que les racines de ces arbres sont parallèles au plan du terrain d’où l’arbre sort, & que les branches doivent être parallèles aux racines, parce que les fibres qui partant des racines vont former le tronc, & ensuite les branches, peuvent bien se plier, mais non pas s’étendre : d’où il s’ensuit qu’après avoir fait un angle obtus au collet des racines, pour former le tronc, il faut qu’elles fassent un angle aigu au collet des branches ; parce que si elles faisoient encore un angle obtus au collet des branches, elles s’étendroient trop. Mais quand elles ont fait un angle aigu au collet des racines, elles peuvent & doivent même en faire un obtus au collet des branches, pour avoir toute l’étendue qui leur convient. Cette raison ne satisfait pas ; car, en supposant même que ces fibres peuvent bien se plier, mais non pas s’étendre, on ne voit point comment une fibre, après avoir fait un angle obtus au collet des racines, n’en peut pas faire encore un au collet des branches sans s’étendre plus que si elle faisoit un angle aigu.

Toutes les plantes doivent être droites & à plomb pour se soutenir plus aisément, & pour porter leurs fruits ; aussi affectent-elles toujours la perpendiculaire. M. Dodard en recherche les causes dans les Mémoires de l’Académie des Sciences, 1700. p. 47. Voyez Racine, Sève.

☞ On distingue les arbres en arbres sauvages, qui viennent naturellement dans les bois, dans les haies, &c. Arbores brutæ, & en arbres cultivés ou domestiques. Arbores cultæ : & encore en arbres forestiers, arbores sylvaticæ, & en arbres fruitiers, arbores pomiferæ, selon qu’ils sont d’espèce à faire la masse des forêts, ou à fournir des fruits bon à manger.

Arbres de haute futaie, ou de haut vent, grands arbres qu’on laisse parvenir à toute leur hauteur sans les abattre. Altæ, proceræque arbores.

Arbres de plein vent, de haut vent, de tige. Ce sont ceux qu’on laisse s’élever de toute leur hauteur, & qui sont éloignés les uns des autres dans les champs, les vignes & les vergers. Cette dénomination convient particulièrement aux arbres fruitiers qui s’élevent naturellement fort haut, & que l’on ne rabaisse point. Arbores justæ magnitudinis. Quæ ad justam magnitudinem excrescunt.

Arbres de demi vent, ou de demi tige. Sont ceux dont on borne la hauteur de la tige à trois ou quatre pieds.

Arbre nain, proprement dit, est celui qui est de petite taille. Le pommier de paradis est naturellement un pommier nain. Mais on donne aussi ce nom aux arbres dont on restreint la tige par la taille à quinze ou vingt pouces de hauteur. Arbor coactæbrevitatis.

☞ Si cet arbre est taillé dans la forme d’un verre à boire, on le nomme en buisson, on le vide en dedans, afin que leurs branches s’étendent sur les côtés, forment une boule ou buisson arrondi.

☞ S’il est taillé à plat, on le dit en éventail, utrinque planum in morem tonsa, & de ces derniers, les uns sont appuyés contre les murailles, & sont dits en espalier ; arbusculæ horti parietibus applicatæ.

☞ D’autres sont attachés à des treillages isolés, & sont dits en contre-espalier. Aligatæ palis.

☞ Les arbres de haute tige, sont ceux auxquels on forme une tige de cinq, six ou sept pieds de hauteur, & entre ceux-là, il y en a de plein vent, & en espalier.

Arbres en mannequin. Arbores in corbe, sont ceux que l’on met à part, plantés dans des mannequins pour les lever dans le besoin, & les mettre en motte à la place de ceux qui sont morts dans un nouveau plan.

Arbres sur franc, sur Coignassier. Voyez au mot Greffer.

Arbres fatigués, sont ceux qui paroissent usés, soit de vieillesse, soit faute de culture, & qui sont chargés de mousse & de gale. Arbores vetulæ, defectæ seni, cariosæ.

Arbres bien aboutis, sont ceux qui ont beaucoup de boutons à fruit. Arbores gemmatæ.

Arbres qui s’emportent, qui poussent trop de branches, nimiâ ramorum luxurie sese efferentes.

Arbres bien conditionnés. Benè compositæ, affectæ.

Un arbre, pour mériter d’être choisi, quand il est encore en pépinière, doit avoir l’écorce nette & luisante, & les jets de l’année longs & vigoureux. Et s’il est hors de terre, il faut qu’il ait les racines belles, bien saines, & qu’à proportion de la tige elles soient passablement grosses. Je ne prends jamais de ces arbres qui n’ont que du chevelu. Les arbres les plus droits, & qui n’ont qu’une tige, me paroissent les plus beaux à choisir pour planter. La Quint. En toutes sortes d’arbres nains que l’on veut planter, excepté les pêchers & les pommiers sur paradis, la grosseur est celle de deux ou trois pouces par le bas. La grosseur des arbres de tige est celle de cinq à six pouces par le bas, & la hauteur de six à sept pieds. La greffe des petits arbres doit être à deux ou trois doigts de terre ; & quand elle est couverte, c’est une marque de vigueur au pied, aussi-bien que de soin & d’habileté au Jardinier qui l’a élevé. Id. Préparer un arbre pour le planter. Id.

La Quintinie traite de la connoissance des arbres fruitiers, part. ch. 3, art. 6. De la manière de préparer un arbre, tant par la tête que par la racine, avant que de le planter, au même endroit, art. 7 & part. III, ch. 19. De la manière de planter les arbres, part. III, ch. 20. Du temps qu’il faut choisir pour bien planter, art. 8. De la taille des arbres, art. 9 & part. IV, entière. Des terres qui conviennent à chaque espèce d’arbres fruitiers. part. II, ch. 25. Du choix des arbres, part. III, ch. 57 & 58. Des greffes & pépinières des arbres, part. V. ch. 11. & suiv.

On dit, abattre des arbres, c’est les couper par le pied, à fleur de terre. Arbores cædere, excidere. Elaguer ou émonder des arbres, quand on en coupe quelques branches pour les faire mieux croître, & les rendre plus agréables à la vue, & plus propres à l’usage auquel on les destine, comme à former des allées, &c. Arbores collucare. Deshonorer les arbres, quand on en coupe seulement la cime, ou le houppier. Arbores decacuminare. Préparer un arbre, tant par la tête que par la racine, c’est en ôter tout ce qui est nuisible, ou superflu, & couper les branches & les racines, comme elles doivent être, pour qu’on le plante. Planter un arbre, tailler un arbre, ébourgeonner les arbres, pincer & repincer un arbre, accoler les arbres, palisser les arbres espaliers, greffer un arbre, enter un arbre, fumer un arbre, arrêter un arbre, émonder les arbres, élaguer les arbres, élever un arbre, abaisser un arbre, pousser, fatiguer, épuiser un arbre, déchausser un arbre, espacer des arbres de tant l’un de l’autre, étronçonner un arbre, encaisser un arbre, ragréer un arbre ; un arbre qui s’échappe ; un arbre qui s’évase trop. Voyez tous ces verbes à leur place.

☞ Les arbres se multiplient par leurs semences, par leurs rejetons, par les provins ou marcottes, & de bouture. Voyez ces différens mots.

☞ La vie & la santé des arbres consistent dans la circulation du suc nourricier. Tout ce qui peut empêcher la circulation de ce suc dans les différentes parties de l’arbre, le rend malade. Il languit, & si le mal continue, il meurt.

☞ Un suc trop abondant peut crever les vaisseaux. Alors il se fait des épanchemens pernicieux, ou bien il n’a pas assez d’espace pour couler, il s’arrête. Le suc qui monte continuellement des racines, occupe peu-à-peu les trachées, empêche l’action de l’air : l’arbre meurt suffoqué.

☞ Le manque de sucs produit le même effet. Les fibres destituées d’humeurs se resserrent, se dessechent, & deviennent incapables de recevoir de nouveaux sucs.

☞ La malignité des sucs altère les organes. Des sucs corrosifs déchirent le chevelu des racines. Un suc trop gluant s’épaissit, se fige.

☞ Les arbres trop fertiles durent moins que les autres. Ils donnent trop de sucs à leurs fruits, & n’en conservent pas assez pour se nourrir.

☞ La gelée en dilatant les sucs, déchire les fibres, & fait quelquefois éclater les arbres.

☞ La chaleur atténue les sucs, ouvre les ports, en exprime ces sucs. Les fibres se relâchent, l’arbre languit.

☞ Les arbres augmentent en grosseur par l’addition des couches ligneuses qui se forment sous l’écorce, & s’ajoutent au bois déjà formé. Voyez Aubier.

☞ Au printemps, lorsque les arbres sont en pleine seve, j’enlevai, dit M. Duhamel, à un jeune arbre un morceau d’écorce qui découvroit le bois jusqu’à la moitié du diamètre du corps de l’arbre que j’avois mesuré avec un compas d’épaisseur. Ayant conservé l’ouverture de ce compas, je posai une pièce d’étain battue immédiatement sur le bois, & je remis ensuite le morceau d’écorce à sa place où je l’assujettis avec une bandelette chargée de térébenthine. Cette écorce se greffa, l’arbre grossit en cet endroit comme ailleurs. Plusieurs années après je sciai mon arbre à l’endroit de cette greffe. Je trouvai ma petite lame d’étain recouverte d’une couche de bois assez épaisse ; mais après avoir mesuré la portion du corps ligneux qui avoit été renfermé par la lame d’étain, je trouvai qu’elle n’avoit pas sensiblement augmenté de grosseur. Ce qui prouve très-bien que le bois qui étoit formé au commencement de l’expérience, n’avoit pas contribué à l’augmentation de grosseur de cet arbre.

☞ Les bourgeons s’alongent dans toutes les parties, tant qu’ils sont tendres & herbacées. L’alongement diminue à mesure que le bois se durcit. Il cesse, quand la partie ligneuse est entièrement endurcie.

☞ Tout le monde peut avoir remarqué qu’une branche qui sort d’un arbre à une certaine distance du terrain, reste toujours à cette même hauteur, quoique l’arbre qui la porte, croisse beaucoup. De même quand les essieux des roues ont endommagé la tige d’un jeune arbre, on remarque que la cicatrice reste toujours à la hauteur des essieux quoique l’arbre croisse. Ainsi le corps ligneux, une fois endurci, ne s’étend plus en longueur.

☞ Mais il est aisé de concevoir l’accroissement des arbres en hauteur, quand on sait que les boutons contiennent les rudimens d’une nouvelle branche, ainsi que le mamelon, qui est à l’extrémité des semences, renferme les rudimens d’une tige, & que de ces boutons sortent les jeunes branches, de la même manière que les tiges sortent des semences. Ces branches naissantes s’élèvent par la suite de la même manière que les jeunes tiges, Voyez Bouton, Couches ligneuses & Aubier.

☞ Il paroît que les couches ligneuses de certains arbres, tels que le maronnier d’Inde, &c. s’endurcissent beaucoup plus lentement que d’autres, tels que le buis, &c. Celles qui s’endurcissent lentement, doivent conserver plus long-temps la propriété de s’étendre. C’est peut être ce qui fait que certains arbres croissent plus promptement que d’autres.

☞ Par la même raison un arbre qui se trouve à l’abri du soleil, transpirant peu, conserve long-temps l’humidité qu’il contient, l’endurcissement se fait plus lentement que dans un arbre fort exposé au soleil ; & l’on remarque assez constamment que les arbres tenus à l’abri poussent plus vigoureusement que ceux qui sont brûlés du soleil.

☞ Un sarment de vigne, dit M. Hales, qui commence à se former lorsque la séve est peu abondante, & souvent quand la saison est encore froide, a vers son origine ses nœuds plus près les uns des autres, que ceux qui se forment dans le temps que la séve est très-abondante. Quand les feuilles sont parvenues à leur grandeur, & quand la séve diminue, alors les nœuds deviennent plus serrés à l’extrémité des sarmens. Cette observation de M. Hales sur les nœuds de la vigne, a son application aux feuilles & aux boutons des autres arbres. Ainsi tout ce qui peut rallentir l’endurcissement, est favorable à l’extension des bourgeons. De-là vient que les branches gourmandes, qui tirent une grande quantité de séve, sont beaucoup plus longues que les autres, que les arbres plantés dans des terrains humides font de plus grandes pousses, que ceux qui sont placés dans des terrains secs. Les années pluvieuses sont, par la même raison, favorables à l’extension des bourgeons.

Arbres de délit, abougris, broutés, avortés, recepés, encroués, arbres chablis, bailliveaux, arbres d’entrée, en étant, gisant.

Ces mots qui sont usités dans le commerce des bois, sont expliqués à leur ordre, au mot Bois.

Arbre de brin, parmi les Charpentiers, est un arbre de belle venue, & dont la tige est haute & droite, tels que sont ceux dont on fait les poutres, les sablières, les mâts, &c. Arbor recta, proceraque. Parmi les mêmes on dit un arbre d’un beau brin ; pour dire, un arbre droit, de belle venue, & assez gros dans son espèce.

Arbre conifére, c’est celui dont le fruit est de figure conique, comme le pepin, le sapin, le picéa, la mélèse. Arbor conifera, ou resinifera ; c’est-à-dire, portant de la résine. On leur donne aussi ce nom, parce que les arbres coniféres sont presque tous couverts d’une écorce remplie de résine.

Arbres de lisière, en termes des Eaux & Forêts, sont des arbres qu’on laisse dans les ventes & coupes de bois entre deux pieds corniers, pour servir de parois & de bornes à la coupe qui est permise. Arbores limitanes. ☞ On a étendu ce terme, car on dit faire des réserves en lisières, pour dire, qu’on réserve une étendue de bois qui a beaucoup de longueur & peu de largeur.

Arbres a laïe, ou Arbres de repeuplée. Ce sont des jeunes plants qu’on laisse pour repeupler les taillis, lorsqu’on en fait coupe. Arbor proletaria, subsidiaria.

Arbre retenu, en termes d’Eaux & Forêts. Arbre marqué du marteau du Roi & de celui du Grand-Maître, pour être conservé dans les ventes, lors de leur exploitation par les marchands adjudicataires.

Arbre en état, est un arbre qui est encore sur pied. Voyez Bois.

Ovide Montalban a écrit trois volumes des arbres, qu’il nomme Dendrologie, qu’il a mis à la suite de l’histoire naturelle d’Ulysse Aldrovandus, dont les six premiers volumes contiennent celle des oiseaux, des animaux terrestres, des poissons, des insectes, & des métaux. Jonston a fait aussi une Dendrologie. Ces ouvrages sont des compilations de tout ce qu’ils ont trouvé dans les Auteurs qui les avoient précédés. La rareté de ces livres fait une partie de leur mérite. Pour les arbres des Indes occidentales, Voyez le P. d’Acosta, Liv. IV de l’Hist. des Indes, ch. 16, & suiv. jusqu’au 32. Et pour ceux des Antilles, l’Histoire naturelle des Antilles de Lonvillers de Poincy, imprimée à Amsterdam in-4o. en 1658, & celle du P. du Tertre, & les plantes de l’Amérique du P. Plumier, Minime.

Il y a des arbres si gros en la province de Nicaragua, qu’à peine quinze hommes les peuvent embrasser. Le P. d’Acosta Jésuite, Liv. IV de l’Histoire des Indes, ch. 3, rapporte qu’à Tlacocharaye, à trois lieues de Gauxa, dans la nouvelle Espagne, il y en a un qui est creux, & qui en dedans a neuf brasses de tour proche de la terre, & en dehors proche de la racine seize brasses, & douze plus haut, & qu’il peut contenir mille personnes sous son ombre ; & que c’est sous cet arbre que les Barbares s’assembloient pour leurs superstitions, & qu’ils faisoient leurs mitotes ou danses autour de leurs idoles. Herrera parle d’un autre, que seize hommes ne purent embrasser en se tenant par les mains. Le P. Kirker, dans son Latium, p. 50, dit qu’il a vu proche de Gonzano un arbre si gros, qu’une famille entière de ving-cinq personnes pouvoit tenir dans sa cavité. Le peuple dit que c’est Auguste qui l’a planté. Rai, dans son Hist. des plantes, p. 43, fait mention de plusieurs arbres d’une grosseur extraordinaire.

Il y a aux Indes de fort grandes forêts qui sont composées d’un seul arbre, dont les branches tombent jusqu’à terre, y prennent racine, & repoussent de nouveaux arbres. Le figuier admirable & le palétuvier sont de cette espèce. Il y a des arbres au Pérou, dont une partie des branches produit des fruits pendant la moitié de l’année, & l’autre partie pendant l’autre moitié. Il y a aux Antilles des arbres de mer, qui naissent dans les bancs des rochers, & qui sont glacés de salpetre, qui les rend tout blancs. Quelques uns les prennent pour une espèce de corail. Lonvillers. De tous les arbres qui croissent dans la Chine, celui qui porte le suif est, à mon sens, le plus admirable. P. Le Comte. Voyez Suif.

Les arbres ont servi autrefois à l’idolâtrie. On plaçoit les Idoles sous des arbres, qui leur faisoient une espèce de temple ; & si les Anciens, dit Pline, ont adoré des arbres, ce n’est que parce qu’ils les regardoient comme les temples de quelque Divinité. Cette idée est très-ancienne, & a été très-commune. Voyez Osée IV, 13. Ezech VI, 13, & Deut. XVI, 21, où Dieu, à cause des abus de l’idolâtrie, défend de planter des arbres proche des autels, ou d’ériger des autels sous des arbres : Loi que les Hébreux violerent si souvent. Encore aujourd’hui dans l’Indes les Brames placent ordinairement leur idole sous des arbres, & dans de petits bouquets de bois toufus. Voyez de la Crequinière, Voyage des Indes, Art. V. p. 51. Chez les Anciens, les Dieux avoient chacun un ou plusieurs arbres qui leur étoient consacrés ; Jupiter, le chêne ; Venus, le myrte ; Apollon, le Laurier ; Cybèle, le pin ; Hercule, le peuplier ; Minerve, l’olivier ; Bacchus, la vigne & le lierre, &c.

Un arbre a servi de corps à bien des devises. Un arbre renversé, avec ce mot, Uno decidit ictu, il est tombé au premier coup, marque la petitesse d’esprit & de courage dans un homme que le moindre revers abat. Au contraire, avec celui-ci, Non uno decidit ictu, il marque la fermeté de courage. Augustin Barbarigo, Doge de Venise, pour marquer que les charges dont il étoit revêtu, abrégeoient sa vie, prit pour devise un arbre chargé de fruits, avec ce mot, Copia me perdit. D’autres ont mis un arbre renversé sous le poids des fruits dont il étoit chargé, avec ces mots, Sternit ubertas ; ou bien celui-ci de Martial, Pondere victa suo. Pour marquer que la chûte des grands hommes en perd beaucoup d’autres, un grand arbre, qui en tombant abat tout ce qu’il trouve autour de lui, avec ce mot de Catule, Cominùs omnia frangit. Pour une ancienne famille, un vieux arbre, Durando sæcula vincit, Virgile, Georg. 2. Un Académicien de Boulogne, appelé l’Inculto, prenoit pour devise un arbrisseau inculte, avec ce mot de Virgile, Sponte suâ, pour donner à entendre que ses ouvrages étoient tout de lui, sans le secours ni le conseil d’aucun autre. Pour un jeune homme dont les belles qualités donnent de l’espérance, des caractères ou figures écrites sur l’écorce d’un arbre, Crescent dum crescet, elles croîtront avec lui. Un arbre coupé par le pied, avec ces mots italiens, A piû bell’ opre, pour de plus beaux ouvrages, est la devise d’un Académicien des Errans de Bresse. Pour un homme de fortune, qui n’oublie point sa première bassesse, un grand arbre, & ce mot, Virga fui.

On dit l’arbre de la Croix, où Jésus-Christ a été attaché. Arbor crucis. L’arbre de vie. Arbor vitæ.

Arbre planté au milieu du Paradis, dont le fruit auroit eu la vertu de conserver la vie à Adam, s’il avoir obéi aux ordres de Dieu.

Arbre de la science, du bien & du mal. Arbor scientiæ boni & mali. Arbre que Dieu avoit planté au milieu du Paradis, auquel Dieu avoit défendu de toucher sous peine de la vie. Quelques-uns croient que l’arbre de vie, & l’arbre de la science du bien & du mal étoient un même arbre. L’opinion contraire paroît plus conforme au texte de Moyse qui en distingue deux.

Arbre de Judas. Arbor Judæ. Il fleurit au commencement du printemps. La couleur de ses feuilles tire du violet au rouge. Sa fleur est comme du safran d’Inde. Il vient de bouture, & prend aisément. Le plus sûr est de coucher les branches en terre & de les inciser. Chom. Nous nommons en françois cet arbre, Arbre de Judée. Il se couvre entièrement de feuilles de couleur de pourpre avant que de pousser ses fleurs. Les Persans l’appellent Argeran ou Argheran. Ils se servent souvent de cet arbre dans leurs comparaisons. Ils donnent au vin, qui leur est défendu, le nom d’eau d’argeran, par respect pour une loi qu’ils violent incessamment. Les visages de safran & les yeux d’argeran sont leurs expressions ordinaires, pour signifier des amans passionnés, dont la mélancolie est peinte sur le visage, & dont les yeux sont rouges à force de verser des larmes. d’Herb. Voyez Gacnier.

Arbre de Mer. Quelques Chimistes appellent ainsi le corail. Corralium, arbor maris. Harr.

Arbre des Philosophes. Terme de science hermétique. Arbor Philosophorum. Le grand arbre des Philosophes est leur mercure, qui est leur teinture, leur principe & leur racine ; quelquefois c’est l’ouvrage de la pierre. Voyez Pluie d’or. Dict. Herm.

Arbre au raisin. Voyez Pistachier sauvage. Voyez aussi Nez coupé.

Arbre qui porte des savonettes. Sapindus foliis coslæ alatæ innascentibus, Inst. R. Herb. Cet arbre croît dans toutes les îles de l’Amérique le long de la mer, dans les lieux les plus secs & les plus arides : son tronc ne s’éleve qu’à la hauteur de deux à trois pieds, & est branchu. Il donne plusieurs petites branches couvertes d’une écorce grise & rude ; elles sont garnies de feuilles vertes, longues, étroites & rangées sur une côte de la même couleur. Monard compare assez mal ses feuilles à celles de la fougère. Ses fleurs sont disposées en manière de grappe, composées de quatre pétales soutenus par un calice fendu en quatre quartiers. Le pistil qui s’éleve du milieu du calice, devient un fruit charnu, très-amer, jaune & de la grosseur d’une petite noix. La chair de ce fruit mûr, se réduit en une substance claire & gluante, comme la gomme arabique fondue. Le noyau de ce fruit est rond, d’un beau noir, gros comme une moyenne balle de pistolet : la semence qu’il renferme, est ronde pareillement, & a un goût de noisette. Le bois de cet arbre est blanc & fort dur. On se sert de ses fruits pour dégraisser & blanchir le linge ; & parce qu’ils font brouer & écumer l’eau comme le savon, on les appelle des savonettes, nuculæ saponariæ ; & son arbre, sapindus en latin, comme qui diroit, Sapo Indus, Savon des Indes, à cause de l’usage de ses fruits. Le P. du Tertre remarque que ce savon brûle & gâte le linge lorsqu’on s’en sert trop souvent.

Arbre triste. Espèce d’arbre commun dans les Indes. On l’appelle triste, parce qu’il ne fleurit que la nuit. Ses fleurs tombent une demi-heure avant le lever du soleil, & commencent à repousser une demi-heure environ après son coucher. Cet arbre est de la grandeur d’un prunier. Ses branches ont une aune de long. Quand on le coupe à la racine, il recroît en moins de six mois. On le plante ordinairement proche des maisons. Les Indiens en ramassent curieusement les fleurs quand elles sont tombées, parce qu’elles sentent fort bon. Goa & Malaca sont les endroits où l’on trouve le plus de ces sortes d’arbres. Cette description est prise d’Acosta & de Linscot. On peut la comparer avec celle de la plante nommée manjapumeran, dans le premier volume de l’Hortus Malabericus.

Arbre de vie. Arbor vitæ, ou Thuya Theophrasti. C. B. Pin. Arbre qui a été apporté de Canada en France, & qui fut présenté à François I. ☞ Il est ainsi nommé, parce qu’il est toujours vert, & qu’il rend une odeur douce & agréable. On le nomme aussi Cèdre américain, ou arbre toujours vert. Cet arbre, quoique étranger, s’est multiplié aisément en Europe ; ses branches prennent facilement racine, & on n’a pas beaucoup de peine à l’élever. Il devient d’une moyenne grandeur en France ; son tronc est droit, noueux, revêtu d’une écorce à-peu-près semblable à celle du cyprès, remplie d’une matière résineuse. Il est assez branchu ; ses branches s’étendent horizontalement, & sur leurs côtés elles sont divisées en d’autres plus petites branches en manière d’ailes. Ces petites branches sont couvertes d’écailles menues, aplaties, posées les unes sur les autres, toujours vertes, bonnes dans l’hiver ; car pour lors elles roussissent ; mais au printemps elles reprennent leur verdure. Entre ces petites feuilles sont placées des petites vessies remplies d’une liqueur onctueuse, résineuse, & d’une forte odeur de drogue. Ces feuilles, quoique desséchées, ne perdent presque jamais leur odeur. A l’extrémité de quelques-unes de ces petites branches naissent des petits boutons qui deviennent des fruits longs de demi-pouce environ, composés de quelques écailles, entre lesquelles on trouve des semences oblongues, bordées d’une aile membraneuse, ou feuillet délié.

On ajuste cet arbre dans les jardins, & on lui donne, comme à l’if, telle figure que l’on veut. On fait cas de son huile tirée par la distillation, pour soulager les goutteux.

Arbre de Diane, Voyez Diane.

Arbre de Mars, Voyez Mars.

Arbre à enivrer. C’est le nom que l’on donne dans le Pérou à l’arbre qui produit le quinquina, dont on se sert pour la guérison des fièvres ; parce qu’outre cette qualité fébrifuge, son écorce a encore celle d’enivrer les poissons plus surement, que la drogue qu’on appelle en Europe Coque de levant.

Arbre, en termes de Charpenterie & d’Architecture, est une grosse pièce de bois, qui est la principale d’une machine, & qui la soutient. L’arbre du moulin est celui que la roue fait tourner, pour mouvoir les meules, soit par l’eau, soit par le vent. Arbor molendinaria. On l’appelle arbre tournant.

L’Arbre d’un navire, est le grand mât qu’on appelle arbre mestre sur la méditerranée. Arbor nautica.

L’Arbre d’une grue, est la principale pièce de bois qui la soutient, qu’on nomme aussi la flèche.

Arbre, en termes d’Horlogerie & de Mécanique, est ce qu’on appelle dans les montres, les horloges & autres machines qui tournent, l’axe ou l’essieu des roues qui portent le pignon ou ce qui les fait mouvoir. Axis.

Arbre, en termes de Monnoyage, signifie la machine qu’on appelle vulgairement une jument, qui contient tout ensemble le dégrossi & le laminoir, une grosse pièce de bois posée perpendiculairement, sur le haut de laquelle est la grande roue à dents qui donne le mouvement aux lanternes & aux hérissons.

On nomme pareillement parmi les ouvriers des monnoies, l’arbre du coupoir, une pièce de fer posée perpendiculairement, dont le bout d’en haut, qui est vis-à-vis, se tourne avec une manivelle, pour la faire baisser ou lever, & qui à son autre bout porte le coupoir, c’est-à-dire, un emporte-pièce d’acier bien acéré, pour débiter les lames de métal en flaons convenables aux espèces qu’on veut marquer.

Arbre, en termes de Tourneur, est un mandrin composé de plusieurs pièces de cuivre, de fer & de bois, dont on se sert, soit pour tourner en l’air, soit pour faire des vis aux ouvrages de tour, soit pour tourner en ovale, ou en d’autres figures irrégulières.

Arbre, chez les Vitriers. Les Vitriers appellent les arbres d’un tire plomb, les axes ou essieux qui font tourner les rouleaux d’acier, entre lesquels on passe la lame de plomb, pour l’aplatir & canneler au sortir de la lingotière.

Arbre, chez les Tireurs d’or, est une espèce de cabestan, dont le treuil, qui est posé perpendiculairement, a huit ou dix pieds de haut. Deux barres ou leviers de vingt-quatre pieds de long, le traversent en croix, & servent à le tourner. C’est sur cet arbre que se roule le cable. Voyez Argue.

Arbre de Pressoir, en termes de Mécanique, est de deux sortes, selon deux différentes espèces de pressoir. Dans la première, c’est un tronc d’arbre équarri, qui a plus de la longueur de la mai du pressoir, & qui déborde par les deux bouts : il est engagé entre deux montans ou jambages de chaque côté, qui l’assujettissent, pour qu’il ne puisse s’écarter ni à droite ni à gauche. Dans son milieu il est percé d’un trou qui reçoit une vis, qui le hausse & le baisse par le moyen d’un écrou. Quand l’arbre est haussé, on dispose dessous & au milieu de la mai le raisin, que l’on entasse en masse carrée que l’on appelle marc. On met sur ce marc des planches épaisses, & l’on en couvre tout, ensorte qu’elles débordent même plus que le marc, sur lequel on a mis deux ou trois grands bâtons de la grosseur du bras pour soutenir ces planches débordantes ; on charge ces planches de solives équarries mises alternativement en carré les unes sur les autres, & l’on en met ainsi jusqu’à ce qu’elles touchent l’arbre du pressoir élevé, comme nous avons dit ; alors, à l’aide d’une roue, au milieu de laquelle est l’écrou, on abaisse l’arbre qui en pressant le raisin sur la mai, exprime tout le jus qu’il contient.

L’autre espèce d’arbre de pressoir est un grand & gros tronc d’arbre équarri en poutre, qui par son gros bout porte sur la mai du pressoir, & de chaque côté de la mai est enclavé entre deux montans qui l’assujettissent. A l’autre bout il porte un écrou, & par le moyen de la vis il se hausse & se baisse ; quand il est haussé, l’autre bout s’abaisse entre les deux montans, qui le tiennent, & alors on met dessus ce bout abaissé des pièces de bois, qui l’empêchent de s’élever, puis par le secours de la vis on abaisse l’autre bout ; l’arbre, en s’abaissant, presse le marc & en exprime le vin.

☞ Il y a quantité d’autres machines pour les différens métiers où cette pièce se rencontre sous le nom d’arbre ; mais comme elle a par-tout la même fonction, les sortes d’arbres dont on vient de parler, suffiront pour faire connoître cette fonction.

Arbre, se dit figurément en Logique de l’ordre & de la suite naturelle des genres, des espèces & des individus. On l’appelle l’arbre de Porphyre, du nom du Philosophe Porphyre, qui en est l’inventeur. Dans l’arbre de Porphyre on descend ainsi du premier genre jusqu’aux individus : être, substance, corps, vivant, animal, homme, pierre. Cette suite se met sur le tronc d’une figure d’arbre ; & sur les branches de l’arbre en ligne collatérale se trouvent les divisions de chacun de ces genres ou espèces. C’est ce qui fait qu’on l’appelle arbre. ☞ On l’appelle autrement, échelle des prédicamens. Scala prædicamentalis.

D’autres Philosophes forment cet arbre différemment. Pourchot, par exemple, met d’abord l’être, puis la substance ; ensuite il descend ainsi : la substance est esprit ou corps ; l’esprit est incréé ou créé, l’esprit créé, est destiné au corps, ou ne l’est pas ; le corps est animé ou inanimé, le corps animé a la force de marcher, ou ne l’a pas ; s’il a la force de marcher, il est ou raisonnable ou irraisonnable. Cela est un peu défectueux. Qui nous a dit qu’il n’y a pas des animaux irraisonnables, qui avec une ame sensitive, n’ont pas la force de marcher ? Les huîtres & autres coquillages attachés à des rochers marchent-ils ?

Arbre, se dit aussi figurément d’une figure tracée en forme d’arbre, d’où l’on voit sortir, comme d’un tronc, diverses branches de consanguinité, de parenté. Arbre généalogique. On a dressé l’arbre généalogique de la maison de France. Graduum cognationis schema ; Arbor consanguinitatis ; Cognationum stemmata.

On a appellé en poësie arbre fourchu, un lai, un virelai, à cause des petits vers intercalaires qui étoient au milieu des grands, qui faisoient une espèce de fourche.

Arbre, en termes de Blason, s’appelle fusté, quand son tronc est d’un autre émail que ses branches. On doit aussi spécifier en blasonnant quand il est sec, ou avec ses feuilles.

On dit figurément & proverbialement, qu’il se faut tenir au gros de l’arbre ; pour dire, au parti juste & solide, & qui est le plus fort. Quand il s’agit de la foi, cela veut dire, qu’il faut s’en tenir aux décisions de l’Eglise, qui sont les règles de notre foi.